EnFrance, depuis une ou deux générations (entre 20 et 40 ans), le tu progresse et le vous recule. Une nouvelle frontière s’installe entre les deux formes de politesse. On l’observe au sein
abricotedapiExpert spécialisé républicain a écrit abricotedapi a écrit Clarianz a écritEn ce qui me concerne je n'oppose pas les deux, je dis juste que la relation professeur-élève est un préalable, elle se fait dans le cadre particulier de l'école où le savoir et la transmissions de celui-ci doivent passer en premier. Sinon comment apprendre à nos enfants que même s'ils n'apprécient pas un professeur ils devront travailler tout de même? Pourquoi ne pourrait-on pas apprendre à un élève qui tutoie qu'il doit travailler, qu'il en ait envie ou non ? Qui a écrit cela sur ce fil? J'essaie de comprendre le lien entre la remarque de Clarianz et le sujet du spécialisé abricotedapi a écritEt bien moi je ne parle pas de tout cela, je ne parle que du n'ai pas d' tant qu'enseignante avec des élèves de 6e, je dis que je ne suis pas gênée par cette habitude de primaire qu'ils finissent par perdre immédiatement pour la plupart. Justement, ils sont de plus en plus nombreux à nous tutoyer en début de 6e cela n'arrivait jamais lorsque j'ai commencé, il y a 20 ans et ils ont de plus en plus de mal à perdre cette habitude. C'est la première année où je dois encore les reprendre alors qu'on est déjà le 7 octobre. Auparavant, les reprendre début septembre une fois suffisait, ils comprenaient immédiatement. Et je sais que ce n'est absolument pas un problème de respect ou non, c'est un problème de "bonnes manières" et de savoir "où est sa place".Et cela me gène d'être dans l'"affectif". Je ne suis pas dans l'affectif avec mes chefs, même si j'apprécie beaucoup la pas fauxEsprit éclairé Zappons a écritJe constate donc que c'est beaucoup plus répandu que je je pensais, et que les avis sont très moi, il y a un lien entre cette "nouveauté" et l'absence générale de respect envers l'enseignant et ce qu'il représente, une fois arrivé dans le secondaire. Et donc les problèmes qui en découlent auxquels on assiste avec effroi dans les autres topics ici même en ce suis d'accord avec la personne ci-dessus qui disait que le vivre-ensemble fait aussi de ce que l'on doit apprendre à l'école quant au fait que ce sont de pauvres petits bouts de chou tout jeunes, en CP je veux bien, mais en CM2 ils ont quand même 10 ans…Et l'argument de mon amie qui est l'argument de son école "de toute façon, ce public [banlieue difficile] n'est pas capable de vouvoyer", m'interpelle aussi. Si on part du principe, dès le départ, qu'ils ne sont capables de rien, même pas d'apprendre à vouvoyer, forcément… Autant aussi ne plus essayer de leur apprendre à précise qu'elle dit avoir des problèmes de discipline avec ses CM2, qui lui parlent mal. En même temps, s'ils avaient appris le respect dans les plus petites classes, j'ai envie de dire… En CM2 c'est presque déjà trop tard. Et ce n'est pas à leur entrée en collège dans moins d'1 an que ça va changer, au contraire, avec la crise d'adolescence. Je plains les pensais qu'à l'école maternelle puis primaire, on apprenait progressivement les fondamentaux. Lire, écrire, compter, vivre l'impression d'être un vieux réac, à mon jeune âge, j'ai l'impression de ne plus comprendre le système éducatif dans lequel je vis. C'est ma problématique quotidienne. Dans mon école de zep +++, je suis entouré de gens sympas, généreux, mais qui sont dans ce mépris social-là . Je n'essaie même pas de lutter. Je me contente de tâcher de cultiver une ambition discrète pour mes élèves, et ils en feront ce qu'ils pour commencer, c'est voussoiement obligatoire et incontournable avec explications à la clé, même si ce n'est pas gagné au spécialiséIl est beaucoup plus facile de tomber dans l'affectif au primaireNous avons ces enfants pendant 24 heures par semaine devant nous, cela pendant 36 semaines. Il est donc naturel que s'établisse une relation amicale avec la plupart, ce qui fait d'ailleurs l'une des spécificités agréables de notre autant, l'évolution naturelle pour grandir semble être un passage par des "rites initiatiques", et l'on peut considérer que le vouvoiement en fait partie, comme Clarianz, semble-t-il, et comme je le conçois exprimer des généralités quant à l'attitude générale d'un élève selon sa façon de s'exprimer envers un adulte est effectivement Astrolaboussole a écrit républicain a écritDans mon école, nous leur demandons de passer au vouvoiement dès le fois l'habitude prise, cela va tout ne me paraît pas normal que des élèves du CM tutoient encore leur fait partie de l'apprentissage du fameux "vivre ensemble". Oui, ça vient tout seul au CE2. C'est assez marrant à observer d'ailleurs. Parfois même 9Je veux bien entendre qu'il existe une politesse à la française, mais je ne la crois pas vraiment liée à la langue, car il y a des contrées d'expression française où le tutoiement est courant sans que ce soit une impolitesse - que ce soit entre adultes inconnus ou d'un enfant à un Tout agent, quelle que soit sa fonction, doit obéissance passive et immédiate aux signaux le concernant. »NormandyxNeoprof expérimenté C'est pas faux a écritC'est ma problématique quotidienne. Dans mon école de zep +++, je suis entouré de gens sympas, généreux, mais qui sont dans ce mépris social-là . Je n'essaie même pas de lutter. Je me contente de tâcher de cultiver une ambition discrète pour mes élèves, et ils en feront ce qu'ils pour commencer, c'est voussoiement obligatoire et incontournable avec explications à la clé, même si ce n'est pas gagné au départ. En tant que "vieux", étant aussi passé par la ZEP, je ne peux que vous encourager à continuer, car si les enfants des quartiers plus standards finiront par recevoir cette habitude plus tardivement, les parents ne les laissant certainement pas continuer à tutoyer n'importe qui au delà d'un certain âge, il est à craindre que les enfants de ZEP ne recevront pas de leurs familles ce bagage culturel et que cela ne serait pour eux qu'un marqueur de plus... J'ai vu reprendre des élèves de CM qui tutoyaient les policiers venus faire les séances de prévention routière... Quand j'étais gamin, j'avais des copains immigrés Portugais à l'école, ils étaient arrivés en France à 5, 6 ans, comme leurs parents avaient du mal avec le français, la mère avait décidé qu'il n'y aurait pas de tu du tout, ce qui fait que quand ils se parlaient en français, ils disaient vous, y compris à leurs parents... superheterodyneNiveau 9 Normandyx a écritQuand j'étais gamin, j'avais des copains immigrés Portugais à l'école, ils étaient arrivés en France à 5, 6 ans, comme leurs parents avaient du mal avec le français, la mère avait décidé qu'il n'y aurait pas de tu du tout, ce qui fait que quand ils se parlaient en français, ils disaient vous, y compris à leurs parents... Peut-être aussi un calque de você..._________________ Tout agent, quelle que soit sa fonction, doit obéissance passive et immédiate aux signaux le concernant. »InvitéInvité abricotedapi a écritJ'ai toujours pensé que le tutoiement était très répandu en primaire et cela ne me choque pas. Le tutoiement n'implique pas l'irrespect je tutoie mes élèves, je les respecte pourtant...Les élèves de primaire sont petits et passent beaucoup de temps avec leur maître ou maîtresse, ils sont proches de cet adulte important pour eux. Dans certaines écoles les enfants ont la même maîtresse tout au long du primaire c'est le cas d'une petite école de village près de mon établissement. Je n'ai aucun problème avec ça. J'ai des 6e, ils sont nombreux à dire encore "maîtresse, tu" au début de l'année, ce n'est pas de l'irrespect, c'est une habitude. Certains intègrent tout de suite le vouvoiement, d'autres prennent plus de temps. Je les reprends gentiment, c'est tout. Tout pareil ! User21714Expert spécialisé abricotedapi a écritJ'ai toujours pensé que le tutoiement était très répandu en primaire et cela ne me choque pas. Le tutoiement n'implique pas l'irrespect je tutoie mes élèves, je les respecte pourtant...Les élèves de primaire sont petits et passent beaucoup de temps avec leur maître ou maîtresse, ils sont proches de cet adulte important pour eux. Dans certaines écoles les enfants ont la même maîtresse tout au long du primaire c'est le cas d'une petite école de village près de mon établissement. Je n'ai aucun problème avec ça. J'ai des 6e, ils sont nombreux à dire encore "maîtresse, tu" au début de l'année, ce n'est pas de l'irrespect, c'est une habitude. Certains intègrent tout de suite le vouvoiement, d'autres prennent plus de temps. Je les reprends gentiment, c'est tout. C'est là l'essentiel!neomathNeoprof expérimentéLes mœurs évoluent, cela se traduit dans le langage et parfois c'est très bien loin que remontent mes souvenirs je vouvoyais et donnais du Madame à mes institutrices. Il en était ainsi à l'époque. Mais je sois dire aussi que leur évocation ne m'évoque aucun bon souvenir. Nous étions toujours rudoyés, parfois battus par des femmes pour lesquelles nous n'avions pas de respect mais de la heureusement, à en juger par les PE que j'ai fréquenté professionnellement ou en tant que parent, ces temps sont complain never explainsurfeuseNiveau 8 volubylis Je n'ai pas voulu insinuer qu'il ne devait pas y avoir d'affection dans la relation entre l'élève et l'enseignant. J'ai seulement tenu à dire, plus haut, que cette relation ne doit pas être QUE cela. Pour que l'élève fasse les efforts que l'on attend de lui, la relation entre enseigné et enseignant ne peut pas, ne doit pas être égalitaire. Qu'on le veuille ou non, elle est hiérarchique. De même, je tutoie mes collègues mais tous, nous vouvoyons le proviseur et ses adjoints. Le "vous" sert à cela la distance. Et il est nécessaire que l'enfant le comprenne assez tôt. Or le tutoiement, qui relève du domaine de l'intimité entre proches amis, membres d'une même famille, nounou, bref, le cercle privé me semble peu compatible avec la reconnaissance indispensable de l'autorité du maître et de la maîtresse. Le "tu" permet la familiarité voire l'insolence alors que le "vous" maintient une distance - qui n'est pas obligatoirement synonyme de froideur ou d'indifférence. Cette distance me semble bonne, nécessaire. Pour parler en termes psychanalytiques, le "tu" est dans le Ça, le "vous" du côté du Surmoi. Le "tu" entretient la régression ou plutôt, la stagnation dans l'état de petit enfant, dans le "Ça", alors que le rôle de l'école, justement, est d'aider l'enfant à faire l'effort de grandir cf l'origine du mot "élève", d'intégrer les règles morales et sociales et de construire ainsi son "Moi". Cela ne se fait pas sans efforts ni renoncements inévitables pour grandir et devenir un sujet responsable et sociable. Tenez, ce débat me fait penser à une autre discussion, du même ordre, sur l'emploi de plus en plus fréquent des termes "papa" et "maman" ailleurs que dans la sphère familiale au lieu des mots adéquats que sont les mots "père" et mère" cf le topic ._________________"L'école est faite pour libérer les enfants de l'amour de leurs parents. C'est une machine de guerre contre la famille "" Je ne promettrai donc pas le plaisir, mais je donnerai comme fin la difficulté vaincue." Alain.babetteNeoprof expérimentéQuelques élèves de 6èmes laissent encore échapper un "tu" ou même un "maitresse, tu...". Souvent, les autres élèves chuchotent "han... il ne faut pas tutoyer!". J'avoue que cela ne me choque pas qu'un élève de primaire tutoie son enseignant. Ils prennent vite l'habitude au collège de vouvoyer. Et pour ma part, je pense qu'on peut très bien être insolent en vouvoyant et très respectueux en tutoyant, pour moi cela n'a rien à voir. _________________ Si ton rève se réalise, c'est qu'il n'était pas assez beau." Proverbe 7 doublecasquette a écritLe problème, c'est la difficulté de cette collègue à obtenir que ses élèves la respectent. Pas le tutoiement. Elle est loin d'être la seule à avoir ce genre de problèmes dans cette école, c'est général. Une école primaire dans une banlieue très difficile.[/quote]surfeuseNiveau 8Eh ! ne pas schématiser ma pensée, SVP. Je n'ai pas dit que le "vous" empêchait radicalement l'insolence ce qui serait une stupidité mais que le "tu" implique une proximité qui permet plus aisément la familiarité -voire l'irrespect. _________________"L'école est faite pour libérer les enfants de l'amour de leurs parents. C'est une machine de guerre contre la famille "" Je ne promettrai donc pas le plaisir, mais je donnerai comme fin la difficulté vaincue." Alain.ClarianzEmpereurJe trouve dingue de confondre le relâchement de vocabulaire et le respect. Je dis que l'abandon progressif du vouvoiement est un symbole de la perte de certaines marques de politesse, que les parents ne les transmettent plus. Alors oui, dans les années 70 c'était une pratique un peu hippie et, oui dans certaines régions c'est pittoresque, et non ce n'est pas l'usage! Sinon, je vous donne du "ma naine" comme marque de respect et de gentillesse! Comme elles disent chez moi... C'est respectueux, mais je trouve ça plouc! -finalement, nous pouvons conclure, j'ai trouvé, je suis snob! Je trouve que dire maîtresse au lieu de madame, et tutoyer tout le monde est terriblement plouc! C'est un marqueur social, comme mettre les coudes sur la table, quoi!_________________Mama's RockdandelionDoyen kero a écrit Zappons a écritPour moi, il y a un lien entre cette "nouveauté" et l'absence générale de respect envers l'enseignant et ce qu'il représente, une fois arrivé dans le secondaire. Et donc les problèmes qui en découlent auxquels on assiste avec effroi dans les autres topics ici même en ce moment. Alors là , je ne suis vraiment pas d' vais revenir sur mon exemple suisse, mais en plein milieu des années 80/début des années 90, la règle là où j'étais était précisément de tutoyer au primaire, vouvoyer au secondaire et il n'y avait aucun problème de passage, comme quelqu'un d'autre l'a déjà dit plus haut, mes petits 6e en pleine ZEP ne m'ont jamais tutoyé, ils comprennent de suite. Et s'il peut leur arriver de se planter, pour ensuite devenir blême, ça ne me semble vraiment pas être un drame. Je confirme. En Suisse on dit 'Salut' à la maîtresse, pour dire bonjour et au revoir, et si vous faites un tour sur le site d'Ikéa suisse, vous constaterez qu'il vous tutoie. Il me semble qu'il y a des habitudes régionales assez marquées. J'ai aussi eu de nombreux élèves étrangers, pour qui le vouvoiement n'était pas du tout facile, car il n'existait pas dans leur langue, certains s'en offusquaient, cela ne m'a jamais gênée outre mesure, je leur expliquais simplement quelle était la règle en France. Je trouve cependant qu'il est intéressant de vouvoyer ne serait-ce que pour que la conjugaison soit maîtrisée, notamment dans des quartiers où le Français n'est pas la langue maternelle d'une majorité d' 7 surfeuse a écrit volubylis Je n'ai pas voulu insinuer qu'il ne devait pas y avoir d'affection dans la relation entre l'élève et l'enseignant. J'ai seulement tenu à dire, plus haut, que cette relation ne doit pas être QUE cela. Pour que l'élève fasse les efforts que l'on attend de lui, la relation entre enseigné et enseignant ne peut pas, ne doit pas être égalitaire. Qu'on le veuille ou non, elle est hiérarchique. De même, je tutoie mes collègues mais tous, nous vouvoyons le proviseur et ses adjoints. Le "vous" sert à cela la distance. Et il est nécessaire que l'enfant le comprenne assez tôt. Or le tutoiement, qui relève du domaine de l'intimité entre proches amis, membres d'une même famille, nounou, bref, le cercle privé me semble peu compatible avec la reconnaissance indispensable de l'autorité du maître et de la maîtresse. Le "tu" permet la familiarité voire l'insolence alors que le "vous" maintient une distance - qui n'est pas obligatoirement synonyme de froideur ou d'indifférence. Cette distance me semble bonne, nécessaire. Pour parler en termes psychanalytiques, le "tu" est dans le Ça, le "vous" du côté du Surmoi. Le "tu" entretient la régression ou plutôt, la stagnation dans l'état de petit enfant, dans le "Ça", alors que le rôle de l'école, justement, est d'aider l'enfant à faire l'effort de grandir cf l'origine du mot "élève", d'intégrer les règles morales et sociales et de construire ainsi son "Moi". Cela ne se fait pas sans efforts ni renoncements inévitables pour grandir et devenir un sujet responsable et sociable. Tenez, ce débat me fait penser à une autre discussion, du même ordre, sur l'emploi de plus en plus fréquent des termes "papa" et "maman" ailleurs que dans la sphère familiale au lieu des mots adéquats que sont les mots "père" et mère" cf le topic . Absolument complètement totalement d'accord avec ton Zappons a écrit surfeuse a écrit volubylis Je n'ai pas voulu insinuer qu'il ne devait pas y avoir d'affection dans la relation entre l'élève et l'enseignant. J'ai seulement tenu à dire, plus haut, que cette relation ne doit pas être QUE cela. Pour que l'élève fasse les efforts que l'on attend de lui, la relation entre enseigné et enseignant ne peut pas, ne doit pas être égalitaire. Qu'on le veuille ou non, elle est hiérarchique. De même, je tutoie mes collègues mais tous, nous vouvoyons le proviseur et ses adjoints. Le "vous" sert à cela la distance. Et il est nécessaire que l'enfant le comprenne assez tôt. Or le tutoiement, qui relève du domaine de l'intimité entre proches amis, membres d'une même famille, nounou, bref, le cercle privé me semble peu compatible avec la reconnaissance indispensable de l'autorité du maître et de la maîtresse. Le "tu" permet la familiarité voire l'insolence alors que le "vous" maintient une distance - qui n'est pas obligatoirement synonyme de froideur ou d'indifférence. Cette distance me semble bonne, nécessaire. Pour parler en termes psychanalytiques, le "tu" est dans le Ça, le "vous" du côté du Surmoi. Le "tu" entretient la régression ou plutôt, la stagnation dans l'état de petit enfant, dans le "Ça", alors que le rôle de l'école, justement, est d'aider l'enfant à faire l'effort de grandir cf l'origine du mot "élève", d'intégrer les règles morales et sociales et de construire ainsi son "Moi". Cela ne se fait pas sans efforts ni renoncements inévitables pour grandir et devenir un sujet responsable et sociable. Tenez, ce débat me fait penser à une autre discussion, du même ordre, sur l'emploi de plus en plus fréquent des termes "papa" et "maman" ailleurs que dans la sphère familiale au lieu des mots adéquats que sont les mots "père" et mère" cf le topic . Absolument complètement totalement d'accord avec ton message. Tous les Suisses Romands sont des enfants, et avec eux bon nombre de Provençaux, sans compter tous les Anglophones? Faudrait peut-être raison garder, non ?doublecasquetteEnchanteur Zappons a écrit doublecasquette a écritLe problème, c'est la difficulté de cette collègue à obtenir que ses élèves la respectent. Pas le tutoiement. Elle est loin d'être la seule à avoir ce genre de problèmes dans cette école, c'est général. Une école primaire dans une banlieue très difficile. Je me doute. Mais je ne pense pas que ce soit lié au tutoiement. Je pencherais plutôt pour cette espèce de mépris condescendant qui fait qu'on ne présente jamais le PE comme quelqu'un qui sait et qui peut donner ce qu'il sait. Notre hiérarchie n'a pas encore compris la bêtise qu'elle a faite le jour où elle nous a expliqué qu'il fallait recevoir les familles jusque dans les classes, puis que c'était aux enfants de nous apprendre ce dont ils avaient besoin, puis que nous devions les conforter dans leur délire de toute-puissance estime de soi et tolérer une façon de s'exprimer censément conditionnée par une origine sociale quand ce n'est pas ethnique... . Au lieu de rétablir cette distance par l'estime que les familles devraient ressentir pour ceux qui éduquent et instruisent leurs enfants, on cherche par à -coups à rétablir des signes extérieurs ponctuels, sans le corps indispensable qui était derrière et qui seul était important. Un coup, c'est la blouse, un autre le vouvoiement... Mais le jour où l'on dira que l'école est là pour avoir de l'ambition pour tous les enfants qui la fréquentent et que ses professeurs sont des gens éminemment respectables, ça, ce n'est pas demain la veille. VudiciFidèle du forum" />_________________Front de Libération des Lichens Injustement MassacréssuperheterodyneNiveau 9 surfeuse a écritPour parler en termes psychanalytiques, le "tu" est dans le Ça, le "vous" du côté du Surmoi. Le "tu" entretient la régression ou plutôt, la stagnation dans l'état de petit enfant, dans le "Ça", alors que le rôle de l'école, justement, est d'aider l'enfant à faire l'effort de grandir cf l'origine du mot "élève", d'intégrer les règles morales et sociales et de construire ainsi son "Moi". Cela ne se fait pas sans efforts ni renoncements inévitables pour grandir et devenir un sujet responsable et sociable. Je me demande comment cette explication psychanalytique se porte au-delà des frontières françaises. Quid des langues dans lesquelles l'une des deux formes de la deuxième personne est devenue complètement archaïque l'anglais étant l'exemple le plus connu comme l'a souligné dandelion on n'y tutoie plus que Dieu voire des langues qui n'ont aucune distinction T-V ???_________________ Tout agent, quelle que soit sa fonction, doit obéissance passive et immédiate aux signaux le concernant. »surfeuseNiveau 8Décidément, certains, ici, ont l'art de traduire mes propos pour me faire dire ce que je n'ai pas dit ! c'est fatigant ! Je sais qu'il existe des pays francophones et peut-être des régions de France où le vouvoiement n'est pas évident, je sais que les Anglophones ont du mal avec cette différence entre le "tu" et le "vous" ! Je ne parlais pas de ces cas de figures particuliers et je pense que l'on s'égare, que l'on noie le poisson en évitant le fond de la question, que j'ai tenté de rappeler quel que soit l'âge tutoyer son enseignant n'est ni neutre, ni innocent. Pour ma part, je pense que cela participe du laxisme et de la démagogie dont beaucoup de profs ont tant à se plaindre Zappons ! _________________"L'école est faite pour libérer les enfants de l'amour de leurs parents. C'est une machine de guerre contre la famille "" Je ne promettrai donc pas le plaisir, mais je donnerai comme fin la difficulté vaincue." Alain.surfeuseNiveau 8PS pour superheterodyne nous avons répondu en même temps encore une fois, je ne parle que de ce implique le tutoiement des écoles françaises n'était-ce pas la question initiale ?._________________"L'école est faite pour libérer les enfants de l'amour de leurs parents. C'est une machine de guerre contre la famille "" Je ne promettrai donc pas le plaisir, mais je donnerai comme fin la difficulté vaincue." Alain.surfeuseNiveau 8Oups, post envoyé trop vite. Lire "de ce qu'implique le tutoiement"..._________________"L'école est faite pour libérer les enfants de l'amour de leurs parents. C'est une machine de guerre contre la famille "" Je ne promettrai donc pas le plaisir, mais je donnerai comme fin la difficulté vaincue." Alain.surfeuseNiveau 8... en France, dans les écoles est faite pour libérer les enfants de l'amour de leurs parents. C'est une machine de guerre contre la famille "" Je ne promettrai donc pas le plaisir, mais je donnerai comme fin la difficulté vaincue." Alain.Sujets similairesChine un forcené tue trois élèves et un enseignant dans une école horticole d'Antibes 150 élèves manifestent pour garder leur enseignant remplaçant. Lanmeur 29 insultés par les élèves d'un cours d'EPS, deux sexagénaires braquent leur fusil et lancent leur chien sur les Harris L'immense majorité des enseignants du primaire contestent la réforme des rythmes scolaires, et sont insatisfaits de leur salaire, de leur carrière et de leurs formations. GCB dans Libé, beurk ... 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L’être sexuĂ© de ces femmes pas-toutes ne passe pas par le corps, mais par ce qui rĂ©sulte d’une exigence logique dans la parole. En effet, la logique, la cohĂ©rence inscrite dans le fait qu’existe le langage et qu’il est hors des corps qui en sont agitĂ©s, bref l’Autre qui s’incarne, si l’on peut dire, comme ĂŞtre sexuĂ©, exige cet une par une. Et c’est bien lĂ l’étrange, le fascinant, c’est le cas de le dire – cette exiÂgence de l’Un, comme dĂ©jĂ Ă©trangement le ParmĂ©nide pouvait nous le faire prĂ©voir, c’est de l’Autre qu’elle sort. LĂ oĂą est l’être, c’est l’exigence de l’infinitude. Je reviendrai sur ce qu’il en est de ce lieu de l’Autre. Mais dĂ©s maintenant, pour faire image, je vais vous l’illustrer. On sait assez combien les analystes se sont amusĂ©s autour de Don juan dont ils ont tout fait, y compris, ce qui est un comble, un homosexuel. Mais centrez-le sur ce que je viens de vous imager, cet espace de la jouissance sexuelle recouvert par des ensembles ouverts, qui constituent une finitude, et que finalement on compte. Ne voyez-vous pas que l’essentiel dans le mythe fĂ©minin de Don juan, c’est qu’il les a une par une ? VoilĂ ce qu’est l’autre sexe, le sexe masculin, pour les femmes. En cela, l’image de Don juan est capitale. Des femmes Ă partir du moment oĂą il y a les noms, on peut en faire une liste, et les compter. S’il y en a mille e tre c’est bien qu’on peut les prendre une par une, ce qui est l’essentiel. Et c’est tout autre chose que l’Un de la fusion universelle. Si la femme n’était pas pas-toute, si dans son corps, elle n’était pas pas-toute comme ĂŞtre sexuĂ©, de tout cela rien ne tiendrait. Paroles du Don Juan de Mozart Extraits du serveur musical de serge Soudoplatoff Pour Ă©couter la musique ci-dessous, il faut avoir Real Player vous pouvez le tĂ©lĂ©charger ici —– L’air du catalogue Thomas Allen, Carol Vaness, Keith Lewis, Dimitri Kavrakos, Maria Ewing, Richard Van Allan, John Rawnsley, Elizabeth Gale, Londo Philarmonic Orchestra, Bernard Haitink. Un disque EMI. Don Juan se dĂ©barrasse de Dona Elvire, un peu collante il est vrai. Et pour cela, il demande Ă Leporello de lui expliquer.. la vĂ©ritĂ©!! Ce dont il s’acquitte bien consciencieusement en dĂ©ballant tout simplement le catalogue de toutes les femmes que Don Juan a aimĂ©. Magnifique air, le rĂ©citatif qui donne le ton rassurez-vous, vous n’êtes ni la première, ni la dernière, un mouvement rapide qui contient la liste maintenant disponible sur Internet, grâce Ă ce serveur-, ce point d’orgue du refrain mais en Espagne, elle sont mille et trois », puis une conclusion si belle si tendre, oĂą il lui explique gentiment vous savez bien ce qu’il fait ». Et Donna Elvire qui veut encore y croire… ItalianoMadamina, il catalogo è questo Delle belle che che amo il padron mio Un catalogo egli è che ho fatt’ io; Osservatte, leggere con me. In Italia seicento e quaranta; In Allemagna duecento e trentuna; Cento in Francia; in Turchia novantuna; Ma in Ispagna son gia mille e tre. V’han fra queste contadine, Cameriere, cittadine, V’han contesse, baronesse, Marchesane, principesse E v’han donne d’ogni grado, D’ogni forma, d’ogni eta. Nella bionda egli ha l’usanza Di lodar la gentilezza Nella bruna la constanza Nella bianca la dolcezza. Vuol d’inverno la grassotta Vuol d’estare la magrotta; E la grande maestosa, La piccina è cognor vezzosa Delle vecchie fa conquistra Pel piacer di porle in lista Sua passion predominante E la giovin principiante. Non si picca se sia ricca, Se sia brutta se sia bella ¨Purchè porte la gonnella, Voi sapete quel che fa. FrançaisBelle Dame, regardez cette liste des conquĂŞtes que fit mon beau maĂ®tre catalogue dressĂ© par moi-mĂŞme! Je vous prie, lisez avec moi Italie, voyez, six cent trente Allemagne, deux cent trente et une cent en France, et soixante en Turquie! Mais en Espagne, dĂ©jĂ mille et trois. Voyez, des villageoises, des soubrettes, des bourgeoises, des comtesses, des duchesses, des marquises, des princesses, des femmes de tout âge, et de tout rang. Chez la blonde, il a coutume de goĂ»ter la douceur. Chez la brune, c’est la constance; chez la palotte, la douceur. Pour l’hiver la grassouillette; pour l’étĂ© la maigrelette! Si la grande est plus noble, la petite est plus gracieuse. Les matrones sont fort bonnes pour le petit plaisir de les inscrire! Mais sa passion dominante, c’est la jeune dĂ©butante. Toute femme, toute fille, la vilaine comme la gentille, tout ce qui porte jupe.. Vous savez ce qu’il en fait… Pas de chiffre au-delĂ de trois extrait de Illettrisme et Sexuation » de Charley Supper Il n’y a pas de chiffres au-delĂ de trois. Pas de nombre au-delĂ de trois ! Les textes sacrĂ©s font tous Ă©tat du fait qu’il n’y a pas de nombre au-delĂ de trois. C’est vĂ©rifiable si nous ne comptons pas en mode binaire. Le mode binaire ou analogique Ă©tant le fait de ne prendre en compte que l’identique. On aurait 1 = 2 = 3 = 4 = etc… Cela correspond Ă ce que nous avons nommĂ© ailleurs se mĂŞmer ». Est-ce que tu mĂŞme, ou est-ce que tu mĂŞme plus ? On entend cela tous les jours.. ——————————- L’avantage de compter de façon non binaire Ici oĂą nous comptons en mode non analogique, l’on voit bien que 1 ou 2 ou 3205 sont tous un un chiffre », mais un 1 chiffre » pas pareil. Les mĂŞmes, mais pas pareils ! Des semblables, mais pas pareils ! Comme pour les humains ! Sauf que ceux qui auront refusĂ© l’accès au symbolique, c’est-Ă -dire au mode non analogique du comptage, n’auront accès qu’au racisme ou Ă l’illettrisme. C’est le mĂŞme processus ! L’impossibilitĂ© de mettre sur un mĂŞme plan l’identique et le diffĂ©rent.* Si je rĂ©alise le catalogue des vaches de ma ferme, je vais les faire dĂ©filer devant moi et faire un trait dans mon cahier chaque fois qu’en passe une. Si se prĂ©sente un cheval, je ne le chasserais pas en criant. Je le ferais figurer dans mon registre au paragraphe non-vache ». C’est ça la diffĂ©rence ! Pas le mĂ©tissage, qui est un refus de la diffĂ©rence ! ArrĂŞtons de croire ou de faire croire que A = A. La fonction de A » est de n’être ni B, ni C, ni D, ni aucune autre des lettres de l’alphabet. Nous voyons bien ici oĂą mène le concept imaginaire ou analogique de rĂ©volution en politique, Ă un Ă©ternel retour du mĂŞme despotique, j’entends !. Un tour complet ou quatre quart de tour, et hop, rien n’est changĂ© ! ——————————- Revenons Ă nos moutons qu’il nous reste Ă compter non pas pour nous endormir mais pour essayer de nous rĂ©veiller du binaire ! On voit ci-dessus, au temps 3 reprĂ©sentĂ© en bleu, que de trois Ă quatre, il y a Ă©volution reprĂ©sentĂ©e par la flèche bleue. Alors que se passe-t-il quand nous inscrivons 5, nous constatons que nous rĂ©pĂ©tons le 4. fig. 2 Ă€ quatre, commencent “les mille ĂŞtres” du Tao, ainsi que le lien des mille lettres de l’alphabet, celles que l’illettrĂ© ne peut pas dĂ©chiffrer, d’être bien avant le trois de la TrinitĂ©. C’est-Ă -dire avant le “Un en plus”! De n’avoir pas accès au “Un en plus”, la personne illettrĂ©e se retrouve inscrite comme en moins, un “un” en moins, et du coup elle a le sentiment d’être “en trop”. Toujours cet embrouillamini du binaire oĂą “tout est dans tout”. Alors que le trinitaire donne accès au Tout qui est dans chaque partie ! Ce “+1” n’est pas sans rapport Ă l’unitĂ© de Dieu en ce sens qu’il est infini, toujours Ă©gal Ă lui-mĂŞme sans qu’on puisse lui retrancher ou lui ajouter. C’est ça que les Grecs nommaient le Beau. Le Un symbolique n’apparaĂ®t qu’après le Trois. Illettrime et Ex-il extrait se Illettrisme et Sexuation » de Charley Supper Parlons du fait d’être Ă tu et Ă toi avec l’autre. C’est aujourd’hui un signe de modernitĂ©. On est frères et on se tutoie, ce qui en est la marque. La marque imaginaire, vous l’aurez compris ! C’est tout le contraire Ă©videmment ! Le “tu” sers Ă rĂ©fĂ©rencer le discours pour en faire une parole interchangeable entre deux interlocuteurs qui seront chacun Ă son tour “je” ou “tu”, selon l’acte d’énonciation de celui qui dit “je”. Ă€ partir du moment oĂą tout le monde se dit “tu”, on n’a plus de rĂ©fèrent du discours pour savoir qui est qui et qui dit quoi. Il n’y a dès lors plus Ă s’étonner, dans ce joyeux bordel, qu’un père en parlant de sa femme dise Ă son fils “maman ne veut pas” ce qui complique encore les relations de filiations, le fils se trouvant ainsi avoir la mĂŞme mère imaginaire que son père. Le tutoiement systĂ©matique n’est pas loin du “il” de la “non personne” qu’on entend encore trop souvent dans les institutions s’occupant de personnes handicapĂ©es ou du troisième âge. Le “alooors, il a bien dormiiiii ? ” ne sert qu’à dĂ©nier Ă l’autre son rĂ´le d’interlocuteur valable en l’empĂŞchant de rĂ©pondre par “je”. Le “tu” systĂ©matique aussi, tue celui Ă qui il s’adresse, comme lui interdisant de rĂ©pondre en disant “je”. Ce n’est pas si loin du “madame est servie” d’antan. Pas question de parler avec ces gens-lĂ ! Aristocratie ou pseudo-bourgeoisie gauchisante, mĂŞme combat ! Quant aux diffĂ©rents domaines professionnels oĂą l’on est “à tu et Ă toi”, ce n’est sous prĂ©texte de modernitĂ© qu’une façon de subjuguer l’autre afin qu’il se taise et que la parole ne soit jamais autorisĂ©e. Ça donne ces ambiances Ă©cĹ“urantes oĂą gĂ©nĂ©ralement tout le monde est d’accord, toujours du cĂ´tĂ© “bien-pensant”. Toujours ce refus de la diffĂ©rence ! C’est le mĂŞme phĂ©nomène Ă la mode qui fait qu’on ne puisse plus se rassembler autrement que sous les auspices du tonitruant rĂ©pertoriĂ© musique, afin qu’on ne risque pas d’être confrontĂ© au silence, au vide de son oĂą pourrait bien soudain s’élever la voix de cet Autre qui nous veut tant de mal, qu’on doive l’annuler par n’importe quel moyen. Terreur tenace d’être imaginaire. Terreur de risquer la vĂ©ritĂ© d’une parole, au cas oĂą quelqu’un s’aviserait d’en profĂ©rer une. La vĂ©ritĂ© Ă poil tout Ă coup, devant nous ! Ce “tu”, qui n’est pas “rapportĂ© Ă l’acte d’énonciation qui le supporte”[1] et ce ”il” de la non-personne sont bien sur une façon imaginaire de rĂ©futer l’Autre du discours. En quoi rĂ©futer ou nier est fondamentalement diffĂ©rent que d’énoncer quelque chose qu’il n’y a pas = dĂ©nĂ©gation ! J’ai rĂŞvĂ© d’une femme, je ne sais pas qui c’est; la seule chose dont je suis sur, c’est que ce n’est pas ma mère… Le tu et le il de la non personne n’ont rien Ă voir avec le “il” auquel donne accès le fait d’accepter les rĂ´les rĂ©versibles de locuteur et d’allocutaire, lors de l’énonciation d’un “je” qui s’adresse Ă un “tu” comme futur “je” autorisĂ©. Ainsi l’enfant acquiert le “IL” au moment oĂą il assimile la troisième dimension, la perspective. Cet “il” symbolique lui permet de prĂ©sentifier l’absence et de reprĂ©senter la “dimension trois”, laquelle n’est hĂ©las reprĂ©sentable, pour les pauvres humains que nous sommes, qu’en dimension deux dans la rĂ©alitĂ© Voir plus ici sur la dimension deux en dimension trois Ceux qui, conscients de l’importance de se confronter au IL , n’aurons pas le front de s’y frotter, resteront Ă l’étage imaginaire du IL » de l’ IL-lettrisme. ———————————————————————- xxx Depuis le lien invisible qui relie ces cinq parties, nous nous permettons d’affirmer que l’illettrisme n’est ni une maladie ni une insuffisance, mais un signe d’intelligence. Intelligence, presque au sens d’intelligence avec l’ennemi, intelligence crĂ©atrice d’un mode de survie particulier entre mille que trouve un humain pour pouvoir subsister en faisant l’économie du trĂ© » de la mort symbolique laquelle le terrorise tant, qu’il la rĂ©fute et prĂ©tend pouvoir s’en passer en son for intĂ©rieur. Le choix d’être en ex-il, mort-vivant ! Si je suis en exil, mort-vivant, je n’ai d’autre choix que de m’ill et trer ——————————- [1] “L’ÉNONCIATION en linguistique Française”, de Dominique Maingueneau
Letutoiement est plutôt à situer dans un cadre éthique que le philosophe Martin Buber a partiellement décrit. Dans son ouvrage « Je et Tu » ( 1923), il indique comment le tutoiement situe l’échange au niveau d’une rencontre authentique et égalitaire, sans masque ni parade. Bien entendu, les psychothérapeutes savent par expérience
Les Sonnets » dans la Pléiade Shakespeare, c’est tout un poème Adulé pour son théâtre flamboyant, Shakespeare a également signé une oeuvre poétique remarquable, rassemblée dans un tout nouveau volume de La Pléiade. L’occasion de revenir sur l’énigme de ses Sonnets ». Leurs sens multiples, leurs jeux de mots, leur rythme et leur harmonie éblouissent encore aujourd’hui. Par Philippe Chevilley La troupe du Berliner Ensemble en 2010, dans une mise en scène de Robert Wilson de 25 sonnets de Shakespeare sur une partition musicale de Rufus Wainwright. ©RUBY WASHINGTON/The New York Tim > ZOOM cliquer l’image On a éprouvé les tempêtes et les guerres, admiré et haï les rois, rit avec les fous, pleuré avec les amants désunis, tutoyé le ciel et la terre… Cette fois, l’aventure est terminée le huitième et dernier tome des oeuvres complètes de William Shakespeare 1564-1616, en édition bilingue dans une nouvelle traduction, est paru dans La Pléiade. Un bouquet final dédié à la poésie du grand Will. Pour Jean-Michel Déprats, qui travaille à cette somme depuis deux décennies, traduire les fameux Sonnets - au coeur de cet ultime tome - n’a pas été la partie la plus facile. Il m’a fallu deux ans et demi pour y parvenir… » A titre d’exemple, j’ai passé autant de temps sur le sonnet 135 que sur une pièce entière ». Ce sonnet adressé à une mystérieuse dame brune concentre à la fois tout le génie et la complexité de l’oeuvre polysémie sexuelle, passion des jeux de mots, rythme hypnotique. Le poète joue avec Will, son prénom, et celui d’un rival qui désigne en anglais à la fois le verbe vouloir et l’organe sexuel masculin ou féminin. De Will » en will », il reproche à sa maîtresse de se donner à tous les hommes, mais pas à lui . Pour ne pas altérer le sens et l’effet produit, j’ai diversifié les traductions correspondant aux significations diverses.. en restant proche quand c’est possible du son ’will’ par exemple avec le mot ’oui’ ». Fabuleux paradoxe Les Sonnets constituent un fabuleux paradoxe. D’un côté, ils illustrent la cohérence du génie shakespearien, dramaturge et poète à part entière. En dévoilant ce qui semble être sa part intime, ils inclinent à penser que l’homme a bel et bien existé, que Shakespeare n’est pas le nom de code d’un collectif, comme certains le prétendent. Mais d’un autre côté, par leur singularité et leur caractère énigmatique, ils accroissent le mystère d’un destin extraordinaire - celui de ce fils de gantier qui, une fois marié, a brutalement renoncé à sa petite vie paisible dans la ville de Stratford pour conquérir Londres et le monde. Lorsque Shakespeare s’attaque au sonnet, ce genre noble est tombé en désuétude. Qu’à cela ne tienne ! Dans son introduction au tome de La Pléiade, l’universitaire Anne-Marie Miller-Blaise 1 explique que le dramaturge s’est emparé du modèle de Pétrarque - ode très codifiée à l’amour sublimé - pour mieux le subvertir. La structure, trois quatrains suivis d’un distique, sert son dessein exposer des pensées, pour mieux les questionner, voire les contredire Il retourne les choses, les mots, fait éclater tous leurs sens ». Selon la spécialiste, pour Shakespeare, il n’y a pas d’interdit du langage. De coïncidence en coïncidence, il nous invite à abolir l’inconscient de la langue ». Jeune éphèbe et dame brune La subversion tient aussi aux épanchements équivoques du poète. Dans les 126 premiers sonnets, il exprime son amour pour un jeune homme ; dans les 28 derniers, son désir pour la sulfureuse Dark Lady ». Le chassé-croisé vire au trio amoureux quand le poète jaloux reproche à la dame de vouloir séduire son amant. S’il semble ne pas vouloir passer à l’acte avec le jeune homme il le voue au lit des femmes et l’incite à se reproduire, il brûle apparemment de désir pour l’intrigante dame brune. Cette bisexualité affichée n’est pas si surprenante à l’époque élisabéthaine où l’adolescent était volontiers considéré comme un être androgyne. Mais en faire le fil rouge de ses poèmes est osé. Les Sonnets de Shakespeare Illustration du peintre lituanien Stasis Krasaukas pour une édition de 1966 des Sonnets Difficile de faire le lien avec la vie intime de Shakespeare. On ignore en effet l’identité de ce duo d’amant et maîtresse. L’adresse des poèmes à un certain W. H. a permis aux historiens d’échafauder moult théories plus ou moins fumeuses en ce qui concerne le nom du garçon. Aucune dame brune n’a en revanche été débusquée dans son entourage… Ces serments d’amour ne sont peut-être après tout que des fantasmes ou une licence, l’esquisse d’un manifeste poétique amoureux. William confiné Reste la question intrigante de la publication tardive des sonnets 1609. Shakespeare les a probablement écrits beaucoup plus tôt. Un indice dans Peines d’amour perdues » 1594-1596, le personnage de Rosaline fait beaucoup penser à la Dark lady », souligne Jean-Michel Déprats. Selon le traducteur, la période d’écriture correspond probablement à l’épidémie de peste. Les théâtres étaient fermés… ». Shakespeare confiné se rabat sur la poésie… Etrange résonance avec aujourd’hui ! Si cette partie de son oeuvre a été éditée sur le tard, c’est peut-être parce que son auteur n’avait pas pensé à les publier, préférant les faire tourner parmi un groupe d’amis ou de protecteurs. Accaparé par le théâtre, il n’avait sans doute pas le temps de les mettre en forme » , suggère Anne-Marie Miller-Blaise. D’autant que ses pièces représentaient une activité bien plus lucrative. Un recueil de poésie était vendu une fois pour toutes à une librairie ». Conséquence, les Sonnets connaissent peu de succès de son vivant. Et quand on les redécouvrira après sa mort, ce sera surtout pour dénoncer leur caractère licencieux. Ce traitement particulier du désir, du temps, de l’éternité trouve encore un écho de nos jours. La langue des sonnets apparaît très moderne, proche de la nôtre Cette oeuvre si agile connaîtra finalement un éblouissant retournement de fortune. En particulier en France, deux siècles plus tard, quand les romantiques font du poète anglais leur barde » favori. Cette exaltation de l’amour, ce traitement particulier du désir, du temps, de l’éternité trouve encore un écho de nos jours. La langue des sonnets apparaît très moderne, proche de la nôtre » , explique Anne-Marie Miller-Blaise. Jean-Michel Déprats est du même avis Tous les états de l’amour y sont convoqués, à la façon de Roland Barthes. Les Sonnets nous proposent un parcours amoureux diversifié, souvent douloureux, plus rarement porté par la joie de la beauté et de la fidélité ». Ils évoquent aussi le temps qui nous est compté, le caractère éphémère des passions. Des thèmes éternels dans une langue sans âge… En témoignent les publications et les nouvelles traductions qui ne cessent de se multiplier en ce début de millénaire. Alexandrins blancs DES THEMES QUI TROUVENTENCORE UN ECHO DE NOSJOURS ET UNE LANGUE QUIAPPARAÎT TRES MODERNEPROCHE DE LA NÔTRE Le volume de La Pléiade offre justement en bonus une anthologie des meilleures traductions des sonnets en français depuis deux siècles. Chateaubriand, Francois-Victor Hugo, Yves Bonnefoy, Claude Neumann… quelque soixante auteurs et autant de visions différentes explorent tous les possibles d’une oeuvre inégalée. Quid de la version de Jean-Michel Déprats ? J’ai voulu éviter deux extrêmes un excès de formalisme, la recherche de la rime pour la rime qui dénature le sens des mots et du poème dans son ensemble. Ou à l’inverse une transposition dans une prose qui oublierait la poésie ». Aussi revendique-t-il un entre-deux » J’ai opté pour des alexandrins blancs sans rime en m’autorisant de rares écarts quelques décasyllabes et vers de quatorze syllabes quand j’y étais contraint ». Résultat, un beau travail équilibré qui préserve la magie de ces vignettes miraculeuses, respecte la musique des vers, en clarifiant au maximum le propos. Le traducteur reste humble Il y a tellement de polysémie, tenter une traduction parfaite est voué à l’échec. On ne peut pas rendre en français toute cette richesse. On ne peut faire entendre que deux ou trois sens sur six ou sept. C’est peut-être un avantage… car les Anglais, à vouloir tout saisir s’y perdent parfois » … Il faut en tout état de cause ne pas hésiter à consulter les notes de l’ouvrage qui permettent de contextualiser chaque sonnet données historiques, convictions de l’époque… Et pour en saisir toute la substantifique moelle, certains méritent d’être lus deux ou trois fois. Contre la violence sexuelle En contrepoint, La Pléiade a réuni les autres oeuvres poétiques de Shakespeare, dont les deux poèmes narratifs érotico-mythologiques Vénus et Adonis » 1593 et Le Viol de Lucrèce » 1594 traduits par Henri Suhamy. En apparence convenus, ils traitent avec audace du désir et de ses perversions Vénus prête à tout pour séduire Adonis, Tarquin qui franchit toutes les portes de l’abjection pour posséder Lucrèce. Moins retravaillés, fulgurants, ils frappent par leur côté poignant et leur incroyable ironie », affirme Anne-Marie Miller-Blaise. Le viol de Lucrèce », en particulier s’avère extralucide dans sa manière de démonter la violence sexuelle. Très proche d’un texte dramatique, le poème a l’envergure et la majesté d’une tragédie à la française ». Chrono-lithographie The Genius of Shakespeare », de 1888, le représentant devant ses plus célèbres pièces de théâtre .©Bridgeman Images ZOOM cliquer l’image Préfèrera-t-on toujours le Shakespeare dramaturge au Shakespeare poète ? Cette opposition n’a pas lieu d’être » assure Jean-Michel Déprats. Il y a autant de poésie dans son théâtre, que de théâtralité dans sa poésie. Des sonnets et diverses formes lyriques sont insérés dans ses pièces dans Périclès », La vie d’Henri V », La Tempête » Les chansons d’Ariel, Roméo et Juliette » le choeur et le premier échange entre les amants… » Quant aux Sonnets » eux-mêmes, ils ont autant vocation être dits à haute voix que lus ». Chantés même, parfois le metteur en scène américain Robert Wilson en a fait en 2010 un beau spectacle musical, sur une partition du ténor pop Rufus Wainwright. La messe est dite. Shakespeare in love » a révolutionné la poésie, comme le théâtre. Depuis quatre siècles, le poète amoureux fait battre les coeurs plus vite avec ses intrigants sonnets. Quel amante résisterai à l’appel du numéro 43 ? Tous mes jours sont des nuits tant que je ne te voie/et mes nuits des jours clairs quand je rêve de toi ». All days are nights to see till I see thee, /And nights brights days when dreams do show thee me » A lire Sonnets et autres poèmes OEuvres complètes, VIII. Edition publiée sous la direction de Jean-Michel Déprats et Gisèle Venet. Bibliothèque de La Pléiade, pages, 59euros. prix de lancement ; 1 professeure en littérature anglaise et histoire culturelle des XVIe et XVIIesiècles à Université Sorbonne nouvelle. CHRONOLOGIE POETIQUE 1593 publication à 29 ans du poème Venus et Adonis » 1594 Le viol de Lucrèce » 1594 -1995 Ecriture des pièces Le Songe d’une nuit d’été », fantasmagorie poétique s’il en est, et de Roméo et Juliette », avec ses accents tragiques et ses sonnets. 1599-1601 Hamlet », la pièce la plus intime de Shakespeare, sorte de manifeste mélancolique. 1609 Publication des Sonnets, probablement écrits dans les années 1590. 1610-11 La Tempête », chef-d’oeuvre féerique. 1611 Macbeth avec son atmosphère onirique et ses sorcières. Par Philippe Chevilley Crédit Les Echos, le 24 mars 2021 Shakespeare mon amour La première rencontre entre Roméo et Juliette se matérialise par un échange de mots qui devient un sonnet. Pour François-Victor Hugo qui ressuscita le théâtre shakespearien au 19ème, le sonnet est le langage même des amoureux. Comment Shakespeare construit-il l’amour dans et par la langue ? Shakespeare• Crédits CSA Images-Getty L’invitée du jour Anne-Marie Miller-Blaise, professeure en littérature et histoire culturelle britanniques des 16e-17e siècles à l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, vice-présidente de la Société Française Shakespeare Le sonnet, langage de l’amour Shakespeare a écrit à une période où l’on considère le théâtre comme de la poésie… Mais il a un rapport différent peut-être à la poésie et ses enjeux, à la fois sur la scène et dans l’écriture de ses sonnets. La rencontre entre Roméo et Juliette se matérialise dans le texte de la pièce, à l’acte I scène 5, par un échange de mots qui devient un sonnet… Comme le dira plus tard François-Victor Hugo, tous les amoureux font des sonnets, c’est le langage même des amoureux. Anne-Marie Miller-Blaise Le sonnet, écriture de l’intime ? Penser que le sonnet est une écriture de l’intime est une idée qui surgit au 18ème siècle lorsqu’on commence à identifier le Shakespeare des sonnets comme un Shakespeare qui parlerait en son nom propre, et qu’on commence à voir les sonnets comme une trace autobiographique de l’auteur. Dès Pétrarque, le sonnet est une forme qui semble donner voix et corps à une douleur amoureuse ressentie au plus profond de soi même, mais il faut se garder de cette tentation il faut penser le sonnet comme partiellement biographique, peut-être, mais aussi comme une auto-fiction... Anne-Marie Miller-Blaise Textes lus par Denis Podalydès - William Shakespeare,Sonnets, Sonnet 18, Sonnet 20 et Sonnet 64, 1609, traduction de Jean-Michel Déprats, à paraître fin 2020, édition de la Pléiade, vol. VIII dernier volume des Œuvres complètes Sons diffusés - Extraits de Shakespeare in love, film de John Madden, 1998- Extrait de Roméo et Juliette, film de Franco Zeffirelli, 1968- Chanson de Rufus Wainwright, Take all my loves Sonnet 40 À RÉÉCOUTER SÉRIE William Shakespeare, 4 épisodes France Culture / La compagnie des auteurs Le même Shakespeare écrit Hamlet » et les Sonnets » PAR JEAN-MICHEL DÉPRATS LE 10 MARS 2021 … Entreprendre de retraduire une œuvre majeure, même cent fois traduite, et parfois avec éclat, n’exprime nullement une insatisfaction vis-à -vis des accomplissements antérieurs. La retraduction ne porte pas en soi une critique voilée des poètes traducteurs qui vous ont précédé. Comme l’écrit clairement Jacques Darras, lui-même par deux fois retraducteur récent desSonnetsde Shakespeare C’est le propre de l’œuvre accomplie, en musique comme en poésie, que de permettre une infinie quantité de lectures, de traductions. […] Sachant qu’il n’y en aura jamais de version définitive […] traduire lesSonnetsde Shakespeare, c’est toucher au principe d’insatisfaction » Il y a toujours place pour autre chose. Au tome I desŒuvres complètes de Shakespeare dans la Pléiade, un texte de réflexion sur les questions de traduction, intitulé Traduire Shakespeare » et sous-titré Pour une poétique théâtrale de la traduction shakespearienne », présente la problématique générale de la traduction théâtrale et explore les apories et les limites de la traduction en français moderne de l’anglais élisabéthain. J’y affirme la spécificité de la traduction destinée à la scène, entée sur la perception de ce que Patrice Pavis appelle le verbo-corps1 » et qui désigne l’inscription du souffle et de la gestualité dans la langue. À travers les rythmes, les assonances, les rimes intérieures, les effets allitératifs, les ruptures syntaxiques ou les coulées verbales, Shakespeare guide l’acteur dans son jeu, et il n’est aucun élément de son écriture dramatique qui soit sans conséquences pour l’interprétation d’un rôle. La question se pose donc d’emblée les caracérisiques de la traduction théâtrale, telle que je l’entends, la définis et la pratique, s’appliquent-elles à la traduction desSonnets ? Faut-il au contraire inventer une autre approche et esquisser une autre esthétique pour cerner et transmettre la spécificité de la forme lyrique ? Les lignes qui suivent ont pour seul objet d’aborder et de problématiser ces questions fondamentales. Elles s’attachent à décrire les options adoptées dans cette nouvelle traduction desSonnets, non à élaborer une théorie de la traduction poé- tique comme celle, convaincante et brillamment argumentée, que développe Yves Bonnefoy dans les pages qu’il consacre, au sujet des mêmes sonnets, à l’exposé de sa propre démarche. L’étroite imbrication du poétique et du théâtral dans l’œuvre de Shakespeare est manifeste. Nul ne songerait à dire que Shakespeare est moins poète dans ses pièces que dans sesSonnetset ses autres poèmes. De nombreuses formes lyriques sont insérées dans le tissu même des pièces, qu’il s’agisse, dansRoméo et Juliette, des sonnets que prononce le Chœur en guise de Prologue à la pièce, ou, au début de l’acte II, du sonnet, encore, que forment les répliques alternées des personnages éponymes lors de leur première rencontre ; ou bien, dansPériclès, des différentes interventions en octosyllabes de Gower, qui fait fonction de chœur. Dans l’intervalle la date de compo- sition deRoméo et Juliettese situe entre 1594 et 1596, et celle dePériclèsen 1608, la forme lyrique est choisie en particulier pour les somptueuses interventions du Prologue ou du Chœur dansLa Vie d’Henry V, et pour les chansons d’Ariel dansLa Tempêteou celles du Bouffon dansLa Nuit des n’ai cité que les exemples les plus manifestes et les plus étincelants. À l’inverse, il y a de la théâtralité dans lesSonnets. Le recueil de 1609 met plus ou moins en scène les différents moments d’une relation, voire, parfois, une intrigue ; au fil de la séquence s’installe un dialogisme entre deux entités qui peuvent être deux identités du poète, entre le poète et l’aimé, ou entre le poète et son amante. Bien que la lecture de poèmes à haute voix ne soit pas, ou ne soit plus, une pratique sociale courante en France — alors qu’elle fait partie de la célébration publique de la poésie en Grande-Bretagne, au Portugal et plus encore en Russie — je soulignerai ici l’importance de l’oralitéet même de lavocalitéde l’écriture poétique de Shakespeare dans ses créations lyriques tout autant que dans son œuvre dramatique. La figure du poète n’est pas scindée en deux le poète desSonnetset des deux grands poèmes mythologiques et érotiques d’une part, celui des créations dramatiques de l’autre. C’est le même Shakespeare qui écritHamletet lesSonnets. Un même rythme emporte et soutient les poèmes et les pièces de théâtre, où l’on entend et reconnaît une même voix. Pour le dire clairement, les sonnets de Shakespeare sont donc des textes à direautant que des textes à lire. Il y a à cet égard des similitudes entre la traduction théâtrale et la traduction poétique. Dans l’un et l’autre cas, les mots sont des gestes, traduisant les pulsions de la pensée dans un phrasé lié au souffle. Incidemment, l’auteur desSonnetsfait une référence explicite au jeu de l’acteur au Sonnet 23, dont les premiers vers évoquent un acteur en scène hésitant sur ses vers, / que le trac paralyse et qui oublie son rôle ». Comme la traductionde théâtre, la traductionde poésie ne peut se contenter de donner à comprendre, elle doit aussi donner à entendre, et j’ajouterai, donner à voir à l’œil qui écoute » Claudel. À l’invar du traducteurde théâtre, le traducteur de poésie n’a qu’un guide dans le dédale des exigences multiples, souvent contradictoires, qui le tenaillent l’écoute d’une voix dont il cherche à trouver l’inflexion. Une voix, une diction, une respiration qui lui font préférer tel vocable, telle musique, tel ordre des mots. Ce travail sur la physique de la langue tente de relayer l’économie très particulière desSonnetset de recréer en français leur énergie phonatoire et vocale tout en respectant la contrainte de la concision. Il rêve, face à la forme fixe, deux options antithétiques qui divisent et opposent les traducteurs soit le respect sacré de toutes les caractéristiques formelles du poème, et en particulier du sonnet dans sa version dite shakespearienne » — sa régularité métrique mais aussi ses rimes et son schéma de rimes —, soit, à l’inverse, une écriture plus libre privilégiant d’autres éléments, comme la clarté du sémantisme et le suivi de la ligne narrative et dramatique. La lecture de nombreuses traductions desSonnetsmontre que les éléments majeurs de ces deux options, respect des caractéristiques formelles et suivi de la ligne narrative et dramatique, ne sont guère compatibles. Deux écueils symétriques sur lesquels nous allons revenir guettent en effet le traducteur qui adopte l’une ou l’autre approche de façon systématique. Il va de soi que ces options contraires ne sont pas les seules qui s’offrent aux traducteurs … La fascination exclusive de la forme, conçue comme seule incarnation respectable de la fidélité, fait courir le risque de la domination de la métrique et donc du primat de la versification ; elle éloigne le traducteur de la création poétique dans sa langue et dans son temps. Aujourd’hui surtout, alors que la poésie contemporaine ne pratique plus guère la rime, sauf avec des intentions parodiques. Contrairement à ce que l’on croit couramment, rien n’est plus facile ni plus dangereux pour un traducteur que d’écrire non pas de la poésie, mais des vers, de céder à ce qu’Henri Meschonnic appelle, avec l’acerbe et impi- toyable lucidité qui le caractérise, la comédie versificatoire ». On décèle à la simple écoute les mots qui ne sont là que pour la rime ou pour le mètre et auxquels rien ne correspond dans l’original. Il peut certes arriver que les rimes d’un sonnet de Shakespeare soient rhétoriques et de pure forme, voire qu’il s’agisse de simples rimes pour l’œil. Mais c’est extrêmement rare. Une traduction qui accorde la prédominance aux structures rimiques et métriques s’éloigne du suivi scrupuleux de la construction verbale et du parcours du sens. Elle conduit à privilégier la rhétorique, confond poésie et versification. Une telle démarche convient mieux sans doute à des œuvres marquées par un degré extrême de formalisation, comme les longs poèmes narratifs que sontVenus et AdonisetLe Viol de Lucrèce. Les traducteurs qui, à rebours, se méfient de l’embaumement qu’implique la prédominance de la forme courent quant à eux le risque ou assument le choix ? de transformer le poème en récit en prose, une prose au mieux cadencée ou rythmée. Une partie des traductions les plus récentes se méfient tellement des formes fixes et des vers réguliers — décasyllabes ou alexandrins — qu’elles conduisent à nier tout principe de récurrence et de structuration dans la création du poème. Une suite de lignes composées d’un nombre constamment variable de syllabes fait totalement oublier la forme du sonnet. Les réalisations qui en découlent donnent le sentiment que le traducteur n’a fait que la moitié du chemin, tenant pour négligeable le fait que la création poétique de Shakespeare apris formedans une construcion verbale codifiée qui canalise sans l’occulter le jaillissement de la pensée. Conscient de ces deux dangers opposés, j’ai, pour ma part, tenté un compromis ou une synthèse des deux approches en traduisant lesSonnetsde Shakespeare en alexandrins blancs, donc en vers non rimés, convaincu qu’assonances, allitérations, rimes intérieures, échos internes et rythme d’ensemble offrent une structuration plus discrète mais tout aussi efficace que celle des rimes. Les premières traductions des Sonnets de Shakespeare en alexandrins non rimés sont dues à Abel Doysié 1919 puis à Émile Le Brun 1927, suivis plus tardivement 1942 par Giraud d’Uccle pseudonyme de Léon Kochnitzky, puis avec brio par Henri Thomas 1961, et dans un passé plus récent par Robert Ellrodt 2002, 2007, envers qui j’exprime ici ma gratitude et mon admiration. Sa traduction est à ce jour la plus sûre du point de vue de l’exacitude et de la complexité du sens. Mon approche se différencie de la sienne en ce que je m’accorde plus de souplesse et de libertés dans l’ordonnancement du poème, incluant dans un souci de fluidité, au milieu des alexandrins blancs, des vers de quatorze syllabes quand le contenu informatif oblige à être plus long et des décasyllabes quand, à l’inverse — plus rarement —, ce mètre suffit à prendre en charge la totalité des dénotations et connotations. Puisque le ton et le style de l’énonciation sont délibérément plus modernes que dans les traductions en alexandrins classiques, j’ai également souvent recours à lacésure épique ; courante au Moyen Âge, réapparue avec les symbolistes et les modernistes, elle consiste à compter comme hexasyllabe un premier hémistiche se terminant soit par unemuet non suivi d’une voyelle, soit par unesuivi d’unsmarquant le pluriel, alors que dans l’alexandrin classique l’hémistiche n’est hexasyllabique que si leemuet est suivi d’une voyelle. Ainsi, dans ma traduction, le vers 1 du Sonnet 65 S’il n’eest bronze ni pierre, terre ou mer infinie », ou le vers 7 du Sonnet 78 Ont ajouté des plumes à l’aile des savants », hypermétriques 13 syllabes si l’on applique rigoureusement les règles de l’alexandrin classique, peuvent être considérés comme des alexandrins si, suivant la pratique orale, on a recours à lacésure épiquequi élide la syllabe finale des premiers hémistiches pierre » dans le Sonnet 65 ou plumes » dans le Sonnet 781.Cette variété métrique et la licence qu’ajoute la césure épique visent à éliminer les chevilles et à privilégier l’énonciation mimétique sans recourir à des artifices de pure forme. Henri Meschonnic invite à pourchasser aujourd’hui les poétismes », dont l’inversion sytématique et la négation simple un ne » non suivi d’un pas » ou d’un point » sont les manifestations les plus fréquentes. Sans ignorer que la diction poétique ne s’indexe pas sur le parler courant ou l’oralité naturelle, je crois plus proche de l’essence de la poésie de réduire artefacts et conventions désormais mortes, et je n’ai pour ma part aucune gêne à déclarer que j’ai obstinément recherché la clarté et la limpidité, activant constamment cette propriété inhérente à la traduction d’opérer quel que soit le dessein conscient du traducteur une forme d’exégèse et d’explicitation. Beaucoup de sonnets shakespeariens étant d’une grande complexité et d’une grande densité de pensée, ce souci de limpidité me semble plus à même de donner un écho convaincant du poème qu’une pratique faussement mallarméenne d’obscurité délibérée. Je n’entends personnellement pas la voix de Shakespeare dans ces versions françaises qui, confuses à la première lecture, le relèent à la deuxième ou à la troisième et qui semblent confondre obscurité et profondeur. Sur un point précis, j’ai, traduisant lesSonnets, infléchi ma pratique par rapport à mes principes de traduction des œuvres dramatiques celui du respect de l’alternance entre tutoiement et vouvoiement ou, pour être linguistiquement plus exa ?, de l’alternance entre leyouet lethoudans l’adresse à un interlocuteur en anglais n’est que de façon très globale et grossière que l’on peut assimiler l’alternance duyouet duthouen anglais élisabéthain à celle du vouvoiement et du tutoiement en français. Dans les œuvres dramatiques, l’essentiel est de marquer le passage duyouauthouà l’intérieur d’une scène, et parfois le retour auyouau cours de la même scène. Seul le passage duvo=autuet le retour éventuel auvo=peuvent marquer en français la modification du rapport entre deux personnages. Il ne me paraît guère démontrable que, dans lesSonnets, l’adresse au bien-aimé ou à l’amante parthouimplique un rapport plus intime et plus affectif que l’adresse paryou. Dans ces conditions, j’ai opté pour le tu » dans tous les cas de figure, le vouvoiement d’une amante ou d’un bien-aimé risquant de traduire une forme de snobisme et exprimant surtout en français la déférence et la distance sociale. Il est de fait que l’homme dont le poète est amoureux dans lesSonnets— qu’il se nommât Henry Wriothesley ou William Herbert, selon les conjectures les plus fréquentes — était un aristocrate, mais privilégier le vous » dans ces poèmes d’amour conduit, me semble-t-il, à renoncer à l’expression du sentiment d’intense attachement affectif dont ils témoignent. C’est assurément un choix discutable, mais je le revendique parce qu’il me semble un adjuvant précieux dans la recherche d’une proximité avec le lecteur …. Jean-Michel Déprats Extraits du texte de Jean-Michel Déprats Traduire les Sonnets » dans le volume Sonnets et autres poèmes qui vient de paraitre sous sa direction et celle de Gisèle Venet dans le Tome VIII des Oeuvres complètes de Shakespeare, Bibliothèque de la Pléiade Jean-Michel Déprats » et Rare portrait considéré comme authentique de William Shakespeare , vers 1610, attribué à John Taylor et dit le Chandos » pour avoir appartenu à Lord Chandos » photos Crédit
Ladistinction entre le tutoiement et le vouvoiement est un concept grammatical familier aux locuteurs de langues indo-européennes. Il s'agit d'une opposition entre deux deuxièmes personnes, le premier utilisé pour les proches, les pairs, les subalternes ou dans un registre de langue familier et le second pour les personnes auxquelles on doit un certain respect,
Cette séquence sur les Fleurs du Mal de Baudelaire a été réalisée par Christian FERRE, agrégé de lettres modernes, pour ses élèves de 1 ère L du Lycée Mistral à Avignon. Elle correspond à un travail effectué en début d’année et présente un apprentissage progressif de la lecture analytique et du commentaire littéraire Baudelaire Les Fleurs du Mal Problématique Comment l'évocation de la femme dans Les Fleurs du Mal révèle-t-elle des aspects essentiels du lyrisme de Baudelaire, notamment de son déchirement entre le spleen » et l' Idéal »? Objectifs Histoire littéraire. Genres et registres - Définir la poésie lyrique et approfondir l'étude du registre lyrique - Découvrir la singularité du lyrisme de Baudelaire à travers l'évocation de la femme dans les Fleurs du mal - Étudier l'architecture d'un recueil/livre de poèmes. Situer une oeuvre dans son contexte. Méthodologie - Mener l'étude d'un poème lyrique à l'aide des outils d'analyse appropriés - Consolider les savoirs techniques, versification et rhétorique figures de style, pour les mettre au service de la construction du sens ; - Consolider la méthodologie de la lecture analytique et du commentaire. Évaluations • Formative rédiger la présentation de Parfum exotique » • Sommative devoir type Bac preparation - Rédaction d'une réponse à une question portant sur un corpus de poèmes 1h La chevelure », Les Fleurs du mal Le serpent qui danse », Les Fleurs du mal Un hémisphère dans une chevelure », Le Spleen de Paris - Rédaction de l'introduction et d'un axe du commentaire du Serpent qui danse » l'éloge de la femme. Devoir sur table 2h. Durée 16 heures. 1Page 2 and 3 I. PLAN DE LA SEQUENCE Séance 1 Page 4 and 5 I - Découverte du poème - À prePage 6 and 7 d'autres sensations, olfactives et Page 8 and 9 contexte? - Qu'est-ce que la présePage 10 and 11 marques de la civilisation. - L'adjPage 12 and 13 poète s'adresse à cette femme avePage 14 and 15 Séance 4 L'Invitation au voyagPage 16 and 17 • En vertu de cette relation entrPage 18 and 19 Conclusion Le thème du voyage appPage 20 and 21 fusion avec la femme, comme la voloPage 22 and 23 Introduction Le sonnet est construiPage 24 and 25 Synthèse • Une beauté moderne iPage 26 and 27 Séance 7 Synthèse l'architectuPage 28 and 29 ville, la révolte contre Dieu et l
Un bon mental, une bonne philosophie de vie, un corps souple et fort pour mieux vivre sa vie - Une pédagogie des distances et de l'espace de l'autre. Annoncé dès l'automne 2005 dans la revue Drish 84 dans la rubrique "Prochains Drish", cet article est paru dans plusieurs numéros de ma revue de Yoga, du fait de l'importance et de l'étendue de ce sujet
1Le tatouage est le résultat d’une injection d’encre dans la peau produisant un motif indélébile et aussi, le plus souvent, le résultat d’une interaction entre un tatoueur et un tatoué. Les motivations qui président à cette modification corporelle permanente peuvent être esthétique, symbolique, identitaire, religieuse ou initiatique. Selon les époques et les endroits du monde, le sens conféré au tatouage varie. Le tatouage traditionnel japonais est négativement connoté car il servait de sanction aux criminels et mafieux Yakuza qui se sont appropriés cette pratique, devenue rite initiatique et symbole de fierté, pour se reconnaître. 2Le mot tatouage vient de tatau », frapper en polynésien le préfixe ta » signifie dessin inscrit dans la peau », et le mot atua », esprit. Traditionnellement réservé aux chefs et guerriers, le tatouage Polynésien a une origine divine tandis qu’en Orient et Occident, les religions du livre le condamnent. En 787, le Pape Adrien 1er interdit la pratique du tatouage et il faudra attendre que les voyageurs du XVIIIème, comme James Cook, les ramènent du bout du monde comme souvenir sur leur chair. Aujourd’hui présent dans les musées [1], les médias, sur le corps des célébrités, le tatouage touche de plus en plus de peaux et d’esprits Martin, 2016. 3Cette diffusion du tatouage entraîne l’essor d’un nouveau commerce. Le candidat au tatouage devient un client et le tatoueur un commerçant. Le montant de la transaction commerciale dont le tatouage est l’aboutissement peut varier selon les caractéristiques du dessin, des conditions de sa réalisation, de la réputation du tatoueur Rolle, 2012. 4Dans cette étude nous nous sommes intéressés aux particularités que présente le marché du tatouage comme consommation de l’art. De fait, une fois acheté, c’est-à -dire réalisé, le tatouage perd toute valeur pécuniaire. De plus, la relation client-commerçant construite autour du tatouage est tout à fait singulière c’est l’objet de la recherche ethnographique que nous avons menée dans cinq salons de tatouage franciliens. 5Pour mener cette enquête il nous a d’abord fallu justifier notre présence dans ces établissements réservés aux consommateurs de tatouage. La posture consistant à se présenter comme observateur fut peu concluante dans le premier salon car incomprise par les différents acteurs. Dans un autre salon nous avons souhaité interroger directement l’unique tatoueur au cours d’un entretien semi-directif sur son parcours, sa vision du tatouage, ses pratiques, sa clientèle, ses concurrents et collègues. Pour les trois autres salons nous avons profité de l’occasion d’accompagner des clients afin d’être au plus près d’une séance d’encrage. Nous avons ainsi adopté des méthodes de recherches qualitatives avec notamment la tenue d’un carnet de terrain contenant observations, descriptions, ébauches d’analyses et retranscriptions de paroles stratégies d’approches6Pour intégrer la communauté des tatoués, il faut trouver le professionnel qui aura la tâche d’encrer sa peau. Les demandeurs de tatouages utilisent différents critères de choix, comme la spécialisation du tatoueur, le prix, ou la renommée du salon. En effet, la norme est qu’un tatoueur, apprenti ou confirmé, exerce dans un lieu normalisé, déclaré en préfecture, et remplissant des conditions d’hygiène règlementaires. Ainsi, les prémices de la relation tatoueur-tatoué se font à l’entrée du l’organisation du salon. Répartition de l’espace7Nous avons pu systématiquement observer la présence d’au moins deux espaces, celui de l’accueil et celui de l’encrage, séparés par un comptoir permettant l’accueil des clients et l’exposition des books » [2]. Le comptoir est tenu par le propriétaire, un tatoueur, ou une personne embauchée spécifiquement, qui a le rôle essentiel d’assurer le premier contact avec le client. L’espace d’encrage est généralement dissimulé de la vue de tous pour respecter l’intimité des tatoués et la concentration des tatoueurs. Il comporte plusieurs postes de tatouage pour que plusieurs tatoueurs opèrent simultanément. Il peut exister un troisième espace, consacré à la rencontre entre le tatoueur et le futur tatoué qui négocient les modalités du projet. Les différents espaces sont pensés et décorés dans le but d’attirer le client, de le mettre à l’aise, mais aussi et surtout de donner une image à la fois professionnelle et montrer professionnels et rebelles8D’après Valérie Rolle 2013, les salons de tatouages choisissent leur décoration selon différentes logiques technicienne, propre et rangée en gage de sérieux ; créative, mettant en valeur les réalisations des tatoueurs ; anti-conventionnelle, mettant en exergue l’esprit rebelle de la pratique. Nos observations corroborent ces conclusions. L’un des salons observés, aux murs blancs et à la décoration épurée, affiche également les dessins des tatoueurs, suivant simultanément les logiques technicienne » et créatrice ». D’autres salons exposent des objets étranges, dignes d’un cabinet de curiosités. Les images provocantes et les motifs rebelles comme les têtes de morts, n’ont pas l’air d’étonner ou de mettre mal à l’aise les clients, puisque confirmant l’aspect rock n roll » du tatouage. La clientèle semblait néanmoins davantage diversifiée en termes d’âges et de catégorie sociale, dans un salon ayant adopté sobriété et neutralité ce que j’aime bien c’est que ça soit blanc épuré » témoignage tatoué. 9Les salons doivent faire attention à satisfaire tout le monde, ou du moins à ne heurter personne. Il apparaît important de donner aux clients à la fois une impression médicalisée » pour gagner leur confiance, tout en gardant l’aspect rebelle de l’expérience Rolle, 2013.Pour se vendre et vendre son artL’enjeu de la crédibilité10Dans le discours des employés des salons de tatouage, nous retrouvons la nécessité de faire figure d’expert » Rolle, 2013 en mettant en exergue la supposée incompétence des concurrents, dont on dit qu’ils font ce qu’ils ne devraient pas faire » comme des motifs impersonnels issus d’internet et qu’ils ne font pas ce qu’ils devraient » comme avoir des tatoueurs aux styles différents dans un même salon. 11Pour être respecté et respectable, l’un de nos tatoueurs souligne qu’un tatoueur doit être tatoué et de manière visible, sans quoi sa crédibilité sera mise en cause il sera soupçonné de n’avoir fait ni l’expérience de la douleur ni celle du regard social les gens devaient se dire ha c’est bizarre t’es tatoueur et t’as pas de tatouage’ » témoignage tatoueur. Par ailleurs, le tatoueur doit à la fois se montrer disponible pour accueillir des projets d’encrage élaborés, tout en montrant une activité importante, gage de qualité. Cet équilibre subtil entre disponibilité et non-disponibilité lui permet notamment de sélectionner sa clientèle en évitant par exemple de réaliser des street tattoo [3] ». En effet, les tatoueurs sont critiques d’une clientèle de non-sachants, consommant le tatouage par effet de mode sans en connaître la culture, l’histoire ou les implications C’est des gens qui ne connaissent rien au monde du tatouage, la plupart viennent sans projet et veulent juste avoir un tatouage, c’est juste un effet de mode » témoignage tatoueur.Véhiculer des valeurs de confiance voire de fidélité12Les échanges se mettent en place dès l’accueil, sur un ton amical et ponctué de plaisanteries, avec une automaticité du tutoiement. Un tatoueur nous explique que l’acte de tatouer est une pénétration dans l’intimité de la personne et que le projet du tatoué devient celui du tatoueur ce partage est matérialisé par le tutoiement. Nous avons constaté que les conversations dans les salons basculent souvent dans l’ordre de l’intime, soulignant la force du lien entre le tatoueur et son client et expliquant que certains clients reviennent régulièrement, jusqu’à développer une relation de fidélité. La confiance est ainsi au cœur de la relation tatoueur-tatoué, de la négociation du projet d’encrage à sa réalisation. Cette confiance devient une nécessité lorsque l’on considère l’asymétrie de la relation tatoueur-tatoué, l’un détenant soudainement un pouvoir sur le corps de l’autre Durão et Roman, 2001.Négociation et ritualité du tatouageLe projet de tatouage13Normes implicites interdits, refus, facteurs à prendre en compte 14Nous avons constaté l’existence de normes implicites, concernant notamment l’emplacement et la taille des tatouages, et plus particulièrement des premiers tatouages. Un tatoueur nous explique que les premiers tatouages devraient être cachés ». Un autre affirme qu’il est préférable que les premiers soient de petites pièces. D’une part, le tatoueur craint que le non-initié ne supporte pas la douleur les grosses pièces seront alors d’autant plus difficiles à terminer, comme nous avons pu le constater chez une de nos enquêtées ». D’autre part, le regard social qu’implique un tatouage visible peut déstabiliser lorsqu’il n’est pas anticipé certains tatoueurs sont réticents à endosser la responsabilité d’être les premiers à encrer une partie visible du corps. Enfin, la localisation des tatouages sur le corps apparaît tacitement réglementée certaines zones sont proscrites par les tatoueurs parties génitales, d’autres sont réservées » à une clientèle initiée » mains et crâne Les premiers tatouages devraient être cachés, ça devrait être comme ça, tu te fais pas tatouer direct sur le cou ou sur la tête. Après si tu vois que le mec a déjà plein de tatouages sur les bras et tout, ouais la tête ça peut être en continuité » témoignage tatoueur. 15Ces éléments confirment l’importance de la négociation des modalités d’encrage entre tatoueur et tatoué selon l’âge, l’appartenance socio-sexuelle et professionnelle Rolle, 2013 En principe je suis personne pour dire non, mais en fonction de l’âge, de ses antécédents dans le tatouage, est-ce qu’il en a déjà beaucoup ou pas du tout. Je pose souvent la question de leur travail, est-ce que ça va pas les gêner dans leur travail, il faut penser au regard des autres » témoignage tatoueur. 16D’après notre étude, d’autres facteurs sont également pris en compte comme la couleur, texture et apparence des et l’empreinte du tatoueur17La banalisation du tatouage fait apparaître des motifs-types, devenus des basiques ». Les tatoueurs critiquent ces anti-projets », qualifiés de copié-collétatoué », et renvoyés aux faux tatoueurs » Héas, 2013 mais aussi aux faux tatoués ». En effet, le tatouage conserve cet aspect de quête de marginalité et le risque de ces tatouages communs est de faire disparaître la convention tacite de refuser le conventionnel. Pour que les tatouages soient uniques, respectant ainsi les codes culturels et identitaires, les tatoueurs laissent leur empreinte dans la recherche d’originalité et le démarquage si c’est un truc que tu sors d’Internet on va vouloir te le modifier qu’il soit un peu plus original » témoignage tatoueur. Les books » permettent au client qui envisage un motif de se familiariser avec le style du tatoueur. 18Une fois le tatoueur choisi, un premier rendez-vous permet aux deux acteurs de parler du projet. C’est au rendez-vous suivant, celui de l’encrage, que le client découvre le dessin de ce que sera son futur tatouage, qui doit plaire au millimètre près le client doit exprimer exactement ce qui lui déplaît pour que le tatoueur puisse apporter les modifications nécessaires de l’emplacement, de la taille, ou du motif. 19Un tiers accompagne souvent le futur tatoué nous avons pu tenir ce rôle à trois reprises ; il donne son avis, aide le client à exprimer ses éventuels doutes et rassure. Le tatouage est donc le résultat d’une négociation entre le tatoueur, le client et un proche Lo Sardo, 2009.Implication de l’encrage. Gérer la posture et la douleur20Une fois les négociations terminées, le tatoueur positionne le stencil » [4] du tatouage sur la peau du client préalablement désinfectée et rasée si nécessaire. Tatoueur et tatoué doivent désormais négocier la posture qu’ils adopteront pendant l’encrage afin d’être confortables et d’éviter crampes ou gestes brusques. La douleur varie selon les individus, mais aussi selon les parties du corps. Le tatouage peut ainsi être considéré comme un acte masochiste où se côtoient douleur, plaisir, excitation et addiction Rioult, 2006 On les torture et ils aiment ça, et ils reviennent en plus » témoignage tatoueur. 21Si la douleur est trop intense, les réactions de la personne sont imprévisibles, dérangent et ralentissent le travail du tatoueur. Le tatoueur de l’une de nos observées qui gigotaient par souffrance l’avertit que son tatouage risquait de ne pas être symétrique si elle continuait. Des pauses permettent aux deux acteurs de se reconcentrer. Le tatoueur endosse ici de nombreuses responsabilités et un rôle d’apaisement du client pouvant faire émerger à leur relation intime un caractère thérapeutique Durão et Roman, 2001. à la fin, le tatoueur emballe le tatouage dans du papier cellophane que le tatoué devra enlever dans les heures qui suivront, et accompagne son client à l’accueil pour le faire régler et lui prescrire les soins à retouches et l’ancrage social quotidien22Un tatoueur nous explique que le tatouage représente l’intrusion d’un corps étranger dans la peau, et que l’encre aura tendance à dégorger dans les jours qui suivent l’encrage. Le client est ainsi amené à revenir pour faire les retouches nécessaires, incluses dans le prix. Ce service après-vente » renforce l’analogie avec une transaction commerciale. 23Le tatouage transforme d’abord le quotidien immédiat il faut hydrater régulièrement le tatouage pour permettre la cicatrisation Lo Sardo, 2009, qui provoque des démangeaisons qu’il faut contrôler. Le tatouage modifie ensuite le quotidien sur le long terme, il réajuste les choix vestimentaires à travers un jeu d’inhibition et d’exhibition selon le contexte social. Il transforme également les interactions sociales, à base de compliments ou de questionnements. Enfin, le tatouage est un rite de passage qui agrège l’individu à une nouvelle communauté Van Gennep, 1909 traduisant ainsi une volonté de devenir Autre » Je trouve vraiment que le fait d’être tatoué te fait appartenir à une autre communauté » témoignage tatoué. En outre, si le corps est l’interface entre soi et l’autre » Le Breton, 2010, le tatouer permet de se le réapproprier, de s’individualiser et d’influer sur l’image que peut avoir l’autre de soi Le Breton, 2006.Conclusion24Cette recherche ethnographique porte sur un échantillon limité et aurait gagné à être étendue à d’autres salons. Pour autant, il nous est apparu très vite difficile de justifier la présence d’observateurs dans un salon de tatouage on nous a, à plusieurs reprises, fait bien comprendre qu’il s’agissait d’une intrusion. Nous avons eu l’occasion de nous placer dans la position d’accompagnateur, plutôt que dans celle d’observateur. Ceci nous a permis d’approcher au plus près de la relation tatoueur-tatoué, et de mieux en saisir certaines spécificités qui nous auraient autrement échappé. Il résulte ainsi de cette recherche que la confiance est au cœur de la relation tatoueur-tatoué et permet la mise en place de négociations de l’ordre de l’intime chaque séance d’encrage laisse une trace dans le corps du tatoué, mais aussi dans celui du tatoueur. » Rolle, 2013 p. 97. lRemerciementsÀ Léo Tillard pour sa participation à cette étude, Marie Rose Moro pour m’avoir offert l’opportunité de publier ce travail, à Laelia Benoit pour ses conseils et encouragements. Notes [1] Exposition tatoueurs-tatoués » au musée du quai Branly Jacques Chirac en 2014-2015. [2] Les books sont des albums photos qui renferment les réalisations des tatoueurs. [3] Petites pièces faciles et impersonnelles sans délai de réalisation. [4] Pochoir en anglais, c’est un calque qui permet de transposer le dessin sur la peau afin que le tatoueur suive ces lignes au cours de l’encrage.
Bonjour Vous avez remarqué que dans TOUTE boutique de JV, style Micromania, Dock Games, Game, etc on se fait tutoyer par les vendeurs? C'est "obligatoire" chez eux? Style pour créer une
En reprenant les rites et les faces d’Erving Goffman, Catherine Kerbrat-Orecchioni 1992 s’intéresse aux relations interpersonnelles dans un échange. Elle suggère que lors d’une interaction et au-delà de la dimension informative, des liens se créent entre les participants. 77 En effet, parfois les échanges ont pour fonction d’établir le contact et de construire un type de relations entre les interactants. se ménager, s’accorder ou s’opposer, etc.. En s’appuyant sur les contraintes rituelles » d’Erving Goffman, Catherine Kerbrat-Orecchioni insiste sur les mots que nous utilisons dans la construction de la relation interpersonnelle. Nous remarquons ainsi, que la relation interpersonnelle évolue au cours de l’interaction et que les places ne sont jamais définitivement acquises Flahaut 1978, Vion 1992, Charaudeau et Maingueneau 2002. Proximité-éloignement et égalité-hiérarchie Dans un premier temps, intéressons-nous aux deux aspects de la relation. La relation horizontale correspond au niveau de proximité ou d’éloignement fixé par les interactants. La relation verticale représente la position et le statut égalitaire ou hiérarchique des participants au début et pendant l’interaction. Dans un second temps, repérons la variété des composants de la relation. Une interaction se déroule dans un cadre et les individus définissent la situation au début de l’échange. Pendant l’échange les individus peuvent négocier leur relation de départ en utilisant des unités linguistiques appelées relationèmes constitués de marqueurs verbaux, non-verbaux et para-verbaux. Nous retrouvons cette appoche avec les signes du lien » chez Erving Goffman 1973, et le rapport de places » ou indicateurs de place » chez Flahaut 1978. Habituellement, une interaction se déroule de la façon suivante. Au début de l’échange les interactants se positionnent à proximité ou à distance en fonction du type de lien entre eux statuts, qualités, compétences, en utilisant des relationèmes horizontaux non verbaux et para verbaux pour marquer ou non la distance physique gestes attouchements ou bras croisés, postures du corps face-à -face, côte-à -côte ou relâchement, regards dans les yeux ou ailleurs, mimiques clin d’œil, acquiescement, grimace ou froncer les sourcils, timbre de la voix doux ou fort, débit de paroles rapide ou lent. Les interactants appliquent des marqueurs verbaux pour fixer le type de relations termes d’adresse tutoiement ou vouvoiement, noms d’adresse diminutif, prénom, civilité ou titre honorifique, les thèmes abordés généraux ou intimes, le niveau de langue soutenu ou familier. Cette étape permet de repérer le rapport de force qui s’installe. Nous constatons parfois la présence d’un dominant en position haute et d’un dominé en position basse. Pour le dominé le jeu consiste à rétablir l’égalité. Nous nous situons ici dans la relation verticale et nous utilisons des 78 relationèmes verticaux appelés taxèmes en distinguant les taxèmes de position haute TPH et les taxèmes de position basse TPB. Pour identifier les caractéristiques d’un individu en position haute ou basse nous appliquons des marqueurs para-verbaux et non verbaux TPH uniforme, carrure, gestes d’affirmation, voix haute, etc., TPB absence de gestes ou gestes descendants, voix basse et hésitante, etc. et des marqueurs verbaux TPH langue native, vocabulaire élaboré et spécialisé, tutoiement direct sans négociation, temps long de parole, prise brutale de la parole ou sans autorisation, prise d’initiative de l’ouverture et de la clôture de l’échange, thèmes proposés, affirmation des opinions, etc., TPB langue étrangère, vocabulaire familier, vouvoiement unique ascendant, temps de parole écourté, difficulté à prendre la parole, thèmes imposés, etc.. Si nous suivons Fabienne Martin-Juchat 2005, nous interprétons ses taxemes à dimension affective » TPB tête penchée en avant, regards indirects, bouche semi-ouverte, bassin de profil, etc. ou des TPH menton légerement relevé, symétrie des épaules, bassin de face, bouche fermée, etc.. Parmi les marqueurs verbaux, nous notons l’importance des actes langagiers menaçants et d’autorité qui touchent le territoire de l’individu TPH interdiction, menace, sanction, ordre, suggestion, contestation, conseil, etc. et en TPB promesse, aveux, reconnaissance, excuse, rétractation, auto critique, pardon, remerciement, etc.. Un bémol cependant, Catherine Kerbrat-Orecchioni préfère parler d’une échelle taxémique » car les actes de langages en TPB et TPH doivent s’appréhender en fonction de la manière de les formuler adoucir un acte menaçant ou durcir un acte menaçant, etc. et du choix de renoncer à son statut de dominant ou de se rebeller contre son statut de dominé. Pour l’auteure, les individus coopèrent afin que l’interaction se déroule dans de bonnes conditions, mais pendant l’échange des tensions se produisent et l’affrontement est parfois recherché débat, jeu de questions/réponses.. Toutefois, c’est la dimension coopérative qui domine car les individus évitent les conflits trêves, pauses. Les territoires du moi Pour Erving Goffman, l’individu dispose de droits qui s’exercent sur un territoire, plus exactement dans un espace physique autour de lui, et les objets qui lui sont associés. Ce territoire est constitué de réserves et délimité au moyen de marqueurs. Toute incursion non autorisée dans ce territoire est considérée comme une violation, plus exactement une offense. Les réserves concernent l’espace physique dans lequel évolue l’acteur autour du corps, ses 79 possessions et objets placés à côté de lui accessoires sur le corps, l’enveloppe vêtement sur le corps, la place qui lui est réservé pour se maintenir position du corps, l’espace nécessaire à l’exercice d’une activité distance des autres par rapport au corps, l’ordre dans lequel il reçoit un objet place du corps par rapport aux autres, les faits et informations sur lui corps intime et secret et l’autorisation de conversation rapprochement des corps. Pour Michel Marcoccia 1998 il y aurait un territoire technique mais les contours restent flous et fortement dépendants de la dimension technique/outils limiter le poids des messages, etc.. Toutefois, cette dernière proposition retient notre attention car nous nous dirigeons vers un territoire numérique plus large et sur lequel l’outil occupera une place moins importante Doueihi, 2011. D’une manière générale, le rapport au territoire dépend de la dimension culturelle et sociale qui caractérise une communauté d’interactants. Ainsi, en France, la promiscuité est mal vécue et les individus protègent leur territoire en évitant les attouchements et les incursions dans l’espace intime rêves, secrets, fantasmes, etc.. L’acteur protège son territoire à l’aide de marqueurs comme les objets volontairement placés entre lui et les autres ou l’apposition de sa graphie, mais surtout grâce à l’usage d’indicateurs verbaux mots prononcés afin d’empêcher l’intrusion para verbaux et non verbaux gestes pour repousser, distance suffisante, regard fuyant, etc.. Les formules de politesse La politesse permet d’assurer des échanges harmonieux et équilibrés entre des individus partagés entre la défense de leurs intérêts et la prise en compte de ceux des autres L’ensemble des procédés conventionnels ayant pour fonction de préserver le caractère harmonieux de la relation interpersonnelle, en dépit des risques de friction qu’implique toute rencontre sociale » Kerbrat-Orecchioni 2005, p. 189. En règle générale, l’individu recherche le compromis, utilise des expressions indirectes et nuance son propos. Ce qu’Erving Goffman nomme opérations de réalignement » concernent les expressions édulcorées et nuancées qui permettent de ménager l’autre, ou les tentatives de modifier la situation et de rétablir l’égalité. Nous traitons ici des comportements que doit appliquer l’émetteur en présence du ou des récepteurs la modestie envers soi-même se rabaisser sans se déprécier ni se dévaloriser, le respect envers soi-même toujours conserver sa dignité, le respect des autres politesse, tact, déférence, tenue, réserve. Pour appréhender cette dimension essentielle de l’interactivité, Catherine Kerbrat-Orecchioni 1985 prend la suite de Pénélope Brown, Stéphen Levinson et d’Erving Goffman en proposant des ajustements. Le modèle de Pénélope Brown et Stéphen 80 Levinson 1987 s’appuie sur le territoire du moi » d’Erving Goffman 1973, les rituels positifs » contact avec l’objet sacré par les offrandes et sacrifices et les rituels négatifs » les tabous et interdits d’Emile Durkheim 1912. L’originalité du travail de Pénélope Brown et de Stephen Levinson est de proposer une double face la face positive » et la face négative » et d’affirmer que l’individu cherche, à préserver son image et celle des autres, ainsi que se protéger contre les intrusions sur son territoire. Il évite donc les empiétements sur celui des autres. Dans ce modèle, nous remarquons que les individus disposent d’une face positive qui représente une image valorisante de soi que nous tentons de montrer aux autres faire bonne figure et ne pas perdre la face et d’une face négative qui correspond aux territoires de l’individu possessions, espace intime, jardin secret, temps de parole, le corps et ce qui le prolonge, etc.. Dans une interaction entre deux individus les actes langagiers constituent des menaces pour les faces FTAs Face Threatening Acts. En effet, le locuteur est menacé sur sa face négative quand il s’engage, promet ou offre perte de territoire ou sur sa face positive quand il s’excuse, se soumet ou avoue dévalorisation, dépréciation, quant au récepteur, il est menacé sur sa face négative à la suite de violations de territoire incursions, intrusions, indiscrétions, empiétements ou sur sa face positive suite aux critiques, reproches, rejets, moqueries, injures, insultes qui représentent des atteintes narcissiques. Pour empêcher tout risque de dégradation ou de rupture dans l’échange, nous appliquons des règles de politesse qui visent à ne pas perdre la face ou faire perdre celle de l’autre. Catherine Kerbrat-Orecchioni estime que les deux chercheurs ont une vision négative de l’interaction, les individus seraient menacés en permanence et devraient se protéger. Elle propose d’intégrer les actes positifs qui ne constituent pas une menace pour les faces, mais au contraire une opportunité de valorisation qu’elle nomme FFAs Face Flattering Acts, en d’autres termes, des anti-FTA, des actes flatteurs pour les faces. L’auteure propose deux actes de politesse la politesse négative qui consiste à s’abstenir d’un acte menaçant et la politesse positive qui permet de produire des actes flatteurs. Catherine Kerbrat-Orecchioni reprend les softeners » de Pénélope Brown et Stéphen Levinson, les rites d’évitement », figuration par réparation » et figuration par évitement » chez Erving Goffman et nomme adoucisseurs les marqueurs verbaux, non verbaux et para verbaux de la politesse négative. Parmi les adoucisseurs de la politesse négative anti-menace nous repérons les procédés substitutifs qui permettent de substituer un élément de l’énoncé trop direct à l’aide d’un élément moins direct. C’est le cas de la formulation indirecte qui est préférable à l’impératif pour offrir au récepteur la possibilité de ne pas réagir sourde oreille, de la forme interrogative ou déclarative qui 81 permet de formuler un ordre par une question ou une assertion parabole, critique, reproche, promesse, incompréhension, etc., des formes grammaticales conditionnel, imparfait, futur de politesse, etc., des pronoms personnels iloiement, tutoiement-vouvoiement et des figures de style litote, euphémisme, ironie, trope communicationnel. Nous mettons en évidence les procédés accompagnateurs qui représentent les éléments qui complètent des énoncés directs et dont le rôle est d’atténuer un acte menaçant marqueurs d’hésitation, préliminaires, désarmeurs, minimisateurs, amadoueurs, modélisateurs. Concernant les marqueurs de la politesse positive, Catherine Kerbrat-Orecchioni propose une liste trop détaillée de FFAs. Nous citons les accords, les compliments, les invitations et remerciements, la modestie, mais nous retenons sa proposition d’échanges complimenteurs.
. 419 773 747 319 464 690 742 145
qu implique le tutoiement dans une relation