GARDEÀ VUE. La garde à vue est définie par l’article 62-2 du code de procédure pénale comme étant une "mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, par laquelle une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle
Conseil constitutionnel - 18 novembre 2011 - Décision N° 2011-191/194/195/196/197 QPC NOR CSCX1131381S / Procédure pénale – Audition libre - Garde à vue – Assistance d’un avocat – Audition – Limitation – Restrictions - Accès au dossier - Constitution Point de vue sur la garde à vue 1Il incombe au législateur d’assurer la conciliation entre, d’une part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d’autre part, l’exercice des droits et libertés constitutionnellement garantis ; qu’au nombre de ceux-ci figurent le respect des droits de la défense. 2Si le respect des droits de la défense impose, en principe, qu’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction ne peut être entendue, alors qu’elle est retenue contre sa volonté, sans bénéficier de l’assistance effective d’un avocat, cette exigence constitutionnelle n’impose pas une telle assistance dès lors que la personne soupçonnée ne fait l’objet d’aucune mesure de contrainte et consent à être entendue librement. 3Pour autant, elle ne peut continuer à être entendue librement par les enquêteurs que si elle a été informée de la nature et de la date de l’infraction qu’on la soupçonne d’avoir commise et de son droit de quitter à tout moment les locaux de police ou de gendarmerie. Sous cette réserve, les dispositions du second alinéa de l’article 62 du Code de procédure pénale ne méconnaissent pas les droits de la défense. 4La garde à vue est une mesure de contrainte nécessaire à certaines opérations de police judiciaire. Compte tenu des délais dans lesquels la garde à vue est encadrée, les dispositions de l’article 63-4-1 qui limitent l’accès de l’avocat aux seules pièces relatives à la procédure de garde à vue et aux auditions antérieures de la personne gardée à vue assurent, entre le respect des droits de la défense et l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée. 5Les dispositions contestées n’ont pas pour objet de permettre la discussion de la légalité des actes d’enquête ou du bien-fondé des éléments de preuve rassemblés par les enquêteurs, qui n’ont pas donné lieu à une décision de poursuite de l’autorité judiciaire et qui ont vocation, le cas échéant, à être discutés devant les juridictions d’instruction ou de jugement. 6Elles n’ont pas davantage pour objet de permettre la discussion du bien-fondé de la mesure de garde à vue enfermée par la loi dans un délai de vingt-quatre heures renouvelable une fois. 7Les griefs tirés de ce que les dispositions contestées relatives à la garde à vue n’assureraient pas l’équilibre des droits des parties et le caractère contradictoire de cette phase de la procédure pénale sont inopérants. Le Conseil constitutionnel a été saisi le 23 août 2011 par le Conseil d’État décision n° 349752 du 23 août 2011, dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par Mmes Élise A., Alexandra B. et Véronica C., MM. Benjamin C., Fabrice E. Grégoire É. et Mathieu H., Mme Julia K., MM. Pierre R. et Martin R., Mme Peggy S. et M. Georges S., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 62 et 63-4-1 à 63-4-5 du Code de procédure pénale n° 2011-191 QPC.Il a également été saisi le 9 septembre 2011 par la Cour de cassation chambre criminelle, arrêts nos 4684 à 4687 du 6 septembre 2011 dans les mêmes conditions d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Jean-François M. relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du deuxième alinéa de l’article 62 du Code de procédure pénale ainsi que de ses articles 63-4-1 à 63-4-5 du même Code n° 2011-194 QPC ;de deux questions prioritaires de constitutionnalité posées par MM. Undriks K. et Mabrouk T., relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du troisième alinéa de l’article 63-3-1 du Code de procédure pénale, du deuxième alinéa de son article 63-4 et de ses articles 63-4-1 à 63-4-3 n° 2011-195 QPC et n° 2011 196 QPC ;d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par MM. Mohamed A. et Khalifa Z., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 63-4-1 du Code de procédure pénale n° 2011-197 QPC.Le Conseil constitutionnel,…1. Considérant qu’il y a lieu de joindre ces questions prioritaires de constitutionnalité pour statuer par une seule décision ;2. Considérant qu’aux termes de l’article 62 du Code de procédure pénale Les personnes à l’encontre desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction ne peuvent être retenues que le temps strictement nécessaire à leur audition, sans que cette durée ne puisse excéder quatre heures. S’il apparaît, au cours de l’audition de la personne, qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, elle ne peut être maintenue sous la contrainte à la disposition des enquêteurs que sous le régime de la garde à vue. Son placement en garde à vue lui est alors notifié dans les conditions prévues à l’article 63 » ;3. Considérant que l’article 63-3-1 du même Code est relatif au droit d’une personne gardée à vue d’être assistée par un avocat ; qu’aux termes du troisième alinéa de cet article L’avocat peut également être désigné par la ou les personnes prévenues en application du premier alinéa de l’article 63-2. Cette désignation doit toutefois être confirmée par la personne » ;4. Considérant que l’article 63-4 du même Code est relatif à l’entretien de la personne gardée à vue avec son avocat ; qu’aux termes du deuxième alinéa de cet article La durée de l’entretien ne peut excéder trente minutes » ;5. Considérant qu’aux termes de son article 63-4-1 À sa demande, l’avocat peut consulter le procès-verbal établi en application du dernier alinéa de l’article 63-1 constatant la notification du placement en garde à vue et des droits y étant attachés, le certificat médical établi en application de l’article 63-3, ainsi que les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste. Il ne peut en demander ou en réaliser une copie. Il peut toutefois prendre des notes » ;6. Considérant qu’aux termes de son article 63-4-2 La personne gardée à vue peut demander que l’avocat assiste à ses auditions et confrontations. Dans ce cas, la première audition, sauf si elle porte uniquement sur les éléments d’identité, ne peut débuter sans la présence de l’avocat choisi ou commis d’office avant l’expiration d’un délai de deux heures suivant l’avis adressé dans les conditions prévues à l’article 63-3-1 de la demande formulée par la personne gardée à vue d’être assistée par un avocat. Au cours des auditions ou confrontations, l’avocat peut prendre des notes. Si l’avocat se présente après l’expiration du délai prévu au premier alinéa alors qu’une audition ou une confrontation est en cours, celle-ci est interrompue à la demande de la personne gardée à vue afin de lui permettre de s’entretenir avec son avocat dans les conditions prévues à l’article 63-4 et que celui-ci prenne connaissance des documents prévus à l’article 63-4-1. Si la personne gardée à vue ne demande pas à s’entretenir avec son avocat, celui-ci peut assister à l’audition en cours dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire ou à la confrontation. Lorsque les nécessités de l’enquête exigent une audition immédiate de la personne, le procureur de la République peut autoriser, par décision écrite et motivée, sur demande de l’officier de police judiciaire, que l’audition débute sans attendre l’expiration du délai prévu au premier alinéa. À titre exceptionnel, sur demande de l’officier de police judiciaire, le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention, selon les distinctions prévues par l’alinéa suivant, peut autoriser, par décision écrite et motivée, le report de présence de l’avocat lors des auditions ou confrontations, si cette mesure apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête, soit pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes. Le procureur de la République ne peut différer la présence de l’avocat que pendant une durée maximale de douze heures. Lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, le juge des libertés et de la détention peut, sur requête du procureur de la République, autoriser à différer la présence de l’avocat, au-delà de la douzième heure, jusqu’à la vingt-quatrième heure. Les autorisations du procureur de la République et du juge des libertés et de la détention sont écrites et motivées par référence aux conditions prévues à l’alinéa précédent au regard des éléments précis et circonstanciés résultant des faits de l’espèce. Lorsque, conformément aux dispositions des deux alinéas qui précèdent, le procureur de la République ou le juge des libertés et de la détention a autorisé à différer la présence de l’avocat lors des auditions ou confrontations, il peut également, dans les conditions et selon les modalités prévues par ces mêmes alinéas, décider que l’avocat ne peut, pour une durée identique, consulter les procès-verbaux d’audition de la personne gardée à vue » ;7. Considérant qu’aux termes de son article 63-4-3 L’audition ou la confrontation est menée sous la direction de l’officier ou de l’agent de police judiciaire qui peut à tout moment, en cas de difficulté, y mettre un terme et en aviser immédiatement le procureur de la République qui informe, s’il y a lieu, le bâtonnier aux fins de désignation d’un autre avocat. À l’issue de chaque audition ou confrontation à laquelle il assiste, l’avocat peut poser des questions. L’officier ou l’agent de police judiciaire ne peut s’opposer aux questions que si celles-ci sont de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête. Mention de ce refus est portée au procès-verbal. À l’issue de chaque entretien avec la personne gardée à vue et de chaque audition ou confrontation à laquelle il a assisté, l’avocat peut présenter des observations écrites dans lesquelles il peut consigner les questions refusées en application du deuxième alinéa. Celles-ci sont jointes à la procédure. L’avocat peut adresser ses observations, ou copie de celles-ci, au procureur de la République pendant la durée de la garde à vue » ;8. Considérant qu’aux termes de son article 63-4-4 Sans préjudice de l’exercice des droits de la défense, l’avocat ne peut faire état auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue ni des entretiens avec la personne qu’il assiste, ni des informations qu’il a recueillies en consultant les procès-verbaux et en assistant aux auditions et aux confrontations » ;9. Considérant qu’aux termes de son article 63-4-5 Si la victime est confrontée avec une personne gardée à vue, elle peut demander à être également assistée par un avocat choisi par elle ou par son représentant légal si elle est mineure ou, à sa demande, désigné par le bâtonnier. La victime est informée de ce droit avant qu’il soit procédé à la confrontation. À sa demande, l’avocat peut consulter les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste. L’article 63-4-3 est applicable » ;10. Considérant que les requérants soutiennent que ces dispositions méconnaissent les droits de la défense, le droit à une procédure juste et équitable garantissant l’équilibre des droits des parties, le principe de rigueur nécessaire des mesures de contrainte mises en œuvre au cours de la procédure pénale, ainsi que la compétence de l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle ; qu’ils critiquent, d’une part, les dispositions de l’article 62 du Code de procédure pénale en tant qu’elles permettent l’audition sans avocat d’une personne suspectée qui n’a pas été placée en garde à vue et, d’autre part, les dispositions relatives aux conditions dans lesquelles une personne gardée à vue est assistée par un avocat ;Sur les normes de constitutionnalité applicables 11. Considérant qu’aux termes de l’article 7 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l’instant il se rend coupable par la résistance » ; qu’aux termes de son article 9 Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi » ; que son article 16 dispose Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ;12. Considérant qu’en vertu de l’article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant la procédure pénale ; qu’aux termes de son article 66 Nul ne peut être arbitrairement détenu. – L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi » ;13. Considérant que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution l’obligation de fixer lui-même le champ d’application de la loi pénale ; que, s’agissant de la procédure pénale, cette exigence s’impose notamment pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d’infractions ;14. Considérant, en outre, qu’il incombe au législateur d’assurer la conciliation entre, d’une part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d’autre part, l’exercice des droits et libertés constitutionnellement garantis ; qu’au nombre de ceux-ci figurent le respect des droits de la défense, qui découle de l’article 16 de la Déclaration de 1789, et la liberté individuelle que l’article 66 de la Constitution place sous la protection de l’autorité judiciaire ;Sur l’article 62 du Code de procédure pénale 15. Considérant que les requérants font valoir qu’en faisant dépendre le droit à l’assistance d’un avocat de l’existence d’une mesure de contrainte et non de la suspicion qui pèse sur la personne interrogée, l’article 62 du Code de procédure pénale permet qu’une personne suspectée soit interrogée sans bénéficier de l’assistance d’un avocat ; que, par suite, il méconnaîtrait le respect des droits de la défense ;16. Considérant que le premier alinéa de l’article 62 limite à une durée maximale de quatre heures la possibilité de retenir, pour qu’elles soient entendues, les personnes à l’encontre desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction ; qu’il est applicable aux seuls témoins et, par suite, ne méconnaît pas les droits de la défense ;17. Considérant que le second alinéa de cet article prévoit que s’il apparaît, au cours de l’audition de la personne, qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, elle ne peut être maintenue sous la contrainte à la disposition des enquêteurs pour être entendue que sous le régime de la garde à vue ;18. Considérant qu’il résulte nécessairement de ces dispositions qu’une personne à l’encontre de laquelle il apparaît qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction peut être entendue par les enquêteurs en dehors du régime de la garde à vue dès lors qu’elle n’est pas maintenue à leur disposition sous la contrainte ;19. Considérant que, si le respect des droits de la défense impose, en principe, qu’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction ne peut être entendue, alors qu’elle est retenue contre sa volonté, sans bénéficier de l’assistance effective d’un avocat, cette exigence constitutionnelle n’impose pas une telle assistance dès lors que la personne soupçonnée ne fait l’objet d’aucune mesure de contrainte et consent à être entendue librement ;20. Considérant que, toutefois, le respect des droits de la défense exige qu’une personne à l’encontre de laquelle il apparaît, avant son audition ou au cours de celle-ci, qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction pour laquelle elle pourrait être placée en garde à vue, ne puisse être entendue ou continuer à être entendue librement par les enquêteurs que si elle a été informéede la nature et de la date de l’infraction qu’on la soupçonne d’avoir commise et de son droit de quitter à tout moment les locaux de police ou de gendarmerie ; que, sous cette réserve applicable aux auditions réalisées postérieurement à la publication de la présente décision, les dispositions du second alinéa de l’article 62 du Code de procédure pénale ne méconnaissent pas les droits de la défense ;21. Considérant que les dispositions de l’article 62 du Code de procédure pénale ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ;Sur les dispositions relatives à la garde à vue 22. Considérant que les requérants font valoir que les restrictions apportées à l’assistance par un avocat de la personne gardée à vue ou de la victime méconnaissent le respect des droits de la défense, le droit à une procédure juste et équitable et le principe du contradictoire ; qu’ils dénoncent, en particulier, l’absence de droit pour l’avocat de consulter les pièces de la procédure avant l’audition ou la confrontation et d’en obtenir la copie, la possibilité laissée aux enquêteurs de commencer l’audition de la personne gardée à vue sans que l’avocat ait eu le temps de se rendre dans les locaux de la police ou de la gendarmerie, la limitation à trente minutes de l’entretien de la personne gardée à vue avec l’avocat, la restriction de l’assistance de l’avocat pour les seuls actes d’audition et de confrontation, ainsi que l’exclusion de cette assistance au cours des autres actes d’investigation, telles les perquisitions ;23. Considérant que les requérants mettent également en cause le pouvoir reconnu à l’officier de police judiciaire, d’une part, de s’opposer aux questions posées par l’avocat au cours de l’audition de la personne gardée à vue et, d’autre part, de décider de mettre fin à une audition ou une confrontation, en cas de difficulté, pour demander au procureur de la République de saisir le bâtonnier aux fins de désignation d’un autre avocat ;24. Considérant que l’association intervenante fait valoir, en outre, que la faculté donnée au procureur de la République ou au juge des libertés et de la détention de reporter la présence de l’avocat lors des auditions ou confrontations porte atteinte aux droits de la défense ;25. Considérant qu’à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, la loi du 14 avril 2011 susvisée a eu pour objet de remédier à l’inconstitutionnalité des dispositions du Code de procédure pénale relatives à la garde à vue ; qu’à cette fin, notamment, l’article préliminaire du Code de procédure pénale a été complété par un alinéa aux termes duquel En matière criminelle et correctionnelle, aucune condamnation ne peut être prononcée contre une personne sur le seul fondement de déclarations qu’elle a faites sans avoir pu s’entretenir avec un avocat et être assistée par lui » ; que l’article 63-1 dispose que la personne placée en garde à vue est immédiatement informée de son droit lors des auditions, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire » ; que l’article 63-4-2 prévoit que la personne gardée à vue peut demander que l’avocat assiste à ses auditions et confrontations et organise les conditions de cette assistance ;26. Considérant, en premier lieu, que le troisième alinéa de l’article 63-3-1 prévoit que, lorsque l’avocat de la personne gardée à vue est désigné par la personne prévenue en application de l’article 63-2, la personne gardée à vue doit confirmer cette désignation ; que cette disposition, qui tend à garantir la liberté de la personne gardée à vue de choisir son avocat, ne méconnaît aucun droit ou liberté que la Constitution garantit ;27. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions de l’article 63-4-1 prévoient que l’avocat de la personne gardée à vue ne peut consulter que le procès-verbal de placement en garde à vue et de notification des droits établi en application de l’article 63-1, le certificat médical établi en application de l’article 63-3 et les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il assiste ;28. Considérant, d’une part, qu’en vertu de l’article 14 du Code de procédure pénale, la police judiciaire est chargée de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs » ; que la garde à vue est une mesure de contrainte nécessaire à certaines opérations de police judiciaire ; que, comme le Conseil constitutionnel l’a jugé dans sa décision du 30 juillet 2010 susvisée, les évolutions de la procédure pénale qui ont renforcé l’importance de la phase d’enquête policière dans la Constitution des éléments sur le fondement desquels une personne mise en cause est jugée doivent être accompagnées des garanties appropriées encadrant le recours à la garde à vue ainsi que son déroulement et assurant la protection des droits de la défense ; que les dispositions contestées n’ont pas pour objet de permettre la discussion de la légalité des actes d’enquête ou du bien-fondé des éléments de preuve rassemblés par les enquêteurs, qui n’ont pas donné lieu à une décision de poursuite de l’autorité judiciaire et qui ont vocation, le cas échéant, à être discutés devant les juridictions d’instruction ou de jugement ; qu’elles n’ont pas davantage pour objet de permettre la discussion du bien-fondé de la mesure de garde à vue enfermée par la loi dans un délai de vingt-quatre heures renouvelable une fois ; que, par suite, les griefs tirés de ce que les dispositions contestées relatives à la garde à vue n’assureraient pas l’équilibre des droits des parties et le caractère contradictoire de cette phase de la procédure pénale sont inopérants ;29. Considérant, d’autre part, que le 2° de l’article 63-1 dispose que la personne gardée à vue est immédiatement informée de la nature et de la date présumée de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ; que, compte tenu des délais dans lesquels la garde à vue est encadrée, les dispositions de l’article 63-4-1 qui limitent l’accès de l’avocat aux seules pièces relatives à la procédure de garde à vue et aux auditions antérieures de la personne gardée à vue assurent, entre le respect des droits de la défense et l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée ; que, par suite, l’article 63-4-1 n’est contraire à aucun droit ou liberté que la Constitution garantit ;30. Considérant, en troisième lieu, qu’en prévoyant que la personne gardée à vue peut s’entretenir avec son avocat pendant trente minutes, qu’elle peut demander que l’avocat assiste à ses auditions et confrontations et que la première audition de la personne gardée à vue ne peut avoir lieu moins de deux heures après que l’avocat a été avisé, le deuxième alinéa de l’article 63-4 et l’article 63-4-2 instituent des garanties de nature à assurer que la personne gardée à vue bénéficie de l’assistance effective d’un avocat ; qu’il appartient en tout état de cause à l’autorité judiciaire de veiller au respect du principe de loyauté dans l’administration de la preuve et d’apprécier la valeur probante des déclarations faites, le cas échéant, par une personne gardée à vue hors la présence de son avocat ; que, par suite, en n’imposant pas un délai avant chacune des éventuelles auditions suivantes de la personne gardée à vue et en permettant que, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République, l’audition puisse commencer avant l’expiration du délai de deux heures lorsque les nécessités de l’enquête exigent une audition immédiate de la personne, le législateur a assuré, entre le droit de la personne gardée à vue à bénéficier de l’assistance d’un avocat et l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée ;31. Considérant, en quatrième lieu, que les trois derniers alinéas de l’article 63-4-2 permettent le report de la présence de l’avocat lors des auditions ou confrontations ainsi que celui de la consultation des procès-verbaux d’audition de la personne gardée à vue ; que ces dispositions n’ont pas pour effet de permettre le report de l’entretien de trente minutes de l’avocat avec la personne gardée à vue ; qu’un tel report n’est possible que sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République, pour une durée de douze heures ; que cette durée peut être portée à vingt-quatre heures sur autorisation du juge des libertés et de la détention, lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans ; que la possibilité d’un tel report n’est prévue qu’à titre exceptionnel, lorsque cette mesure apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête, soit pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes ; que la restriction ainsi apportée au principe selon lequel la personne gardée à vue ne peut être entendue sans avoir pu bénéficier de l’assistance effective d’un avocat est placée sous le contrôle des juridictions pénales saisies des poursuites ; que, par suite, eu égard aux cas et aux conditions dans lesquelles elle peut être mise en œuvre, la faculté d’un tel report assure, entre le respect des droits de la défense et l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée ;32. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les dispositions du deuxième alinéa de l’article 63-4 et celles de l’article 63-4-2 ne méconnaissent ni le respect des droits de la défense ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ;33. Considérant, en cinquième lieu, que le premier alinéa de l’article 63-4-3 dispose que l’audition ou la confrontation est menée sous la direction de l’officier ou de l’agent de police judiciaire et prévoit que ce dernier peut à tout moment, en cas de difficulté, y mettre un terme et en aviser le procureur de la République qui informe, s’il y a lieu, le bâtonnier aux fins de désignation d’un autre avocat ;34. Considérant, que le deuxième alinéa de cet article prévoit que l’avocat peut poser des questions à l’issue de chaque audition ou confrontation et que l’officier ou l’agent de police judiciaire ne peut s’opposer aux questions que si celles-ci sont de nature à nuire au bon déroulement de l’enquête ; que son dernier alinéa permet à l’avocat de présenter des observations écrites dans lesquelles il peut consigner les questions refusées ; que l’avocat peut également adresser ses observations écrites directement au procureur de la République pendant la durée de la garde à vue ;35. Considérant que ces dispositions ne méconnaissent ni les droits de la défense ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ;36. Considérant, en sixième lieu, que l’article 63-4-4 soumet l’avocat au secret de l’enquête en lui interdisant de faire état auprès de quiconque pendant la durée de la garde à vue des entretiens avec la personne qu’il assiste et des informations qu’il a recueillies en consultant les procès-verbaux et en assistant aux auditions et aux confrontations ; qu’il ressort des termes mêmes de cet article que cette interdiction s’applique sans préjudice de l’exercice des droits de la défense » ; qu’elle ne saurait, par suite, porter atteinte à ces droits ; que cet article n’est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ;37. Considérant, en septième lieu, que l’article 63-4-5 reconnaît également à la victime confrontée avec une personne gardée à vue le droit de demander à être assistée par un avocat ; qu’il n’est contraire à aucun droit ou liberté que la Constitution garantit ;38. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le second alinéa de l’article 62 du Code de procédure pénale doit être déclaré conforme à la Constitution sous la réserve énoncée au considérant 20 ; que les autres dispositions contestées doivent être déclarées conformes à la Constitution,Décide Article 1er. – Sous la réserve énoncée au considérant 20, le second alinéa de l’article 62 du Code de procédure pénale est conforme à la 2. – Le premier alinéa de l’article 62 du Code de procédure pénale, le troisième alinéa de son article 63-3-1, le deuxième alinéa de son article 63 4 et ses articles 63-4-1 à 63-4-5 sont conformes à la Constitution.…Sièg. M. Jean-Louis Debré, Président, M. Jacques Barrot, Mme Claire Bazy Malaurie, MM. Guy Canivet, Michel Charasse, Renaud Denoix de Saint Marc, Mme Jacqueline de Guillenchmidt, MM. Hubert Haenel et Pierre Mes G. Étrillard, M. Cessieux L. Marchand, E. Molin, P. Spinosi, B. Sayn, D. Ligier, avocats Cour d’appel d’Agen - 24 octobre 2011 - N°11/00403 extrait / Procédure pénale – Garde à vue – Avocat – Accès au dossier – Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales CESDH Un autre point de vue 8La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, telle qu’interprétée par la Cour européenne des droits de l’Homme, peut être invoquée directement devant les tribunaux et prime les lois nationales contraires 9L’article 6 § 3 de la CSEDH relatif au droit à un procès équitable implique que toute personne gardée à vue puisse bénéficier de l’assistance effective d’un avocat tout au long de cette mesure L’effectivité de l’assistance de l’avocat du gardé à vue passe nécessairement par l’accès à l’entier dossier de la procédure, afin que l’avocat puisse pleinement remplir le rôle essentiel qui lui est reconnu par la Cour EDH pour garantir un procès équitable, dans le respect du principe d’égalité des armes, et notamment organiser la défense et préparer les interrogatoires. 10X./ministère public, parties civiles Résumé Le tribunal de grande instance d’Agen a déclaré M. X. coupable de dégradation ou détérioration volontaire du bien d’autrui ; violence suivie d’incapacité n’excédant pas 8 jours par conjoint ; recel de bien provenant d’un vol, en état de récidive légale ; refus, par le conducteur d’un véhicule, d’obtempérer a une sommation de s’arrêter ; destruction d’un bien appartenant a autrui ; conduite d’un véhicule à une vitesse excessive ; inobservation, par conducteur, de l’arrêt absolu impose par le panneau stop » ; circulation de véhicule en sens interdit ; conduite sans port de la ceinture de sécurité et l’a condamné à deux ans d’emprisonnement dont un an avec sursis mise à l’épreuve pendant trois ans et à diverses amendes et décerné mandat de dépôt à son encontre. Il a également déclaré recevables les demandes des parties tribunal a rejeté l’exception de nullité invoquées par X. selon laquelle son avocat n’avait pas obtenu communication de l’entier malgré sa et le parquet ont interjeté appel du appel, X. réitère notamment l’exception de nullité invoquée en première instance, destinée à annuler les procès-verbaux établi lors de l’audition alors que son avocat réclamait en vain la communication de l’ensemble du dossier. L’audition de X. a eu lieu après l’’entrée en vigueur de la loi n° 2011-392 du 14 avril de l’arrêtSur l’exception de nullité de la garde à vueAux termes de l’article 63-4 du Code de procédure pénale dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011, l’avocat peut consulter le procès-verbal établi en application du dernier alinéa de l’article 63-l concernant la notification du placement en garde à vue et les droits y étant attachés, le certificat médical établi en application de l’article 63-3 ainsi que les procès-verbaux d’audition de la personne qu’il n’est pas discuté que ces dispositions légales ont été respectées lors de la garde à vue de X..Cependant, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, telle qu’interprétée par la Cour EDH, peut être invoquée directement devant les tribunaux et prime les lois nationales en est ainsi de l’article 6 § 3 de la CESDH relatif au droit à un procès équitable qui implique que toute personne gardée à vue puisse bénéficier de l’assistance effective d’un avocat tout au long de cette mesure ; or, selon la Cour EDH arrêt du 13 octobre 2009 Danayan/Turquie, statuant à propos de la garde à vue, l’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil ; à cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer ».En conséquence, l’effectivité de l’assistance de l’avocat du gardé à vue passe nécessairement par l’accès à l’entier dossier de la procédure, afin que l’avocat puisse pleinement remplir le rôle essentiel qui lui est reconnu par la Cour EDH pour garantir un procès équitable, dans le respect du principe d’égalité des armes, et notamment organiser la défense et préparer les en référence avec la motivation des premiers juges qui se sont livrés à une exégèse très complète, quoiqu’orientée, de la jurisprudence de la Cour EDH et de la Cour de cassation mais aussi de jurisprudence étrangère comme celle du Canada. la Cour estime utile de souligner que de façon à mettre enfin sa législation en matière de garde à vue en conformité avec la norme supranationale, la France pourrait s’inspirer utilement de législation de pays voisins telle celle de la Principauté d’Andorre dont le Président de la République est le coprince qui prévoit, depuis 1998, en particulier l’information de la personne gardée à vue de son droit au silence, à ne pas s’incriminer, à faire ajouter à ses déclarations les modifications ou éclaircissements qu’il croit nécessaires, le droit d’être assisté d’un avocat dès le début de la garde à vue depuis 2010 qui peut accéder au dossier, assister aux interrogatoires, intervenir durant ceux-ci pour demander aux enquêteurs de poser des questions sur les points qu’il sollicite, formuler des observations, sans que ceci nuise à l’efficacité des garde à vue à laquelle a été soumis M. X. ne respectant pas les dispositions de l’article 6 § 3 de la CSDEH, le procès-verbal n° 9 feuillets I à 16 de la procédure n°00694/20 11 doit donc être annulé et le jugement entrepris infirmé en ce qu’il a rejeté l’exception de nullité. Toutefois, la nullité de la garde à vue n’affecte pas les plaintes de S. ainsi que les témoignages de C. et de A. situés en amont et en aval, indépendants de cette dernière, et les actes subséquents qui n’ont pas eu pour support nécessaire la mesure annulée.…Par ces motifs …Sur les exceptions de nullité…Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté l’exception de nullité tirée de la méconnaissance de l’article 6 § 3 c de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ;…Prés. M. Richiari, présidentSièg. MM. Belmas et Sarrau, conseillersAv. gén. Mme Carbonnier, avocat Me Morisset, Le procureur général a formé pourvoi en cassation contre l’arrêt. Lors de l’audience pourtant, l’avocat général avait adhéré à l’exception de nullité soulevée par l’avocat. Commentaire des deux décisions par Jean-Luc Rongé De la manière de s’accorder sur le violon 11Pour la première fois depuis l’adoption de la loi du loi du 14 avril 2011 [1] relative à la garde à vue, le Conseil constitutionnel a eu à se prononcer sur quelques aspects des nouvelles règles, répondant à quelques questions prioritaires de constitutionnalité QPC posées par le Conseil d’État et par plusieurs juridictions relayées par la Cour de cassation, selon le parcours prévu par le constituant [2]. 12Le Conseil constitutionnel demeurant constant dans son habitude de réserver l’examen de conformité des lois à la seule Constitution et faisant semblant d’ignorer les normes internationales supérieures, l’interrogation du praticien sur le respect des principes des droits de la défense et du procès équitable demeurera jusqu’à ce que la Cour de cassation se prononce sur la conventionnalité » de la loi nouvelle et, éventuellement, jusqu’à ce que la Cour européenne des droits de l’Homme ait à trancher entre l’interprétation constitutionnelle » et l’interprétation conventionnelle ». 13Rappelons que dans un arrêt rendu le même jour que la publication de la loi nouvelle au Journal officiel, la Cour de cassation [3] a déclaré que non seulement les dispositions de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales devaient trouver à s’appliquer immédiatement – ce qui créa un embarras certain pour l’entrée en vigueur d’une loi fixée au 1er juin – mais également que les États adhérents à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, sans attendre d’être attaqués devant elle ni d’avoir modifié leur législation ». Ce que fit la Cour d’appel d’Agen par son arrêt du 14 octobre 2011 ci-dessus reproduit. Et comme le parquet général a décidé de se pourvoir, on connaîtra dans les prochains mois la position de la Cour de cassation sur la question essentielle de l’accès au dossier par l’avocat durant la garde à vue. 14Deux séries de questions étaient posées au Conseil constitutionnel l’assistance d’un avocat n’étant réservée qu’à la personne sous la contrainte de la garde à vue, la disposition prévoyant l’audition libre » d’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction est-elle conforme à la Constitution dans la mesure où elle ne prévoit pas qu’elle puisse être assisté d’un avocat ? I ;la seconde partie des questions portait sur les conditions d’exercice de la défense pendant la garde à vue. Les demandeurs d’une QPC dénonçaient l’absence de droit pour l’avocat de consulter les pièces de la procédure avant l’audition ou la confrontation et d’en obtenir la copie, la possibilité laissée aux enquêteurs de commencer l’audition de la personne gardée à vue sans que l’avocat ait eu le temps de se rendre dans les locaux de la police ou de la gendarmerie, la limitation à trente minutes de l’entretien de la personne gardée à vue avec l’avocat, la restriction de l’assistance de l’avocat pour les seuls actes d’audition et de confrontation, ainsi que l’exclusion de cette assistance au cours des autres actes d’investigation, telles les perquisitions II. I – L’audition libre »15Dans le souci de réduire le nombre effrayant de gardes à vue – on en compta jusqu’à 800 000 sur une année – le législateur a prévu de désormais limiter cette mesure à une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement », pour autant que cette privation de liberté constitue l’unique moyen de parvenir à l’un au moins des objectifs suivants Permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ;Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ;Empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou leurs proches ;Empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ;Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit » [4].Autrement, les personnes à l’encontre desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction ne peuvent être retenues que le temps strictement nécessaire à leur audition, sans que cette durée ne puisse excéder quatre heures. 16S’il apparaît, au cours de l’audition de la personne, qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, elle ne peut être maintenue sous la contrainte à la disposition des enquêteurs que sous le régime de la garde à vue. Son placement en garde à vue lui est alors notifié dans les conditions prévues à l’article 63 » [5]. 17Sur le plan légal, le Conseil constitutionnel avait à trancher une contradiction entre les termes ajoutés par la loi nouvelle au titre préliminaire du Code de procédure pénale CPP En matière criminelle et correctionnelle, aucune condamnation ne peut être prononcée contre une personne sur le seul fondement de déclarations qu’elle a faites sans avoir pu s’entretenir avec un avocat et être assistée par lui » et les dispositions précitées particulières relatives à l’audition selon lesquelles seule la personne soupçonnée et placée en garde à vue selon le régime prévu aux articles 63 et suivants du CPP prévoyant que la personne peut bénéficier de l’assistance d’un avocat. 18Autant dire que les officiers de police judiciaire et les parquets peuvent très bien organiser des auditions au cours desquelles des déclarations seraient faites par des personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction – qu’elle soit punie ou non d’emprisonnement – sans qu’elles aient pu s’entretenir avec un avocat et être assistées par lui, dès lors qu’elles ne sont pas placées sous la contrainte elles consentent à être entendues librement [6], étant entendu que la retenue de quatre heures n’est applicable qu’aux témoins à l’encontre desquels il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction ». 19Le Conseil constitutionnel accorde sa bénédiction à cette interprétation [7] pour autant, insiste-t-il, que [la personne] ne peut continuer à être entendue librement par les enquêteurs que si elle a été informée de la nature et de la date de l’infraction qu’on la soupçonne d’avoir commise et de son droit de quitter à tout moment les locaux de police ou de gendarmerie », comme l’indiquent les termes de l’article 73 CPP [8]. Rien n’est dit sur la menace pesant sur la personne soupçonnée, entendue librement » désirant faire appel à un avocat, ou simplement décidée à s’en aller et s’entendant répondre pas de problème, mais alors on peut vous retenir 24 heures renouvelables…sous le régime de la garde à vue ; alors il vaut mieux que vous restiez encore un peu avec nous ». 20Rien n’est dit, non plus, sur la suite que vont donner à ces affaires les cours et tribunaux [9] qui ont requis cette QPC et devant lesquels les défenseurs n’ont certainement pas manqué d’invoquer la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme CEDH. 21À cet égard, dans un arrêt récent, la CEDH a considéré à l’égard d’une personne qui ne faisait l’objet d’aucune mesure restrictive ou privative de liberté au titre de la procédure en cause » s’il apparaît que le requérant a délibérément consenti à faire des révélations aux services d’enquête, ce choix, alors même que ses déclarations ont contribué à sa propre incrimination, ne peut être considéré, aux yeux de la Cour, comme totalement éclairé. Certes, le requérant a été informé des dispositions légales prévoyant que ses propos pourraient servir de preuve en justice. Pour autant, outre qu’aucun droit à garder le silence ne lui a été expressément notifié, il a pris sa décision sans être assisté d’un conseil …. Or, la Cour constate qu’il n’avait renoncé de manière non équivoque ni à son droit au silence, ni à l’assistance d’un avocat … » [10], pour conclure qu’il y avait eu violation de l’article 6 § 3 c de la Convention combiné avec l’article 6 § 1. 22La CEDH renouvelle l’exigence que toute renonciation au bénéfice des garanties de l’article 6 doit se trouver établie de manière non équivoque » [11]. Or l’article 62 CPP n’organise en rien ces garanties, sauf la possibilité de quitter à tout moment les lieux qui doit lui être notifiée par le service de police ou de gendarmerie, comme l’exige le Conseil constitutionnel. 23L’équivoque demeure et il suffit de rappeler que la Cour de cassation a bien souligné que les États … sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, sans attendre d’être attaqués devant elle ni d’avoir modifié leur législation » [12]. II – Le droit à l’avocat, les droits de l’avocat en garde à vue24C’est à une rafale de questions que le Conseil constitutionnel a eu à répondre sur les conditions de l’assistance d’un avocat à la personne gardée à vue l’absence de droit de l’avocat de la personne gardée à vue et de la victime de consulter les pièces de la procédure avant l’audition ou la confrontation et d’en obtenir une copie ;l’absence de dispositions imposant aux forces de police d’attendre l’arrivée de l’avocat avant de commencer l’interrogatoire seul le premier interrogatoire ne pouvant commencer en principe moins de deux heures après l’avis à avocat ;la limitation à trente minutes de l’entretien du gardé à vue avec l’avocat avant l’audition ;la limitation de l’assistance de l’avocat aux seuls actes d’interrogatoire et de confrontation, et non aux autres actes notamment les perquisitions ;les pouvoirs reconnus à l’officier de police judiciaire OPJ de s’opposer aux questions posées par l’avocat et éventuellement de décider de mettre fin à une audition ou à une confrontation, en cas de difficulté, pour demander au procureur de la République de saisir le bâtonnier aux fins de désignation d’un autre Conseil constitutionnel y a généralement répondu en distinguant la garde à vue, qui doit demeurer une mesure de police judiciaire, de la procédure devant conduire au prononcé d’une sanction ayant le caractère de punition. Or, selon les Sages, la mesure de police judiciaire n’a pas pour objet de permettre un débat contradictoire sur sa légalité ou le bien-fondé des éléments de preuve recueillis par les enquêteurs, ce débat ayant sa place durant les phases d’instruction et de jugement. Ils ont donc considéré que les griefs tirés de la violation de l’équilibre des droits des parties ou de la méconnaissance du contradictoire étaient inopérants. 25Il est donc logique que les conditions dans lesquelles s’exercent les droits de la défense soient encadrées et qu’il en résulte certaines restrictions qui ne sont pas disproportionnées, dès lors que, de toute façon celles-ci demeurent sous le contrôle des juridictions d’instruction ou de jugement. 26Ainsi, pour l’examen du dossier – limité au procès-verbal de l’audition de la personne, à l’exclusion des autres pièces telles que la plainte de la victime, les constatations des enquêteurs, les auditions de témoins, - le Conseil considère qu’une personne ne peut faire l’objet d’une sanction sans avoir accès au dossier complet… mais avant la phase de jugement et non dès la phase d’enquête. 27Il s’agit de loyauté dans l’administration de la preuve lorsqu’il est recouru à de nouvelles auditions sans imposer un délai d’attente de l’avocat ce sera à l’autorité judiciaire d’apprécier la valeur probante des déclarations faites par le gardé à vue en l’absence de son conseil. Quant au report de la présence de l’avocat [13], il demeure sous le contrôle des juridictions pénales saisies des poursuites. Selon les Sages par suite, eu égard aux cas et aux conditions dans lesquelles elle peut être mise en œuvre, la faculté d’un tel report assure, entre le respect des droits de la défense et l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée » [14]. L’accès au dossier 28L’accès au dossier par l’avocat appelé auprès du gardé à vue est l’élément majeur des QPC sur lequel la position du Conseil constitutionnel était attendue. Les Sages allaient-ils se joindre au mouvement inexorable suscité par la jurisprudence de la CEDH ? 29Les motifs de la décision du Conseil constitutionnel sur la prééminence de la phase de l’enquête et la recherche des auteurs d’infractions sur les droits de la défense qui ne peuvent s’exercer pleinement que devant un juge rejoignent les préoccupations des organisations professionnelles des policiers [15] qui s’étaient déjà émues de la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2011 déclarant inconstitutionnelles les dispositions alors en vigueur qui ne permettaient pas à la personne interrogée, alors qu’elle est retenue contre sa volonté, de bénéficier de l’assistance effective d’un avocat [16]. 30On retiendra un propos plus mesuré que celui cité en bas de page émis par une officier de police judiciaire Je le répète, je suis donc contre l’accès au dossier à ce stade des investigations. Le mis en cause n’a pas à prendre connaissance de l’intégralité des éléments à disposition des enquêteurs. Pour arriver à savoir ce qu’il s’est vraiment passé, il faut parfois mettre le suspect face à ses contradictions, ses incohérences, ses élucubrations, en passer par des questions auxquelles on sait pertinemment qu’il mentira pour ensuite lui présenter, de manière calculée, les éléments qui démonteront son discours. Lui présenter dès le départ les pièces du dossier par le biais de son conseil, c’est l’éclairer totalement sur ce que nous savons et donc ce que nous ne savons pas encore, c’est lui permettre d’élaborer un discours adapté ». Et plus loin tout bon avocat utilisera les éléments qui lui seront présentés tous, y compris et surtout ceux qui pourraient réduire à néant l’enquête pour mener à bien sa mission, à savoir défendre les intérêts de son client intérêts qui n’ont parfois rien à voir avec la manifestation de la vérité, et ce sans enfreindre la moindre règle déontologique » [17]. 31 En d’autres termes, selon les Sages, dès lors que la garde à vue n’est pas menée dans une phase juridictionnelle de la procédure pénale, il n’y a pas lieu de respecter les principes de l’égalité des armes et du contradictoire. Une telle affirmation doit être critiquée. Tout d’abord, parce qu’elle passe sous silence la juridictionnalisation latente du rôle du procureur de la République en raison du développement constant des procédures contractualisées ». Ensuite, parce qu’elle contraste singulièrement avec la jurisprudence ancienne de la Cour de Strasbourg aux termes de laquelle le droit à un procès équitable s’applique aux phases qui se déroulent avant la procédure de jugement » » [18]. 32Les avocats considèrent qu’ils sont désarmés dans une défense indigente ne reposant que sur la connaissance du procès-verbal signalant la nature et la date présumée de l’infraction, constatant la notification du placement en garde à vue et des droits y étant attachés, le certificat médical lorsque le gardé à vue a été examiné par un médecin, ainsi que les procès-verbaux d’audition antérieure de la personne qu’il assiste [19]. 33 Si le Conseil avait été cohérent, il aurait dû censurer cet article 63-4-1 du CPP et imposer par exemple un système analogue à celui du 63-4-2 [20] le dossier peut être si les circonstances l’imposent et seulement dans ce cas, dans un premier temps caché à l’avocat, sur décision du procureur et du juge selon le délai » ; et pour contredire ledit Conseil En effet, l’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil. À cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer » [21]. 34C’est ici que la pertinence des raisons invoquées par les Sages pour faire la césure entre la phase d’enquête et la procédure judiciaire se télescopent avec la jurisprudence de la CEDH. Rappelons que dans les décisions Salduz et Dayanan [22] auxquelles se réfère la Cour de cassation dans son arrêt du 15 avril 2011 précité [23], la CEDH souligne l’importance du stade de l’enquête pour la préparation du procès, dans la mesure où les preuves obtenues durant cette phase déterminent le cadre dans lequel l’infraction imputée sera examinée au procès » [24]. 35Si le Conseil retient notamment une conciliation qui n’est pas déséquilibrée » entre les deux objectifs constitutionnels de respect des droits de la défense et de recherche des auteurs d’infractions compte tenu des délais dans lesquels la garde à vue est encadrée » [25], il en oublie toutefois qu’ un accusé se trouve souvent dans une situation particulièrement vulnérable à ce stade de la procédure, effet qui se trouve amplifié par le fait que la législation en matière de procédure pénale tend à devenir de plus en plus complexe » [26]. 36Quant à l’examen des preuves et la balance entre les intérêts divergents de l’enquête et de la défense, la CEDH souligne l’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil. À cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat doit librement exercer » [27]. 37Cette exigence s’est récemment trouvée renforcée dans un récent arrêt de la CEDH [28] Ce qui est toutefois clair pour la Cour, c’est que l’avocat du requérant n’a pas été autorisé à examiner le dossier de l’enquête [lorsqu’il a rencontré son client durant 25 minutes] ce qui a pu entraver sérieusement sa capacité de fournir un conseil juridique significatif au requérant. La Cour note encore que qu’il n’est pas contesté entre les parties que le requérant n’avait pas d’assistance juridique au moment où il faisait sa déclaration à la police ou durant son interrogatoire devant le Procureur. À ce sujet, la Cour rappelle que dans l’arrêt Salduz elle avait souligné l’importance du stade de l’enquête pour la préparation de la procédure pénale, tout comme la preuve obtenue à ce stade constitue le cadre dans lequel l’infraction sera considérée au tribunal. Afin que le droit à une audition loyale soit équitable et effectif, l’article exige, en règle générale, l’accès à l’avocat dès le premier interrogatoire d’un suspect par la police, sauf s’il est démontré dans les circonstances spécifiques d’un cas particulier qu’il y a des raisons convaincantes de restreindre ce droit … la Cour conclut que même si le requérant a rencontré son avocat durant sa retenue par la police pour un bref moment, cette entrevue ne peut être considérée comme étant suffisante selon la Convention » [29]. 38Il importe de noter que la CEDH fait ici deux reproches, qui peuvent trouver à s’appliquer à l’égard de la législation française d’une part, l’avocat n’a pas été autorisé à examiner le dossier de l’enquête ; d’autre part, le temps laissé à l’avocat pour rencontrer son client 25 minutes… en France, c’est 30 est insuffisant pour assurer sa défense. 39C’est cette logique qu’a suivie la Cour d’appel d’Agen dans l’arrêt commenté, certaine du soutien de la Cour de cassation [30] lorsqu’elle répète que la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, telle qu’interprétée par la Cour EDH, peut être invoquée directement devant les tribunaux et prime les lois nationales contraires ». 40Dans ses attendus, la Cour d’Agen retient l’effectivité de l’assistance de l’avocat du gardé à vue passe nécessairement par l’accès à l’entier dossier de la procédure, afin que l’avocat puisse pleinement remplir le rôle essentiel qui lui est reconnu par la Cour EDH pour garantir un procès équitable, dans le respect du principe d’égalité des armes, et notamment organiser la défense et préparer les interrogatoires », tout en constatant qu’elle dispose d’éléments suffisants dans le dossier répressif pour condamner le prévenu, puisque l’annulation des pièces ne porte que sur les déclarations enregistrées au cours de la garde à vue en violation des principes dictés par la CEDH. 41Comme quoi, même en respectant les droits de la défense, il y a quand même une justice… Conseil constitutionnel - 17 février 2012 - Décision n° 2012-222 QPC. Conseil constitutionnel - 16 septembre 2011 - Décision n° 2011-163 QPC / Droit pénal – Infraction – Inceste – Qualification – Membres de la famille – Désignation – Constitution - Violation Qui est incestueux ? 42Le Conseil constitutionnel saisi de questions prioritaire de constitutionnalité QPC, a, par deux fois, censuré les textes des articles 222-31-1 et 227-27-2 du code pénal, introduits par la loi du 8 février 2010, définissant les relations incestueuses lorsqu’elles sont commises au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ». Les dispositions sont dès lors retirées du Code pénal. 43Le Conseil constitutionnel considéré que le législateur ne pouvait, sans méconnaître le principe de légalité des délits et des peines, s’abstenir de désigner précisément les personnes qui doivent être regardées, au sens de cette qualification, comme membres de la famille ». La loi sur l’inceste disqualifiée 44LAURE DOURGNON [*] 45Dans le n° 294 du JDJ d’avril 2010 p. 42, nous avions signalé, avec Pierre Verdier, les dangers liés à l’imprécision de la loi sur l’inceste du 8 février 2010. Cette loi définissait l’inceste comme un viol ou une agression sexuelle commis au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin ou d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait. 46Le cousin, le concubin ou la concubine du demi-frère font-ils partie de la famille ? La sécurité juridique nécessite que la loi pénale soit d’une telle précision qu’il ne puisse exister aucune ambiguïté sur les actes interdits. 47Or on ne connaît pas les contours d’une famille. Au lendemain de la Révolution, en effet, les rédacteurs du Code civil n’ont pas souhaité définir ce qu’est une famille afin de ne pas recréer le pouvoir des familles nobiliaires. Ce fut une bonne chose, puisque les mœurs ont évolué. Au XXIe siècle la famille n’est plus limitée à un couple marié avec leurs enfants légitimes. Les couples non mariés peuvent créer une famille, les familles peuvent être recomposées. La loi sur l’inceste, pour la première fois, donnait des indications sur les membres de la famille ascendants, frères ou sœurs…. Mais la loi pénale ne peut pas être indicative. Elle doit être précise dans chacun des concepts qu’elle énonce. 48C’est pour cela que le Conseil constitutionnel, saisi en question prioritaire de constitutionnalité, a déclaré l’inconstitutionnalité de la loi. 49Le concept de famille n’étant pas défini, la loi a été censurée le 16 septembre 2011 et le 17 février dernier par le Conseil constitutionnel. À compter de ces dates, aucune condamnation ne peut retenir la qualification de délit ou crime incestueux » prévue par cet article et lorsque l’affaire a été définitivement jugée à cette date, la mention de cette qualification ne peut plus figurer au casier judiciaire. 50Pour autant, la réalité de l’inceste n’est pas niée. D’abord parce que les lois n’ont pas le monopole des mots, et ensuite parce que le viol commis par un ascendant ou une personne ayant autorité sur l’enfant est toujours une circonstance aggravante du viol ou des atteintes sexuelles Code pénal, art. 222-24, 222-28, 222-30, etc.. 51Il faut simplement retenir de cette jurisprudence du Conseil constitutionnel que le droit français actuel refuse de définir la famille. Et, à l’heure actuelle, cela lui est impossible. Le concept de famille relève plus du sentiment d’appartenance à un groupe qu’à une réalité juridique. Notes [1] Loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue 15/04/2011. [2] Art. 61-1 de la Constitution, depuis la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République. [3] Cass. Ass. pl., 15 avril 2011, n° 10-30316 ; JDJ n°305, mai 2011, p. 58-62 ; comm. Rongé. [4] Art. 62-2 du Code de procédure pénale CPP. [5] Art. 62 CPP. [6] Rappelons quand même que Les personnes convoquées par [un officier de police judiciaire] sont tenues de comparaître » art. 61, al. CPP. [7] Le respect des droits de la défense impose, en principe, qu’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction ne peut être entendue, alors qu’elle est retenue contre sa volonté, sans bénéficier de l’assistance effective d’un avocat, cette exigence constitutionnelle n’impose pas une telle assistance dès lors que la personne soupçonnée ne fait l’objet d’aucune mesure de contrainte et consent à être entendue librement » § 19. [8] Lorsque la personne est présentée devant l’officier de police judiciaire, son placement en garde à vue, lorsque les conditions de cette mesure prévues par le présent Code sont réunies, n’est pas obligatoire dès lors qu’elle n’est pas tenue sous la contrainte de demeurer à la disposition des enquêteurs et qu’elle a été informée qu’elle peut à tout moment quitter les locaux de police ou de gendarmerie. Le présent alinéa n’est toutefois pas applicable si la personne a été conduite par la force publique devant l’officier de police judiciaire ». [9] Notamment le Conseil d’État dans l’examen de la requête en annulation de la circulaire du garde des Sceaux du 23 mai 2011 relative à l’application des dispositions relatives à la garde à vue N° 349752. [10] CEDH, affaire Stojkovic c. France et Belgique requ. n° 25303/08 ; 27 octobre 2011, § 53 et 54. [11] CEDH, affaire Sava c. Turquie requ. n° 9762/03, 8 décembre 2009, § 69. [12] Op. cit., en note 3. [13] Sur ordre du procureur pour une durée maximale de 12 heures si cette mesure apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête, soit pour permettre le bon déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte imminente aux personnes » ou sur ordre du juge des libertés et de la détention JLD lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, le juge des libertés et de la détention peut, sur requête du procureur de la République, autoriser à différer la présence de l’avocat, au-delà de la douzième heure, jusqu’à la vingt-quatrième heure » art. 63-4-2 CPP [14] 14 § 31. [15] Lire notamment le communiqué des syndicats Alliance Police Nationale, Synergie Officiers et le Syndicat Indépendant des Commissaires de Police qui prennent acte avec dépit de l’adoption définitive du projet de loi sur la garde à vue qui entraînera un déséquilibre inquiétant entre droits de la défense et moyens d’action des enquêteurs, au préjudice des victimes » et qui sans nier la nécessité du rôle des avocats, … rappellent que ceux-ci exercent une profession libérale et ne peuvent donc en aucun cas s’ériger comme seuls garants des libertés individuelles » ; lisible sur [16] Décision n° 2010-14/22 QPC, 30 juillet 2010 ; JDJ n° 302, p. 48 [17] Le Sage, le Flic et le Suspect », par Simone Duchmole, pseudonyme utilisé sur le site de Maître Eolas, 30/12/11. [18] O. Bachelet, Conformité, sous une réserve, des nouvelles dispositions relatives à la garde à vue de droit commun », Actualités Droits-Libertés, 22/11/11, CREDOF citant CEDH, 24 novembre 1993, Affaire Imbrioscia c. Suisse, n° 13972/88, § 36. [19] Art. 63-4-1 CPP. [20] Cet article autorise le procureur de la République à commencer l’audition sans attendre l’expiration du délai de deux heures lorsque les nécessités de l’enquête exigent une audition immédiate » et également, à titre exceptionnel, le procureur ou le JLD, d’imposer le report de présence de l’avocat lors des auditions ou confrontations, si cette mesure apparaît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ». [21] Garde à vue la démission du Conseil constitutionnel » ; Eolas, 27/11/11 ; [22] Cour européenne des droits de l’Homme – 27 novembre 2008 - Affaire Salduz c./ Turquie Requête n° 36391/02, reproduit dans JDJ n° 282, p. 52-62 ; Affaire Dayanan c. Turquie - 13 octobre 2009 Requête n° 7377/03. [23] Op. cit. en note 3. [24] Affaire Salduz c. Turquie, § 54. [25] § 29. [26] Affaire Salduz c. Turquie, § 54. [27] Affaire Dayanan c. Turquie, § 32. [28] Sapan c. Turquie, 20 septembre 2011, req. n° 17252/09. Arrêt en anglais rendu par un comité de trois juges auquel est confié l’examen des requêtes pour rendre un arrêt sur le fond lorsque la question relative à l’interprétation ou à l’application de la Convention ou de ses Protocoles qui est à l’origine de l’affaire fait l’objet d’une jurisprudence bien établie de la Cour nouvelle rédaction de l’art. 28 de la Convention depuis l’adoption du protocole n° 14. [29] Sapan c. Turquie, § 21 ; traduction libre. [30] Arrêt du 15 avril 2011, voy. en note 3. [*]
Article62 Version en vigueur depuis le 02 juin 2014 Modifié par LOI n°2014-535 du 27 mai 2014 - art. 1 Les personnes à l'encontre desquelles il n'existe aucune raison plausible de soupçonner qu'elles ont commis ou tenté de commettre une infraction sont entendues par les enquêteurs sans faire l'objet d'une mesure de contrainte.
Quand faire une recherche des causes de la mort L’article 74 du Code de procédure pénale prévoit une procédure spécifique en cas de découverte d’un cadavre dont la cause de la mort est inconnue ou suspecte. La finalité de cette procédure est déterminer si la mort à une origine infractionnelle crime ou délit pour le cas échéant entamer des investigations pour trouver l’auteur de l’infraction. Cette procédure s’applique lors de la découverte d’un corps sans vie. L’origine de la mort ne doit pas être naturelle. Dans cette hypothèse, le code de procédure pénale prévoit à l’article 78 la procédure à suivre en cas de mort naturelle. L’enquête pour recherche des causes de la mort implique nécessairement que les causes soient inconnues ou suspectes. Le caractère inconnu ou suspect découle des circonstances relatives au décès. L’avis du médecin légiste est déterminant et fondamental. Celui-ci, en cas de mort suspect ou inconnu, indiquera qu’il existe un obstacle médico-légal à l’inhumation. Toutefois, quand bien même, le médecin ne constaterait pas d’obstacle, l’officier de police juridique peut de lui-même engager l’enquête pour recherche des causes de la mort. Comment se déroule l’enquête pour recherche des causes de la mort Dès l’ouverture de cette enquête, le Procureur de la République est avisé immédiatement et se transporte sur les lieux pour procéder aux premières constatations ou délègue ces constatations à un officier de police judiciaire. Le cadre de l’enquête pour recherche des causes de la mort est ni la flagrance ni l’enquête préliminaire. Il s’agit d’un cadre autonome ayant pour finalité de rechercher si une atteinte à la loi pénale a pu être portée Cour de cassation, chambre criminelle, 26 juillet 1966. En cas de démonstration de l’atteinte, alors une enquête de flagrance ou préliminaire ou une information judiciaire – instruction – sera ouverte. Les investigations dans l’enquête pour recherche des causes de la mort sont celles prévues par le Code de procédure pénale perquisitions, saisies, examens techniques et scientifiques, réquisitions, audition de témoins. La durée maximale de cette enquête est de huit jours. Résultat de l’enquête pour recherche des causes de la mort A l’issue de l’enquête, le Procureur dispose de plusieurs suites si les causes de la mort ne sont pas infractionnelles ni délit ni crime, un classement sans suite est prononcé ; si les causes de la mort sont délictuelles, le Procureur ouvre une enquête soit de flagrance soit préliminaire ; si les causes de la mort sont criminelles, le Procureur requiert l’ouverture d’une information judiciaire ; si les causes de la mort ne sont pas encore déterminées, le Procureur peut requérir l’ouverture d’une information judiciaire pour recherche des causes de la mort. Fort de son expérience dans cette procédure technique et spécifique, Maître Franck LEVY vous assiste et défend vos intérêts quelle que soit la décision prise par le Procureur de la République. Concernant cette procédure, Maître Franck LEVY intervient tant dans toute la France que devant l’ensemble des juridictions relevant de la Cour d’Appel de Paris tels que les Tribunaux Judiciaires d’Auxerre, Sens, Evry, Créteil, Bobigny, Melun, Meaux et Fontainebleau. En cas d’insatisfaction à la suite d’un classement sans suite, Maître Franck LEVY vous accompagne pour trouver une solution juridique et ouvrir une nouvelle enquête le cas échéant.
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