Ceque tu as offert en d'autres revivra. Celui qui perd sa vie un jour la trouvera. (Bis) 4. Il restera de toi une larme tombée Un sourire germé sur les yeux de ton coeur. Il restera de toi ce que tu as semé Que tu as partagé aux mendiants du bonheur. Ce que tu as semé en d'autres germera. Celui qui perd sa vie un jour la trouvera. (Bis)
Quelques paroles de JĂ©sus Édition Vevey 1946, rééditĂ©e partiellement en sĂ©rie 314 de 25 minibrochures Table des matiĂšres Introduction 1er Jour — Une invitation misĂ©ricordieuse 2° Jour — Une consolante assurance 3° Jour — La puissance de la priĂšre 4° Jour — Les voies de Dieu 5° Jour — La gloire du PĂšre 6° Jour — Tendre sollicitude 7° Jour — Le bon Berger 8° Jour — Le vrai consolateur 9° Jour — Le juge misĂ©ricordieux 10° Jour — La plus Ă©tonnante des relations 11° Jour — L’ami des orphelins 12° Jour — La victoire sur le monde 13° Jour — Le petit troupeau 14° Jour — La grĂące Ă  la portĂ©e de tous 15° Jour — Une douce servitude 16° Jour — L’amour de Dieu 17° Jour — Le rĂ©sumĂ© de l’Évangile 18° Jour — Le grand calme 19° Jour — Un legs 20° Jour — Le pouvoir suprĂȘme 21° Jour — L’office de l’Esprit 22° Jour — Une heureuse transformation 23° Jour — Une priĂšre toute puissante 24° Jour — Un gage immuable 25 - Jour — JĂ©sus toujours prĂ©sent 26° Jour — La rĂ©surrection et la vie 27° Jour — Encore un peu de temps 28° Jour — Une contemplation bienheureuse 29° Jour — Plusieurs demeures 30° Jour — Le royaume de l’Étoile du matin 31° Jour — La servitude et l’attente Épilogue — Le jour de Dieu 2 Pierre 311-14 Introduction Des pommes d’or incrustĂ©es d’argent, c’est la parole dite Ă  propos » Proverbes 2511. Si cela est vrai de paroles prononcĂ©es par des lĂšvres non inspirĂ©es, de quelle incomparable valeur ne doivent pas ĂȘtre les paroles de Celui qui est la vĂ©ritĂ© mĂȘme, les paroles de JĂ©sus » ! Ce sont quelques-unes de ces paroles que nous rappelons dans les pages suivantes et que nous vous invitons Ă  considĂ©rer pour la consolation et la paix de vos cƓurs. Notre dĂ©sir est que par ces simples rĂ©flexions le lecteur soit mis en contact avec Celui qui est la Source de toutes bĂ©nĂ©dictions et qui a dit lui-mĂȘme Les paroles que moi je vous ai dites sont esprit et sont vie » Jean 663. Sachons mieux Ă©couter cette voix qui nous parle des cieux et puissions-nous dire comme le psalmiste Que tes paroles ont Ă©tĂ© douces Ă  mon palais, plus que le miel Ă  ma bouche ». — Tes tĂ©moignages me sont un hĂ©ritage Ă  toujours, car ils sont la joie de mon cƓur » Ps. 119103, 111. Lecteur, cherche Ă  rendre vivante en toi, par la mĂ©ditation de ces paroles, et de tant d’autres qui remplissent les Évangiles, cette vĂ©ritĂ© simple et saisissante C’est JĂ©sus qui me parle ». Rien assurĂ©ment ne te sera plus doux, soit en posant le soir la tĂȘte sur ton oreiller, soit en vaquant Ă  tes occupations journaliĂšres, soit Ă  l’heure de l’épreuve, que de possĂ©der dans ton cƓur une parole de JĂ©sus ». 1er Jour — Une invitation misĂ©ricordieuse Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Venez Ă  moi, vous tous qui vous fatiguez et qui ĂȘtes chargĂ©s, et moi, je vous donnerai du repos » Matt. 1128. Oh ! prĂ©cieuse parole du Sauveur sur laquelle l’ñme peut se reposer en toute confiance et oĂč elle trouve une paix Ă©ternelle ! Et cette paix ne nous est pas promise seulement pour les demeures cĂ©lestes ; non, nous pouvons la goĂ»ter dĂšs Ă  prĂ©sent. En attendant le repos de la gloire, nous pouvons jouir du repos de la grĂące. Pendant que l’ombre du grand rocher s’étend sur notre terre aride, nous pressentons dĂ©jĂ  les splendides clartĂ©s de la citĂ© de Dieu. Sans doute, la mer de verre parfaitement unie ne se trouve que devant le trĂŽne de Dieu ; mais il y a dĂ©jĂ  un abri sur cette terre pour ceux qui sont battus par la tempĂȘte Nous qui avons cru, nous entrons dans ce repos. Lecteur, as-tu trouvĂ© la douce paix acquise au prix du sang de JĂ©sus ? AprĂšs avoir longtemps errĂ© de cĂŽtĂ© et d’autre, cherchant du repos et n’en trouvant point, cet appel de ton Sauveur Venez Ă  moi », rĂ©sonne-t-il Ă  ton oreille comme la plus suave harmonie ? Toute autre paix est dangereuse, factice ou mensongĂšre. L’aigle captif ronge la cage dorĂ©e qui le retient
 ; pauvre compensation Ă  sa libertĂ© perdue ! les aspirations immortelles de l’ñme ne peuvent ĂȘtre satisfaites par rien moins que par la possession de la grĂące de Dieu et de l’amour de JĂ©sus. Et quelle largeur, quelle plĂ©nitude dans cette invitation ! Si nous avions dĂ» remplir une seule condition avant d’entrer dans l’arche du salut, nous aurions Ă©tĂ© ballottĂ©s par l’orage pendant toute l’éternitĂ© ; mais tous sont Ă©galement appelĂ©s, tous seront Ă©galement les bienvenus, la paix de Dieu est offerte Ă  chacun sans argent et sans aucun prix. La porte de la grĂące est ouverte pour le faible, pour le pĂ©cheur travaillĂ© par le sentiment de ses iniquitĂ©s, pour l’ñme chargĂ©e du poids de l’affliction. Retourne donc en ton repos, ĂŽ mon Ăąme ! que cette douce parole de JĂ©sus te donne du courage pour supporter les Ă©preuves de la terre. À son ombre tu es en sĂ»retĂ© pour le temps, en sĂ»retĂ© pour l’éternitĂ© ! Tu auras encore Ă  endurer bien des secousses, bien des craintes, bien des Ă©garements autant de consĂ©quences de ta corruption intĂ©rieure ; mais ces fluctuations ne seront plus que comme celles qui rident la surface de l’OcĂ©an. Au-dessous des vagues il y aura un calme inaltĂ©rable Tu garderas dans une paix parfaite l’esprit qui s’appuie sur toi, car Il se confie en toi » És. 263. Si l’avant-goĂ»t de ce repos est dĂ©jĂ  si prĂ©cieux, que sera donc ce repos mĂȘme dans toute l’éternitĂ© ? Ô ravissante perspective ! lorsque nous entrerons dans le bonheur ineffable du Paradis, nous verrons disparaĂźtre derriĂšre nous le songe fugitif de notre vie terrestre ; notre foi sera changĂ©e en vue, notre espĂ©rance en rĂ©alitĂ© ; il n’existera plus en nous de penchant au mal ; rien ne viendra troubler la sĂ©rĂ©nitĂ© Ă©ternelle de l’ñme, et le cƓur trouvera pour jamais dans la jouissance du Dieu infini un repos parfait et Ă©ternel ! Je vous ai dit ces choses afin qu’en moi vous ayez la paix » Jean 1633. 2° Jour — Une consolante assurance Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Votre PĂšre cĂ©leste sait que vous avez besoin de toutes ces choses » Matt. 632. Quoique cette parole ait Ă©tĂ© prononcĂ©e par JĂ©sus Ă  l’occasion des biens temporels de ses disciples, elle s’applique indistinctement aux vicissitudes de tout genre que l’enfant de Dieu peut rencontrer sur sa route. Qu’elle est propre, en effet, Ă  adoucir toute dĂ©ception, Ă  imposer silence Ă  tout murmure, Ă  inspirer une soumission humble et confiante, cette pensĂ©e Mon PĂšre cĂ©leste sait que j’ai besoin de toutes ces choses ! » OĂč un enfant pourrait-il se trouver plus en sĂ»retĂ© que dans les bras de son pĂšre ? OĂč le fidĂšle pourrait-il ĂȘtre mieux que dans ceux de Dieu ? Nous sommes de mauvais juges de ce qui nous convient le mieux, mais Dieu nous est un guide infailliblement sage. Si dans un moment d’orgueilleuse prĂ©somption, nous Ă©tions tentĂ©s de dire avec dĂ©pit et amertume Toutes ces choses sont contre moi », oh ! qu’alors cette parole de JĂ©sus vienne rĂ©primer l’indigne rĂ©volte de notre cƓur, et souvenons-nous que la sagesse parfaite du PĂšre et son amour nous ont donnĂ© l’assurance que nous avions besoin de ces choses ». Mon Ăąme, n’y a-t-il rien qui trouble en ce moment ta paix ? Ce que la Providence dispense Ă  ton Ă©gard te semble-t-il obscur ? Ta force spirituelle t’a-t-elle abandonnĂ©e ? Ceux de qui tu attendais des consolations se sont-ils Ă©loignĂ©s de toi ? Ton kikajon s’est-il dessĂ©chĂ© comme l’herbe ? S’il en est ainsi, Ă©cris sur chacune de tes Ă©preuves Votre PĂšre cĂ©leste sait que vous avez besoin de toutes ces choses ». Pourquoi ce tendre PĂšre a-t-il accru ton fardeau ? parce que tu en avais besoin ! Pourquoi a-t-il rĂ©duit en poudre tes idoles ? encore parce que tu en avais besoin. Elles usurpaient la place de Dieu dans ton cƓur et il a dĂ» les enlever. Pourquoi a-t-il contrariĂ© tes plans terrestres et anĂ©anti tes plus chĂšres espĂ©rances ? parce que cela aussi t’était nĂ©cessaire. Dans le sentier que tu avais choisi se trouvait une Ă©pine cachĂ©e, tandis que dans la voie opposĂ©e se trouvait une bĂ©nĂ©diction spirituelle Il t’a prĂ©venue par toutes sortes de biens. Cherche donc Ă  l’avenir, ĂŽ mon Ăąme, Ă  te confier avec plus de simplicitĂ© et de confiance enfantines en la volontĂ© de ton PĂšre cĂ©leste. Tu n’es pas abandonnĂ©e Ă  toi-mĂȘme, tu n’as pas Ă  affronter seule et sans ami les tempĂȘtes de cet aride dĂ©sert. Tes Maras » comme tes Élims » [Exode 1523 et suiv.] sont voulus de lui. Une colonne de nuĂ©e marche devant toi. Suis-la dans les jours de soleil comme dans les jours d’orage. Dieu peut te conduire par des chemins que tu ne connais pas », mais il ne te conduit, sois-en certain, que lĂ  oĂč il t’est bon d’aller. Un amour inexprimable dirige toutes tes voies. BĂ©ni soit son nom ! » s’écriait un fidĂšle dans l’épreuve, il a rendu mes pieds semblables Ă  ceux des biches, et m’a fait tenir debout sur des lieux Ă©levĂ©s ». Et quel est Celui qui nous adresse cette douce parole Votre PĂšre cĂ©leste sait que vous avez besoin de toutes ces choses » ? C’est Celui qui a Ă©prouvĂ© lui-mĂȘme durant sa vie de tribulations le prix de cette assurance, qui a reconnu que de la crĂšche de BethlĂ©hem Ă  la croix du Calvaire il ne se trouvait pas une Ă©pine de trop dans la longue suite d’épreuves que lui, l’homme de douleur, a voulu endurer. Il n’était pas une goutte de cette coupe amĂšre qui n’eĂ»t Ă©tĂ© prĂ©parĂ©e par son PĂšre ; aussi que disait-il ? La coupe que tu m’as donnĂ©e ne la boirai-je pas ? ». Oh ! si en cette heure d’agonie inexprimable JĂ©sus a trouvĂ© sa consolation dans la pensĂ©e que la main de son PĂšre avait allumĂ© la fournaise ardente, quelle consolation immense ne doit pas trouver Ă  son tour, dans cette mĂȘme vĂ©ritĂ©, son peuple affligĂ© et dĂ©faillant ! Quoi ! il y aurait, ĂŽ mon Ăąme, une goutte de trop dans ton calice ? une Ă©preuve inutile, une douleur superflue dans ta vie ? ArriĂšre de toi ce secret athĂ©isme ! il t’a donnĂ© son Fils ! il a voulu s’appeler ton PĂšre » ! Quelle que soit l’épreuve sous laquelle tu gĂ©misses Ă  cette heure, que la parole d’un Sauveur misĂ©ricordieux soit comme l’huile jetĂ©e sur la mer en courroux » ; qu’elle sĂšche tes larmes rebelles ; ton PĂšre », ton PĂšre lui-mĂȘme, sait que tu as besoin de toutes ces choses-lĂ  ». Ta parole est bien affinĂ©e, et ton serviteur l’aime » Ps. 119140. 3° Jour — La puissance de la priĂšre Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Quoi que vous demandiez en mon nom, je le ferai, afin que le PĂšre soit glorifiĂ© dans le Fils » Jean 1413. Oh ! Sauveur bien-aimĂ©, c’est toi qui as donnĂ© Ă  ton peuple un libre accĂšs au sanctuaire de la priĂšre ! Sans toi, nous n’eussions jamais pu y pĂ©nĂ©trer. Ce sont tes mĂ©rites expiatoires qui nous en ont d’abord ouvert les portes ; c’est ton intercession dans le ciel qui les laisse encore ouvertes pour nous. Quelle immense Ă©tendue Ă  cette promesse Tout ce que vous demanderez ! » C’est la rĂ©ponse anticipĂ©e Ă  tout ce dont un pauvre pĂ©cheur a besoin, Ă  tout ce qu’il peut attendre d’un Sauveur tout-puissant ! En outre, Il nous engage Ă  demander en son nom ». Quel amour ! Celui qui sollicite une faveur dans le monde est heureux de pouvoir se rĂ©clamer du nom d’un protecteur influent ; eh bien, JĂ©sus nous donne son nom comme pouvant nous ouvrir le cƓur de Dieu. De mĂȘme que David aimait le pauvre impotent de la maison de SaĂŒl, pour l’amour de Jonathan, ainsi le PĂšre cĂ©leste, grĂące Ă  nos rapports avec le vrai Jonathan » don de l’Éternel, se plaĂźt Ă  nous donner infiniment plus que tout ce que nous demandons et mĂȘme pensons ». Lecteur, connaissez-vous le bonheur immense qu’il y a Ă  confier au Sauveur tous ses besoins et toutes ses peines, toutes ses douleurs et tous ses fardeaux ? Il est l’Admirable », le Conseiller ». Sa sympathie si exquise et si tendre peut pĂ©nĂ©trer jusqu’aux profondeurs les plus intimes de vos peines. Ces peines peuvent ĂȘtre grandes, mais les bras Ă©ternels de sa misĂ©ricorde vous entourent. Pensez Ă  lui en ce moment mĂȘme comme au Souverain Sacrificateur qui se charge d’offrir Ă  son PĂšre et Ă  votre PĂšre vos plus faibles aspirations, vos plus douloureux soupirs. La rĂ©ponse Ă  vos priĂšres pourra tarder ; vos supplications sembleront peut-ĂȘtre voltiger autour du trĂŽne de la grĂące, sans pouvoir jamais arriver jusqu’à lui, car le Dieu de misĂ©ricorde fait quelquefois attendre ses enfants. Il le fait pour Ă©prouver leur foi et leur persĂ©vĂ©rance, pour les former aussi Ă  plus de soumission et de patience. Il aime Ă  les voir surmonter tout obstacle, espĂ©rer contre toute espĂ©rance, ne pas se laisser dĂ©courager par un apparent oubli de sa part. Mais il viendra bientĂŽt, et la source de la grĂące et de l’amour jaillira enfin pour eux. Il leur fera entendre, au moment qu’il a choisi lui-mĂȘme pour cela, ces consolantes paroles Qu’il te soit fait comme tu as cru ». CƓur affligĂ©, remets donc ta cause Ă  ton RĂ©dempteur ; ne crains pas de le lasser par ton importunitĂ© ; encore une fois, il prend plaisir Ă  t’entendre, et son PĂšre met sa gloire Ă  bĂ©nir. Ces paroles mĂ©morables prononcĂ©es Ă  BĂ©thanie seront toujours vraies, toujours irrĂ©vocables Je sais que tu m’entends toujours ». Oui, JĂ©sus est Ă  la droite de Dieu pour ĂȘtre ton intercesseur et ton avocat. Celui qui a fait les promesses est fidĂšle et Il est puissant pour les accomplir. Qui est-ce qui nous sĂ©parera de l’amour du Christ ? » J’ai attendu l’Éternel ; mon Ăąme l’a attendu et j’ai eu mon attente en sa parole » Ps. 1305. 4° Jour — Les voies de Dieu Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant, mais tu le sauras dans la suite » Jean 137. Oh ! jour bienheureux que celui oĂč toutes choses seront manifestĂ©es, oĂč tant de mystĂšres seront rĂ©vĂ©lĂ©s Ă  la lumiĂšre de l’éternitĂ© et oĂč se dĂ©roulera Ă  nos yeux le plan merveilleux d’une sagesse souveraine et d’un amour ineffable ! Ici-bas ce que le Seigneur permet Ă  notre Ă©gard nous Ă©tonne ; nous ne pouvons sonder ses voies. Mais bientĂŽt le mystĂšre de Dieu sera accompli », les sceaux fermĂ©s seront ouverts et expliquĂ©s. Oui, le jour vient oĂč tout nuage sera dissipĂ©, oĂč l’ombre fera place Ă  la lumiĂšre parfaite. Demeure donc en paix, ĂŽ croyant ! le propos divin te semble obscur peut-ĂȘtre ; tu n’y peux discerner aucun reflet lumineux ; tu ne peux distinguer la lumiĂšre au travers des tĂ©nĂšbres ; mais voici, le jour vient oĂč tout sera dĂ©voilĂ©. Prends patience encore un peu de temps. Le petit enfant se fie Ă  ce que lui dit son pĂšre, et quand arrive pour lui l’ñge de raison, bien des choses qui paraissaient Ă©tranges Ă  sa jeune intelligence lui sont expliquĂ©es tout naturellement. Tant que tu demeures sur cette terre, tu n’es qu’un enfant ; mais dans l’éternitĂ©, ton Ăąme immortelle atteindra la stature de l’homme fait. LĂ , toutes les voies de Dieu seront mises au grand jour ; toute obscuritĂ© disparaĂźtra, perdus que nous serons dans les flots de la gloire magnifique ! » Mais hĂ©las ! combien souvent, au lieu de faire taire nos dĂ©sirs, comme un enfant sevrĂ© auprĂšs de sa mĂšre, ne recherchons-nous pas des choses trop grandes et trop Ă©levĂ©es pour nous ! Ps. 1311, 2. Non contents de savoir que tout ce qui nous arrive est voulu par notre PĂšre, nous cherchons prĂ©somptueusement Ă  dĂ©couvrir le comment et le pourquoi. Or, s’il est difficile d’apprĂ©cier Ă  leur juste valeur les Ɠuvres incomplĂštes et inachevĂ©es de l’homme, si le peintre et le sculpteur tremblent de voir leurs travaux jugĂ©s quand ils ne sont encore qu’à l’état d’ébauche, combien plus ne devons-nous pas craindre de juger tĂ©mĂ©rairement les Ɠuvres de Dieu ! Combien au contraire ne glorifierions-nous pas le Seigneur en acceptant sa volontĂ© avec une humble soumission, une confiance illimitĂ©e, et en attendant patiemment l’accomplissement de cette promesse Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant, mais tu le sauras dans la suite » ! Oui, n’en doutons pas, dans la suite les lumiĂšres et les ombres du tableau inachevĂ© seront fondues en un tout harmonieux. Et en contemplant l’édifice des voies de Dieu Ă  notre Ă©gard, nous trouverons que chaque pierre occupe la place qui lui convient, que chaque dĂ©tail de l’Ɠuvre ajoute Ă  l’ensemble et Ă  la symĂ©trie du monument entier. Ce que je fais ». Et qui nous adresse cette parole ? C’est Celui qui est mort et qui vit maintenant pour nous ! Oh ! Sauveur bien-aimĂ© ! tu fais beaucoup de choses que nos cƓurs aveugles voudraient repousser, des choses terribles que nous n’attendions point » ; mais voici quelque lourdes ou sĂ©vĂšres en apparence que soient les Ă©preuves que tu voudras nous imposer, nous ne les regarderons dĂ©sormais que comme une preuve de ton inexprimable et inaltĂ©rable amour. L’éternitĂ© nous dĂ©voilera que nous avions besoin de toutes ces choses qu’Il a permises envers nous ; nous verrons que rien d’autre, que rien de moins n’eĂ»t pu ĂȘtre fait pour nous que ce que tu as fait ! Et lorsque du ciel nous jetterons un regard en arriĂšre sur notre vie terrestre, nous ne pourrons que nous Ă©crier avec admiration et reconnaissance La parole de l’Éternel est droite, et toute son Ɠuvre est avec vĂ©ritĂ© » Ps. 334. 5° Jour — La gloire du PĂšre Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit En ceci mon PĂšre est glorifiĂ©, que vous portiez beaucoup de fruit » Jean 158. En contemplant l’ocĂ©an sans bornes de cette misĂ©ricorde dont chaque vague vous crie Dieu est amour ! » ne vous ĂȘtes-vous jamais demandĂ© Que pourrais-je faire pour Celui qui a tant fait pour moi ? » Lui offrir un Ă©quivalent ? je ne le puis ! l’obĂ©issance la plus parfaite ne pourrait ajouter un iota Ă  la gloire inaccessible de Dieu, — pas plus qu’un flambeau ne saurait ajouter Ă  l’éclat du soleil en plein midi, ou qu’une goutte d’eau n’ajouterait Ă  l’OcĂ©an. Et cependant, ĂŽ merveille ! tout indigne que je suis, je peux offrir un sacrifice que celui qui aime les cƓurs contrits et brisĂ©s ne mĂ©prisera point En ceci mon PĂšre est glorifiĂ©, que vous portiez beaucoup de fruit ». Lecteurs ! portez-vous des fruits dans la vigne du Seigneur ? Cherchez-vous Ă  faire de votre vie un acte permanent de consĂ©cration Ă  la gloire de Dieu ? La lui offrez-vous sans cesse en oblation, en retour de l’amour gratuit qu’il vous a tĂ©moignĂ© ? Peut-ĂȘtre ne pouvez-vous pas porter des fruits visibles aux yeux du monde. Votre position et les circonstances dans lesquelles vous vous trouvez vous interdisent peut-ĂȘtre de rendre des services Ă©clatants Ă  l’Ɠuvre du Seigneur, ou de vous distinguer par votre zĂšle, votre activitĂ©, vos gĂ©nĂ©reux efforts ; mais qu’importe ? Les fruits inconnus et ignorĂ©s des hommes, ceux qui mĂ»rissent dans la retraite, sont souvent ceux que Dieu estime le plus. Un esprit paisible et modeste, la patience et la soumission, la douceur et l’humilitĂ© ; une volontĂ© qui abdique entiĂšrement pour se laisser conduire par celle de Dieu, lui disant toujours Non pas ce que je veux, mais ce que tu veux » ; un cƓur exempt d’égoĂŻsme, dĂ©bonnaire, plein de support ; une bontĂ© sans ostentation voilĂ  quelques-uns des fruits auxquels votre PĂšre prend plaisir, et par lesquels vous pouvez le glorifier. Peut-ĂȘtre vous trouvez-vous maintenant dans l’épreuve, la maladie ou le deuil ; vous ĂȘtes appelĂ©s Ă  passer par quelque fournaise ardente. Eh bien, lĂ  aussi vous pouvez glorifier Dieu. Jamais le PĂšre n’est mieux glorifiĂ© sur la terre que lorsque du milieu de la fournaise ses enfants font monter vers lui les soupirs de l’amour et de la foi, et qu’ils s’écrient Que le Seigneur fasse ce qui lui semblera bon ! » Oui, Ăąmes affligĂ©es, vous pouvez glorifier Dieu, et vous pouvez le faire plus parfaitement mĂȘme que ne le font les anges ; car habitant un monde oĂč l’épreuve est inconnue, ils ne peuvent glorifier Dieu qu’en se prosternant devant son trĂŽne, tandis que vous, vous pouvez le glorifier dans vos Ă©preuves d’abord, par votre soumission Ă  sa volontĂ©, et bientĂŽt par la couronne » que vous attendez avec espĂ©rance et que vous jetterez Ă  ses pieds. Ah ! s’il vous Ă©prouve sĂ©vĂšrement, si le divin cultivateur taille sa vigne, Ă©monde ses sarments les plus riches, et retranche ses plus beaux rameaux, rappelez-vous dans quel but il agit ainsi Il les nettoie », nous dit le Seigneur JĂ©sus, afin qu’ils portent plus de fruit », et c’est en ceci », ajoute-t-il, que mon PĂšre est glorifiĂ© ». Puissions-nous tous nous remettre entiĂšrement entre ses mains, disant avec un complet abandon PĂšre, glorifie-toi toi-mĂȘme », soit que tu donnes, soit que tu reprennes, soit que tu remplisses ma coupe ou que tu la vides, que je ne veuille jamais que ce que tu veux ! — Les anges mĂȘmes ne possĂšdent pas d’honneur et de privilĂšge plus grand que celui de glorifier le Dieu devant lequel ils s’inclinent nuit et jour. Quel bonheur que d’ĂȘtre appelĂ©s Ă  le glorifier par notre vie ici-bas ! Quel bonheur surtout que d’ĂȘtre en communion d’esprit avec le Seigneur JĂ©sus lui-mĂȘme, qui a pu dire en vĂ©ritĂ© PĂšre, je t’ai glorifiĂ© sur la terre ! » Je vous ai dit ces choses afin que ma joie soit en vous et que votre joie soit accomplie » Jean 1511. 6° Jour — Tendre sollicitude Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Les cheveux mĂȘme de votre tĂȘte sont tous comptĂ©s » Matt. 1030. Quelle parole que celle-lĂ  ! Quoi ? Dieu prend garde Ă  tout ce qui vous concerne, il compte vos cheveux mĂȘmes ! Rien ne peut arriver par hasard ou par accident. Rien ne peut Ă©chapper Ă  son regard ; la chute de la feuille dans la forĂȘt, le vol de l’insecte Ă©phĂ©mĂšre, les anges qui parcourent le ciel, les mondes qui gravitent dans l’espace, tout est Ă©galement vu de Dieu. L’homme appelle les choses de la terre grandes » ou petites », selon son apprĂ©ciation bornĂ©e ; mais Dieu ne connaĂźt pas de telles distinctions. Et qu’il est surtout consolant de penser Ă  sa tendre sollicitude envers son peuple, auquel il mesure lui-mĂȘme sa part de joies et de douleurs ! Douceurs ou amertumes, tout nous est Ă©galement dispensĂ© par notre PĂšre. Pas une nuit de misĂšre » qui ne soit ordonnĂ©e » de lui Job 73, pas une douleur, pas une larme qui ne lui soit connue. Ce que nous appelons des voies tĂ©nĂ©breuses ne sont que les manifestations de sa fidĂ©litĂ© immuable. L’homme peut se tromper ; ses voies sont tortueuses, mais la voie du Dieu fort est parfaite. Il met mes larmes dans ses vaisseaux ; ses bras misĂ©ricordieux s’étendent sur moi et m’enveloppent ; il me garde comme la prunelle de son Ɠil » ; il me porte comme un homme porte son fils ». Lorsque je cherche Ă  lire dans l’avenir, je n’y entrevois peut-ĂȘtre qu’incertitude, mystĂšre ou Ă©preuve ; mais qu’importe ? j’ai mis en Dieu ma confiance, je sais que tout ce qui me concerne est voulu de lui. Les dangers qui me menacent, il peut m’en dĂ©livrer, les labyrinthes de difficultĂ©s oĂč je m’égare s’expliqueront un jour, grĂące Ă  sa misĂ©ricordieuse providence Il garde les pieds de ses bien-aimĂ©s ». Il ne tombera pas un cheveu de leur tĂȘte sans sa permission. TantĂŽt il nous conduit par des chemins obscurs, tantĂŽt par des voies douloureuses, le plus souvent par des sentiers dĂ©tournĂ©s que nous n’aurions pas choisis nous-mĂȘmes ; mais il nous conduit toujours avec sagesse et compassion, et quelque fatigante, pĂ©nible et raboteuse que soit la route par laquelle il nous fait passer, soyons assurĂ©s qu’elle est bonne, — bien plus, qu’elle est la seule bonne, la seule qui pĂ»t s’accorder avec une volontĂ© pleine d’amour et de sagesse. Rien, disait un chrĂ©tien distinguĂ©, n’affermit l’ñme au milieu des vicissitudes et du bruit des choses prĂ©sentes comme de jeter un regard au-dessus et un autre au-delĂ  de ces choses au-dessus, c’est-Ă -dire Ă  la main sĂ»re et paternelle qui dirige tout ; au-delĂ , c’est-Ă -dire au but glorieux et rĂ©jouissant vers lequel cette mĂȘme main nous conduit ». Le grand Conseiller, dit un autre auteur chrĂ©tien [Thomas Brooks], s’enveloppe de nuĂ©es et d’obscuritĂ©, nous appelant Ă  le suivre, au moindre signe, Ă  travers ces nuages, et nous promettant de l’autre cĂŽtĂ© de l’horizon un soleil Ă©ternel et sans ombre de changement ». Oui, c’est de cet autre cĂŽtĂ© », ĂŽ JĂ©sus, que nous saurons comment les vents, si rudes en apparence, de la vie, ont poussĂ© nos barques vers le port dĂ©sirĂ©. Je puis donc te remettre mon Ăąme en toute confiance comme Ă  mon CrĂ©ateur. Tu t’es donnĂ© toi-mĂȘme pour moi ! Cette preuve si immense de ton amour me garantit que tu me donneras toutes les autres bĂ©nĂ©dictions dont je pourrai avoir besoin. — Oh ! quelle douce pensĂ©e ! Quoi ? mes Ă©preuves sont toutes comptĂ©es par Celui qui s’appelle l’Homme de douleurs ! mes pleurs sont connus de Celui qui rĂ©pandit premiĂšrement ses larmes, puis son sang pour moi ! Il ne m’imposera pas de fardeau inutile, il n’exigera pas de sacrifices superflus. Non, de mĂȘme qu’il n’y a pas eu une goutte de trop dans la coupe de ses propres souffrances, de mĂȘme il n’y en aura pas une de trop dans le calice de chacun de ses bien-aimĂ©s Voici, qu’il me tue, j’espĂ©rerai en lui » Job 1315 Car Lui-mĂȘme a dit Je ne te laisserai point et je ne t’abandonnerai point » HĂ©b. 135. Il est bon pour moi que j’aie Ă©tĂ© affligĂ© » Ps. 11971. 7° Jour — Le bon Berger Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Je suis le bon berger ; et je connais les miens, et je suis connu des miens » Jean 1014. Quelles douces paroles ! les brebis qui connaissent la voix du bon Berger peuvent rendre tĂ©moignage Ă  sa vĂ©ritĂ© et Ă  sa fidĂ©litĂ©. Que serait pour nous l’éternitĂ©, si, quittant son trĂŽne de lumiĂšre et de gloire, il n’avait daignĂ© descendre dans cette sombre vallĂ©e de malĂ©diction, et n’avait donnĂ© sa vie en rançon pour plusieurs ? Qui pourrait dire l’amour qu’il porte Ă  chacune des brebis de son troupeau ? Quelle patience et quelle ardeur infatigables ne met-il pas Ă  chercher celle qui est perdue dans le dĂ©sert, ne s’accordant aucun repos jusqu’à ce qu’il l’ait trouvĂ©e ! Écoutez la voix de son amour qui vous dit aujourd’hui encore Je suis le bon Berger ». Son Ɠil suit toujours avec la mĂȘme sollicitude l’ñme perdue et coupable. Son cƓur est toujours plein d’amour, et ni les gloires cĂ©lestes, ni les cantiques des anges ne sauraient lui faire oublier une seule de ses brebis ; sa voix est toujours aussi pleine de charme, et de ses lĂšvres sortent, avec la mĂȘme grĂące que lorsqu’il les prononçait pour la premiĂšre fois, ces paroles ineffables Je connais mes brebis ». Oui, JĂ©sus connaĂźt chacune d’elles par son nom, quelque faible, quelque lasse, quelque malade qu’elle soit. Ô douce pensĂ©e ! Il me suit de son regard compatissant, jour aprĂšs jour, Ă  travers le dĂ©sert ; il me mĂšne dans des parcs herbeux ; il connaĂźt mes besoins, mes Ă©preuves, mes douleurs et mes perplexitĂ©s ; il me guide Ă  travers les chemins arides, les ruisseaux, les sentiers semĂ©s de ronces et d’épines. Il marche devant ses brebis » ; il ne les rudoie pas, mais les conduit doucement, et les voies par lesquelles il les fait passer, il les a lui-mĂȘme parcourues. Lui aussi a bu du torrent dans le chemin » ; il a souffert, et ayant Ă©tĂ© tentĂ© lui-mĂȘme en toutes choses, il est Ă  mĂȘme de secourir ceux qui sont tentĂ©s ». Il semble nous dire Ne craignez pas ; je ne puis vous Ă©garer ; suivez-moi Ă  travers les plaines dessĂ©chĂ©es et les sombres dĂ©serts, aussi bien que dans les gras pĂąturages ou le long des eaux tranquilles. Vous vous demandez peut-ĂȘtre pourquoi, au lieu de vous mener dans la fraĂźche vallĂ©e Ă©maillĂ©e de mille fleurs et inondĂ©e des rayons du soleil, j’ai choisi pour vous quelque mont escarpĂ© et solitaire, quelque site triste et douloureux ? mais ne craignez pas ; si je vous conduis par un chemin que vous ne connaissez pas, moi je le connais, et c’est moi qui l’ai choisi. Suivez-moi ! » Et mes brebis me connaissent ! » ajoute le Seigneur JĂ©sus. Lecteur ! ton expĂ©rience personnelle est-elle en accord avec ces derniĂšres paroles ? Connais-tu vĂ©ritablement JĂ©sus dans toute la gloire de sa personne, dans la plĂ©nitude de sa grande Ɠuvre, dans l’inĂ©puisable amour et la tendre sympathie qu’il t’a tĂ©moignĂ©e et qu’il te tĂ©moigne encore Ă  toi-mĂȘme ? Des voyageurs, en parcourant la Palestine, ont remarquĂ© que les brebis de ces contrĂ©es ne se contentent pas de suivre leur berger, mais que tout en paissant le long du chemin, elles cherchent d’un regard anxieux Ă  s’assurer qu’il n’est pas loin d’elles. — Est-ce lĂ  ton attitude, ĂŽ chrĂ©tien ? Regardes-tu constamment Ă  JĂ©sus ? Dans toutes tes voies connais-le et il dirigera tes sentiers ». Laisse-le pourvoir Ă  ton avenir. — Que cette parole Le Seigneur est mon berger, je ne manquerai de rien », soit ton mot d’ordre, durant ton voyage Ă  travers le dĂ©sert, jusqu’au jour oĂč la dispensation de la grĂące se changera pour toi en gloire. Oh ! puisses-tu ĂȘtre du nombre de ces Ăąmes simples et confiantes, desquelles on peut dire avec vĂ©ritĂ© Elles suivent l’Agneau oĂč qu’il aille ». Ses brebis le suivent, car elles connaissent sa voix » Jean 104. 8° Jour — Le vrai consolateur Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Je prierai le PĂšre, et il vous donnera un autre consolateur, pour ĂȘtre avec vous Ă©ternellement » Jean 1416. Lorsqu’un ami bien-aimĂ© nous a Ă©tĂ© enlevĂ©, avec quelle force le cƓur ne se sent-il pas attirĂ© vers ceux qui restent ! JĂ©sus, sur le point de quitter ses disciples affligĂ©s, veut les adresser Ă  quelqu’un » qui puisse remplir par sa prĂ©sence le vide que son dĂ©part va laisser. Le nom de cet ami est le consolateur » ; sa mission est de demeurer Ă©ternellement avec eux ». En consĂ©quence, aussitĂŽt que le Seigneur JĂ©sus fut remontĂ© au ciel, dix jours aprĂšs son Ă©lĂ©vation dans la gloire, le Saint Esprit vint sur les disciples et les revĂȘtit de la puissance d’En-haut. Si je m’en vais, je vous l’enverrai », avait dit JĂ©sus. Lecteurs, jouissez-vous de l’immense privilĂšge de vivre sous la dispensation du Saint Esprit ? Êtes-vous bien pĂ©nĂ©trĂ©s de cette pensĂ©e que toute votre vie d’enfant de Dieu dĂ©pend de son action dans votre esprit et dans votre cƓur ; vos priĂšres, vos cantiques, vos mĂ©ditations de la Parole de Dieu, votre marche, votre service, votre espĂ©rance ? N’oubliez pas, chers rachetĂ©s du Seigneur, que vous ĂȘtes le temple du Saint Esprit » et que l’Esprit de Dieu habite en vous ». Ne l’attristez pas ; restez humblement soumis Ă  son action et vous expĂ©rimenterez qu’il est un Esprit de lumiĂšre et d’amour, de grĂące et de vĂ©ritĂ©, de justice et de saintetĂ©, de paix et de joie ineffable. Vous ne pouvez vivre sans l’Esprit de Dieu ; pas une sainte inspiration, pas un soupir d’amour, pas un regard de foi qui ne vienne de sa misĂ©ricordieuse influence. Sans lui point d’efficace dans la Parole sainte, point de bĂ©nĂ©diction dans les assemblĂ©es chrĂ©tiennes, point de fruit permanent de justice au temps de l’affliction. De mĂȘme que l’ange dirigea Agar vers la source cachĂ©e, de mĂȘme le Saint Consolateur, fidĂšle Ă  son nom et Ă  sa mission, conduit son peuple aux eaux rafraĂźchissantes, faisant briller les promesses divines d’une gloire nouvelle et revĂȘtant l’Ɠuvre et la personne du Sauveur d’une grĂące et d’une beautĂ© nouvelles aussi. Qu’il est prĂ©cieux le nom que lui donne ici JĂ©sus le Consolateur » ! Quelle parole pour son peuple affligĂ© ! L’Église Ă©trangĂšre dans ce monde a sa tente plantĂ©e dans une vallĂ©e de larmes », et le nom du divin conducteur qui s’est chargĂ© d’elle, comme autrefois ÉliĂ©zer s’était chargĂ© de Rebecca, et veut pourvoir Ă  tous ses besoins est le Consolateur ». Grande est la famille des affligĂ©s ; mais il a pour tous un baume bienfaisant. Il en a pour le faible, pour celui qui est aux prises avec la tentation, pour le malade, pour le cƓur brisĂ©, pour le pauvre, pour le mourant. Que ce Consolateur est diffĂ©rent des autres ! Les amis humains, un regard peut les aliĂ©ner, l’adversitĂ© peut les dĂ©sunir, la mort les sĂ©parer pour toujours. Mais JĂ©sus nous parle d’un ami dont l’attribut et l’office particulier sont de demeurer Ă©ternellement avec nous. Lui vous enseignera toutes choses et vous rappellera toutes les choses que je vous ai dites » Jean 1426. 9° Jour — Le juge misĂ©ricordieux Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Moi non plus, je ne te condamne pas ; va, — dorĂ©navant ne pĂšche plus » Jean 811. Combien JĂ©sus est plus compatissant que le plus compatissant des amis terrestres ! Dans un moment d’irritation, les disciples veulent faire descendre le feu du ciel sur des pĂ©cheurs obstinĂ©s, mais le MaĂźtre reprend leur coupable emportement. Pierre, le disciple si fervent pour son MaĂźtre et qui, cependant, le renia, Pierre ne pouvait s’attendre Ă  recevoir de lui que de sĂ©vĂšres reproches pour son manque de foi ; mais Celui qui connaĂźt le fond des cƓurs et savait le profond repentir de son disciple, lui envoie tout d’abord le plus tendre des messages Marc 167, et ensuite lui adresse le plus doux des reproches M’aimes-tu ? ». Les gardes, au livre des Cantiques 57, frappent l’épouse, lui arrachent son voile et la couvrent d’injures ; mais lorsqu’elle retrouve l’Époux qu’elle avait perdu, celui-ci ne fait entendre ni plainte, ni reproche ! Dieu est si lent Ă  s’irriter et si prompt Ă  pardonner, disait un chrĂ©tien distinguĂ©, qu’alors mĂȘme que les prophĂštes perdaient toute patience avec le peuple d’IsraĂ«l et le vouaient Ă  la malĂ©diction divine, le Seigneur continuait pourtant Ă  user de support envers ce peuple qu’il avait Ă©lu pour l’amour de son nom ». La pĂ©cheresse Ă  laquelle JĂ©sus adressait les paroles consolantes que nous dĂ©sirons mĂ©diter aujourd’hui Ă©tait repoussĂ©e avec mĂ©pris par ses accusateurs ; mais, tandis que ces derniers rĂ©clamaient contre elle la rigueur de la loi, JĂ©sus lui dit Je ne te condamne pas ». Quel bonheur que de tomber entre les mains de ce Dieu Sauveur, si plein de misĂ©ricorde, et dont les compassions sont sans bornes ! Mais devons-nous en conclure que JĂ©sus ferme les yeux sur le pĂ©chĂ© ? Loin de nous une telle pensĂ©e. Son sang et son Ɠuvre, BethlĂ©hem et le Calvaire, rĂ©futent une supposition aussi impie ! Avant que le crime d’une seule Ăąme ait pu ĂȘtre lavĂ©, le Fils de Dieu a dĂ» quitter le trĂŽne Ă©ternel de la gloire et venir endurer la mort et le jugement sur un bois infĂąme. Mais cette parole de JĂ©sus est une parole d’encouragement pleine de douceur pour le cƓur sincĂšre et repentant ; elle lui dit que quand ses pĂ©chĂ©s seraient rouges comme le cramoisi, ils seront blancs comme la neige, et quand ils seraient comme l’écarlate, ils seront comme la laine » ; car il n’y a pas de limites au pardon libre, entier et Ă©ternel qui lui est offert. De mĂȘme que les anciens IsraĂ©lites, au milieu de leur agonie, devaient regarder au serpent d’airain pour vivre », de mĂȘme Dieu nous dit encore Vous tous les bouts de la terre, regardez Ă  moi et soyez sauvĂ©s ». À cĂŽtĂ© de la croix de JĂ©sus s’élĂšve un autre monument glorieux de la grĂące de Dieu ; c’est le bois oĂč expira le brigand et sur lequel sont gravĂ©es ces paroles adressĂ©es Ă  tout pĂ©cheur qui se sent perdu C’est une chose certaine et digne de toute acceptation que JĂ©sus Christ est venu dans le monde pour sauver les pĂ©cheurs ». — Quels que soient nos pĂ©chĂ©s, dit Rutherford, lorsqu’ils tombent dans l’ocĂ©an de la misĂ©ricorde divine, ils ne sont plus que comme une goutte de sang qui, tombant dans le vaste OcĂ©an, s’y perdrait aussitĂŽt ». Lecteur, tu es peut-ĂȘtre le premier des pĂ©cheurs. Semblable au banqueroutier qui craint de regarder ses livres, tu redoutes peut-ĂȘtre de sonder ton cƓur, tu es prĂšs de tomber dans le dĂ©sespoir ; ta conscience et le souvenir de tes pĂ©chĂ©s sans nombre s’élĂšvent contre toi et te crient Je te condamne ». Mais prends courage, pauvre Ăąme ; JĂ©sus te fait entendre une parole plus douce, une dĂ©claration plus rĂ©jouissante Je ne te condamne pas », te dit-il en cet instant mĂȘme ; va, et ne pĂšche plus Ă  l’avenir ». Et tous lui rendaient tĂ©moignage et s’étonnaient des paroles de grĂące qui sortaient de sa bouche » Luc 422. 10° Jour — La plus Ă©tonnante des relations Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Quiconque fera la volontĂ© de Dieu, celui-lĂ  est mon frĂšre, et ma sƓur, et ma mĂšre » Marc 335. Il semble qu’une seule comparaison empruntĂ©e Ă  la terre ne suffisant pas Ă  nous dĂ©peindre l’amour de JĂ©sus, ce bon Sauveur ait dĂ» rĂ©unir dans cette seule parole tout ce qu’il y a de plus tendre dans nos relations terrestres. Et dans toute la Bible, il en est ainsi. Les affections les plus puissantes que l’homme puisse ressentir sont employĂ©es tour Ă  tour par l’Esprit saint pour nous peindre la profondeur et l’intensitĂ© de l’amour de JĂ©sus. TantĂŽt il est comparĂ© Ă  une mĂšre qui console son enfant », tantĂŽt il appelle son peuple ma sƓur », mon amie », mon Ă©pouse ». Un tel langage nous surprend-il ? Ne serait-ce lĂ  qu’une simple figure plus expressive que rĂ©elle ? Mais JĂ©sus n’a-t-il pas donnĂ© sa vie pour nous ? Oh ! devant ce gage de Son amour, cessons de nous Ă©tonner qu’il ait pu s’exprimer en ces termes. ChrĂ©tien, es-tu triste ou solitaire ? Les liens les plus chers qui t’attachaient Ă  la vie viennent-ils de se rompre ? La tombe a-t-elle fait des vides autour de toi et brisĂ© tes plus intimes affections ? Oh ! s’il en est ainsi, regarde Ă  JĂ©sus, tu trouveras en lui un amour qui surpasse toute connaissance. Il est l’Ami plus attachĂ© qu’un frĂšre », dont la prĂ©sence et la douce sociĂ©tĂ© compensent toutes les pertes et remplissent tous les vides. Il fait habiter en famille celui qui Ă©tait seul ». Es-tu orphelin, sans consolation ? Souviens-toi que tu as au ciel un tendre ami qui t’aime d’un amour aussi profond que l’OcĂ©an, aussi incommensurable que l’éternitĂ©. Et pour qui sont les bĂ©nĂ©dictions prĂ©sentĂ©es sous cette Ă©tonnante image ? À qui JĂ©sus prodigue-t-il ces tĂ©moignages d’un amour sans bornes ? Pour avoir accĂšs Ă  ces grĂąces, il ne suffit pas de faire une profession extĂ©rieure de christianisme, d’appartenir Ă  telle ou telle Église, de suivre tel ou tel ministre, d’observer certains rites ou de porter telle dĂ©nomination religieuse ; non, les paroles de JĂ©sus ne s’appliquent qu’à celui seul qui est revĂȘtu de saintetĂ©, qu’à celui qui fait la volontĂ© du PĂšre ». Oui, l’ñme qui cherche Ă  reflĂ©ter, pour ainsi dire, l’esprit de Christ, l’ñme qui est remplie de l’Esprit, qui prend sa Parole pour rĂšgle de sa conduite journaliĂšre et fait de la gloire de Dieu le grand but de son existence ; l’ñme qui vit pour Dieu, avec Dieu et en Dieu, en un mot, l’ñme croyante, douce et humble qui cherche Ă  vivre de la vie de Christ et en vue du ciel, cette Ăąme, — et celle-lĂ  seule, — peut goĂ»ter les joies et les bĂ©nĂ©dictions de la famille de Dieu. Si l’amitiĂ© des puissants et des vertueux de la terre est chose dĂ©sirable, qu’est-ce donc que de possĂ©der cet amour divin auprĂšs duquel l’affection terrestre d’un frĂšre ou d’une sƓur, celle d’un pĂšre, d’une mĂšre, ou d’un ami ne sont que comme de pĂąles Ă©toiles Ă  cĂŽtĂ© du soleil resplendissant ! JĂ©sus ne craint pas de nous appeler ses frĂšres. Jetant les yeux sur de pauvres vermisseaux tels que nous, il dit Voici mon frĂšre, ma sƓur et ma mĂšre ! » N’est-il pas plein de beautĂ© et d’amour ce premier message du Christ ressuscitĂ© Va dire Ă  mes frĂšres Je monte vers mon PĂšre et votre PĂšre, et vers mon Dieu et votre Dieu ? » Jean 2017. Et ce doux langage qu’il tient Ă  son PĂšre aprĂšs les souffrances endurĂ©es pour faire de nous une famille d’adorateurs J’annoncerai ton Nom Ă  mes frĂšres ; au milieu de l’assemblĂ©e je chanterai tes louanges » Ps. 2222 ; HĂ©b. 212. J’écrirai sur eux, dit-il ailleurs, mon nouveau nom ». Comme nous Ă©crivons notre nom sur un livre pour montrer qu’il nous appartient, de mĂȘme JĂ©sus Ă©crira son nom sur nous, — merveilleux ouvrage de sa grĂące, — afin que ce nom soit lu et connu des principautĂ©s et des puissances cĂ©lestes. Avons-nous connu et cru l’amour que Dieu a pour nous » ? Ah ! que notre gratitude est faible ! Qui ne pourrait souscrire Ă  ces mots d’un chrĂ©tien dont le nom est restĂ© en vĂ©nĂ©ration dans l’Église Ton amour a Ă©tĂ© pour moi comme une ondĂ©e abondante ; mais ma reconnaissance n’est que comme une goutte de rosĂ©e, et cette goutte elle-mĂȘme est souillĂ©e par le pĂ©chĂ© ». Puis au matin de l’éternitĂ©, bienheureux celui qui aura gardĂ© la parole du Seigneur et n’aura pas reniĂ© son Nom. Il verra s’accomplir la promesse donnĂ©e en Apoc. 312 Celui qui vaincra, je le ferai une colonne dans le temple de mon Dieu, et il ne sortira plus jamais dehors ; et j’écrirai sur lui le nom de mon Dieu, et le nom de la citĂ© de mon Dieu, de la nouvelle JĂ©rusalem qui descend du ciel d’auprĂšs de mon Dieu, et mon nouveau nom ». Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon PĂšre l’aimera, et nous viendrons Ă  lui, et nous ferons notre demeure chez lui » Jean 1423. 11° Jour — L’ami des orphelins Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Je ne vous laisserai pas orphelins, je viens Ă  vous » Jean 1418. Le chrĂ©tien est-il destinĂ© Ă  marcher toujours dans les sentiers de la joie ? Non, il a Ă©tĂ© averti au contraire qu’il doit s’attendre Ă  beaucoup de tribulations. Il a ses Maras aussi bien que ses Élims, ses vallĂ©es de Baca comme ses heures de repos. Il est souvent seul pour rĂ©sister Ă  la fureur de l’orage ; souvent son kikajon se flĂ©trit au moment oĂč il en aurait besoin ; son soleil se voile quand il est encore jour. Sa demeure et son cƓur, autrefois si joyeux, sont soudain obscurcis par une douleur qu’aucun Ă©tranger, qu’un frĂšre mĂȘme peut-ĂȘtre ne saurait partager. Mais nous avons quelqu’un qui, venu ici-bas pour souffrir, est toujours prĂȘt Ă  nous soulager. Que de fois sa voix d’amour n’a-t-elle pas fait entendre ses doux accents dans la triste chambre d’un malade ou auprĂšs d’un lit de mort Je ne vous laisserai pas orphelins ! » — C’est comme si JĂ©sus nous disait Le monde, les amis pourront vous abandonner ; les sĂ©parations douloureuses, la mort pourront vous atteindre ; mais ne craignez rien, moi je ne vous abandonnerai pas. Vous pourrez ĂȘtre solitaires, mais non pas seuls ; car moi, votre Seigneur et votre Dieu, je suis avec vous ! » JĂ©sus semble avoir une tendresse toute particuliĂšre pour ses enfants orphelins et affligĂ©s. Un pĂšre aime d’autant plus tendrement son enfant qu’il le voit malade et abattu ; de tous ceux de sa maison, c’est celui sur lequel se concentrent le plus ses pensĂ©es. De mĂȘme Christ semble trouver ses dĂ©lices Ă  prodiguer la plus tendre sympathie Ă  celui qui n’a personne qui l’aide. C’est aux jours de l’affliction que son peuple sent le plus vivement combien il lui est prĂ©cieux ; c’est lorsqu’il traverse le dĂ©sert » que JĂ©sus lui parle selon son cƓur » ; c’est de lĂ , chose merveilleuse, qu’il lui donne ses vignes et la vallĂ©e d’Acor [ou vallĂ©e du trouble] pour une porte d’espĂ©rance » OsĂ©e 215. LĂ  mĂȘme oĂč il s’y Ă©tait le moins attendu, il voit jaillir sous ses pas les sources de ses consolations cĂ©lestes. Comme autrefois Jonathan, faible et las, sentit renaĂźtre ses forces en prenant du miel coulant au milieu de la forĂȘt, ainsi il y a pour les enfants de Dieu, fatiguĂ©s et attristĂ©s, un miel rafraĂźchissant, — consolations Ă©ternelles dĂ©coulant de l’arbre de vie et qui viennent adoucir leurs plus dures Ă©preuves. Ô vous, Ăąmes affligĂ©es, soyez donc consolĂ©es ! Si JĂ©sus vous a retranchĂ© votre portion ici-bas, c’est afin de vous amener Ă  lui comme Ă  votre portion Ă©ternelle. S’il a tari les ruisseaux et la source de vos bĂ©nĂ©dictions temporelles, il l’a fait pour vous amener Ă  dire Toutes mes sources sont en toi ». Dieu semble vouloir remplir tous les vides que son amour a dĂ» creuser dans nos cƓurs, disait un fidĂšle, parlant d’aprĂšs sa propre expĂ©rience ; son but de grĂące est de guĂ©rir les cƓurs brisĂ©s ». Quelle admirable peinture le Seigneur nous donne de la profondeur, de la tendresse et de l’immuable certitude de ses consolations, quand il nous dit Comme quelqu’un que sa mĂšre console, ainsi moi, je vous consolerai ; et vous serez consolĂ©s » ! ÉsaĂŻe 6613. Ah ! qui ne voudrait voir se transformer ainsi toutes ses Ă©preuves, ses tristesses, ses amertumes, en tĂ©moignages de sympathie et d’amour du Consolateur des orphelins, de ce Consolateur puissant et tendre dont le seul regard dissipe les plus sombres douleurs ! Comme une brillante constellation jette sa clartĂ© la plus vive Ă  l’heure de minuit, de mĂȘme les paroles de JĂ©sus, vĂ©ritables messagĂšres, rĂ©pandent leur douce clartĂ© dans la sombre nuit de nos douleurs terrestres. Nous pouvons ne pas en discerner la beautĂ© lorsque l’horizon nous apparaĂźt brillant et lumineux, mais Dieu nous les tient en rĂ©serve pour les jours oĂč notre ciel est couvert de sombres nuages. Je vous ai dit ces choses, afin que, quand l’heure sera venue, il vous souvienne que moi je vous les ai dites » Jean 164. 12° Jour — La victoire sur le monde Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Vous avez de la tribulation dans le monde ; mais ayez bon courage, moi, j’ai vaincu le monde » Jean 1633. Qu’aurai-je Ă  craindre d’un monde dĂ©jĂ  vaincu ? Le Triomphateur tout-puissant, prĂšs de recevoir la couronne de gloire, se tourne vers ses faibles et timides soldats et leur dit de prendre courage. Ils n’ont pas Ă  combattre des ennemis inconnus. L’Homme-Dieu, notre MĂ©diateur, connaĂźt leurs Ă©preuves. Il a Ă©tĂ© tentĂ© en toutes choses ». Il marche devant nous et nous crie Ă  nous, pauvres pĂšlerins Je vous ferai connaĂźtre le chemin de la vie. Et ce chemin, il l’a ouvert lui-mĂȘme ; il en sait par expĂ©rience toutes les difficultĂ©s. Pas une Ă©pine douloureuse qui ne l’ait blessĂ©, pas une offense qu’il n’ait supportĂ©e, pas de larmes qu’il n’ait aussi rĂ©pandues ! Une chose, il est vrai, manque Ă  cette parfaite identitĂ© entre Christ et les siens il a Ă©tĂ© sans pĂ©chĂ© » ; mais cette horreur du pĂ©chĂ© qu’éprouvait sa nature sainte prĂȘte peut-ĂȘtre Ă  sa sympathie envers ceux qui ne sont que corruption au dedans et assaillis de tentations au dehors, quelque chose de plus intense et de plus profond. Lecteur ! es-tu prĂšs de succomber Ă  la tentation ? le monde a-t-il dĂ©ployĂ© devant toi ses appĂąts sĂ©ducteurs, ou ton cƓur serait-il inconstant et lĂ©ger ? ConsidĂšre Celui qui a souffert ! Ă©coute ton RĂ©dempteur adorable, te disant du haut de son trĂŽne J’ai vaincu le monde » ! Il a triomphĂ© des ruses de l’ennemi ; par trois fois, avec les mĂȘmes armes dont il veut que tu te revĂȘtes, il a repoussĂ© le tentateur en disant IL EST ÉCRIT. Serais-tu sous le poids de quelque peine Ă©crasante ou de quelque dĂ©tresse extrĂȘme ? Il sait ce que c’est que la langueur ». Lui, le vrai Cep, connaĂźt jusqu’aux moindres fibres de ses sarments ; la serpe qui les blesse le blesse aussi. Il a parcouru, disait un affligĂ©, toutes les phases de l’école de douleur par laquelle nous avons Ă  passer ». Il aime Ă  mettre son peuple dans des positions exceptionnelles et difficiles, pour le contraindre Ă  s’appuyer sur lui et Ă  se confier en sa puissance. S’il nous laisse ballotter au grĂ© des vagues, c’est pour nous faire sentir le besoin de la lumiĂšre conductrice qui Ă©mane de lui-mĂȘme et qui peut seule nous guider au milieu de la tempĂȘte. Soyez assurĂ©s qu’il n’y a qu’amour dans toutes ses voies. Celui qui nous connaĂźt infiniment mieux que nous ne nous connaissons nous-mĂȘmes, met souvent une Ă©pine sur notre chemin pour nous contraindre Ă  prendre notre essor vers le ciel et Ă  nous Ă©lever au-dessus de la terre oĂč nous rampons. Nous glissons sur une glace unie, dit Evans ; les chemins raboteux sont les plus sĂ»rs ». Ne nous attendons pas Ă  ne point verser de larmes sur cette terre ; ce bonheur est rĂ©servĂ© pour le ciel. Qui pourrait dire combien sont nĂ©cessaires Ă  l’enfant de Dieu les afflictions qu’il trouve dans le monde ? La vraie semence spirituelle de Christ c’est-Ă -dire le peuple qu’il s’est acquis est d’ordinaire dĂ©posĂ©e bien profondĂ©ment dans le sol et doit se frayer sa voie Ă  travers des difficultĂ©s sans nombre avant d’atteindre la surface ; mais ses racines n’en sont que plus fortes ; et si ces plantes du jardin de Dieu n’étaient sorties de ces profondeurs cachĂ©es, comme l’arbrisseau elles auraient Ă©tĂ© dĂ©racinĂ©es par le premier coup de vent. JĂ©sus aime conduire ses disciples, comme il le fit autrefois, sur une haute montagne Ă  l’écart », c’est-Ă -dire en un lieu bien Ă©levĂ© au-dessus des choses du monde ; mais lui-mĂȘme, vainqueur du monde, leur adresse, tout en les conduisant, ses consolations ineffables en attendant de les introduire dans sa gloire. Les souffrances du temps prĂ©sent ne sont pas dignes d’ĂȘtre comparĂ©es avec la gloire Ă  venir qui doit nous ĂȘtre rĂ©vĂ©lĂ©e » Rom. 818. 13° Jour — Le petit troupeau Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Ne crains pas, petit troupeau, car il a plu Ă  votre PĂšre de vous donner le royaume » Luc 1232. Encore la voix du bon Berger ! Encore une parole de consolation, et quelle tendre parole ! Son troupeau est petit, faible, craintif ; mais il est aimĂ© du PĂšre, il jouit de son bon plaisir » et il sera bientĂŽt un troupeau glorifiĂ© », abritĂ© dans la bergerie cĂ©leste et dans une sĂ©curitĂ© Ă©ternelle et parfaite ! Et comment le bon Berger apaise-t-il les craintes et les angoisses de ses brebis ? S’il les voit haletantes et fatiguĂ©es au penchant de la montagne, il leur montre de sa houlette les portes brillantes du royaume de gloire, en leur disant Le bon plaisir de votre PĂšre est de vous le donner ! » Quelles paroles rĂ©jouissantes ! Quelle bienheureuse perspective ! Sauveur misĂ©ricordieux, ton amour fait mon bonheur ! Le royaume de Dieu appartient aux fidĂšles en vertu d’une charte inaliĂ©nable et irrĂ©vocable. Je vous confĂšre un royaume », leur dit JĂ©sus dans une autre occasion, comme mon PĂšre m’en a confĂ©rĂ© un » Luc 2229. Ce royaume est aussi sĂ»r que l’amour Ă©ternel et que la toute puissance de Dieu. Satan, le grand ennemi du royaume, peut jeter dans vos Ăąmes des doutes, des mĂ©fiances et des craintes pour troubler votre paix, mais il ne peut vous dĂ©pouiller de votre propriĂ©tĂ©. Il faudrait qu’il arrachĂąt la couronne du front de Celui qui est assis sur le trĂŽne avant de pouvoir affaiblir ou altĂ©rer en quoi que ce soit cette promesse certaine. S’il a plu Ă  Dieu de frapper le pasteur du troupeau, il lui plaira aussi de donner la joie Ă  son peuple rachetĂ©. S’il a dit Ă  l’épĂ©e de se rĂ©veiller contre son compagnon, alors que le troupeau Ă©tait dispersĂ© », il mettra certainement son plaisir, pour l’amour du bon Berger, Ă  tourner sa main avec amour sur les petits de ce troupeau Zach. 137. ChrĂ©tiens, songez Ă  cette parole C’est la volontĂ© de votre PĂšre ». Le bon Berger, tout en vous conduisant Ă  travers les montagnes qui vous sĂ©parent encore de son heureux bercail, vous montre de toutes parts sur la route des signes et des gages de l’amour de son PĂšre. Il peut, il est vrai, vous conduire dans votre patrie par une voie qui vous est inconnue. AprĂšs avoir fait sortir son peuple d’IsraĂ«l hors d’Égypte, comment le fit-il entrer dans la terre promise ? En le faisant passer par quarante ans d’épreuves et de privations au dĂ©sert. Souvent il en agit encore ainsi ; mais confiez-vous en lui, ĂŽ croyants ; ne le dĂ©shonorez pas par vos doutes et vos craintes coupables. Ne regardez pas Ă  vos sentiers obscurs ou Ă  votre cƓur capricieux et vacillant, mais regardez plutĂŽt au but qui est devant vous. Avec quelle ardeur Dieu dĂ©sire votre salut ! Combien d’autres paroles, tout aussi tendres que celles-ci, ne vous a-t-il pas adressĂ©es ! Que la douce voix du bon Berger vous redise Il a plu Ă  votre PĂšre ». Je vous ai donnĂ©, semble-t-il nous dire, la meilleure preuve que telle est aussi ma volontĂ©, car pour ouvrir les portes de ce royaume, j’ai donnĂ© ma vie pour vous ; mais c’est aussi la volontĂ© de mon PĂšre ». Comme un berger prend soin de son troupeau au jour oĂč il est au milieu de ses brebis dispersĂ©es, a dit le Seigneur l’Éternel, ainsi je prendrai soin de mes brebis et je les sauverai de tous les lieux oĂč elles ont Ă©tĂ© dispersĂ©es au jour de la nuĂ©e et de l’obscuritĂ© profonde » ÉzĂ©ch. 3412. Or c’est ici la volontĂ© de Celui qui m’a envoyĂ©, c’est que je ne perde rien de tout ce qu’il m’a donnĂ©.. » Jean 639. Mes brebis Ă©coutent ma voix, et moi je les connais, et elles me suivent, et moi, je leur donne la vie Ă©ternelle, et elles ne pĂ©riront jamais ;et personne ne les ravira de ma main. Mon PĂšre qui me les a donnĂ©es est plus grand que tous, et personne ne peut les ravir de la main de mon PĂšre. Moi et le PĂšre, nous sommes un » Jean 1027-30. Ne crains donc point, petit troupeau ! quoique tu aies Ă  traverser pendant quelques jours encore une terre aride et dessĂ©chĂ©e, quoique ta toison soit peut-ĂȘtre mise en lambeaux par les ronces du chemin et tes pieds ensanglantĂ©s par les cailloux, ne crains point, te dis-je, car Ce n’est pas la volontĂ© de votre PĂšre qui est dans les cieux qu’un seul de ces petits pĂ©risse » Matt. 1814. 14° Jour — La grĂące Ă  la portĂ©e de tous Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Si quelqu’un a soif, qu’il vienne Ă  moi et qu’il boive » Jean 737. N’est-ce pas une des paroles les plus rĂ©jouissantes qui soient jamais sorties de la bouche du Seigneur » ? Le jour oĂč elle fut prononcĂ©e Ă©tait des plus solennels ; c’était le dernier, le grand jour » de la fĂȘte des Tabernacles, et la foule Ă©tait plus considĂ©rable encore qu’elle ne l’avait Ă©tĂ© pendant les sept autres jours de la fĂȘte. Le bassin d’or venait probablement, selon la coutume, d’ĂȘtre rempli des eaux de SiloĂ« et apportĂ© au temple au bruit des acclamations du peuple, lorsque le Sauveur du monde saisit cette occasion pour proclamer la bonne nouvelle du salut. Nombreuses, sans doute, furent les paroles que JĂ©sus prononça en ces jours particuliĂšrement solennels, mais il semble avoir rĂ©servĂ© la plus importante de toutes pour la derniĂšre. Quelle est donc cette vĂ©ritĂ© capitale sur laquelle il veut attirer l’attention de son nombreux auditoire ? C’est celle-ci Si quelqu’un a soif, qu’il vienne Ă  moi et qu’il boive ». Lecteur, doutez-vous de la rĂ©alitĂ© de cette misĂ©ricordieuse promesse ? Vos pĂ©chĂ©s sans nombre s’élĂšvent-ils comme une barriĂšre entre vous et la misĂ©ricorde gratuite du Sauveur ? Croyez-vous ne pas pouvoir venir Ă  lui tel que vous ĂȘtes, et qu’une guĂ©rison partielle, une rĂ©forme prĂ©paratoire doivent s’opĂ©rer en vous avant que vous osiez vous approcher de la source de vie ? Si vous le croyez, grande est votre erreur, car JĂ©sus vous dit Quiconque a soif » ; il ne fait aucune exception. Quoi de plus gratuit que l’eau ? Le plus pauvre mendiant peut se dĂ©saltĂ©rer, sans argent et sans aucun prix », Ă  la fontaine du chemin. Telle est l’image du salut glorieux que vous offre le Seigneur. Il vous invite Ă  venir Ă  lui avec votre misĂšre et votre pĂ©nurie, votre faiblesse et votre indignitĂ©. Souvenez-vous de l’entretien du RĂ©dempteur avec la Samaritaine. Elle Ă©tait une grande pĂ©cheresse, perdue, endurcie, dĂ©gradĂ©e, mais il n’exige d’elle aucune condition ; croire et croire seulement voilĂ  tout ce qu’il lui demande. Si tu connaissais le don de Dieu, lui dit-il, toi tu lui eusses demandĂ©, et il t’eut donnĂ© de l’eau vive ». Mais n’y a-t-il pas cependant une condition requise dans cette parole de JĂ©sus Si quelqu’un a soif » ? Peut-ĂȘtre ĂȘtes-vous abattu en pensant combien peu vous recherchez la saintetĂ©, combien peu vous sentez le besoin d’un Sauveur. Mais cette conviction mĂȘme de votre misĂšre n’est-elle pas un signe que vous soupirez Ă  quelque degrĂ© aprĂšs JĂ©sus Christ ? et quelque faible que soit ce soupir, si vous dites Je n’ai rien pour puiser, et le puits est profond », Celui qui vous offre l’eau du salut remplira lui-mĂȘme vos vaisseaux dessĂ©chĂ©s. Car Il a rassasiĂ© l’ñme altĂ©rĂ©e et a rempli de biens l’ñme affamĂ©e » Psaume 1079. JĂ©sus se tint lĂ , et cria ». — C’est le seul trait de ce genre qui nous soit racontĂ© dans la vie de Celui dont il Ă©tait dit Il ne criera pas et il n’élĂšvera pas sa voix, et il ne la fera pas entendre dans la rue » És. 422. Mais la vĂ©ritĂ© qu’il avait Ă  faire entendre Ă  la foule Ă©tant d’un intĂ©rĂȘt et d’une importance de premier ordre, il tenait particuliĂšrement Ă  la proclamer devant tous. Et c’est par une invitation semblable que le Seigneur JĂ©sus a voulu sceller le livre inspirĂ© Que celui qui a soif vienne et que celui qui veut prenne gratuitement de l’eau de la vie », nous rĂ©pĂšte-t-il encore Ă  la derniĂšre page de l’Apocalypse. Puissent ces paroles misĂ©ricordieuses rĂ©sonner jusqu’aux extrĂ©mitĂ©s du monde, en sorte qu’on puisse dire aujourd’hui comme autrefois Comme il disait ces choses, plusieurs crurent en lui » Jean 830. 15° Jour — Une douce servitude Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Mon joug est aisĂ© et mon fardeau est lĂ©ger » Matt. 1130. Pourrait-on en dire autant du joug de Satan et du joug du pĂ©chĂ© ? Combien ne serait-il pas plus vrai de dire Son joug est dur et son fardeau pesant » ? Le service de Christ est un service heureux et le seul heureux. Mon joug, dit-il. Ce joug nous est imposĂ© par un ami Ă©prouvĂ©, par un ami qui a portĂ© lui-mĂȘme le fardeau qu’il veut nous donner. Il s’est chargĂ© de nos douleurs ». Quelle bĂ©nĂ©diction que de se sentir sous la sainte servitude d’un MaĂźtre aussi bon ! Il n’en est pas de nous comme des esclaves que l’on frappait pour les faire travailler, mais nous sommes conduits » d’autant plus tendrement que JĂ©sus a mis son joug et son fardeau sur nous. Le grand apĂŽtre Paul, en parlant de lui-mĂȘme, emploie toujours les plus humbles Ă©pithĂštes ; ce n’était pas cependant qu’il n’eĂ»t bien des sujets de se glorifier il avait pris la parole devant des rois, avait pĂ©nĂ©trĂ© dans le palais des CĂ©sars et comparu devant CĂ©sar lui-mĂȘme ; il avait Ă©tĂ© ravi jusqu’au troisiĂšme ciel ; mais le seul titre qu’il se donne dans toutes ses Ă©pĂźtres, le seul qu’il soit heureux de prendre, est celui-ci Serviteur ou littĂ©ralement esclave » de JĂ©sus Christ » ! Lecteur ! connais-tu cette douce servitude ? Peux-tu dire aussi avec joie Ô Seigneur, je suis vĂ©ritablement ton serviteur » ? JĂ©sus n’est pas un maĂźtre dur ; et si jamais Satan cherchait Ă  te le persuader, rĂ©ponds hardiment Il m’a aimĂ© et il s’est donnĂ© lui-mĂȘme pour moi ». — Il est vrai, le joug est la discipline dont il se sert pour prĂ©parer ses enfants Ă  une glorieuse immortalitĂ©. Mais ne craignez pas ! C’est sa main toujours tendre qui a mis sur vous son joug, et qui l’y maintient. Il a proportionnĂ© lui-mĂȘme son joug Ă  vos forces ; mon fardeau est lĂ©ger », dit-il ; il vous accordera ses grĂąces dans la mesure exacte de vos besoins. Mieux encore, il vous amĂšnera Ă  aimer vos Ă©preuves, parce qu’elles vous feront apprĂ©cier toutes les richesses de la fidĂ©litĂ© et de la misĂ©ricorde de Dieu. Ah ! que son peuple a besoin de se sentir ainsi sous le joug, au milieu des tentations sans nombre qui l’environnent, pour rester soumis et humble. L’amour de Dieu use de tous les moyens pour subjuguer nos cƓurs, pour nous humilier et nous Ă©prouver, pour nous faire sortir de nous-mĂȘmes, de nos goĂ»ts, de nos relations, de notre bien-ĂȘtre, en un mot pour nous charger de son joug ! Et qui a jamais regrettĂ© cette heureuse servitude ? Parmi les mille regrets qui entourent souvent un lit de mort, et qui ont mouillĂ© plus d’une fois de larmes amĂšres l’oreiller du mourant, y en a-t-il jamais eu un seul qui ait eu pour objet de s’ĂȘtre soumis Ă  ce joug ? ChrĂ©tien dans l’épreuve, JĂ©sus t’a-t-il jamais fait dĂ©faut ? Son joug t’a-t-il jamais paru trop lourd ? Tes larmes n’ont-elles pas toujours Ă©tĂ© essuyĂ©es, et tes douleurs apaisĂ©es ? Tes tentations ont-elles jamais Ă©tĂ© au-dessus de tes forces ? Ah ! ne dois-tu pas bien plutĂŽt t’écrier Oui, la parole de l’Éternel est bonne » ; je lui ai remis mon fardeau et il m’a soutenu ? Comme tous les obstacles se sont dissipĂ©s ! Comme le joug a perdu sa pesanteur et la croix son amertume dans la pensĂ©e que tu les portais pour l’amour de JĂ©sus ! Un repos est promis dĂšs ici-bas Ă  celui qui accepte franchement ce joug ; mais un repos meilleur encore attend l’ñme fatiguĂ©e et chargĂ©e qui atteint le terme de sa course, car ainsi a dit JĂ©sus Prenez mon joug sur vous et apprenez de moi, car je suis dĂ©bonnaire et humble de cƓur, et vous trouverez le repos de vos Ăąmes » Matthieu 1129. 16° Jour — L’amour de Dieu Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Comme le PĂšre m’a aimĂ©, moi aussi je vous ai aimĂ©s » Jean 159. N’est-ce pas le plus Ă©tonnant des versets de la Bible ? Qui peut sonder la profondeur incommensurable de l’amour qui Ă©tait dans le sein du PĂšre de toute Ă©ternitĂ© pour le Fils de ses dilections ? Et cependant c’est cet amour qui sert de terme de comparaison au Sauveur, quand il veut exprimer sa tendresse pour ses disciples. Rien de plus mystĂ©rieux que la communion qui existe entre la premiĂšre et la seconde personne de la TrinitĂ© adorable dĂšs avant la crĂ©ation du monde. L’Écriture ne nous donne Ă  ce sujet que quelques rĂ©vĂ©lations, mais qui doivent nous suffire. J’étais alors Ă  cĂŽtĂ© de lui son nourrisson », nous dit la Parole, j’étais ses dĂ©lices tous les jours, toujours en joie devant lui ». Nous savons que nos affections terrestres sont susceptibles de croĂźtre en profondeur et en intensitĂ©. La grandeur de l’amitiĂ© d’hier n’est pas encore ce qu’elle pourra devenir, alors qu’elle aura Ă©tĂ© consacrĂ©e et mĂ»rie par des annĂ©es de rapports mutuels. Mais quelle perfection dans ce mutuel amour du PĂšre et du Fils qui est de toute Ă©ternitĂ© ! cet amour qui n’est pas comme le nĂŽtre, capricieux, passager, vacillant, sujet Ă  mille fluctuations, mais qui est, au contraire, pur, immuable, sans ombre de changement ! —Et cependant Ă©coutez ce que dit JĂ©sus Comme le PĂšre m’a aimĂ©, moi aussi je vous ai aimĂ©s ». AssurĂ©ment, s’il nous eĂ»t dit Comme mon PĂšre a aimĂ© les anges, moi je vous ai aimĂ©s », c’eĂ»t Ă©tĂ© dĂ©jĂ  infiniment plus que nous n’étions en droit d’attendre. Mais le vrai symbole de l’amour ne pouvait ĂȘtre qu’un amour infini. Bien avant que les jours et les mondes fussent créés, cet amour existait. L’amour du PĂšre, et son propre amour pour les pĂ©cheurs tels sont les deux sujets de la joie Ă©ternelle du Sauveur. Pour complĂ©ter l’image que nous montre notre texte, regardons Ă  la description de l’amour du PĂšre pour nous. À cause de ceci le PĂšre m’aime », dit ailleurs JĂ©sus, c’est que je laisse MA VIE » ! Dieu possĂ©dait en lui-mĂȘme un amour entier, parfait ; il n’avait pas besoin de l’amour de ses crĂ©atures pour ajouter Ă  sa gloire ou Ă  son bonheur ; nĂ©anmoins il semble dire que son amour pour nous est si intense, qu’il en aime davantage son Fils bien-aimĂ© si un amour infini est susceptible de s’accroĂźtre, parce qu’il a donnĂ© sa vie pour les coupables enfants d’Adam ! C’est en parlant des rachetĂ©s qu’il est dit Il se reposera dans son amour ; — il s’égayera en toi avec chant de triomphe ». En vĂ©ritĂ©, cette assertion Dieu est amour », nous a Ă©tĂ© surabondamment prouvĂ©e, et il ne nous est plus possible dĂ©sormais de considĂ©rer l’amour comme une perfection abstraite de la nature divine. Par ceci », nous dit l’apĂŽtre Jean, nous avons connu l’amour, c’est que Lui a laissĂ© sa vie pour nous » 1 Jean 316. AprĂšs cette preuve de la tendresse de JĂ©sus, aucune autre ne peut nous Ă©tonner. Ah ! qu’elles sont faibles nos plus tendres affections, comparĂ©es Ă  celle qu’il nous a tĂ©moignĂ©e ! Notre amour n’est qu’un pĂąle reflet de celui de Dieu, aussi froid que les rayons de la lune comparĂ©s Ă  ceux du soleil. — Nous refuserions-nous donc Ă  aimer davantage Celui qui nous a aimĂ©s le premier » et qui nous a tant aimĂ©s » ? Voyez de quel amour le PĂšre nous a fait don, que nous soyons appelĂ©s enfants de Dieu » 1 Jean 31. 17° Jour — Le rĂ©sumĂ© de l’Évangile Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Crois seulement » Marc 536. Cette parole est Ă  la fois la plus brĂšve et la plus consolante peut-ĂȘtre des paroles de JĂ©sus. Elle contient le rĂ©sumĂ© et l’essence mĂȘme de la vĂ©ritĂ© qui sauve. Lecteur, es-tu assailli par les terreurs de Satan ? La pensĂ©e de tes pĂ©chĂ©s, de ta vie de misĂšres, s’élĂšve-t-elle en tĂ©moignage contre toi, menaçant de te jeter dans le dĂ©sespoir ? Ne crains rien ! Une douce voix murmure Ă  ton oreille Crois seulement ». Tes pĂ©chĂ©s sont nombreux, il est vrai, mais ma grĂące et mes mĂ©rites les surpassent encore. Crois seulement » que je suis mort pour toi, que j’intercĂšde pour toi, et que cette parole est certaine et digne d’une entiĂšre croyance. — As-tu honteusement dĂ©sertĂ© la bonne voie ? As-tu reniĂ© ton Sauveur ? et par suite de cette coupable dĂ©faillance, Celui qui Ă©tait pour toi tout amour et dont le service faisait autrefois tes dĂ©lices, a-t-il cachĂ© sa face de toi ? Ton cƓur brisĂ© soupire-t-il en songeant aux jours bĂ©nis oĂč tu marchais avec Dieu, et t’écries-tu avec angoisse Oh ! que ne suis-je comme aux jours d’autrefois,
 quand la clartĂ© de Dieu luisait sur ma tĂȘte » ? Job 292, 3. S’il en est ainsi, crois seulement ». Change tes plaintes en priĂšres. Crois la parole de Celui dont les voies ne sont pas nos voies, et qui a dit Ă  des pĂ©cheurs tels que toi Revenez, fils infidĂšles, et je guĂ©rirai vos infidĂ©litĂ©s » JĂ©r. 322. — Ou bien encore, es-tu accablĂ© sous quelque lourde Ă©preuve ? tes plans les plus chers ont-ils Ă©tĂ© renversĂ©s ? tes plus belles fleurs se sont-elles flĂ©tries, Ă  peine Ă©closes ? Le Seigneur aurait-il oubliĂ© d’avoir compassion » ? Alors Ă©coute cette parole de JĂ©sus qui rĂ©sonne jusque dans la plus sombre nuit de l’épreuve, et qui retentit mĂȘme au delĂ  des portes de la mort Crois, crois seulement ». Toutes tes Ă©preuves, n’en doute pas, ont leur raison d’ĂȘtre. C’était peut-ĂȘtre une Ă©pine qu’il fallait enlever de ton sentier, ou une leçon pleine de misĂ©ricorde qu’il fallait t’enseigner. Le coup terrible qui a fondu sur toi t’a Ă©tĂ© envoyĂ© par amour ; la gloire de Dieu et le salut de ton Ăąme exigeaient que tu fusses ainsi frappĂ©. Ici-bas, tu dois accepter avec foi ce qu’Il permet Ă  ton Ă©gard. Maintenant la parole que JĂ©sus t’adresse est celle-ci Ne t’ai-je pas dit que, si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ? » Es-tu craintif et agitĂ© Ă  la pensĂ©e de la mort ? As-tu Ă©tĂ© toute ta vie » assujetti Ă  la servitude », dans la crainte du dernier ennemi ? Crois seulement ». Tel sera ton jour, telle sera ta force ». À l’heure de la mort il te sera accordĂ© une grĂące toute particuliĂšre. Un bras protecteur te soutiendra lorsque tu traverseras la sombre riviĂšre, et ce bras est plus puissant que les plus hautes vagues. Avant mĂȘme que tu t’en sois aperçu, l’obscuritĂ© sera passĂ©e et la vraie lumiĂšre brillera ; le murmure de la foi qui te rĂ©pĂ©tera dans la sombre vallĂ©e Crois seulement », sera soudain remplacĂ© par le rassasiement de joie devant la face de ton Sauveur. Alors la foi sera changĂ©e en vue, et l’espĂ©rance en rĂ©alitĂ©. JĂ©sus lui-mĂȘme n’a pas de remĂšde plus puissant contre le pĂ©chĂ©, l’épreuve et la souffrance, que celui renfermĂ© dans ces deux mots Crois seulement ». À l’heure suprĂȘme de sa propre agonie et Ă  la vue de l’affliction de ses disciples, quelles sont les paroles qui sortent de ses lĂšvres ? Que votre cƓur ne soit pas troublĂ© ; vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi » Croyez, oh ! croyez seulement » ! Je crois, Seigneur, viens en aide Ă  mon incrĂ©dulitĂ© » Marc 924. 18° Jour — Le grand calme Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit C’est moi, n’ayez point de peur » Marc 650 ; Jean 620. C’est moi, ou, comme le porte le texte original, JE SUIS ! n’ayez point de peur. — JĂ©sus vit ! JĂ©sus est lĂ  ! Que son peuple chasse donc toute crainte. Le Dieu tout-puissant marche sur les vagues. La raison humaine peut, il est vrai, juger autrement des choses ; elle peut dire que l’aveugle hasard, des circonstances imprĂ©vues rĂšglent les destinĂ©es de l’homme ; mais le chrĂ©tien sait qu’il n’en est pas ainsi. La voix de l’Éternel est sur les eaux ». Assis prĂšs du gouvernail, il dirige la barque ballottĂ©e sur les vagues, et la conduit en sĂ»retĂ© dans le port. Que de fois n’est-il pas venu Ă  nous comme il vint vers ses disciples, lorsque tout semblait perdu, — Ă  la quatriĂšme veille de la nuit », lorsque nous y pensions le moins ! Que de fois lorsque, comme l’apĂŽtre Paul Actes 2720, nous Ă©tions sur le point de faire naufrage, que ni le soleil ni les Ă©toiles ne paraissaient autour de nous », et que la tempĂȘte Ă©tait si violente que nous perdions toute espĂ©rance de nous sauver », — que de fois, dans de pareils moments, n’avons-nous pas entendu la parole de JĂ©sus, s’élevant au-dessus du bruit des vagues pour nous dire C’est moi, n’ayez point de peur ! » ChrĂ©tien dans l’épreuve, Ă©coute la voix qui te crie du milieu de l’orage Ne crains point, C’EST MOI » ; cette voix, comme celle de Joseph lorsqu’il s’adressait Ă  ses frĂšres, peut te sembler Ă©trange, rude mĂȘme, mais les paroles qu’elle prononce n’en sont pas moins pleines d’amour. C’est moi », semble-t-il dire, qui soulĂšve cette mer en furie, et c’est moi qui, lorsqu’elle aura accompli son Ɠuvre, l’apaiserai en lui disant Tais-toi, sois tranquille ». Chacune de ses vagues obĂ©it Ă  ma parole, chacune de tes Ă©preuves est voulue par moi dans un but misĂ©ricordieux ; elles ne sont pas destinĂ©es Ă  te jeter sur la cĂŽte aride et rocailleuse, mais Ă  t’amener plus prĂšs du ciel. Est-ce la maladie qui t’atteint ? Mais j’ai connu ces douleurs, cet Ă©puisement, ces nuits d’insomnie, et c’est moi qui te les ai envoyĂ©s pour te bĂ©nir. Est-ce la solitude et le deuil qui font couler tes larmes ? Mais ne suis-je pas ton consolateur, venu au monde pour souffrir avec toi ? Les ĂȘtres bien-aimĂ©s que tu as perdus, c’est moi qui les ai recueillis. Est-ce la mort qui t’effraie ? Mais je suis le vainqueur de la mort. Quand tu passeras par les eaux, je serai avec toi, et par les riviĂšres elles ne te submergeront pas ». BientĂŽt c’est moi qui viendrai te chercher, et qui t’introduirai dans la maison du PĂšre pour toujours ». Lecteur, tu auras sujet, n’en doute pas, de rendre grĂąces Ă  ton Dieu, pendant l’éternitĂ©, de chacune des tempĂȘtes qui t’assaillent ici-bas, car les tempĂȘtes mĂȘmes font avancer le voyageur chrĂ©tien vers le port dĂ©sirĂ©. La tourmente et l’obscuritĂ© vont passer et l’aurore inonder bientĂŽt de ses glorieux rayons les rivages de l’éternitĂ© ! Quelle doit donc ĂȘtre l’attitude de l’enfant de Dieu ? Il doit regarder constamment Ă  JĂ©sus, et non plus Ă  lui-mĂȘme, ni au pĂ©chĂ©, ni aux hommes ; il doit fixer le regard ferme et assurĂ© de la foi sur le Sauveur. Ah ! comme la contemplation vivante et vraie de JĂ©sus Christ Ă©loigne toute crainte coupable ? Les gardes romains, Ă  la rĂ©surrection de JĂ©sus, furent tellement effrayĂ©s qu’ils en devinrent comme morts », mais les pauvres femmes juives ne craignirent pas ; pourquoi cela ? parce qu’elles cherchaient JĂ©sus ». Il arrĂȘte la tempĂȘte, la changeant en calme, et les flots se taisent ; et ils se rĂ©jouissent de ce que les eaux sont apaisĂ©es, et il les conduit au port qu’ils dĂ©siraient » Psaume 10729, 30. Lecteur, que ton esprit fatiguĂ© se repose Ă  l’ombre de ces paroles d’un Sauveur misĂ©ricordieux, en disant J’ai attendu l’Éternel ; mon Ăąme l’a attendu, et j’ai eu mon attente en sa parole » Ps. 1305. 19° Jour — Un legs Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix, je ne vous donne pas, moi, comme le monde donne » Jean 1427. Quel trĂ©sor pour nous que les derniĂšres paroles d’un mourant qui nous est cher ! Comme ses derniers mots, ses derniers regards nous sont particuliĂšrement prĂ©cieux ! Or, voici les derniĂšres paroles, le legs sacrĂ© du Sauveur allant Ă  la mort pour nous Je vous laisse la paix ». De quelle paix s’agit-il ? de celle qu’il nous a acquise, d’une paix qui provient du pardon gratuit par son sang prĂ©cieux. Il a fait la paix par le sang de la croix ». C’est cette paix que peut seule donner la grĂące infinie de Dieu en vertu du grand sacrifice de son Fils unique et bien-aimĂ© ». JĂ©sus, notre Seigneur, lequel a Ă©tĂ© livrĂ© pour nos fautes et a Ă©tĂ© ressuscitĂ© pour notre justification » Romains 425. L’ñme humaine a besoin de paix. L’existence n’est qu’une longue aspiration aprĂšs le repos, et ce repos ne se trouve que dans le sang de la croix ! Ayant donc Ă©tĂ© justifiĂ©s sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur JĂ©sus Christ » Romains 51. — Il donne du repos Ă  ses bien-aimĂ©s ». AprĂšs avoir dit Je vous laisse la paix », JĂ©sus ajoute Je vous donne MA PAIX », la sienne propre, douce, profonde, parfaite paix dans la communication intime de son Ăąme avec le PĂšre, et Ă  laquelle il nous donne part avec lui ; paix de Dieu qui surpasse toute intelligence et qui gardera nos cƓurs et nos pensĂ©es dans le Christ JĂ©sus » Philippiens 47. Qu’elle est diffĂ©rente, cette douce paix, de la fausse et trompeuse sĂ©curitĂ© dans laquelle tant d’hommes vivent et meurent, Ce n’est pas ici un lieu de repos », dit le prophĂšte MichĂ©e. Paix, paix » — crie le monde, et il n’y a point de paix ». — Il n’y a pas de paix, dit l’Éternel, pour les mĂ©chants » ÉsaĂŻe 4822. Quand ils diront Paix et sĂ»retĂ© », alors une subite destruction viendra sur eux » 1 Thess. 53. Mais la paix de JĂ©sus n’est pas celle que le monde donne ! la paix du croyant est vĂ©ritable, profonde, solide, Ă©ternelle. Le monde avec tous ses appas, toutes ses sĂ©ductions, ne peut la donner ; le monde avec toutes ses vicissitudes, toutes ses fluctuations ne peut nous l’îter ! Elle brille d’un nouvel Ă©clat Ă  l’heure de l’épreuve, et Ă©claire la sombre vallĂ©e de la mort Prends garde Ă  l’homme intĂšgre et regarde l’homme droit, car la fin d’un tel homme est la PAIX » Ps. 3737. — Tu garderas dans une paix parfaite l’esprit qui s’appuie sur toi, car il se confie en toi » ÉsaĂŻe 263. Que de fois, en effet, le lit de mort du chrĂ©tien n’a-t-il pas Ă©tĂ© aussi paisible que le plus beau ciel d’un soir d’étĂ©, alors que tout repose dans le silence ? Que de fois l’ñme qui s’envolait pour l’éternitĂ© n’a-t-elle pas disparu comme le soleil Ă  son dĂ©clin, pour briller d’un nouvel Ă©clat dans une hĂ©misphĂšre plus belle ? Il me semble », disait un chrĂ©tien Ă©minent sur son lit de mort, il me semble n’avoir plus rien Ă  faire qu’à attendre tout est paix, douce paix ! » Lecteurs, connaissez-vous cette paix qui surpasse toute intelligence ? Pouvez-vous rĂ©pĂ©ter chaque matin Ă  l’heure du rĂ©veil J’ai la paix avec Dieu » ? Les flots de l’adversitĂ© peuvent mugir autour de l’enfant de Dieu, mais ils ne l’atteindront jamais, car il est Ă  l’abri dans le creux du rocher, et les plus violentes tempĂȘtes ne sauraient l’en arracher. Oh ! n’attendez pas votre derniĂšre heure pour possĂ©der une telle paix ! Comment sera-t-il possible d’adoucir les angoisses de cette heure solennelle, si vous n’avez pas reçu avant ce moment-lĂ  la grĂące et la paix » que Dieu vous offre ? Et souvenez-vous que toutes les paroles du Seigneur JĂ©sus sont autant de ruisseaux destinĂ©s Ă  grossir le fleuve de votre paix. Oh ! si tu avais fait attention Ă  mes commandements, ta paix aurait Ă©tĂ© comme un fleuve
 » És. 4818. — Il a dit lui-mĂȘme Je vous ai dit ces choses afin qu’en moi vous ayez la paix » Jean 1633. J’écouterai ce que dira Dieu, l’Éternel ; car il dira paix Ă  son peuple et Ă  ses saints. Mais qu’ils ne retournent pas Ă  la folie ? » Ps. 858. 20° Jour — Le pouvoir suprĂȘme Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Toute autoritĂ© m’a Ă©tĂ© donnĂ©e dans le ciel et sur la terre » Matt. 2818. Quel empire que celui-ci, comprenant les cieux et la terre. Les anges dans le ciel et les saints sur la terre sont soumis Ă  JĂ©sus. À sa voix, les flots s’apaisaient, les dĂ©mons s’enfuyaient avec terreur, la tombe rendait sa proie. Il porte sur la tĂȘte plusieurs diadĂšmes. Toutes choses lui sont assujetties voir HĂ©b. 1 et 2, et il a Ă©tĂ© donnĂ© pour ĂȘtre chef sur toutes choses Ă  l’Église qui est son corps Éph. 120-23. Oui, au-dessus de toutes choses », des plus petites comme des plus grandes. Il tient les sept Ă©toiles en sa main droite ; il marche au milieu des sept lampes d’or, alimentant celles-ci de l’huile de sa grĂące », et maintenant celles-lĂ  dans leur vĂ©ritable orbite. Grande, sans doute, est la puissance du prince des tĂ©nĂšbres ; mais Dieu en soit louĂ©, ce n’est pas Ă  lui qu’appartient la toute-puissance. Christ le retient captif ; il lui oppose une barriĂšre infranchissable. Nous lisons dans l’Évangile que Satan ne put pas mĂȘme entrer dans le troupeau de pourceaux avant que Christ le lui eĂ»t permis. Nous lisons aussi qu’il demanda Ă  cribler Pierre, mais le Seigneur dit Ă  son disciple J’ai priĂ© pour toi afin que ta foi ne dĂ©faille pas ». ChrĂ©tien, que de fois cette grĂące de JĂ©sus ne t’a-t-elle pas dĂ©livrĂ© du piĂšge de l’ennemi ? La clef de Satan n’ouvrait que trop bien, hĂ©las ! la porte de ton mauvais cƓur, mais celui qui est plus fort que l’homme fort », s’opposa victorieusement Ă  son entrĂ©e ; le pouvoir de l’adversaire attisait le feu, mais la toute-puissance de JĂ©sus l’éteignait. En ce moment mĂȘme, es-tu oppressĂ© par le sentiment de la grandeur de ta corruption, de la faiblesse de ton cƓur, ou bien serais-tu aux prises avec quelque tentation extĂ©rieure ou intĂ©rieure ? Regarde Ă  Celui qui t’a promis que sa grĂące suffirait. À lui est la toute puissance, Ă  lui est l’amour infini ! La mĂȘme main qui tient le sceptre de l’empire universel conduit doucement son peuple fatiguĂ© et chargĂ©. Celui qui compte les Ă©toiles aime aussi Ă  compter les Ă©preuves de ses enfants ; rien n’est trop grand, rien n’est trop petit Ă  ses yeux. Il met nos larmes dans ses vaisseaux, il fait Ă  son peuple un sentier uni dans son amour. Ô Sauveur bien-aimĂ© ! nos intĂ©rĂȘts Ă©ternels ne pourraient ĂȘtre en mains plus sĂ»res et meilleures que les tiennes. Je puis me reposer en paix sur ta toute-puissance ; je puis me rĂ©jouir de la tendre sympathie que tu nous as tĂ©moignĂ©e par ton humanitĂ© ; je puis avoir toute confiance en la parfaite sagesse de tes voies. Quelquefois », disait un chrĂ©tien, nous attendons une bĂ©nĂ©diction de notre façon, mais Dieu juge bon de nous en donner une de la sienne ». Quoi qu’il en soit, ses voies et sa volontĂ© sont toujours les meilleures. — Amour infini, puissance infinie, sagesse infinie, voilĂ  autant de garanties infaillibles de notre bonheur. Ses desseins sont immuables, ses promesses sont fidĂšles, et pas un seul iota de sa parole ne tombera en terre sans ĂȘtre accompli. Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point ». 21° Jour — L’office de l’Esprit Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Celui-lĂ  me glorifiera, car il prendra de ce qui est Ă  moi et vous l’annoncera » Jean 1614. Le Saint Esprit glorifie JĂ©sus dans sa personne, dans son caractĂšre, dans son amour et devant son peuple. Il est en quelque sorte le lien qui unit le chef glorieux dans le ciel et son Église ici-bas ; c’est lui qui prĂ©sente au grand Intercesseur assis sur le trĂŽne les besoins et les priĂšres incessantes des saints selon Dieu Rom. 826, 27, et qui est chargĂ© de leur communiquer en retour des trĂ©sors de consolation pour leurs Ă©preuves, de force contre leurs tentations, de sympathie pour leurs larmes, de richesse pour leur misĂšre, — le tout couronnĂ© par cette parole sublime qui nous dĂ©voile le but de l’Ɠuvre de l’Esprit Il me glorifiera ». Oui, l’Esprit glorifie JĂ©sus ; il ne parle pas de par lui-mĂȘme, mais il dit tout ce qu’il a entendu » ; il rappelle au croyant la toute-puissante intercession du Sauveur, ses paroles de sympathie, les messages pleins de tendresse d’un cƓur qui, bien qu’humain, ne saurait ĂȘtre sujet Ă  aucune ombre de changement Il ne vous parlera », dit un vieux thĂ©ologien en commentant le passage qui nous occupe [Goodwin], il ne vous parlera que de mon amour, il trouvera ses dĂ©lices ineffables Ă  me glorifier dans l’Église, Ă  me rendre toujours plus cher au cƓur de mes rachetĂ©s ; et il est digne de toute croyance, car il est l’ESPRIT DE VÉRITÉ ». Et quelle n’a pas Ă©tĂ© la fidĂ©litĂ© de l’Esprit dans tous les siĂšcles Ă  glorifier, JĂ©sus ! Voyez la premiĂšre manifestation de sa puissance dans l’Église chrĂ©tienne le jour de la PentecĂŽte ; quelle fut en ce jour Ă  jamais mĂ©morable la grande vĂ©ritĂ© sur laquelle se concentra l’intĂ©rĂȘt de ces milliers de pĂ©cheurs qui flĂ©chirent le genou devant Dieu ? Ce fut l’Ɠuvre de JĂ©sus. L’Esprit de vĂ©ritĂ© mit cette Ɠuvre en lumiĂšre et glorifia ainsi le Sauveur devant les hommes qui jusqu’alors n’avaient vu en lui rien qui le fĂźt dĂ©sirer. Écoutez la dĂ©claration que le Saint Esprit inspira Ă  l’apĂŽtre Pierre, — admirable rĂ©sumĂ© de cette merveilleuse prĂ©dication qui fut accompagnĂ©e d’une dĂ©monstration d’esprit et de puissance » Que toute la maison d’IsraĂ«l sache certainement que Dieu a fait et Seigneur et Christ ce JĂ©sus que vous avez crucifiĂ© ». Et c’est toujours cette sublime vĂ©ritĂ© que l’Esprit saint se plaĂźt Ă  prĂ©senter au pĂ©cheur abattu ; cette vĂ©ritĂ© qui, seule, peut lui donner la force de renverser les forteresses de Satan. Toutes les beautĂ©s intimes et glorieuses de l’Ɠuvre et du caractĂšre de Christ sont invisibles Ă  l’Ɠil naturel. C’est l’Esprit qui vivifie ». Personne ne peut dire Seigneur JĂ©sus, si ce n’est par l’Esprit saint ». Il est le grand annonciateur du Christ et c’est par lui que Jean Baptiste pouvait dĂ©clarer Ă  son peuple VoilĂ  l’agneau de Dieu ! » L’Esprit de Christ qui Ă©tait dans les prophĂštes de l’Ancien Testament rendait par avance tĂ©moignage des souffrances qui devaient ĂȘtre la part de Christ et des gloires qui suivraient 1 Pierre 111. C’est le Saint Esprit qui a rappelĂ© aux apĂŽtres toutes les choses que JĂ©sus a dites pour nous les rapporter Jean 1426. C’est par l’Esprit Saint que JĂ©sus, avant son Ă©lĂ©vation au ciel, a donnĂ© des ordres aux apĂŽtres qu’il avait choisis Actes 12. C’est le Saint Esprit qui a communiquĂ© toute la vĂ©ritĂ© » aux Ă©crivains inspirĂ©s du Nouveau Testament afin de complĂ©ter la parole de Dieu » Jean 1613. — Richesses insondables ! Ô merveilleux dons de la grĂące infinie de Dieu envers l’homme Christ la vĂ©ritĂ©, l’Esprit la vĂ©ritĂ©, sa Parole la vĂ©ritĂ© Jean 146 ; 1717 ; 1 Jean 56. Lecteur, si la saintetĂ©, la gloire et l’amour de JĂ©sus ont Ă©tĂ© dĂ©voilĂ©s Ă  votre Ăąme, c’est au Saint Esprit que vous le devez. Si, Ă  l’heure de l’épreuve, vous avez puisĂ© de grandes consolations dans la pensĂ©e de la profonde sympathie de votre RĂ©dempteur et de son amour toujours vivant ; ou bien si, Ă  la perspective d’une mort prochaine, vous Ă©prouvez la puissance de ses promesses magnifiques, qui est-ce qui a produit cette Ɠuvre en vous, sinon le Saint Esprit, qui, fidĂšle Ă  sa mission de paix, prend de ce qui est Ă  Christ pour vous le donner, vous rendant ainsi capable de le bĂ©nir, soit dans la vie, soit dans la mort. Puisse votre devise ĂȘtre toujours celle-ci Rien que Christ ; mais pour croĂźtre dans la connaissance et dans la grĂące de Christ, ne nĂ©gligez pas de rechercher les communications de Celui qui peut seul vous rĂ©vĂ©ler l’excellence de cette connaissance ». L’Esprit de vĂ©ritĂ© qui procĂšde du PĂšre, celui-lĂ  rendra tĂ©moignage de moi » Jean 1526. 22° Jour — Une heureuse transformation Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Votre tristesse sera changĂ©e en joie » Jean 1620. Le peuple de Christ est un peuple affligĂ©. L’épreuve est son hĂ©ritage ; la tribulation est sa discipline. Mais si vous ĂȘtes affligĂ©s maintenant de diverses maniĂšres, c’est afin que l’épreuve de votre foi, bien plus prĂ©cieuse que celle de l’or qui pĂ©rit et qui toutefois est Ă©prouvĂ© par le feu, soit trouvĂ©e tourner Ă  louange, et Ă  gloire, et Ă  honneur, dans la rĂ©vĂ©lation de JĂ©sus Christ » 1 Pierre 17. Vos Ă©preuves vous sont mesurĂ©es par une main compatissante. Il vous connaĂźt trop bien, il vous aime trop tendrement pour faire de ce monde un monde sans Ă©preuve et sans larmes. Il faut de la pluie, de la grĂȘle, des orages, au ciel des saints », disait Rutherford. Si votre chemin terrestre Ă©tait semĂ© de fleurs et que les rayons du soleil se jouassent sans cesse autour de votre demeure, vous risqueriez d’oublier que votre existence n’est qu’une existence nomade », et que vous n’ĂȘtes ici-bas qu’étrangers et voyageurs. Il faut que la tente soit parfois Ă©branlĂ©e, il faut que les liens qui retiennent ce tabernacle terrestre se relĂąchent les uns aprĂšs les autres, afin de vous amener Ă  sentir que vous n’ĂȘtes vĂ©ritablement qu’un pĂšlerin, et Ă  soupirer aprĂšs une meilleure patrie. Mais encore une fois soyez consolĂ©s ; et tandis que l’affliction est votre partage, pensez Ă  Celui qui dit Ă  chacun de vous Je connais tes afflictions ». Les anges ne pourraient comprendre vos douleurs, ils ne sauraient sympathiser avec vous, car la douleur est chose inconnue pour eux. Mais il y a un Être plus puissant que les anges qui compatit Ă  toutes vos peines, Ă  toutes vos tristesses. L’amour est au fond de tout ce qu’Il dispense Ă  votre Ă©gard. Il a un but cachĂ© dans toute Ă©preuve qu’il vous envoie, en sorte qu’épreuve et bĂ©nĂ©diction sont pour son peuple des mots synonymes. Pourquoi me demandez-vous ce que j’aime ? » disait un fervent serviteur de Dieu sur son lit de mort, je suis le malade du Seigneur, je ne puis que tout aimer ». Quand vos dispositions seront telles, alors votre tristesse sera changĂ©e en joie ». Le matin s’approche, — ce brillant matin oĂč la rosĂ©e amassĂ©e durant des nuits de larmes brillera Ă  l’éclat du soleil de justice. À ce moment bienheureux, tout le travail, toutes les Ă©preuves du temps prĂ©sent seront oubliĂ©s, ou si le souvenir en subsiste encore, il ne servira qu’à Ă©tablir un contraste plus frappant entre cette vie de douleur et la plĂ©nitude des joies de l’éternitĂ©. Quelle rĂ©vĂ©lation ineffable ! Voici, la carte du temps est dĂ©roulĂ©e, et je dĂ©couvre que toute Ă©preuve, de quelque nature qu’elle fĂ»t, — faible ruisseau ou fleuve impĂ©tueux, — se dirigeait vers le ciel, et que chaque rafale, chaque souffle de la tempĂȘte a contribuĂ© Ă  pousser ma barque dans le port ! Et le Seigneur lui-mĂȘme prendra part Ă  mon bonheur. Car si nos tristesses sont ses tristesses, nos joies sont aussi ses joies. Lecteur, puisse une telle joie ĂȘtre la vĂŽtre ! DĂ©tachez-vous de celles du monde. ApprĂ©ciez avec reconnaissance les joies lĂ©gitimes que Dieu vous accorde et qu’Il peut sanctifier et bĂ©nir, mais prenez garde de ne pas y mettre votre cƓur, ou de leur attribuer une permanence qu’elles n’ont pas. Souvenez-vous que JĂ©sus avait les regards fixĂ©s non sur la terre, mais vers le ciel, lorsqu’il ajouta Personne ne vous ĂŽte votre joie » Jean 1622. 23° Jour — Une priĂšre toute puissante Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit PĂšre, je veux, quant Ă  ceux que tu m’as donnĂ©s, que lĂ  oĂč moi je suis, ils y soient aussi avec moi, afin qu’ils voient ma gloire » Jean 1724. Il n’y a qu’une seule requĂȘte » que Christ ait jamais faite, qui fĂ»t rejetĂ©e par son PĂšre c’est celle que lui arracha la violence de son agonie surhumaine PĂšre, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi ! ». Si cette priĂšre eĂ»t Ă©tĂ© exaucĂ©e, nous n’eussions pas reçu une seule parole de consolation de JĂ©sus. S’il est possible » — sans cette parenthĂšse pleine d’amour nous Ă©tions perdus Ă  jamais ! Mais la coupe amĂšre, JĂ©sus l’a bue jusqu’à la lie avec une entiĂšre soumission ; les chĂątiments terribles prononcĂ©s par la loi, il les a supportĂ©s ; l’expiation a Ă©tĂ© complĂšte, la justice parfaite de Dieu est satisfaite, et maintenant, comme prix de son obĂ©issance et de sa mort, le grand vainqueur demande ses trophĂ©es. Et quels sont-ils ? Ceux que lui a donnĂ©s le PĂšre, — les multitudes sans nombre rachetĂ©es par son sang. Pour ceux-lĂ , son dĂ©sir est qu’ils soient pour toujours avec lui, lĂ  oĂč il est » afin qu’ils soient spectateurs de sa gloire. Paroles et dĂ©sirs Ă©tranges de la part d’un testateur mourant ! Ses derniers mots sur la terre sont un ardent plaidoyer pour la gloire des siens ; son dernier souhait, de les retrouver dans le ciel ; comme si ces joyaux terrestres pouvaient ajouter Ă  l’éclat de sa couronne ; comme si leur bonheur et leur joie devaient ĂȘtre le complĂ©ment nĂ©cessaire du sien. Il verra du fruit du travail de son Ăąme et sera satisfait » Ès. 5311. Lecteur ! apprends de lĂ  que le grand Ă©lĂ©ment de ton bonheur dans ta condition Ă  venir sera la prĂ©sence de Christ » avec moi, lĂ  oĂč je suis ». Nous le verrons tel qu’il est ». C’est lĂ  ce qui constitue la bienheureuse espĂ©rance du chrĂ©tien. Le ciel ne serait pas le ciel sans JĂ©sus ; son absence serait comme la disparition du soleil dans le firmament. Mais, ĂŽ bonheur ! il a stipulĂ© lui-mĂȘme dans la priĂšre qu’il nous a laissĂ©e comme legs, que nous passerions l’éternitĂ© tout entiĂšre dans l’union et la communion avec lui, contemplant les mystĂšres insondables de son amour, rendus conformes Ă  sa ressemblance glorieuse, et buvant Ă  longs traits dans l’ocĂ©an sans bornes de ses dĂ©lices. Si quelque chose peut encore rehausser la grandeur de ces bĂ©nĂ©dictions promises, ce sont les mots qui terminent ce verset et par lesquels JĂ©sus motive en quelque sorte son dĂ©sir Afin qu’ils voient ma gloire ». Et pourquoi ? Car tu m’as aimĂ© avant la fondation du monde ! » ChrĂ©tien, te rĂ©jouis-tu d’ĂȘtre avec ton Sauveur comme Lui se rĂ©jouit de t’avoir dans sa prĂ©sence ? Et peux-tu chanter avec bonheur et adoration Toi-mĂȘme tu verras ce que ton cƓur rĂ©clame, De ton Ɠuvre Ă  la croix le fruit mĂ»r et parfait. Tu jouiras, Seigneur, du travail de ton Ăąme, Et ton amour divin en sera satisfait. Nous serons toujours avec le Seigneur. Consolez-vous donc l’un l’autre par ces paroles » 1 Thess. 417, 18. 24° Jour — Un gage immuable Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez » Jean 1419. Dieu choisit quelquefois les objets les plus stables du monde matĂ©riel pour nous faire comprendre sa fidĂ©litĂ© et son amour envers son Église JĂ©rusalem ! — des montagnes sont autour d’elle, et l’Éternel est autour de son peuple ». Mais ici le RĂ©dempteur nous prĂ©sente un argument tirĂ© de son essence divine. Il lie pour ainsi dire la vie de ses rachetĂ©s Ă  la sienne Parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez ! » ChrĂ©tien, ne vois-tu pas dans cette parole de JĂ©sus le gage assurĂ© de ta gloire ? Ton Sauveur vit », et sa vie est la garantie infaillible de la tienne. Sa vie, voilĂ  ce qui nous sauve d’une ruine Ă©ternelle. Mais si Christ est Ă  nous pour la vie, de quelle inviolable sĂ©curitĂ© la nĂŽtre n’est-elle pas entourĂ©e ? La grande source de la vie aurait Ă  tarir avant que le plus petit ruisseau fĂ»t dessĂ©chĂ©. Le grand soleil aurait Ă  s’éteindre avant qu’un seul des satellites qu’il Ă©claire de sa splendeur pĂ»t perdre sa clartĂ©. Satan aurait Ă  arracher la couronne du front divin avant de toucher au plus petit joyau du peuple de Dieu. Il ne pourrait Ă©branler un pilier sans Ă©branler le trĂŽne. Si nous pĂ©rissons », dit Luther, Christ pĂ©rit avec nous ». Lecteur, ta vie est-elle cachĂ©e maintenant avec Christ en Dieu » ? Connais-tu le bonheur d’une union vivante avec le Sauveur qui a la vie en lui-mĂȘme et qui la donne Ă  qui il veut ? Peux-tu dire avec une confiance humble et joyeuse, au milieu des phases si mobiles de ta vie spirituelle Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi » ? — JÉSUS VIT ! telle est la plus rĂ©jouissante dĂ©claration qu’une Ăąme et un monde perdus par le pĂ©chĂ© puissent entendre. Job s’était rĂ©joui dans cette consolante assurance quatorze cents ans Ă  l’avance, puisqu’il s’était Ă©criĂ© Je sais que mon RĂ©dempteur est vivant ». Jean, exilĂ© dans Patmos, fut rĂ©confortĂ© par cette parole Ne crains point moi, je suis le premier et le dernier, et le vivant ; et j’ai Ă©tĂ© mort ; et voici, je suis vivant aux siĂšcles des siĂšcles » Apoc. 117 — parole sublime, adressĂ©e Ă  son serviteur par le RĂ©dempteur lui-mĂȘme quand il lui apparut tout rayonnant de la splendeur de son humanitĂ© glorifiĂ©e. C’est ici le tĂ©moignage que Dieu a rendu au sujet de son Fils », dit Jean, rĂ©sumant dans une parole tout l’Évangile, c’est que Dieu nous a donnĂ© la vie Ă©ternelle et cette vie est dans son Fils Celui qui a le Fils a la vie, celui qui n’a pas le Fils de Dieu n’a pas la vie » 1 Jean 511, 12. Paul, au chapitre 8 de l’épĂźtre aux Romains, oĂč il trace la peinture la plus sublime du caractĂšre et des privilĂšges du chrĂ©tien, commence par ces mots Point de condamnation, et finit par ceux-ci Point de sĂ©paration. Pourquoi n’y a-t-il rien qui puisse sĂ©parer le chrĂ©tien de l’amour de Dieu ? Parce que sa vie est en quelque sorte incorporĂ©e Ă  celle de son Chef et de son Garant adorable. Le cƓur divin et infini d’un Christ vivant fait vibrer ses pulsations dans chaque membre de son corps, en sorte qu’avant que la vie spirituelle du croyant puisse ĂȘtre dĂ©truite, la toute-puissance aurait Ă  devenir faiblesse et l’immutabilitĂ© inconstance ! Mais bĂ©ni sois-tu, ĂŽ JĂ©sus ! ta parole est bien affinĂ©e, et ton serviteur l’aime ». Dieu a tant aimĂ© le monde qu’il a donnĂ© son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne pĂ©risse pas, mais qu’il ait la vie Ă©ternelle » Jean 316. Ô Dieu ! tu l’as donnĂ© dans ton amour immense ! Il a tout accompli pour notre dĂ©livrance ; Il est notre justice et notre saintetĂ©, Sa vie est notre vie, — et pour l’éternitĂ©. 25° Jour — JĂ©sus toujours prĂ©sent Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Voici, moi je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation du siĂšcle » Matt. 2820. Telles sont les paroles que JĂ©sus adressa Ă  ses disciples lorsqu’il se prĂ©parait Ă  les quitter pour remonter au ciel. DĂ©jĂ  il voyait le trĂŽne de misĂ©ricorde oĂč il allait reprendre sa place ; mais toutes ses pensĂ©es Ă©taient pour l’Église qu’il allait laisser dans la lutte et la souffrance ; ses bĂ©nĂ©dictions et ses derniĂšres paroles sont pour elle. Je suis sorti d’auprĂšs du PĂšre, et je suis venu dans le monde ; et de nouveau je laisse le monde, et je m’en vais au PĂšre », avait-il dit avant sa mort ; mais au moment de son dĂ©part, avec quel amour il laisse aux siens cette prĂ©cieuse promesse Et voici, moi je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation du siĂšcle ». Combien les apĂŽtres n’en Ă©prouvĂšrent-ils pas la rĂ©alitĂ© ! Écoutez le tĂ©moignage que rendait longtemps aprĂšs la glorification du Seigneur le disciple bien-aimĂ© qui avait coutume de reposer sa tĂȘte sur le sein de son MaĂźtre, qui l’avait entendu, vu et contemplĂ© ». Peut-ĂȘtre ne va-t-il parler de son Seigneur et de sa divine sociĂ©tĂ© que comme d’un prĂ©cieux souvenir des temps passĂ©s ? Non, il s’écrie avec joie Nous avons communion avec JĂ©sus Christ ! » L’apĂŽtre Paul eut plusieurs fois l’occasion de voir le Seigneur Ă  ses cĂŽtĂ©s et de l’entendre lui donner ses directions et ses encouragements. Le Seigneur s’est tenu prĂšs de moi et m’a fortifiĂ© », dit-il aprĂšs sa comparution devant CĂ©sar, alors que tous ses compagnons l’avaient abandonnĂ© et qu’il n’avait personne pour le soutenir. Oh ! combien, du sein des choses fugitives d’ici-bas, le cƓur s’attache Ă  cette certitude de la prĂ©sence Ă©ternelle du Sauveur ! Quelques semaines suffisent, hĂ©las ! pour changer le cƓur de nos meilleurs amis ; mais siĂšcles aprĂšs siĂšcles s’écouleront, et Christ sera toujours le mĂȘme. Combien il est doux de penser que si je suis rĂ©ellement un enfant de Dieu, il n’y a pas un seul instant oĂč je ne sois gardĂ© par lui ! Quand les rayons du matin Ă©clairent ma chambre, les rayons plus brillants d’un plus brillant soleil resplendissent sur moi. Quand les ombres du soir m’entourent, il n’y a pas de nuit pour moi si JĂ©sus, le Soleil immuable de mon Ăąme, est auprĂšs de moi. Il est prĂ©sent Ă©galement aux jours de la prospĂ©ritĂ© et aux jours de l’adversitĂ©. Il ne peut changer. Il est le mĂȘme dans la maladie et dans la solitude, dans la joie et dans l’épreuve, dans la vie et dans la mort. De mĂȘme que la colonne de feu ou la nuĂ©e des enfants d’IsraĂ«l les accompagnĂšrent jusqu’à la frontiĂšre de Canaan, de mĂȘme JĂ©sus, dans son amour, conduit son peuple pas Ă  pas dans les sentiers de la vie. Sa parole a-t-elle jamais Ă©tĂ© trouvĂ©e fausse ? Que la nuĂ©e de tĂ©moins qui sont maintenant dans la gloire rĂ©pondent. Tous diront d’un commun accord Il n’est point tombĂ© un seul mot de toutes les bonnes paroles que l’Éternel notre Dieu a dites ». — Oui, la parole du Seigneur est bonne » ; comme il avait aimĂ© les siens, qui Ă©taient dans le monde, il les aima jusqu’à la fin » . ChrĂ©tien ! es-tu assailli ou troublĂ© par des tentations ? Des choses permises par Dieu, impĂ©nĂ©trables et de sĂ©vĂšres afflictions semblent-elles te dĂ©rober la vĂ©ritĂ© et la rĂ©alitĂ© des promesses misĂ©ricordieuses de Dieu ? Es-tu sur le point de dire comme GĂ©dĂ©on Si l’Éternel est avec nous, pourquoi donc toutes ces choses nous sont-elles arrivĂ©es ? » Ne crains pas ; il a des vues de misĂ©ricorde Ă  ton Ă©gard. En t’enlevant tes espĂ©rances terrestres, en te privant des appuis auxquels tu attachais tant de prix, il a dĂ©ployĂ© envers toi toute sa tendresse. Au sein du naufrage de ton bonheur, que la tombe peut-ĂȘtre a cachĂ© Ă  tes yeux, un Ami plus prĂ©cieux, plus cher, plus tendre que celui dont tu pleures la perte, t’invite Ă  lui dire avec confiance L’Éternel est vivant et mon rocher est bĂ©ni ; que le Dieu de mon salut soit exaltĂ© ». GrĂąces Ă  Dieu qui nous donne la victoire par notre Seigneur JĂ©sus Christ » ; et jamais nous ne jouissons plus complĂštement de cette victoire qu’au moment oĂč, dĂ©pouillĂ©s de tout objet digne d’affection, nous restons, comme les disciples sur la montagne, avec JĂ©sus seul ! » ; en attendant la victoire dĂ©finitive sur la mort au jour de la rĂ©surrection et de la gloire. MĂȘme quand je marcherais par la vallĂ©e de l’ombre de la mort, je ne craindrai aucun mal ; car tu es avec moi » Ps. 234. 26° Jour — La rĂ©surrection et la vie Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Je suis la rĂ©surrection et la vie celui qui croit en moi, encore qu’il soit mort, vivra » Jean 1125. Quelle voix que celle qui retentit sur un monde plongĂ© depuis six mille ans dans le sommeil du pĂ©chĂ© et de la mort ! Pendant quatre mille ans, le paganisme ne put jeter aucune lumiĂšre sur les sombres rĂ©gions de la tombe ; ses oracles restĂšrent muets sur la grande doctrine de la vie Ă  venir et plus particuliĂšrement sur ce qui concerne la rĂ©surrection des corps. Le peuple juif lui-mĂȘme, sous la dispensation de l’Ancien Testament, ne pouvait guĂšre jouir Ă  cet Ă©gard que d’une lumiĂšre incomplĂšte. Il fallait la mort du grand Vainqueur pour faire briller aux yeux d’un monde aveuglĂ© le lumineux chemin de la vie ». C’est lui qui a introduit une meilleure espĂ©rance », qui a dĂ©chirĂ© le voile mystĂ©rieux Ă©tendu depuis des siĂšcles sur toutes les gĂ©nĂ©rations humaines. Merveilleuse rĂ©vĂ©lation ! Ce corps mortel, qui doit se dĂ©composer et se dissoudre dans la poussiĂšre, renaĂźtra de ses cendres et ressuscitera en gloire ! Il ne sera plus un tabernacle terrestre, une tente fragile, mais il sera incorruptible, immortel ! La belle transformation de la chrysalide en insecte, celle de la graine qui meurt au printemps pour s’élancer de sa tombe en Ă©pi fertile ou en fleur splendide, sont autant de voix muettes de la nature qui proclament Ă  leur maniĂšre cette grande vĂ©ritĂ©. Mais l’Évangile a pleinement rĂ©vĂ©lĂ© ce que la raison, dans ses plus sublimes conceptions, n’avait pu rĂȘver, — JĂ©sus a fait luire la vie et l’incorruptibilitĂ© par l’évangile » 2 Tim. 19. Sa rĂ©surrection est le gage de la rĂ©surrection de son peuple. Il est le premier fruit de la moisson immortelle qui doit ĂȘtre recueillie dans les greniers cĂ©lestes. PrĂ©cieuse vĂ©ritĂ© ! cette parole de JĂ©sus brille comme un cĂ©leste arc-en-ciel Ă  l’entrĂ©e de la sombre vallĂ©e ; la mort perd son aiguillon. La tombe retient, comme un dĂ©pĂŽt prĂ©cieux, les cendres de tout enfant de Dieu, parce qu’il a Ă©tĂ© rachetĂ©. Dieu le fera sortir au jour oĂč il mettra dehors tous ses prĂ©cieux joyaux » ; alors il sera revĂȘtu d’une beautĂ© impĂ©rissable Ă  la ressemblance du corps glorieux du RĂ©dempteur. En attendant, ceux qui se sont endormis en JĂ©sus » sont absents du corps et prĂ©sents avec le Seigneur » 2 Cor. 58. L’apĂŽtre avait le dĂ©sir de dĂ©loger et d’ĂȘtre avec Christ, car cela est de beaucoup meilleur » Phil. 223. ChrĂ©tien affligĂ© et dĂ©pouillĂ© de toute joie, toi qui peut-ĂȘtre pleures amĂšrement ceux qui ne sont plus, rĂ©jouis-toi au milieu de tes larmes, Ă  cause de cette espĂ©rance immortelle. La corde d’argent » est relĂąchĂ©e, mais non rompue. Tandis que tu es dans la chambre mortuaire, ou sur le bord d’une tombe Ă  peine fermĂ©e, ou sous le poids d’une affreuse solitude et d’un morne silence, souviens-toi de ces paroles Tes morts vivront, mes corps morts se relĂšveront. RĂ©veillez-vous et exultez avec chant de triomphe, vous qui habitez dans la poussiĂšre ; car ta rosĂ©e est la rosĂ©e de l’aurore, et la terre jettera dehors les trĂ©passĂ©s » És. 2619. Ne vous Ă©tonnez pas de cela ; car l’heure vient en laquelle tous ceux qui sont dans les sĂ©pulcres entendront sa voix ; et ils sortiront, ceux qui auront pratiquĂ© le bien en rĂ©surrection de vie ; et ceux qui auront fait le mal en rĂ©surrection de jugement » Jean 528, 29. 27° Jour — Encore un peu de temps Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Un peu de temps et vous ne me verrez pas, et encore un peu de temps et vous me verrez, parce que je m’en vais au PĂšre » Jean 1616. Qu’elles nous paraissent longues les heures qui nous sĂ©parent d’un ĂȘtre aimĂ© ! oh ! que le moment du retour d’un frĂšre absent est impatiemment attendu ! Or, voici, le RĂ©dempteur vivant envoie un message Ă  son Église qui l’attend, — message de consolation et de paix, — lui disant que bientĂŽt, dans peu de temps », il reviendra pour ne plus la quitter. Le fidĂšle jouit Ă  la vĂ©ritĂ©, dĂšs Ă  prĂ©sent, de prĂ©cieux moments de communion avec son Sauveur bien-aimĂ© ; mais hĂ©las ! qu’ils sont courts et passagers ! Aujourd’hui, la vie est un court voyage oĂč l’ñme jouit de la prĂ©sence d’un Sauveur invisible, mais il arrive parfois que le cƓur solitaire se demande Ă  lui-mĂȘme d’un accent plaintif OĂč est ton Dieu ? ». Et lors mĂȘme que le fidĂšle n’aurait pas Ă  passer par ces jours d’obscuritĂ© et d’abattement, que de choses dans le monde qui l’entoure sont propres Ă  le remplir de tristesse ! son Sauveur rejetĂ© et mĂ©connu ; — son amour comptĂ© pour rien ; — ses voies providentielles mĂ©prisĂ©es ; son saint nom blasphĂ©mĂ© ; — la crĂ©ation tout entiĂšre opprimĂ©e et gĂ©missante ; la dĂ©sunion parmi le peuple mĂȘme de Dieu ; — le cƓur aimant de JĂ©sus blessĂ© dans la maison de ses amis ». Mais encore un peu de temps », et tout ce mystĂšre d’iniquitĂ© prendra fin. Les pas du Bien-aimĂ© se font dĂ©jĂ  entendre. Le voici qui vient » Cant. des cant. 28 chercher les siens pour les conduire dans les demeures Ă©ternelles que son amour leur a prĂ©parĂ©es. Et quel jour bĂ©ni que celui oĂč toute cette crĂ©ation en souffrance sera aussi dĂ©livrĂ©e de la servitude de la corruption pour jouir de la libertĂ© de la gloire des enfants de Dieu Rom. 8. Alors le Seigneur, si longtemps mĂ©connu, rĂ©gnera enfin au milieu des hosannas de l’univers, des cantiques et des actions de grĂąces des rachetĂ©s ! Et l’Ɠuvre de la justice sera la paix, et le travail de la justice, repos et sĂ©curitĂ© Ă  toujours » Ès. 3217. Oui, encore trĂšs peu de temps, et celui qui vient viendra, et il ne tardera pas ». Il n’attendra pas un moment de plus qu’il n’est nĂ©cessaire », dit un auteur chrĂ©tien. Avec quelle joie ne fera-t-il pas entendre le cri de commandement » annonçant que ce peu de temps » est enfin passĂ©, et nous appelant Ă  sa rencontre sur les nuĂ©es pour nous introduire au festin Ă©ternel de son amour et de sa gloire. Enfants de Dieu dans l’épreuve, pensez souvent Ă  ce peu de temps ». Les jours de votre deuil seront bientĂŽt passĂ©s. Il y a un terme mis aux Ă©preuves du temps prĂ©sent. — AprĂšs que vous aurez souffert un peu de temps », Dieu vous appellera Ă  sa gloire Ă©ternelle par JĂ©sus Christ. Chacune des vagues qui vous sĂ©parent encore du port sont comptĂ©es, et lorsque vous aurez atteint ce port dĂ©sirĂ©, oh ! quelles rĂ©vĂ©lations glorieuses luiront Ă  vos yeux ! le peu de temps » sera pour jamais absorbĂ© dans les jours sans fin de l’éternitĂ© ! vous serez pour toujours avec le Seigneur », avec ce Sauveur immuable qui n’a pas changĂ© et ne peut changer ! Encore un peu de temps et vous me verrez ! ». Oh ! si les yeux de la foi pouvaient ĂȘtre plus constamment dirigĂ©s sur cette apparition glorieuse ! mais, hĂ©las ! le monde et ses coupables sĂ©ductions s’efforcent de voiler et d’obscurcir cette bienheureuse espĂ©rance. Le cƓur est prompt Ă  jeter ici-bas ses filets et Ă  les fixer sur des objets pĂ©rissables. Lecteur ! cherche Ă  vivre plus constamment dans la pensĂ©e de cette rĂ©alisation de tes vƓux les plus chers ; que ton Ăąme soit toujours comme la colombe prĂȘte Ă  prendre son vol. Attendant la bienheureuse espĂ©rance et l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur JĂ©sus Christ » Tite 213. 28° Jour — Une contemplation bienheureuse Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Bienheureux ceux qui sont purs de cƓur, car c’est eux qui verront Dieu » Matt. 58. Voici le ciel ! Cette parole de JĂ©sus reprĂ©sente le bonheur futur des saints glorifiĂ©s comme dĂ©pendant, non des lieux qu’ils habitent, mais de leur position devant Dieu ; l’essence de ce bonheur est la prĂ©sence et la vue de Dieu. Notre attention est parfois attirĂ©e vers des thĂ©ories vagues et indĂ©finies sur les accessoires de la fĂ©licitĂ© Ă  venir ; mais le seul grand objet digne de notre contemplation, la gloire par excellence, c’est la face du Seigneur lui-mĂȘme » ! La grande leçon pratique donnĂ©e ici par JĂ©sus Ă  son peuple est la nĂ©cessitĂ© d’un cƓur pur sans lequel personne ne verra Dieu. Poursuivez la paix avec tous et la saintetĂ© sans laquelle nul ne verra le Seigneur » HĂ©b. 1214. Il faut que le cƓur soit purifiĂ© par le sang de JĂ©sus et sanctifiĂ© par sa Parole. Lecteur ! connais-tu quelque chose de cette puretĂ© et de cette saintetĂ© du cƓur ? On a dit les rues du ciel commencent sur la terre ». DĂšs ici-bas, nous pouvons jouir de cette saintetĂ©, avant-goĂ»t des bĂ©nĂ©dictions Ă  venir. Qui n’a senti que les plus heureux moments de la vie sont ceux oĂč nous marchons le plus prĂšs de Dieu, oĂč, renonçant Ă  nous-mĂȘmes, nous dirigeons nos regards vers JĂ©sus glorifiĂ© comme vers notre seul but ? Que sera le ciel, sinon la communion constante de l’ñme avec Dieu, la dĂ©livrance de tout penchant au mal et de toute crainte de cĂ©der aux tentations extĂ©rieures ? Ne sera-ce pas un Ă©tat de l’ñme oĂč tout sera dans une parfaite harmonie avec toute la pensĂ©e et toute la volontĂ© de Dieu, avec ses voies rĂ©alisĂ©es et son amour satisfait ; oĂč notre intelligence sera rendue capable de connaĂźtre Ă  fond comme nous avons Ă©tĂ© connus et de sonder tous les glorieux mystĂšres qui sont encore voilĂ©s Ă  nos yeux. Car nous voyons maintenant au travers d’un verre, obscurĂ©ment, mais alors face Ă  face » 1 Cor. 1312, dans le plein Ă©clat de la LumiĂšre et dans la parfaite jouissance de l’Amour. En ta lumiĂšre nous verrons la lumiĂšre » Ps. 369. Ta face est un rassasiement de joie ; il y a des plaisirs Ă  ta droite pour toujours » Ps. 1611. Le cƓur sera changĂ©, pour ainsi dire, en une fontaine limpide dont aucune impuretĂ© ne viendra souiller la transparence, dont aucune douleur ne viendra troubler les eaux calmes. La longue nuit de la vie est passĂ©e, et voici la gloire du matin Ă©ternel qui lui succĂšde ! Je verrai ta face en justice ; quand je serai rĂ©veillĂ©, je serai rassasiĂ© de ton image » Ps. 1715. Oui, c’est bien lĂ  le ciel puretĂ© du cƓur », Dieu tout en tous ! », face adorable du Sauveur », hymne Ă©ternel Ă  la gloire de l’Agneau immolĂ© ». Sans doute, dans cette fĂ©licitĂ© des rachetĂ©s il y aura, pour ainsi dire, bien des sujets de joie. C’est ainsi, par exemple, qu’ils jouiront de se trouver dans la communion des saints et la compagnie des anges, et d’ĂȘtre rĂ©unis aux bien-aimĂ©s dont la mort les avait sĂ©parĂ©s. Mais toutes ces joies secondaires ne seront que comme dĂ©pendantes de la grande et suprĂȘme joie d’ĂȘtre ensemble pour toujours avec le Seigneur et de le voir comme il est » 1 Jean 32. Et il n’y aura plus de malĂ©diction ; et le trĂŽne de Dieu et de l’Agneau sera en elle ; et ses esclaves le serviront et ils verront sa face » Apoc. 224. Lecteur, puissiez-vous, pendant toute l’éternitĂ©, connaĂźtre par expĂ©rience le sens de ces admirables paroles de l’apĂŽtre Nous lui serons semblables, car nous le verrons comme il est ». Quiconque a cette espĂ©rance en lui se purifie comme lui est pur » 1 Jean 33. Ô lumiĂšre ineffable ! Splendeur inaltĂ©rable ! Quand de leur Dieu les saints jouiront Ă  jamais ; Bonheur incomparable ! Quand sa face adorable Resplendira sur eux dans l’éternelle paix. Toujours dans la lumiĂšre De la maison du PĂšre ! Toute ombre a disparu devant l’éclat du jour. Et, bien loin de la terre, Notre Ăąme tout entiĂšre GoĂ»tera, prĂšs de Lui, le repos de l’amour. 29° Jour — Plusieurs demeures Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Dans la maison de mon PĂšre, il y a plusieurs demeures » Jean 142. Quelle touchante allusion Ă  la vie de famille, que celle renfermĂ©e dans ces paroles de JĂ©sus ! Il console son Église en lui annonçant que bientĂŽt elle aura atteint les limites du dĂ©sert, que le tabernacle temporaire, bon pour le pĂšlerinage terrestre, va ĂȘtre changĂ© en une demeure » permanente. Ce ne sera pas un asile Ă©tranger, mais une demeure paternelle oĂč nous attend un accueil paternel. LĂ , il y aura place pour tous. Des milliers de bienheureux ont dĂ©jĂ  franchi ces portes resplendissantes de gloire, des patriarches, des prophĂštes, des saints, des martyrs, des jeunes et des vieux, — et il y a encore de la place. La devise du pĂšlerin sur la terre est celle-ci Nous n’avons point ici-bas de citĂ© permanente ». Les joies les plus douces, les heures les plus bĂ©nies prendront fin. Levez-vous et allez, car ce n’est pas ici un lieu de repos ! ». Tel est l’appel qui vient souvent interrompre les moments de repos de l’Église ici-bas. — Mais dans le ciel, tout fidĂšle devient une colonne dans le temple de Dieu et il ne sortira plus jamais dehors » Apoc. 312. Cette terre n’est que le gĂźte oĂč le voyageur s’arrĂȘte pour passer une nuit. Nous-mĂȘmes ne sommes que des Ă©trangers en passage ; rien ne nous appartient en propre ; ce qui est Ă  nous aujourd’hui, un autre peut le possĂ©der demain. Mais ces demeures qui nous sont promises seront un hĂ©ritage incorruptible et qui ne se peut flĂ©trir. Aucune vicissitude ne peut atteindre le patrimoine cĂ©leste. Une fois entrĂ©s dans la maison paternelle, nous y serons Ă  toujours. Pensons aussi Ă  l’amour de JĂ©sus, qui a Ă©tĂ© lui-mĂȘme nous prĂ©parer une place dans une telle demeure. Je vais », a-t-il dit, vous prĂ©parer une place ». Et il a ajoutĂ© Je reviendrai et je vous prendrai auprĂšs de moi ». Quelle sublime pensĂ©e ! JĂ©sus s’occupant dans le ciel du bonheur de son Église ! Lecteur, que l’espĂ©rance de ce lieu bĂ©ni que le Seigneur tient en rĂ©serve pour les siens, te rĂ©concilie avec les aspĂ©ritĂ©s et les difficultĂ©s de la vie prĂ©sente, avec la rude carriĂšre du pĂšlerin. Laisse-toi conduire Ă  la clartĂ© de ce phare qui parle Ă  ton cƓur d’une demeure incomparablement plus belle que la plus somptueuse des habitations terrestres ; oublie ces vagues qui t’en sĂ©parent encore, ou plutĂŽt ne les considĂšre que comme devant servir Ă  te pousser de plus en plus vers le port ! Je voudrais », disait un fidĂšle entrĂ© maintenant dans son repos, qu’on pĂ»t lire, Ă©crire, prier, manger, boire et s’endormir avec cette pensĂ©e toujours prĂ©sente Ă  l’esprit Je serai bientĂŽt dans le ciel, dans le ciel pour l’éternitĂ© ! » La maison du PĂšre ! » Que d’ñmes Ă  l’heure du dĂ©logement ont Ă©tĂ© rĂ©jouies et consolĂ©es par la vue de ces demeures glorieuses qu’elles entrevoyaient au travers des tĂ©nĂšbres de la sombre vallĂ©e ! que de larmes versĂ©es par des amis affligĂ©s ont Ă©tĂ© sĂ©chĂ©es Ă  l’ouĂŻe de ce tendre reproche Si vous m’aviez aimĂ©, vous vous seriez rĂ©jouis de ce que je m’en vais au PĂšre ! » — Oui, la mort pour le chrĂ©tien n’est rĂ©ellement que l’entrĂ©e dans la maison paternelle. Et que sera-ce lorsque le Seigneur accomplira sa promesse en venant Lui-mĂȘme Ă  la rencontre de sa chĂšre Église et la fera entrer au lieu qui lui est destinĂ©, pour la joie de son cƓur et des nĂŽtres ! Car le Seigneur lui-mĂȘme, avec un cri de commandement, avec une voix d’archange, et avec la trompette de Dieu, descendra du ciel ; et les morts en Christ ressusciteront premiĂšrement ; puis nous, les vivants qui demeurons, nous serons ravis ensemble avec eux dans les nuĂ©es Ă  la rencontre du Seigneur, en l’air ; et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur » 1 Thess. 416-17. Lieu de repos, sainte patrie, SĂ©jour heureux des rachetĂ©s, Ô ville d’or, citĂ© chĂ©rie, J’aspire Ă  tes fĂ©licitĂ©s. Repos, repos, prĂšs de JĂ©sus, Peines, douleurs ne seront plus. LĂ , j’entrerai sauvĂ© par grĂące, LĂ , tu m’attends aux saints parvis. Viens, me dis-tu, j’acquis ta place Par ma croix, dans le Paradis. Repos, repos, prĂšs de JĂ©sus, Peines, douleurs ne seront plus. 30° Jour — Le royaume de l’Étoile du matin H. Rossier Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Je suis l’Étoile brillante du matin » Apoc. 2216. Sur la sainte montagne, Pierre avait eu la merveilleuse vision du fils de l’homme venant dans son royaume » Matt. 1628. C’est lĂ  que les gloires qui devaient accompagner cette venue, lui avaient Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©es ; elles Ă©taient restĂ©es gravĂ©es dans son cƓur jusqu’au moment de dĂ©poser sa tente. D’abord il avait contemplĂ© la majestĂ© du fils de l’homme, dĂ©clarĂ© Fils de Dieu par la gloire magnifique ». Il avait vu son visage resplendissant comme le soleil et ses vĂȘtements blancs comme la lumiĂšre. Ses regards s’étaient arrĂȘtĂ©s ensuite sur les saints cĂ©lestes qui l’accompagnaient. Il avait Ă©tĂ© tĂ©moin des entretiens que l’on a dans la gloire et s’était familiarisĂ© avec eux. De ses propres oreilles il avait entendu la voix du PĂšre lui parler du Fils de son amour. Ses compagnons et lui, reprĂ©sentant pour ainsi dire la scĂšne infĂ©rieure et terrestre du royaume, avaient Ă©tĂ© illuminĂ©s des rayons du soleil de justice qui se levait sur la montagne. Cette vision confirmait la prophĂ©tie tout entiĂšre, car le sujet auquel aboutit toute prophĂ©tie c’est le royaume du Christ et surtout dans sa partie terrestre. En mentionnant la parole prophĂ©tique, l’apĂŽtre ajoute À laquelle vous faites bien d’ĂȘtre attentifs, comme Ă  une lampe qui brille dans un lieu obscur ». La prophĂ©tie, dans sa portĂ©e pour nos consciences, est une chose trĂšs importante et trĂšs nĂ©gligĂ©e. Tout en nous parlant du royaume, elle nous renseigne sur la maniĂšre dont il sera Ă©tabli. Il ne pourra l’ĂȘtre que par le jugement. Pourquoi ? Parce que le monde est entiĂšrement corrompu, et que ce n’est pas la corruption que le Seigneur prendra comme sphĂšre de son royaume dans ce monde. Le monde est un lieu obscur » et tĂ©nĂ©breux ; la prophĂ©tie est une lampe qui nous permet de constater son Ă©tat actuel et qui projette sa lumiĂšre sur la condition finale des hommes, lorsque le Seigneur viendra et tous les saints avec lui ». Les fidĂšles Ă©taient en danger de se laisser gagner par le sommeil au milieu de ces tĂ©nĂšbres. La lampe prophĂ©tique leur en faisait voir l’horreur et discerner les piĂšges cachĂ©s ; elle les sĂ©parait du monde par la crainte. Comment s’associer Ă  ce qui allait ĂȘtre balayĂ© par le jugement ? Comment faire des plans d’avenir dans un monde qui n’a pas d’avenir ? Comment s’établir dans un lieu oĂč tout allait ĂȘtre Ă©branlĂ© et dĂ©truit ? Oui, nous faisons bien d’y ĂȘtre attentifs », et je crois que la nĂ©gligence actuelle des chrĂ©tiens au sujet de la prophĂ©tie a portĂ© ses tristes fruits en abaissant les barriĂšres qui les sĂ©paraient autrefois du monde. Mais dĂ©jĂ  maintenant nous avons mieux que la lampe. L’apĂŽtre ajoute Jusqu’à ce que le jour ait commencĂ© Ă  luire ». Nous sommes fils de la lumiĂšre, et fils du jour. Enfants du royaume, nous sommes rendus capables d’avoir part au lot des saints dans la lumiĂšre. En attendant, nous sommes dĂ©jĂ  dĂ©livrĂ©s du pouvoir des tĂ©nĂšbres et, si nous n’avons pas encore Ă©tĂ© transportĂ©s dans le royaume du roi de justice, de paix et de gloire sur la terre, nous l’avons Ă©tĂ© dans un royaume infiniment plus grand et plus glorieux, dans le royaume cĂ©leste du Fils de son amour. DĂ©jĂ  nous jouissons en Christ des relations de fils et de tout l’amour du PĂšre qui repose sur lui. Le jour se lĂšvera bientĂŽt ; puissions-nous marcher comme des fils du jour ! La prophĂ©tie Ă©claire la terre ruinĂ©e ; le soleil de justice Ă©clairera la terre renouvelĂ©e. Il n’a pas encore paru ; cependant dĂ©jĂ  nous en connaissons la splendeur, comme Pierre qui la contempla sur la sainte montagne. Mais l’apĂŽtre mentionne encore une autre lumiĂšre, celle de l’étoile du matin Et que l’étoile du matin se soit levĂ©e dans vos cƓurs ». Si le soleil Ă©claire la terre, l’étoile du matin a le ciel pour domaine. Elle attire les yeux vers elle-mĂȘme et vers ces espaces infinis oĂč brille sa pure lumiĂšre. L’étoile du matin est un astre gracieux et plein d’une fraĂźcheur merveilleuse. Il est levĂ© bien avant l’aube, et celui qui veille toute la nuit a seul le privilĂšge de le voir. L’étoile du matin, c’est le Christ cĂ©leste quand il apparaĂźtra aux yeux des siens. Nous ne le voyons pas encore, mais nous sommes au moment prĂ©cis oĂč il va paraĂźtre ; car la nuit est fort avancĂ©e, et le jour s’est approchĂ© » Rom. 1312. DĂ©jĂ  cette Ă©toile s’est levĂ©e dans nos cƓurs, dĂ©jĂ  l’espĂ©rance cĂ©leste occupe nos pensĂ©es et remplit nos affections, et cette espĂ©rance c’est notre Sauveur en personne. Celui qui rend tĂ©moignage de ces choses dit Oui, je viens bientĂŽt. — Amen ; Viens, Seigneur JĂ©sus ! » Apoc. 2220. 31° Jour — La servitude et l’attente H. Rossier Souvenez-vous des paroles du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Bienheureux sont ces esclaves que le MaĂźtre, quand il viendra, trouvera veillant » Luc 1237. Le Seigneur allait quitter les siens ; car dĂ©finitivement le monde le rejetait. Un complot qui devait aboutir Ă  la croix, s’était dĂ©jĂ  formĂ© contre lui Luc 1153-54. Sans doute les apparences contredisaient encore ce que Satan tramait dans les tĂ©nĂšbres, car jamais sa popularitĂ© » n’avait brillĂ© d’un tel lustre Les foules se rassemblaient par milliers autour de JĂ©sus, de sorte qu’ils se foulaient les uns les autres 121. Mais lui voyait et connaissait ce que recouvrait de son hypocrisie le cƓur humain. C’est Ă  ce moment, qu’en prĂ©sence de la multitude, il se met Ă  parler Ă  ses disciples. Il s’isole avec ce pauvre rĂ©sidu angoissĂ©, sur lequel son dĂ©part projette dĂ©jĂ  son ombre, et, ouvrant tout son cƓur Ă  ses bien-aimĂ©s, les exhorte, les encourage, leur adresse consolation sur consolation. Un volume ne suffirait pas pour mĂ©diter ce chapitre divin ; mais une parole y domine Ne craignez pas ». Devant tout ce qui pourrait abattre ce faible troupeau, que son Berger allait laisser comme Ă  la merci des loups, il leur rĂ©pĂšte Ne craignez pas ». La puissance et la haine des hommes qui va jusqu’à tuer le corps, votre propre insignifiance, ne doivent pas vous inquiĂ©ter ; Dieu a soin de vous et vous aime. Vous courrez des dangers en me confessant, mais je vous confesserai devant les anges de Dieu. On vous traĂźnera devant les synagogues et devant les juges ; ne craignez pas, car la puissance du Saint Esprit vous enseignera. Les hommes seront contre vous Dieu lui-mĂȘme, et le Fils, et le Saint Esprit sont pour vous. Ne soyez pas en souci pour la vie, ne soyez pas en peine de ce que vous mangerez et de ce que vous boirez et comment vous serez vĂȘtus ; vous avez un PĂšre qui sait que vous avez besoin de ces choses ! Il les exhorte aussi Tenez-vous en garde, dit-il, contre le levain des pharisiens qui est l’hypocrisie ». Voyez, et gardez-vous de toute avarice » ; et certes, nous avons besoin de ces tendres exhortations, mais il veut avant tout remplir de confiance ces cƓurs troublĂ©s et craintifs ; Ne craignez pas ; ne craignez pas ! » Puis il introduit le passage de ce chapitre que nous dĂ©sirons mĂ©diter Recherchez son royaume » 531. Le royaume de qui ? Du PĂšre ! Ce royaume du PĂšre n’est pas celui du fils de l’homme. Il n’a pas, comme ce dernier, une sphĂšre terrestre oĂč resplendira sa gloire. C’est le royaume cĂ©leste oĂč le PĂšre a son domicile. Ce nom de PĂšre, comme il parle au cƓur d’ĂȘtres craintifs, faibles, sans dĂ©fense et sans connaissance ! Ne renferme-t-il pas sa protection, ses soins journaliers, son amour, tout son amour pour ceux qu’il a engendrĂ©s, qu’il appelle ses enfants ? — C’est aux lieux oĂč ces choses se trouvent que le Seigneur veut Ă©lever l’ñme de ses disciples. Oh ! comme nous serons portĂ©s au-dessus des craintes, des soucis dessĂ©chants de cette vie, si nous cherchons le royaume du PĂšre ! Toutes les choses terrestres dont nous avons besoin nous seront donnĂ©es par-dessus », car nous aurons le PĂšre ; elles nous seront donnĂ©es Ă  titre de supplĂ©ment, pour parfaire le poids des choses Ă©ternelles que nous trouverons dans son royaume ! Le Seigneur rĂ©sume encore une fois toutes les exhortations qui prĂ©cĂšdent, par un mot Ne crains pas, petit troupeau ». AprĂšs avoir dĂ©taillĂ© tous nos sujets de crainte, il dit Ne crains pas ! » Vous ĂȘtes le petit troupeau au milieu de cette multitude hostile. Cela convient bien Ă  son amour que les enfants de Dieu ne soient que cela. Nous ne pouvons nous confier dans notre nombre, dans notre force ou notre intelligence, mais nous pouvons nous confier en lui. Et voyez quelles grandes choses le PĂšre a faites pour le petit troupeau ! Il a plu » — entiĂšrement en dehors de nous, qui sommes sans mĂ©rite pour l’obtenir — il a plu au PĂšre » — qui nous a mis en relation avec lui-mĂȘme comme ses bien-aimĂ©s — de nous donner » — non pas de nous prĂȘter pour un temps, en nous accordant une jouissance passagĂšre, mais — de nous donner », de nous donner en propre le royaume », — le royaume du PĂšre, le ciel ! Comme cette libre et pure grĂące de Dieu, comme cet intĂ©rĂȘt et cet amour du PĂšre sont faits pour remplir de confiance le cƓur du petit troupeau ! Le royaume est Ă  nous, nous le possĂ©dons, nous pouvons y entrer aujourd’hui et demain et chaque jour. Mais, pour en jouir, j’ai quelque chose Ă  faire. Pour entrer dans ma maison, il me faut en avoir la clef. Le Seigneur place cette clef dans la main de ses disciples ; il leur rĂ©vĂšle le secret par lequel ils peuvent prendre aujourd’hui possession de ce qu’ils auront Ă  jamais. Vendez ce que vous avez, et donnez l’aumĂŽne ; faites-vous des bourses qui ne vieillissent pas, un trĂ©sor qui ne dĂ©faille pas, dans les cieux, d’oĂč le voleur n’approche pas, et oĂč la teigne ne dĂ©truit pas ; car lĂ  oĂč est votre trĂ©sor, lĂ  aussi sera votre cƓur ». Le secret qu’il me confie est de n’avoir ici-bas rien que je possĂšde en propre, de rompre tous les liens qui me rattachent aux choses terrestres en les considĂ©rant comme des entraves, et d’employer ces choses, dont il laisse l’administration entre mes mains, Ă  donner l’aumĂŽne, — Ă  faire du bien aux pauvres et aux dĂ©shĂ©ritĂ©s, devenant ainsi comme la main du PĂšre qui sait qu’ils ont besoin de ces choses. Alors nous nous faisons un trĂ©sor dans les cieux ; nous montrons par nos actes que les biens incorruptibles ont seuls de la valeur, et quand nous avons, pour ainsi dire, constituĂ© notre trĂ©sor, nos cƓurs le suivent. Ces trois choses se lient le renoncement, l’acquisition du trĂ©sor, et le cƓur suivant le trĂ©sor. Si je me fais des bourses qui vieillissent », mon cƓur s’y attachera nĂ©cessairement. Un beau jour, elles pĂ©rissent et me sont dĂ©robĂ©es. Alors, pauvre cƓur misĂ©rable, que deviens-tu, quand ton trĂ©sor a disparu ? Mais, notre cƓur ayant suivi notre trĂ©sor, nous avons encore une chose Ă  faire. Que vos reins soient ceints, et vos lampes allumĂ©es ; et soyez vous-mĂȘmes semblables Ă  des hommes qui attendent leur maĂźtre, Ă  quelque moment qu’il revienne des noces, afin que, quand il viendra, et qu’il heurtera, ils lui ouvrent aussitĂŽt ». Nous avons Ă  prendre ici-bas une certaine attitude en attendant celui qui nous a quittĂ©s, mais qui est sur le point de revenir. On peut avoir les reins ceints pour le service, pour la marche, pour le combat et pour le culte. Dans ce passage, ils doivent ĂȘtre ceints pour l’attente. Nous avons Ă  veiller sur nos pensĂ©es, sur nos affections, sur tout ce qui pourrait nous distraire et nous empĂȘcher d’entendre les pas de l’époux qui s’approche. C’est bien l’attitude d’un serviteur, mais d’un serviteur qui se tient prĂšs de la porte, attentif au moindre bruit, pour ouvrir aussitĂŽt que la main du maĂźtre heurtera. Les lampes allumĂ©es ne sont pas ici le tĂ©moignage, mais la vigilance qui combat contre le sommeil. Que nos reins soient donc ceints et nos lampes allumĂ©es, en sorte qu’il nous trouve veillant, car avec ces deux choses nous attendrons le Seigneur. Cette expression est bien frappante À quelque moment qu’il revienne des noces ». Sans doute, la relation de l’Époux avec son Église ne fut rĂ©vĂ©lĂ©e qu’à la suite de l’exaltation du Seigneur et de la descente du Saint Esprit, et cela peut en quelque mesure expliquer le vague intentionnel de cette parole. Mais ne pouvons-nous pas y voir encore autre chose ? L’évĂ©nement capital de la maison, c’est le mariage du maĂźtre et le moment oĂč il vient, ramenant son Ă©pouse. Cela introduit et Ă©tablit un tout nouvel Ă©tat de choses, en contraste avec ce qui a prĂ©cĂ©dĂ©. Le gouvernement et l’ordre de la maison sont dĂ©sormais complets et dĂ©finitifs. C’est aussi le moment de la joie du maĂźtre, son cƓur satisfait ayant obtenu ce qu’il dĂ©sire et se reposant enfin sur celle qu’il possĂšde comme l’objet de ses affections. Il amĂšne son Ă©pouse dans le lieu oĂč elle habitera dĂ©sormais, lieu ornĂ© par lui et prĂ©parĂ© pour elle. Ce jour est aussi celui de la joie des serviteurs qui voient leur maĂźtre rĂ©pandant sur tous ceux qui lui appartiennent l’expression de son bonheur et de sa satisfaction. VoilĂ  ce qui occupe le cƓur d’un esclave fidĂšle. Comment penser Ă  autre chose ? Fera-t-il attendre Ă  la porte ce maĂźtre chĂ©ri et respectĂ© ? Il tient Ă  lui prouver que tout est prĂȘt pour le recevoir en ce jour de fĂȘte joyeuse et solennelle. Aussi espĂšre-t-il son arrivĂ©e de moment en moment. Le temps s’écoule et ne lui paraĂźt pas long ; son affection donne des ailes Ă  la marche des heures. Que son Seigneur vienne Ă  la seconde ou Ă  la troisiĂšme veille, bienheureux sont ces esclaves, que le maĂźtre, quand il viendra, trouvera veillant. En vĂ©ritĂ©, je vous dis qu’il se ceindra et les fera mettre Ă  table, et s’avançant, il les servira ». Il leur donne plus que le royaume, plus que ses biens, plus mĂȘme que la joie de leur Seigneur. Ce qu’il fait pour eux dĂ©passerait la mesure, s’il y avait une mesure Ă  l’amour. Nous le verrons, revĂȘtant, lui, le MaĂźtre, les insignes du serviteur, de ce qu’il a toujours Ă©tĂ©, de ce qu’il veut toujours rester pour nous ; nous le verrons s’abaissant, aimant Ă  s’abaisser dans la gloire ! Pourquoi ? Pour servir lui-mĂȘme ses esclaves. Et comment nous servira-t-il ? Comme lui, le serviteur par excellence, sait servir. Ce ne sera plus la rĂ©demption, ni le lavage de nos pieds Marc 1045 ; Jean 134 ; il nous aura devant lui, parfaits nous-mĂȘmes dans l’amour. Nous comprendrons cet amour sans limite et nous le laisserons faire. Nous ne dirons pas comme Pierre Tu ne t’abaisseras jamais Ă  de telles fonctions. Nous ne nous Ă©tonnerons pas de l’entendre nous dire Mon service est la rĂ©ponse au tien. La rĂ©ponse Ă  mon service !
 Une telle parole ne peut que m’humilier profondĂ©ment aujourd’hui, mais dans la gloire je comprendrai, en adorant, que son service glorifie Ă©ternellement son amour, et je le laisserai m’aimer avec dĂ©lices, lui donnant en Ă©change tous les mouvements d’un cƓur capable de sonder l’amour parfait de mon Seigneur et de mon Sauveur. Ô profondeur des richesses, et de la sagesse, et de la connaissance de Dieu !
 Ă  lui soit la gloire Ă©ternellement ! Amen » Romains 1133, 36. Épilogue — Le jour de Dieu 2 Pierre 311-14 Souvenez-vous du Seigneur JĂ©sus qui Lui-mĂȘme a dit Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point Luc 2133 Cette derniĂšre parole sert d’épilogue Ă  nos mĂ©ditations. Elle nous parle de l’établissement des temps Ă©ternels. Nous en avons besoin au milieu de ce monde rĂ©voltĂ© contre Dieu, et qui court Ă  sa dissolution. L’apĂŽtre Pierre prend la lampe prophĂ©tique pour nous Ă©clairer sur l’état moral des hommes de la fin, en nous rappelant les paroles dites Ă  l’avance Ă  leur sujet par les saints prophĂštes », qui nous ont annoncĂ© que les impies se moqueraient de la promesse de sa venue ». Cette venue est pour eux une fable de vieilles femmes. Ils disent que toutes choses demeurent dans le mĂȘme Ă©tat depuis le commencement de la crĂ©ation ». Ils professent l’immutabilitĂ© de la matiĂšre, et ignorent volontairement que l’existence et la destruction du monde dĂ©pendent d’une parole de Dieu. Le monde fut créé HĂ©b. 113, subsiste et sera dĂ©truit par cette parole 2 Pierre 35-7. DĂ©jĂ  le dĂ©luge l’a submergĂ© une fois. Ces hommes ne veulent pas le croire, et ne voient pas que les cieux et la terre de maintenant sont rĂ©servĂ©s par sa parole pour le jour du jugement et de la destruction des hommes impies ». Or le jour du Seigneur viendra comme un voleur ; et, dans ce jour-lĂ , les cieux passeront avec un bruit sifflant, et les Ă©lĂ©ments embrasĂ©s seront dissous, et la terre et les Ɠuvres qui sont en elles seront brĂ»lĂ©es entiĂšrement ». Cette vĂ©ritĂ© est un motif puissant pour notre conduite chrĂ©tienne Toutes ces choses devant donc se dissoudre, quelles gens devriez-vous ĂȘtre en sainte conduite et en piĂ©tĂ© ? ». AttachĂ©s Ă  cette parole, nous ne pourrons vivre avec le monde et comme lui, ni conserver des liens avec ce que nous savons devoir ĂȘtre entiĂšrement brĂ»lĂ©. Mais la crainte de nous trouver liĂ©s Ă  cet Ă©tat de choses ne peut ĂȘtre notre seul, ni mĂȘme notre principal motif. Le jour du Seigneur sera suivi d’un autre, le jour de Dieu. C’est Ă  cause de lui que les cieux en feu seront dissous et que les Ă©lĂ©ments embrasĂ©s se fondront ». Ce sera le jour de la pleine et dĂ©finitive stabilitĂ© de toutes choses. Nous l’attendons, car le jour du jugement ne peut ĂȘtre l’objet de notre espĂ©rance. Le jour du Seigneur introduira le rĂšgne de la justice sur la terre purifiĂ©e par le jugement ; aprĂšs ce rĂšgne, quand il aura dĂ©truit le premier ciel et la premiĂšre terre », il introduira le jour de Dieu, qui resplendira dans de nouveaux cieux et sur une nouvelle terre dans lesquels la justice habite. Nous attendons ce jour, mais nous sommes exhortĂ©s Ă  hĂąter sa venue. Comment donc pouvons-nous le hĂąter ? En manifestant dĂšs maintenant dans toute notre conduite les caractĂšres stables de justice et de saintetĂ© qui appartiennent Ă  ce jour. Quelles gens devrions-nous donc ĂȘtre ! C’est pourquoi, bien-aimĂ©s, en attendant ces choses, Ă©tudiez-vous Ă  ĂȘtre trouvĂ©s sans tache et irrĂ©prochables devant lui, en paix ; et estimez que la patience de notre Dieu est salut ». FrĂšres bien-aimĂ©s ! le Seigneur vient. Nous allons le voir comme Étoile du matin, comme Sauveur, comme MaĂźtre, comme Seigneur, comme Époux ; nous reviendrons avec lui en gloire pour rĂ©gner avec lui comme Roi, puis le jour de Dieu apparaĂźtra. En attendant, le mal rĂšgne dans le monde et nous en souffrons, si nous ne souffrons aussi de nos propres et humiliantes expĂ©riences. Ne craignons pas et ne perdons pas courage. Estimons que la patience de notre Dieu est salut que cette pensĂ©e nous soutienne. N’avons-nous pas, au milieu du bouleversement de toutes choses, les plus puissants motifs pour renier l’impiĂ©tĂ© et les convoitises mondaines, et vivre dans le prĂ©sent siĂšcle, sobrement et justement, et pieusement, attendant la bienheureuse espĂ©rance et l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur JĂ©sus Christ » ?
Voiciune large liste de chants liturgiques dont vous pourrez vous inspirer pour crĂ©er le programme musical de la messe. Ce sont tous les chants catholiques pour les funĂ©railles que je peux chanter pendant la cĂ©rĂ©monie d’A-Dieu de votre dĂ©funt.Je dispose mĂȘme d’une bande orchestrale d’accompagnement, ce qui rĂ©sout de nombreux problĂšmes logistiques Le nazisme s’insinua dans la chair et le sang du grand nombre Ă  travers des expressions isolĂ©es, des tournures, des formes syntaxiques qui s’imposaient Ă  des millions d’exemplaires et qui furent adoptĂ©es de façon mĂ©canique et inconsciente. On a coutume de prendre ce distique de Schiller, qui parle de la langue cultivĂ©e qui poĂ©tise et pense Ă  ta place, dans un sens purement esthĂ©tique et, pour ainsi dire, anodin. Un vers rĂ©ussi, dans une langue cultivĂ©e, ne prouve en rien la force poĂ©tique de celui qui l’a trouvĂ© ; il n’est pas si difficile, dans une langue Ă©minemment cultivĂ©e, de se donner l’air d’un poĂšte et d’un penseur. Mais la langue ne se contente pas de poĂ©tiser et de penser Ă  ma place, elle dirige aussi mes sentiments, elle rĂ©git tout mon ĂȘtre moral d’autant plus naturellement que je m’en remets inconsciemment Ă  elle. Et qu’arrive-t-il si cette langue cultivĂ©e est constituĂ©e d’élĂ©ments toxiques ou si l’on en a fait le vecteur de substances toxiques ? Les mots peuvent ĂȘtre comme de minuscules doses d’arsenic on les avale sans y prendre garde, elles semblent ne faire aucun effet, et voilĂ  qu’aprĂšs quelque temps l’effet toxique se fait sentir. Si quelqu’un, au lieu d’ hĂ©roĂŻque et vertueux », dit pendant assez longtemps fanatique », il finira par croire vraiment qu’un fanatique est un hĂ©ros vertueux et que, sans fanatisme, on ne peut pas ĂȘtre un hĂ©ros. Les vocables fanatique et fanatisme n’ont pas Ă©tĂ© inventĂ©s par le TroisiĂšme Reich, il n’a fait qu’en modifier la valeur et les a employĂ©s plus frĂ©quemment en un jour que d’autres Ă©poques en des annĂ©es. » Victor Klemperer, LTI, La langue du IIIĂšme Reich, 1947, tr. fr Elisabeth Guillot, Albin Michel, p. 38. ______________________________________________________________________ Comment ça va Ă  l’usine ? lui demandai-je. – TrĂšs bien ! rĂ©pondit-il. Hier, c’était un trĂšs grand jour pour nous. Quelques communistes culottĂ©s s’étaient incrustĂ©s Ă  Okrilla, alors nous avons organisĂ© une expĂ©dition punitive [Strafexpedition] – Vous avez fait quoi ? – Eh bien, on les a fait passer par les verges, c’est-Ă -dire par nos matraques en caoutchouc, avec un peu de ricin, rien de sanglant mais trĂšs efficace tout de mĂȘme, une expĂ©dition punitive, quoi. ExpĂ©dition punitive est le premier mot que j’ai ressenti comme spĂ©cifiquement nazi, c’est le tout premier de ma LTI et le tout dernier que j’ai entendu de la bouche de T. ; je raccrochai sans mĂȘme prendre la peine de refuser son invitation. Tout ce que je pouvais imaginer d’arrogance brutale et de mĂ©pris envers ce qui est Ă©tranger Ă  soi se trouvait condensĂ© dans ce mot expĂ©dition punitive ; il avait une rĂ©sonance si coloniale qu’on imaginait un village nĂšgre cernĂ© de toutes parts et qu’on entendait le claquement du fouet en cuir d’hippopotame. Plus tard, mais hĂ©las cela ne dura pas, ce souvenir eut aussi, en dĂ©pit de son amertume, quelque chose de rĂ©confortant pour moi. Un peu de ricin il Ă©tait tellement clair que cette opĂ©ration imitait les pratiques fascistes des Italiens; il me semblait que tout le nazisme n’était rien d’autre qu’une infection italienne. Mais cette consolation disparut devant la vĂ©ritĂ© qui se dĂ©voilait, comme s’estompe une brume matinale ; le pĂ©chĂ© nazi, capital et mortel, Ă©tait allemand et non italien. MĂȘme le souvenir de ce mot nazi ou fasciste qu’était expĂ©dition punitive » se serait certainement envolĂ©, pour moi comme pour des millions d’autres gens, s’il n’avait Ă©tĂ© associĂ© Ă  un Ă©vĂ©nement personnel. Car cette expression n’appartient qu’aux dĂ©buts du TroisiĂšme Reich, elle a Ă©tĂ© rendue caduque par la simple institution de ce rĂ©gime, comme la flĂšche est rendue caduque par la bombe. Les expĂ©ditions punitives, semi-privĂ©es et exĂ©cutĂ©es en amateur, furent immĂ©diatement remplacĂ©es par l’action policiĂšre, rĂ©guliĂšre et officielle, et le ricin par les camps de concentration. Et, six ans aprĂšs le commencement du TroisiĂšme Reich, le tumulte des expĂ©ditions punitives Ă  l’intĂ©rieur de l’Allemagne, devenues actions policiĂšres, fut couverte par le vacarme de la guerre mondiale que ses instigateurs avaient Ă©galement conçue comme un genre d’expĂ©dition punitive contre tous les peuples mĂ©prisĂ©s. C’est ainsi que les mots disparaissent. » Victor Klemperer, LTI, La langue du IIIĂšme Reich, 1947, tr. fr Elisabeth Guillot, Albin Michel, p. 71-72. Toute correspondance sur le sujet [l’extermination des Juifs d’Europe] Ă©tait soumise Ă  des rĂšgles de langage » trĂšs strictes el, exception faite pour les rapports de Einsatzgruppen, on trouve rarement, dans les documents des mots crus tels qu’ extermination », liquidation » ou tuerie ». À leur place, des noms de code Ă©taient prescrits pour tuerie» on devait dire Solution finale », Ă©vacuation» Aussiedling ou traitement spĂ©cial » Sonderbehandlung ; quand il ne s’agissait pas des Juifs qu’on envoyait Ă  Theresienstadt, le ghetto des vieillards » pour les juifs privilĂ©giĂ©s – on parlait alors d’un changement de rĂ©sidence » – la dĂ©portation Ă©tait rebaptisĂ©e rĂ©installation » Umsiedlung ou encore travail Ă  l’Est » Arbeitsensatz um Osten, dans la mesure oĂč les Juifs ont souvent Ă©tĂ© temporairement rĂ©installĂ©s dans des ghettos tout comme une certaine partie d’ente eux fut temporairement utilisĂ©e pour le travail forcĂ©. Dans certaines circonstances, il s’avĂ©ra nĂ©cessaire d’apporter de lĂ©gĂšres modifications aux rĂšgles de langage. C’est ainsi qu’un haut responsable des Affaires Ă©trangĂšres proposa que, dans toute correspondance avec le Vatican, on parle du meurtre des Juifs en termes de solution radicale » ; l’idĂ©e Ă©tait ingĂ©nieuse, car le gouvernement catholique fantoche de Slovaquie, mis en place avec l’appui du Vatican, n’avait pas Ă©tĂ©, aux yeux des nazis, suffisamment radical » dans sa lĂ©gislation antijuive il ait commis l’ erreur fondamentale » de promulguer des lois contre les Juifs et d’en exclure les Juifs baptisĂ©s. Les porteurs de secrets » ne pouvaient donc parler un langage non codĂ© qu’entre eux, et il est peu probable qu’ils l’aient fait pendant qu’ils vaquaient Ă  leurs tĂąches meur­triĂšres quotidiennes, ou devant leurs stĂ©nodactylos et autres employĂ©s de bureau. Quelle que fut la raison de ces rĂšgles de langage», elles contribuĂšrent considĂ©rablement au maintien de l’ordre et de l’équilibre mental dans les nombreux services spĂ©cialisĂ©s dans les fonctions les plus diverses dont la coopĂ©ration Ă©tait indispensable en la matiĂšre. Mieux encore, l’ex pression rĂšgles de langage » Sprachregelung Ă©tait elle-mĂȘme un nom de code ; en langage ordinaire, on appellerait cela un mensonge. En effet, lorsqu’un porteur de secrets » Ă©tait envoyĂ© Ă  la rencontre de quelqu’un venant du monde extĂ©rieur, on lui donnait, en mĂȘme temps que les ordres, ses rĂšgles de langage » – comme, par exemple, Eichmann, lorsqu’il fit visiter le ghetto de Theresienstadt aux reprĂ©sentants suisses de la Croix-Rouge internationale. Dans ce dernier cas, il s’agissait d’un mensonge Ă  propos d’une soi-disant Ă©pidĂ©mie de typhus qui aurait fait rage au camp de concentration de Bergen-Belsen que ces messieurs voulaient aussi visiter. L’effet exact produit par ce systĂšme de langage n’était pas d’empĂȘcher les gens de savoir ce qu’ils faisaient, mais de les empĂȘcher de mettre leurs actes en rapport ave une ancienne notion normale » du meurtre et du mensonge. Par sa grande sensibilitĂ© aux expressions toutes faites et aux slogans, ainsi que par son incapacitĂ© Ă  s’exprimer en langage ordinaire, Eichmann Ă©tait le sujet idĂ©al pour les rĂšgles de langage ». » Hannah Arendt, Eichmann Ă  JĂ©rusalem, 1963, tr. fr. Anne GuĂ©rin, Gallimard Quarto, 2002, p. 1100-1101. ________________________________________________________________________ D’oĂč peut venir la sollicitude, envers la langue, de l’autoritĂ© politique, appuyant ou relevant l’interrogation savante ? D’oĂč vient que normaliser la langue, rĂ©former son vocabulaire soient des activitĂ©s politiques et non pas seulement d’innocents jeux d’amoureux des phrases et des mots ? [
] Le rĂ©gime soviĂ©tique en est encore un exemple frappant, lui qu’on a pu qualifier de logocratie ». Il convient, en fait, d’analyser un terme linguis­tiques cette fameuse langue de bois », dĂ©finie ici et lĂ  comme un style par lequel on s’assure le contrĂŽle de tout, en masquant le rĂ©el sous les mots. La novlangue d’Orwell dans 1984 visait, mais dans la fiction, Ă  extirper toute pensĂ©e non orthodoxe en bannissant les noms mĂȘmes qui pouvaient lui servir de support. Les mots y devenaient leurs propres dĂ©funts. Dans les textes soviĂ©tiques officiels, on constate un emploi lar­gement infĂ©rieur de verbes par rapport aux noms dĂ©rivĂ©s de verbes, type de nomination dont le russe est abondamment pourvu. Le grand nombre des nominalisations p­ermet d’esquiver par le discours l’affrontement du rĂ©el, auquel correspondrait l’emploi de verbes. Ainsi, on peut prĂ©senter comme Ă©vident et rĂ©alisĂ© ce qui n’est ni l’un ni l’autre. Pour prendre un exemple français, quand on passe de mes thĂšses sont justes ou les peuples luttent contre l’impĂ©rialisme Ă  la justesse de mes thĂšses ou la lutte des peuples contre l’impĂ©rialisme, on passe de l’assertion Ă  l’implicite. L’énonceur Ă©lude ainsi la prise en charge, aussi bien que l’objection. Car l’auditeur, s’il peut inter­rompre Ă  la fin d’une phrase mes thĂšses sont justes, le peut beaucoup moins aprĂšs une portion de phrase inachevĂ©e la justesse de mes thĂšses. » Claude HagĂšge, L’Homme de paroles, 1985, Fayard, p. 201-202. _______________________________________________________________________ La parole magico-religieuse est d’abord efficace, mais sa qualitĂ© de puissance religieuse engage d’autres aspects en premier lieu, ce type de parole ne se distingue pas d’une action ou, si l’on veut, il n’y a pas Ă  ce niveau de distance entre la parole et l’acte ; en outre, la parole magico-religieuse n’est pas soumise Ă  la temporalitĂ© ; enfin, elle est toujours le privilĂšge d’une fonction socio-religieuse. La parole chargĂ©e d’efficacitĂ© n’est pas sĂ©parĂ©e de sa rĂ©alisation ; elle est d’emblĂ©e une rĂ©alitĂ©, une rĂ©alisation, une action. Cet aspect se marque bien dans la substitution de prattein et de praxis au verbe de l’efficacitĂ©, krainein Zeus ekprattei ; on parle de la praxis des oracles ; et les Érinyes[1], exĂ©cutrices des hautes Ɠuvres de Justice, sont les Praxitheai, les dĂ©esses de la Justice en marche ». L’usage de prattein est, en effet, rĂ©servĂ© Ă  une action naturelle dont l’effet n’est pas un objet extĂ©rieur et Ă©tranger Ă  l’acte qui l’a produit, mais cette action mĂȘme dans son accomplissement. Par ailleurs, tout semble se passer ; en dehors de la temporalitĂ© ; il n’y a pas trace Ă  ce niveau d’une action ou d’une parole engagĂ©e dans le temps. La parole magico-religieuse se prononce au prĂ©sent ; elle baigne dans un prĂ©sent absolu, sans avant, ni aprĂšs, un prĂ©sent qui, comme la mĂ©moire, englobe ce qui a Ă©tĂ©, ce qui est, ce qui sera ». Si la parole de cette espĂšce Ă©chappe Ă  la temporalitĂ©, c’est essentiellement parce qu’elle fait corps avec des forces qui sont au-delĂ  des forces humaines, des forces qui ne font Ă©tat que d’elles-mĂȘmes et prĂ©tendent Ă  un empire absolu. À aucun moment, la parole du poĂšte ne cherche l’accord des auditeurs, l’assentiment du groupe social ; celle du roi de justice pas davantage elle se dĂ©ploie avec la majestĂ© d’une parole oraculaire ; elle ne vise pas Ă  Ă©tablir dans le temps un de ces enchaĂźnements de mots qui tirent leur force de l’approbation ou de la contestation des autres hommes. Dans la mesure oĂč la parole magico-religieuse transcende le temps des hommes, elle transcende aussi les hommes elle n’est pas la manifestation d’une volontĂ© ou d’une pensĂ©e individuelle, elle n’est pas l’expression d’un agent, d’un moi. La parole magico-religieuse dĂ©borde l’homme de toutes parts elle est l’attribut, le privilĂšge d’une fonction sociale. Toutes les paroles des hommes, qui ont le privilĂšge de VĂ©ritĂ© », se dĂ©finissent par la mĂȘme efficacitĂ©. Mais l’articulation d’AlĂštheia et du verbe krainein s’atteste particuliĂšrement dans la reprĂ©sentation des Érinyes. Ce sont de vĂ©nĂ©rables dĂ©esses, Ă  la mĂ©moire inaltĂ©rable ; jamais l’oubli ne les atteint, car elles sont en quelque sorte antĂ©rieures au temps, elles ont l’ñge du Vieux de la Mer. Mais si les Érinyes sont celles qui n’oublient pas mnĂšmones, elles sont aussi les vĂ©ridiques » et celles qui accomplissent ». On les nomme parfois Praxidikai, OuvriĂšres de Justice » elles s’identifient Ă  la parole de malĂ©diction, celle que prononce ƒdipe dans son aveuglement, celle qui dĂ©truit les maisons. Leur vĂ©ritĂ© » est la malĂ©diction efficace qui dĂ©chaĂźne la stĂ©rilitĂ©, anĂ©antit toute forme de vie. La VĂ©ritĂ© » s’institue donc dans le dĂ©ploiement de la parole magico-religieuse, entĂ©e sur la MĂ©moire et articulĂ©e Ă  l’Oubli. Mais la configuration d’AlĂštheia, que dessine l’opposition fondamentale de MĂ©moire et d’Oubli, engage d’autres puissances qui contribuent Ă  la dĂ©finir. Telles sont DikĂš, Pistis, PeithĂŽ. Au mĂȘme titre qu’AlĂštheia, la Justice est une modalitĂ© de la parole magico-religieuse, car la DikĂš rĂ©aliser ». Quand le roi prononce un dit de justice », sa parole a valeur dĂ©cisoire. Dans le domaine de la justice, l’AlĂštheia est naturellement insĂ©parable de la DikĂš, mais, dans le monde poĂ©tique, DikĂš n’est pas moins indispensable un Ă©loge se rend avec justice », tel celui que rendit la langue d’Adraste au devin Amphiaraos. Louer le vaillant » s’accorde Ă  la justice la plus stricte ; le Vieux de la Mer disait Louez de tout votre cƓur, pour ĂȘtre justes, l’exploit de votre ennemi mĂȘme. » D’une certaine façon, l’éloge est une forme de justice. Quand le poĂšte chante une louange, il suit la voie de la justice ; les poĂštes sont des hommes de talent et d’équitĂ© » ; leur AlĂštheia est renforcĂ©e par DikĂš. En fait, dans le systĂšme de pensĂ©e religieuse oĂč triomphe la parole efficace, il n’y a nulle distance entre la vĂ©ritĂ© » et la justice » ce type de parole est toujours conforme Ă  l’ordre cosmique, car il crĂ©e l’ordre cosmique, il en est l’instrument nĂ©cessaire. » Marcel Detienne, Les MaĂźtres de VĂ©ritĂ© dans la GrĂšce archaĂŻque, 1967, Le Livre de Poche, 2006, p. 122-126 _______________________________________________________________________ Le fait banal de la conversation quitte, par un cĂŽtĂ©, l’ordre de la violence. Ce fait banal est la merveille des merveilles. Parler, c’est en mĂȘme temps que connaĂźtre autrui se faire connaĂźtre Ă  lui. Autrui n’est pas seulement connu, il est saluĂ©. Il n’est pas seulement nommĂ© mais aussi invoquĂ©. Pour le dire en termes de grammaire, autrui n’apparaĂźt pas au nominatif mais au vocatif. Je ne pense pas seulement Ă  ce qu’il est pour mois mais aussi et Ă  la fois, je suis pour lui. En lui appliquant un concept, en l’appelant ceci ou cela, j’en appelle Ă  lui. Je ne connais pas seulement mais je suis en sociĂ©tĂ©. Ce commerce que la parole implique est prĂ©cisĂ©ment l’action sans violence l’agent, au moment mĂȘme de son action, a renoncĂ© Ă  toute domination, Ă  toute souverainetĂ©, s’expose dĂ©jĂ  Ă  l’action d’autrui dans l’attente d’une rĂ©ponse. Parler et Ă©couter ne font qu’un, ils ne se succĂšdent pas. Parler institue ainsi le rapport moral d’égalitĂ© et par consĂ©quent reconnaĂźt la justice. MĂȘme quand on parle Ă  un esclave, on parle Ă  un Ă©gal. Ce que l’on dit, le contenu communiquĂ© n’est possible que grĂące Ă  ce rapport de face Ă  face oĂč autrui compte comme interlocuteur avant mĂȘme d’ĂȘtre connu. On regarde un regard. Regarder un regard, c’est regarder ce qui ne s’abandonne pas, ne se livre pas mais qui vous vise c’est regarder le visage. » Emmanuel LĂ©vinas, Éthique et esprit », Difficile libertĂ©, 1952, Éd. Albin Michel, 1976, p. 21. ____________________________________________________________________ Toute organisation sociale, qu’elle soit animale ou humaine, nĂ©cessite le strict respect par les membres du groupe d’un certain nombre de rĂšgles comportementales qui peuvent ĂȘtre contraires Ă  leur intĂ©rĂȘt individuel Ă  court terme, mais qui sont vitales pour la viabilitĂ© du groupe. Dans le monde animal, comme l’avait dĂ©jĂ  si bien montrĂ© le fondateur de l’éthologie animale, Konrad Lorenz, ces comportements dangereux pour la survie de l’espĂšce sont inhibĂ©s par des mĂ©canismes dits instinctifs ». En particulier, chez les mammifĂšres sociaux, ce sont ces mĂ©canismes, profondĂ©ment ancrĂ©s dans les couches les plus primitives du cerveau, qui rĂ©gulent les comportements agressifs les combats au sein du groupe, pourtant frĂ©quents, ne se soldent jamais, ou trĂšs exceptionnellement, par la mise Ă  mort du vaincu. Qu’on nous entende bien il s’agit ici d’observations qui concernent uniquement les comportements meurtriers » au sein d’un mĂȘme groupe, qui menacent directement l’organisation sociale du groupe. En revanche, dans les conflits intergroupes, ces inhibitions ne sont plus de mise c’est ainsi que la primatologue Jane Goodall a pu observer, sur le terrain, de vĂ©ritables guerres » entre groupes de chimpanzĂ©s, avec des tueries systĂ©matiques. Il est intĂ©ressant d’observer que les interdits humains recouvrent assez prĂ©cisĂ©ment ces inhibitions instinctives ainsi, dans routes les cultures, les interdits concernent les meurtres entre individus d’une mĂȘme tribu et, avant tout, dans le cercle familial. Les agressions Ă  l’extĂ©rieur de la tribu, elles, n’ont pas du tout le mĂȘme statut et peuvent mĂȘme ĂȘtre explicitement encouragĂ©es et codifiĂ©es
 La grande diffĂ©rence entre l’homme et les autres mammifĂšres sociaux c’est que, chez l’homme, la rĂ©gulation sociale ne s’effectue pas au niveau biologique, mais au niveau socioculturel. C’est par la parole et la pression du groupe social que s’imposent les interdits et non pas parce qu’ils seraient biologiquement bloquĂ©s, au contraire c’est bien parce que nous sommes capables de commettre de tels actes les exemples ne manquent malheureusement pas qu’ils sont culturellement prohibĂ©s et punis. » Bernard Victorri, À la recherche de la langue originelle », in Les origines du langage, Le Pommier, 2010, p. 110-112. ___________________________________________________________________ En vĂ©ritĂ©, le problĂšme qui se pose Ă  celui qui cherche la nature du dialogue n’est nul autre que celui de la violence et de la nĂ©gation de celle-ci. Car que faut-il pour qu’il puisse y avoir dialogue ? La logique ne permet qu’une chose, Ă  savoir que le dialogue, une fois engagĂ©, aboutisse, que l’on puisse dire lequel des interlocuteurs a raison, plus exactement, lequel des deux a tort car s’il est certain que celui qui se contredit a tort, il n’est nullement prouvĂ© que celui qui l’a convaincu de ce seul crime contre la loi du discours ne soit pas Ă©galement fautif, avec ce seul avantage, tout temporaire, qu’il n’en a pas encore Ă©tĂ© convaincu. La logique, dans le dialogue, Ă©monde [1] le discours. Mais pourquoi l’homme accepte-t-il une situation dans laquelle il peut ĂȘtre confondu [2] ? Il l’accepte, parce que la seule autre issue est la violence, si l’on exclut, comme nous l’avons fait, le silence et l’abstention de toute communication avec les autres hommes quand on n’est pas du mĂȘme avis, il faut se mettre d’accord ou se battre jusqu’à ce que l’une des deux thĂšses disparaisse avec celui qui l’a dĂ©fendue. Si l’on ne veut pas de cette seconde solution, il faut choisir la premiĂšre, chaque fois que le dialogue porte sur des problĂšmes sĂ©rieux et qui ont de l’importance, ceux qui doivent mener Ă  une modification de la vie ou en confirmer la forme traditionnelle contre les attaques des novateurs. ConcrĂštement parlant, quand il n’est pas un jeu qui ne se comprend que comme image du sĂ©rieux, le dialogue porte, en dernier ressort, toujours sur la façon selon laquelle on doit vivre. On ? C’est-Ă -dire, les hommes qui vivent dĂ©jĂ  en communautĂ©, qui possĂšdent dĂ©jĂ  ces donnĂ©es qui sont nĂ©cessaires pour qu’il puisse y avoir dialogue – les hommes qui sont dĂ©jĂ  d’accord sur l’essentiel et auxquels il suffit d’élaborer en commun les consĂ©quences des thĂšses qu’ils ont dĂ©jĂ  acceptĂ©es, tous ensemble. Ils sont en dĂ©saccord sur la façon de vivre, parce qu’ils sont en accord sur cette mĂȘme façon il ne s’agit que de complĂ©ter et de prĂ©ciser. Ils acceptent le dialogue, parce qu’ils ont dĂ©jĂ  exclu la violence. » Éric Weil, Logique de la philosophie, 1950, Vrin, 1985, p. 24. _____________________________________________________________________ Le fait que nous nous sentons aujourd’hui si Ă©trangers dans un monde qui jadis nous paraissait si beau et si familier tient Ă  une autre cause encore, que je vois dans le trouble que cette guerre a apportĂ© dans notre attitude, jadis si ferme et si solidement Ă©tablie, Ă  l’égard de la mort. Cette attitude n’était rien moins que franche et sincĂšre. A nous entendre, on pouvait croire que nous Ă©tions naturellement convaincus que la mort Ă©tait le couronnement nĂ©cessaire de toute vie, que chacun de nous avait Ă  l’égard de la nature une dette dont il ne pouvait s’acquitter que par la mort, que nous devions ĂȘtre prĂȘts Ă  payer cette dette, que la mort Ă©tait un phĂ©nomĂšne naturel, irrĂ©sistible et inĂ©vitable. Mais en rĂ©alitĂ©, nous avions l’habitude de nous comÂŹporter comme s’il en Ă©tait autrement. Nous tendions de toutes nos forces Ă  Ă©carter la mort, Ă  l’éliminer de notre vie. Nous avons essayĂ© de jeter sur elle le voile du silence et nous avons mĂȘme imaginĂ© un proverbe il pense Ă  cela comme Ă  la mort » c’est-Ă -dire qu’il n’y pense pas du tout, bien entendu comme Ă  sa propre mort Ă  laquelle on pense encore moins qu’à celle d’autrui. Le fait est qu’il nous est absolument impossible de nous reprĂ©senter notre propre mort, et toutes les fois que nous l’essayons, nous nous apercevons que nous y assistons en spectateurs. C’est pourquoi l’école psychanalytique a pu dĂ©clarer qu’au fond personne ne croit Ă  sa propre mort ou, ce qui revient au mĂȘme, dans son inconscient chacun est persuadĂ© de sa propre immortalitĂ©. Pour ce qui est de la mort d’autrui, l’homme civilisĂ© Ă©vite soigneusement de parler de cette Ă©ventualitĂ© en prĂ©sence de la personne dont la mort paraĂźt imminente ou proche. Seuls les enfants ne connaissent pas cette discrĂ©tion . ils s’adressent sans mĂ©nagements des menaces impliquant des chances de mort et trouvent encore le moyen d’escompter la mort d’une personne aimĂ©e, en lui disant, comme s’il s’agissait de la chose la plus naturelle du monde ChĂšre maman, quand tu seras morte, je ferai ceci ou cela. » L’homme civilisĂ© adulte, Ă  son tour, ne pensera pas volontiers Ă  la perspective de la mort d’un de ses proches ce serait faire preuve d’insensibilitĂ© ou de mĂ©chancetĂ©, sauf lorsque, comme mĂ©decin, avocat, etc., on est amenĂ© Ă  y penser en vertu de prĂ©ocÂŹcupations professionnelles. Il se permettra encore moins de penser Ă  la mort d’autrui dans les cas oĂč cette mort doit lui apporter un surcroĂźt de fortune ou de libertĂ© ou une amĂ©lioration de sa situation. Certes, ces scrupules ne peuÂŹvent rien contre la mort, sont impuissants Ă  l’empĂȘcher, et toutes les fois que l’évĂ©nement se produit, nous sommes profondĂ©ment Ă©branlĂ©s et comme déçus dans notre attente. Nous insistons toujours sur le caractĂšre occasionnel de la mort accident, maladie, infection, profonde vieillesse, rĂ©vĂ©lant ainsi netteÂŹment notre tendance Ă  dĂ©pouiller la mort de tout caractĂšre de nĂ©cessitĂ©, Ă  en faire un Ă©vĂ©nement purement accidentel. L’accumulation de cas de mort nous effraye. A l’égard du mort lui-mĂȘme nous nous comportons d’une façon trĂšs singuliĂšre nous nous abstenons de toute critique Ă  son endroit, nous lui pardonnons ses injustices, nous ordonnons de mortuis nil nisi bene, et nous trouvons naturel que, dans l’oraison funĂšbre qu’on prononce sur sa tombe et dans l’inscription qu’on fait graver sur son monument funĂ©raire, on ne fasse ressortir que ses qualitĂ©s. Le respect du mort, respect dont celui-ci n’a cepenÂŹdant plus nul besoin, nous apparaĂźt comme supĂ©rieur Ă  la vĂ©ritĂ©, et Ă  beaucoup d’entre nous comme supĂ©rieur mĂȘme Ă  la considĂ©ration que nous devons aux vivants. A cette attitude conventionnelle que la civilisation nous impose Ă  l’égard de la mort, fait pendant l’état de consternation, d’effondrement complet dans lequel nous plonge la mort d’une personne proche pĂšre ou mĂšre, Ă©poux ou Ă©pouse, frĂšre ou sƓur, enfant ou ami cher. Il nous semble qu’avec elle nous enÂŹterÂŹrons nos espĂ©rances, nos ambitions, nos joies, nous refusons toute consolation et dĂ©clarons qu’il s’agit d’une mort irremplaçable. Nous nous comÂŹportons alors comme un de ces Asras qui suivent dans la mort ceux qu’ils ont aimĂ©s dans la vie. Cette attitude Ă  l’égard de la mort rĂ©agit cependant fortement sur notre vie. La vie s’appauvrit, elle perd en intĂ©rĂȘt, dĂšs l’instant oĂč nous ne pouvons pas risquer ce qui en forme le suprĂȘme enjeu, c’est-Ă -dire la vie elle-mĂȘme. Elle devient aussi vide, aussi creuse qu’un flirt dont on sait d’avance qu’il n’abouÂŹtira Ă  rien, Ă  la diffĂ©rence d’un amour rĂ©el, alors que les deux partenaires sont tenus de toujours penser aux sĂ©rieuses consĂ©quences du jeu dans lequel ils se trouvent engagĂ©s. Nos attaches affectives, l’insupportable intensitĂ© de notre chagrin nous dĂ©tournent de la recherche de dangers pour nous-mĂȘmes et pour nos proches. Nous reculons devant de nombreuses entreprises, dangereuses, mais indispensables, telles qu’essais d’aviation, expĂ©ditions dans des pays lointains, expĂ©riences sur des substances explosives, etc. Et ce qui nous reÂŹtient, c’est la question que nous nous posons dans chacune de ces occasions qui remplacera, en cas de malheur, le fils Ă  la mĂšre, l’époux Ă  l’épouse, le pĂšre aux enfants ? La tendance Ă  Ă©liminer la mort du registre de la vie nous a encore imposĂ© beaucoup d’autres renoncements et Ă©liminations. Et, cependant, la devise hansĂ©atique proclamait Navigare necesse est, vivere non necesse! Naviguer est une nĂ©cessitĂ©; vivre n’est pas une nĂ©cessitĂ©. Et nous sommes amenĂ©s tout naturellement Ă  chercher dans le monde de la fiction, dans la littĂ©rature, au théùtre ce que nous sommes obligĂ©s de nous refuser dans la vie rĂ©elle. Nous y trouvons encore des hommes qui savent mourir et s’entendent Ă  faire mourir les autres. LĂ  seulement se trouve remplie la condition Ă  la faveur de laquelle nous pourrions nous rĂ©concilier avec la mort. Cette rĂ©conciliation, en effet, ne serait possible que si nous rĂ©ussissions Ă  nous pĂ©nĂ©trer de la conviction que, quelles que soient les vicissitudes de la vie, nous continuerons toujours Ă  vivre, mais d’une vie qui sera Ă  l’abri de toute atteinte. Il est, en effet, trop triste de savoir que la vie ressemble Ă  un jeu d’échecs oĂč une seule fausse dĂ©marche peut nous obliger Ă  renoncer Ă  la partie, avec cette aggraÂŹvation que, dans la vie, nous ne pouvons mĂȘme pas compter sur une partie de revanche. Mais dans le domaine de la fiction nous trouvons cette multiplicitĂ© de vie dont nous avons besoin. Nous nous identifions avec un hĂ©ros dans sa mort, et cependant nous lui survivons, tout prĂȘts Ă  mourir aussi inoffensiÂŹvement une autre fois, avec un autre hĂ©ros. Il est Ă©vident que cette attitude conventionnelle Ă  l’égard de la mort est incompatible avec la guerre. Il n’est plus possible de nier la mort ; on est obligĂ© d’y croire. Les hommes meurent rĂ©ellement, non plus un Ă  un, mais par masse, par dizaines de mille le mĂȘme jour. Et il ne s’agit plus de morts acciÂŹdentelles cette fois. Sans doute, c’est un effet du hasard lorsque tel obus vient frapper celui-ci plutĂŽt qu’un autre ; mais cet autre pourra ĂȘtre frappĂ© par l’obus suivant. L’accumulation de cas de mort devient incompatible avec la notion du hasard. Et la vie est redevenue intĂ©ressante, elle a retrouvĂ© tout son contenu. Il convient de distinguer ici deux groupes le groupe de ceux qui risquent leur vie dans les batailles, et le groupe de ceux qui, restĂ©s Ă  l’arriĂšre, s’attenÂŹdent Ă  apprendre qu’un ĂȘtre qui leur est cher est mort d’une blessure, d’une maladie ou d’une infection. Il serait sans toute trĂšs intĂ©ressant d’étudier les changements qui se produisent dans la psychologie des combattants, mais lĂ -dessus je suis trop peu renseignĂ©. Aussi devons-nous limiter nos recherches au second groupe, dont nous faisons partie nous-mĂȘmes. J’ai dĂ©jĂ  dit que si nous souffrons d’une perturbation et d’une diminution de notre puissance fonctionÂŹnelle, cela tient essentiellement, Ă  mon avis, au fait que nous ne pouvons plus conserver notre ancienne attitude Ă  l’égard de la mort et que nous n’en avons pas encore trouvĂ© de nouvelle. Nous. obtiendrons peut-ĂȘtre des rĂ©sultats intéressants en Ă©tendant nos recherches Ă  deux autres maniĂšres de se comporter Ă  l’égard de la mort Ă  celle que nous pouvons attribuer Ă  l’homme primitif, Ă  l’homme des Ăąges prĂ©historiques, et Ă  celle qui s’est conservĂ©e encore en chaÂŹcun de nous, mais qui, invisible Ă  notre conscience, se cache dans les couches profondes de notre vie psychique. En ce qui concerne la maniĂšre dont l’homme des Ăąges prĂ©historiques se comportait Ă  l’égard de la mort, nous ne la connaissons naturellement que par infĂ©rences et dĂ©ductions, mais je pense que ces procĂ©dĂ©s nous ont donnĂ© des rĂ©sultats auxquels on peut se fier suffisamment. L’attitude de l’homme primitif Ă  l’égard de la mort est assez remarquable, parce que nettement contradictoire. D’une part, il prenait la mort au sĂ©rieux, la considĂ©rait comme mettant fin Ă  la vie et s’en servait en consĂ©quence ; d’autre part il niait la mort, lui refusait toute signification et toute efficacitĂ©. Ce qui explique en partie cette contradiction, c’est le fait que sa maniĂšre d’envisager la mort d’autrui, de l’étranger, de l’ennemi diffĂ©rait radicalement de celle dont il envisageait la perspective de sa propre mort. La mort d’autrui lui paraissait sĂ©rieuse, il voyait en elle le moyen d’anĂ©antir celui qu’il haĂŻssait, et l’homme primitif n’éprouvait pas le moindre scrupule ni la moindre hĂ©sitation Ă  causer la mort. Il Ă©tait certainement un ĂȘtre trĂšs passionnĂ©, plus cruel et plus mĂ©chant que les autres animaux. Il tuait volontiers et le plus naturellement du monde. Nous n’avons aucune raison de lui attribuer l’instinct qui empĂȘche tant d’autres animaux de tuer et de dĂ©vorer des individus de leur espĂšce. Aussi l’histoire primitive de l’humanitĂ© est-elle remplie de meurtres. Ce que nos enfants apprennent encore de nos jours dans les Ă©coles, sous le nom d’histoire universelle, n’est pas autre chose qu’une succession de meurtres collectifs, de meurtres de peuple Ă  peuple, Le vague et obscur sentiment de culpabilitĂ© que l’humanitĂ© Ă©prouve depuis les temps les plus primitifs et qui s’est cristallisĂ© dans certaines religions sous la forme d’un dogme bien connu, celui de la faute primitive, du pĂ©chĂ© originel, n’est probablement que l’expresÂŹsion d’une faute sanglante dont se serait rendue coupable l’humanitĂ© prĂ©hisÂŹtorique. Dans mon livre Totem et Tabou, j’avais essayĂ©, en utilisant les donÂŹnĂ©es de W. Robertson Smith, Atkinson et Ch. Darwin, de me faire une idĂ©e de la nature de cette faute ancienne et je pense que la doctrine chrĂ©tienne actuelle contient encore des allusions qui permettent de conclure Ă  son existence. Puisque le fils de Dieu a Ă©tĂ© obligĂ© de sacrifier sa vie pour sauver l’humanitĂ© du pĂ©chĂ© originel, on doit conclure, d’aprĂšs la rĂšgle du talion, de l’expiation de l’égal par l’égal, que ce pĂ©chĂ© ne pouvait consister que dans un meurtre. Seul un pĂ©chĂ© comme celui-lĂ  pouvait exiger, Ă  titre d’expiation, le sacrifice d’une vie. Et puisque le pĂ©chĂ© originel Ă©tait une faute commise contre Dieu le PĂšre, le crime le plus ancien de l’humanitĂ© ne pouvait ĂȘtre qu’un parricide, le meurÂŹtre du pĂšre primitif de la horde humaine primitive, dont l’image conservĂ©e par le souvenir a Ă©tĂ© Ă©rigĂ©e plus tard en une divinitĂ© . Certes, l’homme primitif pouvait se reprĂ©senter aussi difficilement que nous-mĂȘmes sa propre mort, et elle lui paraissait aussi irrĂ©elle que nous trouÂŹvons irrĂ©elle la nĂŽtre. Mais il y avait un cas oĂč ses deux certitudes opposĂ©es Ă  l’égard de la mort devaient se rencontrer et entrer en conflit, cas trĂšs significatif et trĂšs riche en consĂ©quences. C’était lorsqu’il voyait mourir un de ses proches, sa femme, son enfant, son ami qu’il aimait certainement comme nous aimons nous-mĂȘmes nos proches, car l’amour ne doit guĂšre ĂȘtre moins ancien que le penchant au meurtre. Dans sa douleur, il devait se dire alors que la mort n’épargne personne, qu’il mourra lui-mĂȘme comme meurent les autres, et tout son ĂȘtre se rĂ©voltait contre cette constatation chacun de ces ĂȘtres chers n’était-il pas une partie de son propre moi qu’il aimait tant ? Mais, d’autre part, la mort d’un ĂȘtre cher lui paraissait naturelle, car si cet ĂȘtre faisait partie de son moi, il lui Ă©tait, par certains cĂŽtĂ©s, Ă©tranger. La loi de l’ambiÂŹvalence, qui rĂ©git encore aujourd’hui notre attitude Ă  l’égard des personnes que nous aiÂŹmons le plus, devait exercer une action moins limitĂ©e aux Ă©poques primiÂŹtives. C’est ainsi que ces chers morts avaient Ă©tĂ© en mĂȘme temps des Ă©trangers et des ennemis Ă  l’égard desquels il nourrissait Ă©galement des sentiments hostiles . Les philosophes prĂ©tendent que l’énigme intellectuelle que reprĂ©sentait pour l’homme primitif l’aspect de la mort s’est imposĂ©e Ă  sa rĂ©flexion et doit ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme le point de dĂ©part de toute spĂ©culation. Il me semble que, sur ce point, les philosophes pensent trop
 en philosophes et ne tiennent pas suffisamment compte de l’action de mobiles primitifs. Je crois donc devoir diminuer la portĂ©e de cette proposition et corriger celle-ci en disant que l’homÂŹme primitif triomphe auprĂšs du cadavre de l’ennemi qu’il vient de tuer, sans avoir Ă  se creuser la tĂȘte Ă  propos des Ă©nigmes de la vie et de la mort. Ce qui poussa l’homme primitif Ă  rĂ©flĂ©chir, ce ne fut ni l’énigme intellectuelle ni la mort en gĂ©nĂ©ral, mais ce fut le conflit affectif qui, pour la premiĂšre fois, s’éleva dans son Ăąme Ă  la vue d’une personne aimĂ©e et, cependant, Ă©trangĂšre et haĂŻe. C’est de ce conflit affectif qu’est nĂ©e la psychologie. L’homme ne pouÂŹvait plus ne pas songer Ă  la mort que la douleur causĂ©e par la disparition d’un ĂȘtre cher lui avait fait toucher du doigt; mais, en mĂȘme temps, il ne voulait pas en admettre la rĂ©alitĂ©, car il ne pouvait se reprĂ©senter lui-mĂȘme Ă  la place du mort. Il se vit ainsi obligĂ© d’adopter un compromis tout en admettant qu’il puisse mourir Ă  son tour, il se refusa Ă  voir dans cette Ă©ventualitĂ© l’équivalent de sa disparition totale, alors qu’il trouvait tout naturel qu’il en fĂ»t ainsi de l’ennemi. C’est devant le cadavre de la personne aimĂ©e qu’il imagina les esprits et, comme il se sentait coupable d’un sentiment de satisfaction qui veÂŹnait se mĂȘler Ă  son deuil, ces premiers esprits ne tardĂšrent pas Ă  se transformer en dĂ©mons mĂ©chants dont il fallait se mĂ©fier. Les changements qui suivent la mort lui suggĂšrent l’idĂ©e d’une dĂ©composition de l’individu en un corps et en une primitivement en plusieurs Ăąme. Le souvenir persistant du mort devint la base de la croyance Ă  d’autres formes d’existence, lui suggĂ©ra l’idĂ©e d’une persistance de la vie aprĂšs la mort apparente. Ces existences ultĂ©rieures n’étaient au dĂ©but que des prolongements de celle Ă  laquelle la mort avait mis un terme existences Ă  l’état d’ombres, vides de tout contenu, auxquelles on n’attachait, jusqu’à une Ă©poque assez tardive, qu’une valeur insignifiante. Elles portent encore le caractĂšre de misĂ©rables expĂ©dients. Rappelons-nous la rĂ©ponse que fait l’ñme d’Achille Ă  Ulysse Vivant, nous, Akhileus, nous t’honorions comme un Dieu, et, maintenant, tu commandes Ă  tous les morts. Tel que te voilĂ , et bien que mort, ne te plains pas, Akhileus. – Je parlai ainsi, et il me rĂ©pondit Ne me parle pas de la mort, illustre Odysseus ! J’aimerais mieux ĂȘtre un laboureur, et servir, pour un salaire, un homme pauvre, que de commander Ă  tous les morts qui ne sont plus » OdyssĂ©e, XI, v. 484-491, traduction Leconte de Lisle. Et souvenons-nous encore de cette parodie puissante et amĂšre de Heine Der kleinste lebendige Philister Zu Stuckert am Neckar Viel glĂŒcklicher ist er Als ich, der Pelide der tote Held, Der SchattenfĂŒrst ln der Unterwelt » C’est seulement plus tard que les religions en sont venues Ă  proclamer cette existence qui suit la mort comme Ă©tant plus prĂ©cieuse, plus complĂšte, et Ă  ne voir dans la vie Ă  laquelle la mort met un terme qu’une prĂ©paration Ă  cette existence meilleure. De lĂ  Ă  prolonger la vie dans le passĂ©, il n’y avait qu’un pas, et ce pas fut vite franchi on attribua Ă  l’homme un grand nombre d’exisÂŹtences antĂ©rieures Ă  sa vie actuelle, on inventa la mĂ©tempsycose et les rĂ©inÂŹcarnations multiples, et tout cela dans le but de dĂ©pouiller la mort de toute valeur, de lui refuser le rĂŽle d’un facteur opposĂ© Ă  la vie, destructeur de la vie. On le voit la nĂ©gation de la mort, dont nous avons parlĂ© plus haut comme de l’une des conventions de la vie sociale, remonte Ă  une antiquitĂ© trĂšs lointaine. Devant le cadavre de la personne aimĂ©e prirent naissance non seulement la doctrine des Ăąmes, la croyance Ă  l’immortalitĂ©, mais aussi, avec le sentiment de culpabilitĂ© humaine, qui ne tarda pas Ă  pousser une puissante racine, les premiers commandements moraux. Le premier et le plus important commanÂŹdement qui ait jailli de la conscience Ă  peine Ă©veillĂ©e Ă©tait tu ne tueras point. Il exprimait une rĂ©action contre le sentiment de satisfaction haineuse qu’à cĂŽtĂ© de la tristesse on Ă©prouvait devant le cadavre de la personne aimĂ©e et s’est Ă©tendu peu Ă  peu aux Ă©trangers indiffĂ©rents et mĂȘme aux ennemis dĂ©testĂ©s. A l’heure oĂč nous sommes, les hommes restent sourds Ă  ce commandeÂŹment. Lorsque la lutte sauvage qui caractĂ©rise cette guerre aura pris fin, Ă  l’avantage de l’une ou de l’autre partie, le combattant victorieux retournera joyeux dans son foyer, auprĂšs de sa femme et de ses enfants, sans ĂȘtre le moins du monde troublĂ© par le souvenir de tout ce qu’il a fait, de tous les enneÂŹmis qu’il a tuĂ©s soit dans des luttes corps Ă  corps, soit avec des armes agissant Ă  distance. Il est Ă  noter que les peuples sauvages qui survivent encore de nos jours et qui sont certainement plus proches de l’homme primitif se comportent sur ce point ou, plutĂŽt, se sont comportĂ©s tant qu’ils n’ont pas subi l’influence de notre civilisation autrement. Le sauvage, qu’il s’agisse de l’Australien, du Boschiman ou d’un indigĂšne de la Terre de Feu, n’est nullement un meurtrier impĂ©nitent; lorsqu’il revient de la guerre en vainqueur, il n’a pas le droit d’entrer dans son village et de toucher Ă  sa femme, tant qu’il n’a pas expiĂ© par des pĂ©nitences souvent fastidieuses et pĂ©nibles les meurtres qu’il a commis Ă  la guerre. Il va sans dire que cette interdiction a sa source dans une superstiÂŹtion, le sauvage craignant la vengeance des esprits de ceux qu’il a tuĂ©s. Mais ces esprits des ennemis tuĂ©s ne sont autre chose que l’exÂŹpresÂŹsion de sa mauvaise conscience, du remords qu’il Ă©prouve Ă  la suite des crimes commis. Il y a au fond de cette superstition une certaine finesse morale qui nous manque Ă  nous autres civilisĂ©s . Des Ăąmes pieuses qui cherchent Ă  se persuader que nous sommes Ă©trangers Ă  tout ce qui est mauvais et vulgaire ne manqueront pas de tirer de cette interdiction si ancienne et si formelle du meurtre des conclusions favorables quant Ă  la force de nos penchants moraux innĂ©s. Malheureusement, cet arguÂŹment peut servir Ă  prouver, dans une mesure peut-ĂȘtre encore plus grande, le contraire. Une interdiction aussi impĂ©rieuse et formelle ne peut s’adresser qu’à une impulsion particuliĂšrement forte. On n’a pas Ă  interdire ce Ă  quoi aucune Ăąme humaine n’aspire . C’est prĂ©cisĂ©ment la maniĂšre dont est formuÂŹlĂ©e la prohibition t u ne tueras point », qui est de nature Ă  nous donner la certitude que nous descendons d’une sĂ©rie infiniment longue de gĂ©nĂ©rations de meurÂŹtriers qui, comme nous mĂȘmes peut-ĂȘtre, avaient la passion du meurtre dans le sang. Les tendances morales de l’humanitĂ©, dont il serait oiseux de contester la force et l’importance, constituent une acquisition de l’histoire humaine et forment, Ă  un degrĂ© malheureusement trĂšs variable, le patrimoine hĂ©rĂ©ditaire des hommes d’aujourd’hui. Laissons maintenant l’homme primitif et interrogeons l’inconscient de notre propre vie psychique. Cela n’est possible qu’à l’aide des mĂ©thodes de reÂŹcherÂŹche psychanalytiques, les seules qui permettent de descendre Ă  cette profondeur. Comment l’inconscient se comporte-t-il Ă  l’égard du problĂšme de la mort ? Exactement comme l’homme primitif. Sous ce rapport, comme sous tant d’autres, l’homme primitif survit tel quel dans notre inconscient. Comme l’homme primitif, notre inconscient ne croit pas Ă  la possibilitĂ© de sa mort et se considĂšre comme immortel. Ce que nous appelons notre inconscient », c’est-Ă -dire les couches les plus profondes de notre Ăąme, celles qui se compoÂŹsent d’instincts, ne connaĂźt, en gĂ©nĂ©ral, rien de nĂ©gatif, ignore la nĂ©gation les contraires s’y concilient et s’y fondent et, par consĂ©quent, la mort Ă  laquelle nous ne pouvons attribuer qu’un contenu nĂ©gatif. La croyance Ă  la mort ne trouve donc aucun point d’appui dans nos instincts, et c’est peut-ĂȘtre lĂ  qu’il faut chercher l’explication de ce qui constitue le mystĂšre de l’hĂ©roĂŻsme. L’exÂŹplication rationnelle de l’hĂ©roĂŻsme prĂ©tend qu’il y a des biens abstraits et universels plus prĂ©cieux que la vie. Mais, Ă  mon avis, l’hĂ©roĂŻsme, qui est le plus souvent instinctif et impulsif, ignore cette motivation et affronte le danger sans penser Ă  ce qui peut en rĂ©sulter. Ou bien cette motivation ne sert qu’à Ă©carter les doutes et les hĂ©sitations susceptibles de s’opposer Ă  la rĂ©action hĂ©roĂŻque de l’inconscient. L’angoisse de la mort, au contraire, dont nous subisÂŹsons l’empire plus souvent que nous ne le croyons, est quelque chose de secondaire et rĂ©sulte le plus souvent du sentiment de culpabilitĂ©. D’autre part, nous trouvons toute naturelle la mort d’étrangers et d’ennemis que nous infligeons aussi volontiers et avec aussi peu de scrupules que le fait l’homme primitif. Sur ce point cependant il y a, entre l’homme primitif et nous, une diffĂ©rence qui, dans la rĂ©alitĂ©, apparaĂźt comme dĂ©cisive. Notre inÂŹconÂŹscient se contente de penser Ă  la mort et de la souhaiter, sans la rĂ©aliser. Mais on aurait tort de sous-estimer cette rĂ©alitĂ© psychique par rapport Ă  la rĂ©alitĂ© de fait. Cette rĂ©alitĂ© est dĂ©jĂ  assez grave et grosse de consĂ©quences. Dans nos dĂ©sirs inconscients, nous supprimons journellement, et Ă  toute heure du jour, tous ceux qui se trouvent sur notre chemin, qui nous ont offensĂ©s ou lĂ©sĂ©s. Que le diable l’emporte! » disons-nous couramment sur un ton de plaisanterie, destinĂ© Ă  dissimuler notre mauvaise humeur. Mais ce que nous voulons dire rĂ©ellement, sans l’oser, c’est la que la mort l’emporte ! », et ce souhait de mort, notre inconscient le prend plus au sĂ©rieux que nous ne le pensons nous-mĂȘmes et lui donne un accent que notre conscience est prĂȘte Ă  dĂ©savouer. Notre inconscient tue mĂȘme pour des dĂ©tails ; comme l’ancienne lĂ©gislation athĂ©nienne de Dracon, il ne connaĂźt pas d’autre chĂątiment pour les crimes que la mort, en quoi il est assez logique, puisque tout tort infligĂ© Ă  noÂŹtre moi tout-puissant et autocratique est, au fond, un crimen laeesae majestatis. C’est ainsi qu’à en juger par nos dĂ©sirs et souhaits inconscients, nous ne sommes nous-mĂȘmes qu’une bande d’assassins. Heureusement, que tous ces dĂ©sirs et souhaits ne possĂšdent pas la force que leur attribuaient les hommes des temps primitifs ; s’il en Ă©tait autrement, l’humanitĂ© aurait pĂ©ri depuis longtemps sous les feux croisĂ©s des malĂ©dictions rĂ©ciproques, lesquelles n’auÂŹraient Ă©pargnĂ© ni ses hommes les meilleurs et les plus sages, ni ses femmes les plus belles et les plus douces. Ces affirmations de la psychanalyse ne trouvent aucun crĂ©dit auprĂšs des profanes. On les repousse comme des calomnies qui ne rĂ©sistent pas aux cerÂŹtitudes fournies par la conscience, et on nĂ©glige adroitement les petits indices par lesquels l’inconscient se rĂ©vĂšle gĂ©nĂ©ralement Ă  la conscience. Aussi ne serait-il pas inutile de rappeler que beaucoup de penseurs qui n’ont certaineÂŹment pas pu subir l’influence de la psychanalyse se sont plaints de la facilitĂ© avec laquelle nous sommes disposĂ©s, ne tenant aucun compte de la prohibition du meurtre, Ă  Ă©carter, Ă  supprimer mentalement tout ce qui se trouve sur notre chemin. Je me contenterai de citer un seul exemple, devenu d’ailleurs cĂ©lĂšbre. Dans le PĂšre Goriot, Balzac cite un passage de Rousseau, dans lequel celui-ci demande au lecteur ce qu’il ferait si, sans quitter Paris et, naturelleÂŹment, avec la certitude de ne pas ĂȘtre dĂ©couvert, il pouvait, par un simple acte de volontĂ©, tuer un vieux mandarin habitant PĂ©kin et dont le mort lui proÂŹcureÂŹrait un grand avantage. Il laisse deviner qu’il ne donnerait pas bien cher pour la vie de ce dignitaire. Tuer le mandarin est devenu alors une expression proÂŹverÂŹbiale de cette disposition secrĂšte, inhĂ©rente mĂȘme aux hommes de nos jours. On connaĂźt, en outre, un grand nombre de plaisanteries et d’anecdotes cyÂŹniques dans lesquelles s’exprime la mĂȘme tendance, comme, par exemple, cette dĂ©claration qu’on attribue Ă  un mari AprĂšs la mort de l’un de nous deux, je viendrai habiter Paris ». Ces plaisanteries cyniques ne seraient pas possibles, si elles ne servaient pas Ă  exprimer une vĂ©ritĂ© qu’on nie, dont on ne veut pas convenir lorsqu’elle est exprimĂ©e sĂ©rieusement et d’une façon non dissimulĂ©e. On sait, en effet, qu’en plaisantant on peut tout dire, mĂȘme la vĂ©ritĂ©. Comme pour l’homme primitif, il existe aussi pour notre inconscient un cas oĂč les deux attitudes opposĂ©es Ă  l’égard de la mort, celle qui la conçoit comme une destruction de la vie et celle qui la nie comme quelque chose d’irrĂ©el, se rencontrent et entrent en conflit. Et le cas est exactement le mĂȘme que celui qui s’offre Ă  l’homme primitif la mort ou le danger de mort d’un ĂȘtre cher, d’un Ă©poux ou d’une Ă©pouse, du pĂšre ou de la mĂšre, d’un frĂšre ou d’une sƓur, d’un enfant ou d’un ami. D’une part, ces ĂȘtres chers forment notre patrimoine intime, sont une partie de notre Moi ; mais, par d’autres cĂŽtĂ©s, ils sont, en partie tout au moins, pour nous des Ă©trangers et des ennemis. A l’exception de quelques situations, nos attitudes amoureuses les plus tendres et les plus intimes sont nuancĂ©es d’une hostilitĂ© qui peut comporter un souhait de mort inconscient. Mais, cette fois, ce conflit ayant sa source dans l’ambivaÂŹlence donne naissance, non plus Ă  la doctrine de la transmigration et Ă  la moÂŹrale, maĂŻs Ă  la nĂ©vrose qui nous ouvre une large perspective, mĂȘme sur la vie psychique normale. Les mĂ©decins psychanalystes savent combien est frĂ©quent le symptĂŽme par lequel les malades expriment leur prĂ©occupation, toute d’amour et de tendresse, du bien de leurs proches, et combien sont frĂ©quents les reproches, absolument injustifiĂ©s, dont ils s’accablent Ă  la suite de la mort d’un ĂȘtre cher. L’étude de ces symptĂŽmes n’a laissĂ© aux mĂ©decins en question aucun doute quant Ă  la frĂ©quence et Ă  la signification des souhaits de mort inconscients. Le profane Ă©prouve une horreur indicible devant cette possibilitĂ© affective, et il voit dans cette horreur mĂȘme une raison suffisante et lĂ©gitime pour reÂŹpousser comme invraisemblables les affirmations des psychanalystes. A tort, Ă  mon avis. Nous ne songeons nullement Ă  rabaisser la vie amoureuse ; ce serait d’ailleurs aller Ă  l’encontre de la rĂ©alitĂ©. Notre raison et notre sentiment se refusent, certes, Ă  admettre une association aussi Ă©troite entre l’amour et la haine, mais la nature sait utiliser cette association et maintenir en Ă©veil et dans toute sa fraĂźcheur le sentiment d’amour, afin de le mettre mieux Ă  l’abri des atteintes de la haine qui le guette. On peut dire que nous sommes redevables des plus beaux Ă©panouissements de notre vie amoureuse Ă  la rĂ©acÂŹtion contre l’impulsion hostile que nous ressentons dans notre for intĂ©rieur. RĂ©sumons-nous impĂ©nĂ©trabilitĂ© Ă  la reprĂ©sentation de notre propre mort, souhait de mort Ă  l’adresse de l’étranger et de l’ennemi, ambivalence Ă  l’égard de la personne aimĂ©e tels sont les traits communs Ă  l’homme primitif et Ă  notre inconscient. Combien est grande la distance qui sĂ©pare cette attitude primitive Ă  l’égard de la mort et celle que nous imposent les conventions de notre vie civilisĂ©e ! Il est facile de dĂ©finir la maniĂšre dont la guerre retentit sur cette double attitude. Elle emporte les couches d’alluvions dĂ©posĂ©es par la civilisation et ne laisse subsister en nous que l’homme primitif. Elle nous impose de nouveau une attitude de hĂ©ros ne croyant pas Ă  la possibilitĂ© de leur propre mort; elle nous montre dans les Ă©trangers des ennemis qu’il faut supprimer ou dont il faut souhaiter la mort ; elle nous recommande de garder notre calme et notre sang-froid en prĂ©sence de la mort de personnes aimĂ©es. Mais les guerres elles-mĂȘmes ne se laissent pas supprimer. Il y aura des guerres, tant qu’il y aura des diffĂ©rences tranchĂ©es entre les conditions d’exisÂŹtence des peuples et tant qu’ils Ă©prouveront les uns envers les autres une aversion aussi profonde. La question qui se pose dans ces conditions est celle-ci Ă©tant donnĂ© que les guerres sont Ă  peu prĂšs inĂ©vitables, ne ferions-nous pas bien de nous incliner devant cette situation et de nous y adapter? Ne ferions-nous pas bien de convenir que notre attitude Ă  l’égard de la mort, telle qu’elle dĂ©coule de notre vie civilisĂ©e, nous dĂ©passe au point de vue psychologique et qu’il serait prĂ©fĂ©rable pour nous de faire abstraction de cette attitude et de nous incliner devant la vĂ©ritĂ©? Ne ferions-nous pas bien d’assigner Ă  la mort, dans la rĂ©alitĂ© et dans nos idĂ©es, la place qui lui convient et de prĂȘter une attention un peu plus grande Ă  notre attitude inconsciente Ă  l’égard de la mort, Ă  celle que nous nous sommes touÂŹjours si soigneusement appliquĂ©s Ă  rĂ©primer ? Ce ne serait pas un progrĂšs que nous accomplirions ainsi, mais bien plutĂŽt, sous certains rapports du moins, une rĂ©gression, mais en nous rĂ©signant Ă  celle-ci,nous aurions l’avanÂŹtage d’ĂȘtre sincĂšres avec nous-mĂȘmes et de nous rendre de nouveau la vie supportable. En effet, rendre la vie supportable est le premier devoir du viÂŹvant. L’illusion perd toute sa valeur, lorsqu’elle est en opposition avec ce devoir. Rappelons-nous le vieil adage si vis pacem, para bellum. Si tu veux maintenir la paix, sois toujours prĂȘt Ă  la guerre. Il serait temps de modifier cet adage et de dire si vis vitam, para mortem. Si tu veux pouvoir supporter la vie, soit prĂȘt Ă  accepter la mort. Freud, ConsidĂ©rations actuelles ________________________________________________________________________ Salomon Reinach, De l’origine et de l’essence des tabous », Cultes, mythes et religions, Tome II, Éd. Ernest Leroux, Paris, 1906, pp. 18-22. De l’origine et de l’essence des tabous [1]En thĂ©orie, l’activitĂ© de l’homme n’a d’autres limites que celles de sa force physique. Il peut manger tout ce qui lui tombe sous la dent, tuer tout ce qui lui tombe sous la main, pourvu qu’il soit le plus fort. PoussĂ© par ses besoins et ses passions, il ne s’arrĂȘtera que devant une puissance supĂ©rieure Ă  la sienne ; son Ă©nergie n’est contenue et rĂ©primĂ©e que du dehors. Mais cet Ă©tat d’indĂ©pendance absolue est purement thĂ©orique. Dans la pratique, et aussi loin que nous remontions dans le cours des Ăąges, l’homme subit, Ă  cĂŽtĂ© des contraintes extĂ©rieures, une contrainte intĂ©rieure. Il n’éprouve pas seulement des rĂ©sistances, mais il s’en crĂ©e Ă  lui-mĂȘme, sous la forme de craintes ou de scrupules. Ces craintes et ces scrupules ont pris, avec le temps, des noms diffĂ©rents ce sont les lois morales, les lois politiques, les lois religieuses. Aujourd’hui, ces trois sortes de lois subsistent et exercent leur action restrictive sur l’énergie humaine ; elles existaient de mĂȘme chez les sauvages des temps les plus reculĂ©s, mais Ă  l’état confus et, pour ainsi dire, indivis. Les notions mĂȘmes de morale, de religion, de politique, telles du moins que nous les entendons Ă  cette heure, n’existaient pas ; mais l’homme subissait et acceptait de nombreuses contraintes, dont l’ensemble constitue ce qu’on appelle le systĂšme des tabous. La formule gĂ©nĂ©rale du tabou est Ne fais pas ceci, ne touche pas Ă  cela » ; c’est le don’t anglais de la civilitĂ© puĂ©rile et honnĂȘte. Le tabou, de quelque nature qu’il soit, a cela de particulier qu’il impose une limite Ă  l’activitĂ© de l’homme. Ce sentier est tabou ? n’y marche pas. Ce fruit est tabou ? ne le mange pas. Ce champ est tabou tel jour ? n’y travaille pas. Ainsi, Ă  la diffĂ©rence des lois religieuses, civiles ou morales, la loi du tabou ne prescrit jamais l’action, mais l’abstention ; c’est un frein, ce n’est pas un stimulant. J’ai dit que ce frein consistait en craintes et en scrupules. On ne voit pas, en effet, si l’on excepte la force brutale opposĂ©e Ă  la force, ce qui a pu contenir l’énergie de l’homme en dehors de la crainte, sentiment qui engendre le scrupule. Or, le sauvage ne craint pas seulement la dent des fauves, la morsure des serpents il craint aussi, il craint surtout la maladie et la mort, chĂątiments qu’infligent les gĂ©nies irritĂ©s dont son imagination peuple le monde. Être social par excellence, l’homme se figure, Ă  tous les Ă©tages de la civilisation, que le monde extĂ©rieur forme comme une sociĂ©tĂ© avec lui et, par une gĂ©nĂ©ralisation naturelle, il projette au-dehors et multiplie Ă  l’infini le principe spirituel dont il se sent animĂ©. Avant d’avoir de la divinitĂ© une notion prĂ©cise et consĂ©quente avec elle-mĂȘme, il se sent entourĂ© de dieux, il les craint et cherche Ă  vivre en paix avec eux. La cause gĂ©nĂ©rale des tabous est donc la crainte du danger.
S’il n’y avait pas eu de tabous, l’homme sauvage, encore inaccessible aux conseils de la raison et de la prĂ©voyance, aurait ravagĂ© et dĂ©vastĂ© la terre les tabous lui enseignĂšrent la contrainte et la modĂ©ration. Mais s’il n’y avait pas eu un correctif aux tabous, l’homme sauvage, encore inaccessible Ă  la critique et Ă©pris du merveilleux, aurait tellement enchaĂźnĂ© sa vie, par crainte de la perdre, que toute activitĂ© civilisatrice eĂ»t Ă©tĂ© impossible. » ___________________________________________________________________________ Je prends le premier ensemble de questions Pensez-­vous enseigner l’oral ? Quelles difficultĂ©s rencontrez?vous ? Rencontrez-vous des rĂ©sistances ? Vous heurtez?vous Ă  la passivitĂ© des Ă©lĂšves ?
 ImmĂ©diatement, j’ai envie de demander Enseigner l’oral ? Mais quel oral ? II y a un implicite comme dans tout discours oral ou mĂȘme Ă©crit. Il y a un ensemble de prĂ©supposĂ©s que chacun apporte en posant cette question. Étant donnĂ© que les structures mentales sont des structures sociales intĂ©riorisĂ©es, on a toutes chances d’introduire, dans l’opposition entre l’écrit et l’oral, une opposition tout Ă  fait classique entre le distinguĂ© et le vulgaire, le savant et le populaire, en sorte que l’oral a de fortes chances d’ĂȘtre assorti de toute une aura populiste. Enseigner l’oral, ce serait ainsi enseigner ce lange qui s’enseigne dans la rue, ce qui dĂ©jĂ  conduit Ă  un paradoxe. Autrement dit, est?ce que la question de la nature mĂȘme de la langue enseignĂ©e ne fait pas question ? Ou alors, est?ce que cet oral qu’on veut enseigner n’est pas tout simplement quelque chose qui s’enseigne dĂ©jĂ , et cela trĂšs inĂ©gale­ment, selon les institutions scolaires ? On sait par exemple que les diffĂ©rentes instances de l’enseignement supĂ©rieur enseignent trĂšs inĂ©galement l’oral. Les ins­tances qui prĂ©parent Ă  la politique comme Sciences Po, l’ENA, enseignent beaucoup plus l’oral et lui accordent une importance beaucoup plus grande dans la notation que l’enseignement qui prĂ©pare soit Ă  l’enseignement, soit Ă  la technique. Par exemple, Ă  Polytechnique, on fait des rĂ©sumĂ©s, Ă  l’ENA, on fait ce que l’on appelle un grand oral» qui est tout Ă  fait une conversation de salon, demandant un certain type de rapport su langage, un certain type de culture. Dire enseigner l’oral» sans plus, cela n’a rien de nouveau, cela se fait dĂ©jĂ  beaucoup. Cet oral peut donc ĂȘtre l’oral de la conversation mon­daine, ce peut ĂȘtre l’oral du colloque international, etc. Donc se demander enseigner l’oral ?», quel oral enseigner ?», cela ne suffit pas. Il faut se demander aussi qui va dĂ©finir quel oral enseigner. Une des lois de la socio?linguistique est que le langage employĂ© dans une situation particuliĂšre dĂ©pend non seulement, comme le croit la linguistique interne, de la compĂ©tence du locuteur au sens chomskyen du terme, mais aussi de ce que j’appelle le marchĂ© linguistique. Le discours que nous produisons, selon le modĂšle que je propose, est une rĂ©sultante» de la compĂ©tence du locuteur et du marchĂ© sur lequel passe son discours; le discours dĂ©pend pour une part qu’il faudrait apprĂ©cier plus rigoureusement des conditions de rĂ©ception. Toute situation linguistique fonctionne donc comme un marchĂ© sur lequel le locuteur place ses produits et le produit qu’il produit pour ce marchĂ© dĂ©pend de l’antici­pation qu’il a des prix que vont recevoir ses produits. Sur le marchĂ© scolaire, que nous le voulions ou non, nous arrivons avec une anticipation des profits et des sanc­tions que nous recevrons. Un des grands mystĂšres que la socio?linguistique doit rĂ©soudre, c’est cette espĂšce de sens de l’acceptabilitĂ©. Nous n’apprenons jamais le langage sans apprendre, en mĂȘme temps, les conditions d’acceptabilitĂ© de ce langage. C’est?Ă ?dire qu’apprendre un langage, c’est apprendre en mĂȘme temps que ce langage sera payant dans telle ou telle situation. Nous apprenons insĂ©parablement Ă  parler et Ă  Ă©valuer par anticipation le prix que recevra notre langage; sur le marchĂ© scolaire ?et en cela le marchĂ© scolaire offre une situation idĂ©ale Ă  l’analyse? ce prix c’est la note, la note qui implique trĂšs souvent un prix matĂ©riel si vous n’avez pas une bonne note Ă  votre rĂ©sumĂ© de concours de Polytechnique, vous serez administrateur Ă  l’INSEE et vous gagnerez trois fois moins
. Donc, toute situation linguistique fonctionne comme un marchĂ© dans lequel quelque chose s’échange. Ces choses sont bien sĂ»r des mots, mais ces mots ne sont pas seulement faits pour ĂȘtre compris; le rapport de communication n’est pas un simple rapport de communication, c’est aussi un rapport Ă©conomique oĂč se joue la valeur de celui qui parle a?t?il bien ou mal parlĂ© ? Est?il brillant ou non ? Peut?on l’épouser ou non ? 
 Les Ă©lĂšves qui arrivent sur le marchĂ© scolaire ont une anticipation des chances de rĂ©compense ou des sanctions promises Ă  tel ou tel type de langage. Autrement dit, la situation scolaire en tant que situation linguistique d’un type particulier exerce une formidable censure sur tous ceux qui anticipent en connaissance de cause les chances de profit et de perte qu’ils ont, Ă©tant donnĂ© la compé­tence linguistique dont ils disposent. Et le silence de certains n’est que de l’intĂ©rĂȘt bien compris. Un des problĂšmes qui est posĂ© par ce questionnaire est celui de savoir qui gouverne la situation linguistique scolaire. Est?ce que le professeur est maĂźtre Ă  bord ? Est?ce qu’il a vraiment l’initiative dans la dĂ©finition de l’acceptabilitĂ© ? Est?ce qu’il a la maĂźtrise des lois du marchĂ© ? Toutes les contradictions que vont rencontrer les gens qui s’embarquent dans l’expĂ©rience de l’enseignement de l’oral dĂ©coulent de la proposition suivante la libertĂ© du professeur, s’agissant de dĂ©finir les lois du marchĂ© spĂ©ci­fique de sa classe, est limitĂ©e, parce qu’il ne crĂ©era jamais qu’un empire dans un empire», un sous?espace dans lequel les lois du marchĂ© dominant sont suspendues. Avant d’aller plus loin, il faut rappeler le caractĂšre trĂšs particulier du marchĂ© scolaire il est dominĂ© par les exi­gences impĂ©ratives du professeur de français qui est lĂ©gitimĂ© Ă  enseigner ce qui ne devrait pas s’enseigner si tout le monde avait des chances Ă©gales d’avoir cette capa­citĂ© et qui a le droit de correction su double sens du terme la correction linguistique le langage chĂątié» est le produit de la correction. Le professeur est une sorte de juge pour enfants en matiĂšre linguistique il a droit de correction et de sanction sur le langage de ses Ă©lĂšves. Imaginons, par exemple, un professeur populiste qui refuse ce droit de correction et qui dit Qui veut la parole la prenne; le plus beau des langages, c’est le lan­gage des faubourgs». En fait, ce professeur, quelles que soient ses intentions, reste dans un espace qui n’obĂ©it pas normalement Ă  cette logique, parce qu’il y a de fortes chances qu’à cĂŽtĂ© il y ait un professeur qui exige la rigueur, la correction, l’orthographe
 Mais supposons mĂȘme que tout un Ă©tablissement scolaire soit trans­formĂ©, les anticipations des chances que les Ă©lĂšves apportent sur le marchĂ© les entraĂźneront Ă  exercer une censure anticipĂ©e, et il faudra un temps considĂ©rable pour qu’ils abdiquent leur correction et leur hyper­correction qui apparaissent dans toutes les situations linguistiquement, c’est?Ă ?dire socialement, dissymé­triques et en particulier dans la situation d’enquĂȘte. Tout le travail de Labov n’a Ă©tĂ© possible qu’au prix d’une foule de ruses visant Ă  dĂ©truire l’artefact linguistique que produit le seul fait de la mise en relation d’un compé­tent» et d’un incompĂ©tent», d’un locuteur autorisĂ© avec un locuteur qui ne se sent pas autorisĂ©; de mĂȘme, tout le travail que nous avons fait en matiĂšre de culture, a consistĂ© Ă  essayer de surmonter l’effet d’imposition de lĂ©gitimitĂ© que rĂ©alise le fait seul de poser des questions sur la culture. Poser des questions sur la culture dans une situation d’enquĂȘte qui ressemble Ă  une situation scolaire Ă  des gens qui ne se pensent pas cultivĂ©s, exclut de leur discours ce qui les intĂ©resse vraiment; ils cherchent alors tout ce qui peut ressembler Ă  de la culture; ainsi quand on demande Aimez?vous la musique ?», on n’entend jamais J’aime Dalida» mais on entend J’aime les valses de Strauss», parce que c’est, dans la compĂ©tence populaire, ce qui ressemble le plus Ă  l’idĂ©e qu’on se fait de ce qu’aiment les bourgeois. Dans toutes les circonstances rĂ©volutionnaires, les popu­listes se sont toujours heurtĂ©s Ă  cette sorte de revanche des lois du marchĂ© qui semblent ne jamais s’affirmer autant que quand on pense les transgresser. Pour revenir Ă  ce qui Ă©tait le point de dĂ©part de cette digression Qui dĂ©finit l’acceptabilitĂ© ? » [Bourdieu, Extrait de Ce que parler veut dire,]
Refrain: Celui qui aime a déjà franchi la mort. Rien ne pourra le séparer de l'amour du Dieu vivant. Si notre faim de la Parole Nourri nos corps brisés, Devant toi, Seigneur, Nous
ConfĂ©rence, par Denis Vasse. Ecouter la voix Ecouter quelqu’un, c’est entendre sa voix. Entendre la voix de quelqu’un, c’est – dans le silence de la prĂ©sence – laisser pĂ©nĂ©trer dans ses propres oreilles, par la mĂ©diation de l’air subtil qui transporte les ondes, ce qui sort de la bouche de celui qui parle. C’est laisser rĂ©sonner dans le lieu de son corps, dans le cƓur, les vibrations qu’impriment Ă  l’air, hors de son corps, le jeu minutieux des cordes vocales sous la poussĂ©e du souffle de l’autre. Entendre la voix de quelqu’un, c’est recueillir en soi quelque chose du plus intime de l’autre. Les modulations de la voix font vibrer notre tympan de maniĂšre unique et spĂ©cifique pour chaque ĂȘtre rencontrĂ© nous reconnaissons les gens Ă  la voix. Elle nous indique – souvent sans que nous le sachions – leur maniĂšre d’ĂȘtre, parce qu’en elle, comme en un registre musical, se manifestent les accords et les dissonances, l’ardeur ou la platitude, la joie ou l’angoisse d’une prĂ©sence qui cherche Ă  se dire et qui n’est prĂ©sence Ă  soi que dans le fait de se dire. La voix d’un homme trahit toujours quelque chose de son histoire passĂ©e et de sa structure actuelle, sa structure », c’est-Ă -dire, si vous voulez, la maniĂšre dont il se vit, ses dispositions, comment il se trouve dans sa peau. Cette voix qui nous trahit Ă  chaque instant dans la rĂ©sonance qu’elle procure au corps de l’autre est toujours dĂ©jĂ  enchevĂȘtrĂ©e dans les signes du discours qu’elle articule. Tout occupĂ©s que nous sommes Ă  la cohĂ©rence de ce qui nous est dit, nous sommes rarement attentifs Ă  la qualitĂ© de la voix. Et s’il advient que nous le soyons, par le biais d’une attention qui ne peut que rater son objet, nous ne pouvons plus l’ĂȘtre Ă  la cohĂ©rence du discours. Lorsque nous Ă©coutons parler quelqu’un, nous pouvons ĂȘtre attentifs soit Ă  la cohĂ©rence de ce qu’il dit, Ă  son discours, soit Ă  la maniĂšre dont il le dit, Ă  sa voix. Ainsi, dans le discours qu’elle tient Ă  l’extĂ©rieur », la voix exprime la vie dans le mĂȘme temps oĂč la vie s’éprouve comme proximitĂ© Ă  soi-mĂȘme. Si vous voulez, la voix est l’expression de la vie. Non seulement, la vie se donne par la voix, mais la voix est l’expression de la vie parce qu’elle se donne et qu’il n’y a pas de concept de vie pensable hors du concept de don-de-soi. La voix ne prend conscience d’elle-mĂȘme qu’en se donnant, comme la vie. La voix est la vie dans le mĂȘme acte de se donner, elle crĂ©e un discours qui est une Ɠuvre indĂ©pendante d’elle-mĂȘme et qui s’en dĂ©tache ou s’en sĂ©pare, mais aussi, sortant de celui qui l’émet, elle se donne comme se donne la vie qui l’habite. Parler, c’est vivre, et vivre, c’est donner la vie, ce qui est aussi bien courir – pour l’homme – le risque d’engendrer ou de mourir. Parler, c’est vivre et/ou mourir. La voix entre-deux originaire du savoir et du lieu Etablir le concept de voix » n’est pas chose facile. Car la voix n’est pas de l’ordre de la reprĂ©sentation, de l’ordre du discours. Elle n’est pas non plus de l’ordre de la prĂ©sence. Elle est bien plutĂŽt l’énergie qui, franchissant les limites d’un lieu, spĂ©cifie hors de ce lieu la prĂ©sence qui habite ce lieu et qui s’inscrit au lieu de l’autre par la mĂ©diation d’un savoir qui la reprĂ©sente. Cela veut dire que la voix, Ă©nergie qui franchit la limite d’un lieu dans la condensation d’un savoir pour l’autre, est ce qui fonde, ce qui crĂ©e et le Lieu et le Savoir qui, hors d’elle, ne peuvent se donner Ă  penser que secondairement. La voix est Ă  l’origine du Lieu et du Savoir. Traversant la limite de la peau, elle est ce par quoi la surface de la peau se donne Ă  penser comme volume du corps dans une reprĂ©sentation sans Ă©paisseur pour l’autre. La voix est l’entre-deux fondateur, originaire, du corps et de la parole, du dedans et du dehors, du rĂ©el impossible Ă  entrevoir hors de l’imagination qui le reprĂ©sente. La voix, pourtant, offre le risque permanent d’ĂȘtre pensĂ©e comme le lieu ou le savoir. Le ou » qui s’introduit ici Ă  la place du et » renvoie Ă  la structure de la conscience, rĂ©gie par la loi de la contradiction qui lui interdit de penser, dans la clartĂ© de la reprĂ©sentation, deux choses ou deux concepts d’ordre diffĂ©rent en mĂȘme temps et au mĂȘme lieu, comme le sont la prĂ©sence et la reprĂ©sentation, le recueillement d’un volume en soi-mĂȘme et l’expression d’un savoir hors de soi, pour un autre
 ou pour soi. Ce qui revient Ă  dire qu’il est impossible Ă  la conscience de penser l’origine de ses propres coordonnĂ©es, de l’espace et du temps. La conscience, qui a pour fonction de reprĂ©senter, est totalitaire et tente constamment d’imposer sa loi et de rĂ©duire la prĂ©sence Ă  la reprĂ©sentation, de l’enfermer et de la possĂ©der pour mieux la saisir et la comprendre. Elle imagine la prĂ©sence Ă  l’intĂ©rieur d’elle-mĂȘme et finit par confondre le dehors et le dedans, le rĂ©el et l’imaginaire, capable qu’elle est d’incorporer en elle-mĂȘme le corps Ă©tranger de l’autre livrĂ© Ă  travers sa reprĂ©sentation cette incorporation de la reprĂ©sentation qui se donne Ă  penser comme prĂ©sence, dans l’absence, c’est le fantasme. La brisure de la voix Il n’y a pas de rĂ©alitĂ© humaine pensable hors de ce rapport Ă  la voix comme entre-deux originaire et fondateur du lieu le corps, si vous voulez et du savoir le discours. Cela nous amĂšne Ă  penser qu’il n’y a de vĂ©ritable Ă©coute de quelqu’un, de sa voix, de son ĂȘtre, que dans l’écoute de ce rapport entre son lieu et son discours sa voix. Mais, s’il en est ainsi, l’espace de cette Ă©coute ne peut ĂȘtre dĂ©fini» que par le rapport de notre propre lieu Ă  notre propre savoir, dans l’écoute de notre propre voix, ou plus exactement de la voix qui parle en nous, et que nous ne pouvons Ă©couter que dans le silence, envisagĂ©e comme l’ultime parole de la prĂ©sence qui se dit Ă  elle-mĂȘme. C’est dans le silence seulement que nous pouvons Ă©couter la voix de l’autre qui parle en nous de la prĂ©sence qui se donne en lui et en nous dans les reprĂ©sentations d’un savoir. Laisser sortir de la bouche de quelqu’un le savoir qu’il articule, c’est laisser rĂ©sonner en lui et en nous le rapport fondateur de son ĂȘtre mĂȘme dans son rapport au nĂŽtre. Ecouter la voix de quelqu’un dans le silence d’une prĂ©sence qui se dit Ă  elle-mĂȘme, c’est – ipso facto – l’inviter Ă  l’incessant voyage qui le fait sortir de lui pour se loger dans ce qu’il croĂźt ĂȘtre pour l’autre son savoir avant de le faire revenir en lui-mĂȘme pour se loger Ă  nouveau dans ce qu’il est son lieu, irrĂ©ductible au lieu et au corps de la prĂ©sence de l’autre. La non-rĂ©ponse Ă  la demande de reconnaissance dans le savoir ou dans le lieu creuse en lui la question de la destination et de l’origine. OĂč donc est-il ? OĂč donc se situe-t-il ? Seulement dans les limites de son lieu ou seulement dans celles de son discours ? Ni savoir abstrait qui l’inscrit dans un systĂšme de reprĂ©sentations pour l’autre, ni corps abstrait sĂ©parĂ© du savoir qui le circonscrit dans les murailles infranchissables de son lieu, la rĂ©alitĂ© humaine ne se laisse entrevoir que dans le rapport des deux, dans la voix. Il se peut – et c’est l’enjeu de l’expĂ©rience humaine – que le rapport se dissocie et que la voix se brise. Dire que la voix se brise, c’est laisser entendre que la limite qui sĂ©pare le lieu corps du savoir discours n’est plus traversĂ©e et que n’étant plus traversĂ©e elle n’est plus vĂ©cue comme sĂ©paration qui constitue la diffĂ©rence originaire du lieu et du savoir. La tension du rapport entre les deux s’efface et l’homme en vient Ă  vivre » dans le savoir imaginaire comme si le savoir Ă©tait le lieu rĂ©el de son corps
 et c’est la folie, ou bien dans le lieu rĂ©el de son corps comme si le lieu de son corps Ă©tait le savoir imaginaire et c’est la mort. Si la voix se brise, si elle n’est plus la transgression de la limite qu’elle fonde entre le savoir et le lieu, si elle n’est plus prĂ©cisĂ©ment la VOIX QUI PASSE A TRAVERS, s’ouvre alors le royaume de la FOLIE, SAVOIR SANS LIMITES, oĂč les reprĂ©sentations ne renvoient qu’à d’autres reprĂ©sentations, SANS RAPPORT avec le lieu d’oĂč il est Ă©mis bateau ivre, dĂ©semparĂ©, qu’aucune amarre jamais plus ne retiendra au port, ne liera au corps puisque le corps ne peut plus y ĂȘtre vĂ©cu que comme le non-lieu d’un savoir pur. Le FOU est un homme enfermĂ© dans son SAVOIR IMAGINAIRE et cette clĂŽture est d’autant plus infranchissable, dans un sens ou dans l’autre, qu’il ne sait pas qu’elle est clĂŽture c’est seulement dans la mesure oĂč une voix, la voix d’un autre ou la sienne, se fera entendre Ă  travers elle, la traversera
 qu’il se saura enfermĂ© de toutes parts mais, justement et dĂ©jĂ , Ă  la recherche d’une porte. Chercher Ă  sortir de la prison de son savoir, c’est dĂ©jĂ  espĂ©rer retrouver les limites bienheureuses de son corps, ĂȘtre bien dans sa peau. La brisure de la voix fait tomber l’homme dans le royaume de la folie
 Ă  moins que ce ne soit dans le royaume de la mort. Ou l’un, ou l’autre. La brisure de la voix supprime le rapport et la limite elle supprime le et qui les sĂ©pare et les contre distingue, et laisse s’établir les deux termes dans l’exclusion rĂ©ciproque ou la confusion. Si la VOIX ne vient plus manifester en la traversant la limite du lieu, et s’extĂ©rioriser en un savoir, s’ouvre – pour l’homme – la gueule bĂ©ante de la mort, LIEU SANS LIMITES, NON-LIEU, non reprĂ©sentable pour un autre, vĂ©cu par l’autre comme le non-savoir, le non-su d’un pur lieu. Le MORT est un homme enfermĂ© dans son LIEU REEL et cette clĂŽture est d’autant plus infranchissable, dans un sens ou dans l’autre, que l’autre sait qu’un tel lieu n’en est pas un 
 puisque aucun savoir n’en sort, aucune voix n’y retourne. Quand la voix ne fonctionne plus, Ă  la limite du SAVOIR et du LIEU, la rĂ©alitĂ© de l’homme vivant s’évanouit dans la FOLIE ou dans la MORT. Un homme vient me consulter. Il est prĂȘtre » et aprĂšs un moment de silence VoilĂ , me dit-il, je n’arrive plus Ă  rien faire et je crois une voix en lui le lui dit que j’ai une mission et, aprĂšs mon ordination, je me suis mis Ă  penser qu’il n’y avait aucune raison pour que je ne sois pas chanoine, ou Ă©vĂȘque, ou mĂȘme cardinal
 ou mĂȘme pape 
 et mĂȘme il hĂ©site JĂ©sus-Christ. Je me dis bien maintenant que cela n’est pas vrai, mais lors de ma crise », je le pensais vraiment. On m’a traitĂ© Ă  l’hĂŽpital
 Il s’arrĂȘte repris par l’incantation irrĂ©sistible de sa voix qui Ă©voque la mission divine et finit par me dire Ă  mi-voix encore maintenant je ne suis pas sĂ»r que ce ne soit pas vrai
 » Ainsi, le fou ! se prend pour ce qu’il dit ĂȘtre, ce qu’il sait ĂȘtre et c’est pourquoi il est perdu dans les mots qui sont, pour lui, plus rĂ©els que son corps et que sa peau. DĂšs qu’ils sont Ă©mis, ils prennent force de rĂ©el et deviennent la rĂ©fĂ©rence unique ils ont valeur absolue, c’est-Ă -dire dĂ©liĂ©e d’un lieu particulier, abstraite, sĂ©parĂ©e radicalement de son corps et de son histoire. Du moins, pour lui. Il est livrĂ© Ă  l’imaginaire qui se dĂ©veloppe en lui, mais qu’il ne connaĂźt plus comme le sien propre. Il prend le rĂȘve pour le rĂ©el comme toujours quand on rĂȘve. Il n’a plus les pieds sur terre. On dit d’un homme perdu dans son discours qu’il est fou Ă  lier. Il est Ă©prouvĂ© comme dangereux de se livrer Ă  la toute-puissance des mots, et quiconque y est aliĂ©nĂ© suscitera chez ceux qui l’entourent le dĂ©sir et la nĂ©cessitĂ©, bienveillante ou hostile, de le ramener de force en un lieu. Non plus un lieu dĂ©fini par une prĂ©sence organisĂ©e par elle-mĂȘme, mais un lieu qui est une localisation arbitraire imposĂ©e par d’autres l’hĂŽpital psychiatrique, la prison
 ou parfois, jadis, le couvent. La folie se donne donc comme un savoir accompli en lui-mĂȘme et qui n’a Ă  franchir aucune limite dans l’acte de son accomplissement. Il faut, dit-on habituellement, que l’idĂ©e passe dans le fait ». Cette expression dit bien le changement d’ordre qu’implique l’accomplissement et l’authentification d’un savoir. Le fait » n’est pas le savoir, ce qui revient Ă  dire que l’accomplissement du savoir exige du savoir qu’il meure Ă  lui-mĂȘme, Ă  son universelle possibilitĂ© pour se rĂ©aliser dans la particularitĂ© d’un lieu. L’on peut aussi bien dire que la folie est une voix sans lieu. Et ce qui est fou est prĂ©cisĂ©ment qu’une voix ne peut pas se concevoir sans lieu, sans un lieu d’oĂč elle sort et oĂč elle retourne. Une voix sans lieu est une voix inconcevable, aberrante, folle. Une voix qui ne peut se poser et se reposer nulle part, qui. ne s’accomplit pas. La voix qui ne peut ĂȘtre recueillie en un lieu qui la caractĂ©rise et la spĂ©cifie est littĂ©ralement la voix de tous et de personne, Ă©chouant Ă  se recueillir en elle-mĂȘme, projetant la prĂ©sence hors de soi, hors des limites d’un lieu oĂč elle deviendrait silence. A cette limite extrĂȘme, vous entrevoyez que tout savoir a quelque chose Ă  voir avec la folie il en prend le risque puisqu’il est pour l’homme la tentative de se projeter hors de lui-mĂȘme, dans la reprĂ©sentation de soi, pour se comprendre et se concevoir comme un autre pour l’autre et pour lui-mĂȘme. Le fou est l’homme qui, projetĂ© dĂ©finitivement et indĂ©finiment hors de lui, dans la reprĂ©sentation du savoir, tente de faire de ce savoir son lieu et perd le chemin du retour Ă  soi. Il est a-liĂ©nĂ© sans lieu
 et sans lien. C’est la mort qui ancre le savoir dans son lieu Le dĂ©lire nie la limite, il ne la connaĂźt pas. Il ne la traverse pas. ConnaĂźtre, en effet, c’est traverser. Il ne la connaĂźt ni dans l’espace, ni dans le temps et cette nĂ©gation en son terme est dĂ©nĂ©gation de la mort souvent repĂ©rĂ©e dans les fantasmes de mission ou de protection particuliĂšre qu’elles soient dites d’origine divine ou diabolique. Ce qu’il y a justement de curieux, c’est que les Ă©pisodes dĂ©lirants s’accompagnent toujours d’une angoisse massive corrĂ©lative Ă  cette impossibilitĂ© de se situer dans l’espace et dans le temps, dans les coordonnĂ©es symboliques oĂč imaginaire et rĂ©el s’articulent en rĂ©alitĂ© humaine. Elle est aussi corrĂ©lative de l’impossibilitĂ© qu’a un tel homme de se concevoir comme mortel et vous entendrez souvent dire Ă  quelqu’un qui sort ou qui est sorti de son dĂ©lire Je croyais que j’étais immortel et j’en Ă©prouvais une angoisse formidable ». C’est cette angoisse massive du psychotique qui, en certaines circonstances, le pousse irrĂ©ductiblement au suicide. C’est en effet dans ce rapport Ă  la mort que l’homme peut dĂ©finir son lieu et sa limite dans l’espace et le temps. Si vous voulez, la mort est un pur lieu, un pur fait que, dans le savoir qui organise le lieu de la vie, la voix de l’homme nie, et que, dans la folie, qui est une dĂ©nĂ©gation du lieu, la voix dĂ©nie, dĂ©niant aussi la vie dont elle est l’expression et le don. En affirmant la vie, la voix sort de l’espace du corps oĂč la mort est Ă  l’Ɠuvre. Mais il n’y a pas d’autre maniĂšre de vivre que d’avouer en la niant la mort. Et il n’y a pas non plus d’autre maniĂšre de mourir. C’est le rapport Ă  cette ultime limite de la mort, constamment transgressĂ©e par la vie qui dĂ©finit le lieu de notre corps dans un savoir. C’est ce rapport Ă  la mort qui ancre l’homme dans le rĂ©el et contraint son imaginaire tout-puissant Ă  composer avec le dĂ©sir de l’autre sous peine de mort. Avant l’irruption de la Parole porteuse de loi et opĂ©ratrice de structure, il n’y a pas d’imaginaire et de rĂ©el. Ces deux ordres ne peuvent ĂȘtre pensĂ©s qu’à partir d’elle. Avant elle, il y a confusion, magma, chaos proprement inimaginable et qui ne se donne Ă  imaginer qu’aprĂšs-coup comme dĂ©structuration de la structure. La folie, le savoir et la mort RĂ©sumons nous en une phrase La folie est un savoir qui n’est plus traversĂ© de/par la mort. Ou, ce qui revient au mĂȘme, qui est dĂ©liĂ© de son lieu. Ce qui peut s’écrire encore La folie est un savoir de vie qui n’est plus sous-tendu, en quelque maniĂšre, par un savoir de mort. Savoir de vie sans mort, savoir de vie Ă©ternelle. Pur savoir de vie qui se prĂ©cipite constamment dans le danger d’une mort qu’il ne sait pas prĂ©voir. De celui qui traverse une rue sans rĂ©aliser le risque qu’il prend » d’ĂȘtre Ă©crasĂ© – vous dĂ©clarerez qu’il est fou. La folie est un discours qui ne se heurte Ă  aucune impossibilitĂ©, Ă  aucune limite Ă©trangĂšre, le discours de celui qui n’a pas conscience de ses limites. Un discours sans lieu qui, paradoxalement, enferme celui qui le tient et l’aliĂšne dans le non-lieu des mots, hors de son corps aussi bien que dedans, lĂ  oĂč il n’est pas. Dans le vide. Il en va du fou comme de l’alpiniste qui bascule dans le vide parce qu’il a mal Ă©valuĂ© ou imaginĂ© sa prise. Ce qu’il croyait ĂȘtre prise est non prise il n’adhĂšre plus Ă  la paroi dont il n’a pas trouvĂ© la faille, et au lieu de retomber dans l’équilibre de son corps, il tombe dans le vide. De celui qui dĂ©lire, comme de l’alpiniste en ce cas, on dit qu’il dĂ©visse ou qu’il dĂ©croche. Autrement dit, le savoir – qui est ex-pression et pro-gression de la vie dans un lieu et une histoire – ne se distingue de la folie – qui est suppression du lieu et de l’histoire – qu’en ceci qu’il est sub-version symbolique de la mort, de la limite, alors que la folie en est la transgression imaginaire ou rĂ©elle. Le pro-cessus de la vie implique la sub-version de la mort. Nous disions que la folie Ă©tait un savoir qui n’est plus traversĂ© par la mort passage au travers de
 . La mort quant Ă  elle est un lieu qui n’est plus traversĂ© par le savoir. Un lieu que le savoir ne sait pas, mais seulement un lieu par oĂč il retourne et dans lequel il revient. La voix diffĂ©rence originaire du savoir et du lieu ou l’énigme de la traversĂ©e Nous voici parvenus au moment dĂ©cisif, en vĂ©ritĂ©, de notre enquĂȘte. Dire, en effet, que la folie est un savoir qui n’est plus traversĂ© par la mort et que la mort est un lieu qui n’est plus traversĂ© par le savoir, c’est laisser entendre que la sagesse raison est un savoir qui est traversĂ© par la mort et que la vie est un lieu qui est traversĂ© par le savoir qui est lui-mĂȘme traversĂ© de/par la mort. Ces deux propositions peuvent s’écrire, lorsqu’on les articule La vie est un lieu traversĂ© par le savoir elle est sagesse selon que ce savoir est traversĂ© de/par la mort, elle est folie selon qu’il ne l’est pas. Mais cette traversĂ©e du lieu de/par le savoir et du savoir de/par la mort dans le lieu limitĂ© oĂč elle survient, cette traversĂ©e qui fonde aprĂšs coup et le savoir et le lieu, comment s’opĂšre-t-elle et que peut-on en dire ? Elle se prĂ©sente comme l’énigme originelle de la rĂ©alitĂ© humaine dans la VOIX. Enigme, la voix, puisqu’elle ne peut ĂȘtre pensĂ©e ni comme le lieu de la prĂ©sence, ni comme le savoir de la reprĂ©sentation. Elle est le rapport incessant des deux tout en Ă©tant irrĂ©ductible Ă  aucun des deux ordres elle est, dans la reprĂ©sentation, la manifestation de la prĂ©sence, et dans la prĂ©sence la manifestation de la reprĂ©sentation. Elle est dans le savoir la subversion du lieu et dans le lieu la subversion du savoir elle est le passage Ă  la limite de l’un et de l’autre la traversĂ©e elle-mĂȘme. C’est pourquoi elle n’est concevable que dans l’écoute de la parole, l’acte de parler et/ou d’entendre. Parler consiste Ă  Ă©-mettre, mettre dehors, la voix entendue, tenue dedans. C’est pourquoi la voix fonde la catĂ©gorie de l’espace elle crĂ©e un dedans et un dehors inimaginables sans elle. A un moment donnĂ© prĂ©cisĂ©ment le moment oĂč elle se donne dans la crĂ©ation et la sĂ©paration du dedans et du dehors, premier repĂšre spatial, avĂšnement des choses et des ĂȘtres. Cette manifestation de la voix qui se donne comme origine de l’espace est aussi bien, par consĂ©quent, origine du temps, crĂ©ation et sĂ©paration d’un passĂ© et d’un futur, premier repĂšre temporel des choses et des ĂȘtres qui avant elle n’existaient pas dans l’espace et le temps. En tant que manifestation de la voix, la parole est toujours originelle repĂšre de l’origine du temps et de l’espace, mais repĂšre irrepĂ©rable dans le temps et l’espace elle est toujours l’ici et le maintenant des ĂȘtres et des choses, du lieu et du savoir, de la prĂ©sence et de la reprĂ©sentation, du corps et du discours. C’est pourquoi la voix ouvre l’espace de l’écriture dans le temps de l’histoire. D’une question Ă  l’autre Disons – en gros – que la batterie de concepts utilisĂ©s jusqu’ici est empruntĂ©e Ă  l’anthropologie. On aurait pu emprunter d’autres sĂ©ries, Ă  rĂ©sonance plus psychanalytique par exemple. Cette analyse de la voix comme entre-deux originaire du lieu et du savoir, du corps et du discours, de l’espace et du temps creuse la question sempiternelle de l’origine, barrant la route Ă  une rĂ©flexion linĂ©aire qui voudrait penser l’origine comme une notion chronologique appuyĂ©e sur le report indĂ©fini d’une antĂ©rioritĂ© l’Ɠuf et la poule dans le temps. La voix » est ainsi entendue comme traversĂ©e Ă©nigmatique Ă©nigmatique en ce sens qu’elle questionne le silence, qu’elle questionne dans le silence, qu’elle est faite – en son nerf – de la question du silence. Une Ă©nigme se mesure Ă  la profondeur du silence oĂč elle se recueille et dans lequel se dĂ©veloppe sa question. La voix [de l’homme] se mesure aux profondeurs de la mort nĂ©ant oĂč et d’oĂč elle se recueille. Sur fond de mort, se dĂ©veloppe la vie. Le silence de la mort est le lieu oĂč se recueille la parole de la vie. La voix sort de ce silence et y retourne. Elle en pose la question. L’énigme de la voix ne se donne Ă  penser comme traversĂ©e originaire que dans, par et Ă  travers le silence de la mort de l’attente interprĂ©tĂ©e comme voix se donnant dans le silence, prĂ©sence Ă  soi de l’origine et de la fin, hors du lieu et du savoir oĂč elle se donne Ă  penser entre l’origine et la fin. InterprĂ©tation, en vĂ©ritĂ©, plus sage que folle, puisqu’elle implique un savoir de la mort comme retour Ă  l’origine de la vie, dans le corps ; mais aussi, plus folle que sage, puisqu’elle implique un savoir de la vie dans la mort, savoir de vie Ă©ternelle, hors du corps. Une telle interprĂ©tation fidĂšle Ă  la voix qui se faisait entendre dans le silence d’hier et qui se fait entendre dans le silence du souvenir, aujourd’hui, ne peut qu’inscrire au livre de Vie sur le registre des morts tous ceux qui ont vĂ©cu selon l’ordre de cette voix, ordre qui ne doit rien au lieu, ni au savoir, mais qui les fonde en les traversant. La voix qui se fait entendre dans la parole engendre l’existence de l’homme en son corps et son discours elle appelle Ă  l’existence ce qui sans elle, sans cette trouĂ©e du silence d’oĂč elle sort naissance et oĂč elle retourne mort Ă  chaque moment prĂ©sent, ne peut se donner Ă  penser. Mais cette voix qui donne Ă  penser le savoir et le lieu ne se pense que nĂ©gativement dans1e silence d’avant » la naissance et dans le silence d’aprĂšs » la mort. Penser la Voix, c’est l’impossible tĂąche Ă  laquelle est attelĂ© l’homme de penser le silence dont il est issu et oĂč il retourne – Ă  chaque instant. TĂąche impossible, en vĂ©ritĂ©, puisqu’il ne l’exprime qu’en parlant. Dans la voix parolĂ©e qui est silence, l’homme laisse entendre la voix silencieuse qui la fonde en la traversant et qu’il livre dans son corps et dans sa parole. La voix de l’homme ne peut dire le silence d’oĂč elle vient et dont elle est le signe » dans l’origine que si elle se tait dans un silence de mort dont la clameur se fait entendre par tous comme la VOIX qui sourd dans les voix. Une telle interprĂ©tation fidĂšle Ă  la voix qui se fait entendre ici et maintenant, aussi bien que dans la promesse ou le souvenir, se donne Ă  penser comme la FOI contre l’infidĂ©litĂ© du MENSONGE qui enferme la VERITE dans le seul savoir, ce qui conduit Ă  la vanitĂ© de la folie, ou dans le seul lieu, ce qui conduit Ă  l’enfermement dans la mort. Le mensonge de l’homme rĂ©side dans la possibilitĂ© qui est sienne de ne pas Ă©couter la Voix silencieuse, cette Ă©nigme de la vie qu’il cherche Ă  rĂ©soudre en la rĂ©duisant Ă  la folie de son discours ou Ă  la mort de son corps. Le mensonge enferme dans l’oubli le silence. Et c’est Ă  travers le prisme d’une folie, don de soi hors de soi qui ne serait pourtant pas aliĂ©nation, d’une folie qui serait sagesse, comme Ă  travers le prisme d’une mort, don de soi hors de soi qui ne serait pourtant pas non-vie, d’une mort qui serait Vie, que l’homme peut croire Ă  une VOIX qui serait silence et qui pourtant se donnerait Ă  entendre VOIX d’un Dieu qui se donne Ă  lui-mĂȘme dans l’acte de la sĂ©paration d’avec soi qui est identiquement acte de la crĂ©ation d’un autre, acte d’un maintenant Ă©ternel qui se fait entendre dans le silence Ă©ternel du monde et de la mort. La voix de Dieu dans le silence C’est dans le silence des astres, de la lumiĂšre, de la terre et des eaux, dans le silence de la crĂ©ation que depuis toujours et jusqu’à toujours l’homme reconnaĂźt la voix de Dieu. La lumiĂšre originelle est, comme la mort, silence. C’est dans le silence du dĂ©sert et dans le silence de la mort qu’il a entendu la voix. C’est en Ă©coutant le bruissement silencieux de son sang coulant en lui et hors de lui qu’il parle. CrĂ©ation, naissance, dĂ©sert, exil, mort tels sont les lieux de la rĂ©vĂ©lation de la Voix de Dieu, les lieux oĂč elle se donne Ă  entendre dans la vie de l’homme. C’est dans le maintenant de ce Silence qu’hier comme aujourd’hui et comme demain, l’homme reconnaĂźt l’énigme d’une Voix qui l’appelle Ă  la vie et le constitue dans son lieu et son savoir, dans son histoire. C’est lĂ  que, dans la mesure oĂč il Ă©coute et oĂč il se souvient, il contracte l’alliance Ă©ternelle. C’est dans le silence du monde oĂč son savoir se perd, c’est dans le silence de son lieu corps oĂč sa voix prend corps et oĂč il meurt lorsque sa voix s’éteint, c’est dans le silence, et de lui, que l’homme fait l’expĂ©rience du don de la vie. Le silence du monde qui a toujours raison du savoir de l’homme, le silence de son histoire qui le met constamment en position d’exil, le Silence s’oppose Ă  la voix de l’homme et la traverse. Il est concevable comme la FIN du savoir, de l’histoire et de la vie de l’homme, ou, ce qui revient au mĂȘme, comme le retour Ă  l’ORIGINE du savoir, de l’histoire et de la vie, dans la mort. Le SILENCE qui traverse le savoir de l’homme et le constitue en espace-temps oĂč rĂ©sonne et se monnaye la diffĂ©rence originelle, qui traverse la vie de l’homme et la constitue comme sortie et retour dans l’Arche du Rien, ce SILENCE est Ă  concevoir comme la TraversĂ©e originelle qui fonde toutes les autres traversĂ©es fondatrices du lieu et du savoir, de l’histoire et de la crĂ©ation, de la vie et de la mort le Silence est la Voix qui traverse toutes les autres voix. Le SILENCE est la VOIX de Dieu qui traverse et fonde la voix des hommes. Il est Parole de Dieu dans la parole de l’homme, c’est pourquoi il ne peut ĂȘtre cherchĂ© et trouvĂ© que lĂ  dans le maintenant de la parole de l’homme qui se prend pour objet, c’est-Ă -dire dans le langage, dans l’histoire et dans le corps Ă©criture de l’homme, dĂ©couvrant en elle cela mĂȘme qui la constitue comme traversĂ©e, comme voix, la Parole de Dieu articulĂ©e, lue et vĂ©cue comme Don de la Vie se donnant sans repentance dans la crĂ©ation, l’alliance, la naissance et la mort. Dans l’impossibilitĂ© oĂč il est, en effet, de fonder par sa parole la Parole originelle, l’homme se trouve acculĂ© Ă  l’alternative de considĂ©rer sa vie, sa parole, son histoire – ou comme transgression indĂ©finie de la loi Ă©chouant perpĂ©tuellement Ă  se saisir de la Promesse de Dieu dans la mesure oĂč il oublie la Voix silencieuse de la crĂ©ation. – ou comme don d’un Autre d’oĂč elle vient et oĂč elle fait retour comme Ă  son Origine et Ă  sa Fin, dans le don silencieux de sa vie dans la mort. Ainsi laisse-t-il se poser et se dĂ©velopper l’énigme de sa voix ouvrant nĂ©cessairement la question d’une Alliance Ă©ternelle dans le silence de la crĂ©ation. Le Christ comme manifestation du Silence ou de la Voix de Dieu manifestĂ©e dans la mort ou / et dans la voix des hommes Dans l’Evangile, et particuliĂšrement dans l’Evangile de Jean, le Christ – corps et discours – se donne Ă  entendre comme la manifestation spatio-temporelle de la Voix originelle, celle du PĂšre, comme la manifestation du Silence de Dieu. Il est ce qu’annonce la voix qui crie dans le dĂ©sert » de l’histoire du peuple de Dieu, il est celui qu’annonce la voix du prophĂšte MoĂŻse, rĂ©percutĂ©e en Ă©cho indĂ©fini dans le chant des prophĂštes, et la voix du ProphĂšte n’est prophĂ©tique en vĂ©ritĂ© que si elle donne Ă  entendre ce que le prophĂšte lui-mĂȘme a entendu, la Voix de Dieu toujours dĂ©jĂ  barrĂ©e par la voix du prophĂšte qui parle. La voix de Dieu ne se donne Ă  entendre que comme silence, cela mĂȘme que la voix de l’homme ne peut pas articuler. Cette rupture dans la transmission, qui cache dans le silence de la parole la voix qui se donne Ă  entendre originellement, constitue en mĂ©diateur silencieux le corps du prophĂšte lorsque quelqu’un nous raconte ce qu’a dit un tiers, c’est nĂ©cessairement dans le silence qui traverse ce que dit l’interlocuteur que nous entendons la voix du tiers. Sauf si, par ruse, l’interlocuteur tente de reprendre Ă  son compte la voix mĂȘme de ce tiers il ne tĂ©moigne alors que de lui-mĂȘme. Le silence du ProphĂšte oĂč se donne Ă  entendre la Parole de Dieu engendrera, devant l’échec d’une parole Ă  faire entendre le silence qui la constitue comme voix de Dieu, un prophĂšte silencieux, le Serviteur souffrant dont l’impuissance Ă  dire sera plus effectivement signifiante, plus puissante que le dire. Cette impuissance Ă  dire le Nom de Dieu, Parole originelle, fondatrice de toute parole vraie parce qu’elle la traverse dans le silence d’elle-mĂȘme, c’est bien l’expĂ©rience que fait tout homme quand il parle, incapable qu’il est de dire adĂ©quatement ce qui s’opĂšre silencieusement dans l’acte du souvenir. C’est vrai du Nom de Dieu, mais c’est aussi vrai de n’importe quel nom propre dire un nom propre, le nom de quelqu’un, c’est manifester en la barrant toujours dĂ©jĂ  la prĂ©sence Ă  soi d’un autre dans l’acte du souvenir qu’on en a. C’est manifester l’autre comme Ă©tranger Ă  soi, absent dans l’acte mĂȘme de sa prĂ©sence Ă  soi. Le maintenant de la prĂ©sence n’est accessible que toujours dĂ©jĂ  barrĂ© par l’invocation du NOM dans l’écriture opaque d’un CORPS. La mort est l’opacitĂ© radicale du CORPS et l’invocation du NOM ne peut la traverser que dans l’effet d’une VOIX qui toujours dĂ©jĂ  lui a donnĂ© NAISSANCE, de la VOIX ORIGINELLE. C’est comme le LIEU et le SAVOIR de cette VOIX originelle que le Christ se donne Ă  entendre dans le souvenir en acte dont la voix des tĂ©moins de sa RĂ©surrection est le signe, ce dont nous sommes tout au long de l’Evangile avertis cette VOIX qui le constitue dans son corps et dans son discours, c’est la voix qu’entendent les morts eux-mĂȘmes 5,25, la voix qui se fait entendre en traversant l’opacitĂ© ultime et mortelle du corps de Lazare 11,43, la voix dont la modulation parolĂ©e est gĂ©nĂ©ratrice de vie, dans l’écoute 5,15 et de vie Ă©ternelle 3,15-16, la voix qui, dans le maintenant originaire d’elle-mĂȘme, franchit toute limite de temps et de lieu, toute frontiĂšre 10,3-5 et toute mort 5,27-28, la voix que jamais les hommes n’ont entendue comme telle parce qu’elle est Silence 5,37, et qui n’est pourtant pas Ă©trangĂšre puisqu’elle est la proximitĂ© mĂȘme qui rassemble l’ĂȘtre et les ĂȘtres 10,3-5 dans le silence originel, voix de l’ami qui appelle Ă  la joie 3,29, voix de l’esprit dont la perception Ă©veille Ă  la prĂ©sence et fait naĂźtre Ă  nouveau 3,8. Le savoir du Christ entendu comme » folie Jusqu’à plus ample informĂ©, quiconque se prĂ©vaut d’un savoir de la vie Ă©ternelle n’est pas sage il peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme fou puisqu’un tel savoir nie toute possibilitĂ© de retour dans les limites du lieu et dĂ©nie la mort, Ă  laquelle toute sagesse humaine ramĂšne comme Ă  l’abri de l’ĂȘtre en tant qu’ĂȘtre. Nous l’avons longuement analysĂ© dans la premiĂšre partie, le fou est celui qui se rĂ©fugie dans un savoir d’immortalitĂ© » pour fuir l’angoisse massive d’une mort omniprĂ©sente dans le lieu de son corps. Il se boucle, s’enferme dans les remparts abstraits de ce savoir et en colmate toutes les brĂšches au prix d’un effort Ă©puisant, pour que la mort ne fasse plus irruption dans l’endroit oĂč il se trouve. Nous l’avons dit, c’est pour cela que la prĂ©sence d’un fou nous est tellement insupportable quoi qu’il en ait, la rigiditĂ© et la folle assurance de ses certitudes nous renvoient Ă  notre propre angoisse de la mort. Il n’y a qu’une maniĂšre de nier la mort, c’est de se rĂ©fugier en effet dans l’imaginaire d’un savoir voire d’une science qui abolit immĂ©diatement toute limite et de dĂ©nier tout ce qui pourrait en elle la rendre prĂ©sente c’est-Ă -dire, en dernier ressort, toute souffrance et tout altĂ©ritĂ©. C’est pourquoi le fou vit dans son monde intĂ©rieur » et Ă©choue constamment Ă  rencontrer quelqu’un d’autre. L’irruption de l’autre, dans la contradiction par exemple, dans l’obligation aussi de respecter une Loi quelconque, le prĂ©cipite immĂ©diatement dans cela mĂȘme qu’il ne peut penser, dans son propre corps c’est-Ă -dire dans la mort. Ce que je voudrais indiquer ici – rapidement – c’est que la multiplicitĂ© des contacts avec les autres » sociologiquement parlant Ă  laquelle sont invitĂ©s ceux qui sont enfermĂ©s hors de leur propre corps pour apporter remĂšde Ă  leur maux
 vous devriez sortir, voir des gens
 » ne fait que renforcer leur angoisse. Les donneurs de tels conseils participent Ă  la folie de celui qui cherche dĂ©sespĂ©rĂ©ment quelqu’un qui saura Ă©couter la voix de mort qui inconsciemment le submerge. Ce n’est que dans le silence de notre propre mort, pour autant que nous pouvons nous y recueillir, que le hurlement forcenĂ© de la vie hors d’elle-mĂȘme du fou peut se faire entendre. Ecouter un fou, c’est ĂȘtre soi-mĂȘme dans le lieu de la mort. S’il en est ainsi, il n’est pas faux de dire que la folie est constitutive du savoir de l’homme, puisqu’elle est l’instance qui le renvoie Ă  sa condition de mortel. Elle manifeste qu’il est porteur d’une voix qui sort du nĂ©ant et qui y retourne comme Ă  son origine, dans la mort. Cette VOIX qui se manifeste dans, par et Ă  travers le savoir des hommes dans l’acte de parler n’est finalement audible que dans le silence de la mort qu’entendent les mortels 
 quand ils vivent et lĂ  oĂč ils vivent. De cette analyse, il ressort, en rĂ©sumĂ©, que la modalitĂ© du rapport Ă  la mort en nous-mĂȘmes est ce qui permet et colore notre rapport Ă  autrui, et non l’inverse. Il n’y a d’accĂšs Ă  l’altĂ©ritĂ© que dans l’absence radicale, c’est-Ă -dire dans la mort. LĂ  oĂč il n’y a pas savoir de la mort, il n’y a pas vie avec d’autres possible. Ne sachant pas la mort, le fou au contraire l’agit c’est pourquoi il tue et se tue. Il tue le mortel parce qu’il a peur de la mort. C’est pourquoi il faut » l’arrĂȘter, l’enfermer ou le tuer avant qu’il ne tue. Le fou ne peut pas vivre au milieu des mortels. La proximitĂ© du prochain lui est aussi insupportable que la mort. Mais quiconque se prĂ©vaut d’un savoir d’immortalitĂ© dans la proximitĂ© du prochain, c’est-Ă -dire qui se laisse atteindre par la voix de l’autre, par sa blessure et finalement par sa mort peut, certes, ĂȘtre considĂ©rĂ© comme » fou, mais il ne l’est pas. Simplement il entend avec plus d’acuitĂ© la voix silencieuse de la mort qui Ɠuvre en lui, et c’est pourquoi il entend l’autre et, par l’acte de cette Ă©coute, le fait vivre, mortel, en lui-mĂȘme. Traiter de fou un fou, traiter comme fou un homme, c’est finalement ne pas entendre en soi le silence de la mort. C’est pourquoi, dans le langage courant, traiter quelqu’un de fou, c’est refuser de l’écouter, l’exclure du champ de la parole qui traverse la limite, et du champ du langage traversĂ© par la mort. Le fou ne sait pas la mort il ne peut donc vivre, si vivre consiste comme nous l’avons dit – Ă  subvertir la mort. Mais le sage qui ne reconnaĂźtrait pas dans le fou le non-savoir de la mort comme le noyau mĂȘme du non-savoir-vivre serait plus fou que le fou. Mais celui qui donne Ă  entendre sa parole de vie dans le lieu de la mort comme passage de la mort Ă  la vie s’adresse par excellence aux mortels qui font tout au long de leur vie l’expĂ©rience de ce passage, dans la subversion de la mort. Dans la parole qui constitue son lieu et son savoir, son corps et son discours, il donne Ă  entendre une VOIX qu’entendent les mortels, Voix qui se donne comme la rĂ©alitĂ© ultime de l’Homme et des hommes, c’est-Ă -dire comme l’Origine de l’existence et de l’histoire, Silence qui traverse en les fondant hors de lui-mĂȘme la vie et la mort de l’homme. Hors de lui-mĂȘme, c’est-Ă -dire dans ce qui les traverse et les diffĂ©rencie dans l’éternel maintenant d’une prĂ©sence Ă  soi et Ă  l’autre, VOIX parfaitement rĂ©alisĂ©e, donnĂ©e dans le Silence du monde, dans la LumiĂšre de la crĂ©ation ; Silence d’une vie se donnant dans le don de la crĂ©ature comme la Voix qui se reçoit et se donne dans le silence du monde. Le Christ fait entendre le Silence de la mort comme la Voix de Dieu La vie se donnant, mourant Ă  elle-mĂȘme dans la parole de l’homme indique la mort comme lieu de passage Ă  travers lequel la voix de Dieu se rĂ©alise dans le silence de la crĂ©ation. Mais rĂ©aliser la vie comme ce qu’elle est, don d’elle-mĂȘme, c’est, pour l’homme, laisser s’accomplir la voix qui traverse sa parole, son savoir et son lieu dans le silence de la mort. Cet accomplissement dans la mort, dans le don radical de soi, est le destin de toute vie qui se sait comme vie. C’est pourquoi prĂ©tendre Ă  une parole qui se donne comme le lieu et le savoir, comme le corps et le discours de la vie Ă©ternelle, c’est aussi bien se donner comme Dieu se donnant dans l’acte de la crĂ©ation que comme Homme se donnant dans l’acte de la mort dans les deux cas, unique Silence d’une sĂ©paration, d’une diffĂ©rence originelle hors de laquelle aucune PrĂ©sence et aucun prĂ©sent ne peut se donner Ă  penser. Dans le silence Ă©ternel de la mort se fait entendre la Voix Ă©ternelle de la crĂ©ation, – jusque-lĂ  oubliĂ©e -. Mais alors, se donner comme enracinĂ©, lieu et savoir, corps et parole, dans cette VOIX-SILENCE, c’est proprement se donner comme VIE dans la MORT. Proprement, c’est-Ă -dire EN VERITE », c’est se donner comme le Vivant, maintenant, comme Parole originelle. Etre vivant dans la mort oĂč se donne la vie, c’est ressusciter. Et c’est pourquoi, ce n’est qu’à la lumiĂšre de la RĂ©surrection que le corps et le discours du Christ peuvent ĂȘtre dans l’acte du maintenant du souvenir interprĂ©tĂ©s comme l’accomplissement de l’Histoire ou, autrement dit, comme la VOIX de Dieu se rĂ©alisant dans l’acte Silencieux de la crĂ©ation. C’est aussi bien dire – et c’est encore Jean qui le dit – que Dieu est amour, a-mort. Il n’est pas la mort dans la mort mĂȘme. S’il est vrai que il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime », que le don de la vie dans la reconnaissance de la vie de l’autre est la mort de la mort l’a-mour, ou crĂ©ation. L’a-mour est dĂ©finitive victoire sur la mort, dĂ©finitive subversion de la mort, dĂ©finitif savoir de la vie dans le savoir de la mort, dĂ©finitif lieu de la vie dans le lieu de la mort. Sagesse Ă©ternelle de Dieu qui ne peut se donner Ă  lire, hors du rapport Ă  la Voix de Dieu dans le silence de la CrĂ©ation, que comme savoir de fou et/ou lieu de mort. Ainsi en est-il pour les hommes qui rencontrent JĂ©sus-Christ sans entendre la Voix silencieuse de Dieu qui parle en eux ils pensent qu’il est possĂ©dĂ© », qu’il dĂ©lire », que son discours est trop fort et que personne ne peut l’entendre» et ils le tuent pour le ramener Ă  son statut de mortel. Ce faisant, pourtant, ils rendent Ă  jamais audible le silence de la mort. Toutes les rĂ©fĂ©rences scripturaires de cette Ă©tude se rĂ©fĂšrent Ă  l’évangile de Jean. Denis Vasse Il. – EN MARGE DE LA CONFERENCE DE DENIS VASSE LA VOIX, LA FOLIE ET LA MORT. O’NEILL J’aimerais que D. Vasse prĂ©cise ce qu’il entend par Parole est-ce uniquement le bruit que l’on fait avec sa bouche, ou d’autres choses qui permettent de s’exprimer, par exemple le silence lui aussi? D’autre part, peut-il dĂ©velopper davantage ce qu’on a appelĂ© traditionnellement la folie de la croix ou la folie de l’évangile, en fonction de ce qu’il nous a dit sur la folie et la mort ? G. ENDERLÉ J’aimerais une prĂ©cision sur le rĂŽle du regard par rapport Ă  la voix ou Ă  l’écoute, comment le regard, ou le voir est-il impliquĂ© dans cette approche anthropologique ? P. BOVATI Je trouve dans l’Ecriture que la mort en gĂ©nĂ©ral et la mort du Christ, sont trĂšs liĂ©es Ă  la catĂ©gorie ou Ă  la notion thĂ©ologique du pĂ©chĂ©. J’aimerais que l’on essaie de voir dans notre discussion comment le pĂ©chĂ© s’articule Ă  la notion de mort, comment cela est vu dans la mort mĂȘme du Christ, et aussi comment le pĂ©chĂ© fait partie de notre vie mĂȘme. Je ne voudrais pas que la considĂ©ration du pĂ©chĂ© soit faite d’une façon extĂ©rieure et rapportĂ©e Ă  la mort du Christ seulement pour en faire un acte de rĂ©demption, mais je souhaiterais voir comment tout cet ensemble est vĂ©cu anthropologiquement. G. PETITDEMANGE Je serais intĂ©ressĂ© par une explicitation de ce qui ce matin m’est apparu comme un lĂ©ger dĂ©tour dans l’exposĂ©, bien que cela fĂ»t annoncĂ© au dĂ©but avec la mention des Pharisiens, je veux dire la question du mensonge. Car il est vrai que les Pharisiens, c’est nous
 F. GUIBAL Ma question pourrait rejoindre celle qui concerne la vie et la mort de JĂ©sus, ainsi que la description de la rĂ©alitĂ© humaine. Tu proposes la voix comme Ă©tant l’entre-deux du lieu et du savoir, et tu montres que la brisure de la voix est la dissociation qui peut mener soit Ă  la folie d’un savoir sans lieu, soit Ă  la mort d’un lieu sans savoir. Mais il me semble que les deux choses ne sont pas absolument sur le mĂȘme plan. Car ce qui va ĂȘtre le lieu d’une Ă©coute possible de la question humaine, le lieu de surgissement possible de la foi, ce n’est pas le savoir et les reprĂ©sentations, mais c’est le renvoi de ce savoir au silence du corps comme ultime parole. Il serait intĂ©ressant de prĂ©ciser un peu en quel sens il y a analogie entre folie d’une part et mort de l’autre, et en quel sens les deux cas sont diffĂ©rents, puisque c’est justement dans la mort que se pose la question d’une Ă©coute du silence. D. VASSE Je rĂ©pondrai d’abord au P. Guillet. Le mot de conscience me gĂȘne, parce que, pour moi, c’est un mot piĂ©gĂ©. Pour que le mot de conscience se donne Ă  penser, il faut qu’il se donne dans un rapport, et dans le rapport d’un langage structurĂ© qui le dĂ©finisse. Autrement dit, il ne peut ĂȘtre pensĂ© en dehors d’une certaine structure conceptuelle qui met en jeu l’inconscient, la loi, le dĂ©sir, la mort, etc
 D’autre part, vous assimilez ce terme de conscience Ă  un savoir de 
 Quand il s’agit de l’accomplissement d’un savoir, ou de l’accomplissement des Ecritures, il est bien Ă©vident qu’il y a une antinomie profonde et structurale entre, d’une part, la conscience et le savoir et, de l’autre, l’accomplissement. C’est un problĂšme philosophique et une session sur la conscience du Christ suffirait Ă  nous occuper. Vous me demandez d’ouvrir une piste pour Ă©c1airer la chose. Si ce que j’ai essayĂ© de dire ce matin a quelque chance d’ĂȘtre opĂ©rant, il est bien certain qu’il n’est pas possible de penser la conscience de quelque homme que ce soit sans rapport Ă  la mort. C’est un critĂšre d’humanitĂ©. Le savoir de la mort est constitutif de notre conscience. Il serait donc extrĂȘmement curieux que le Christ soit le seul homme qui ait Ă©chappĂ© Ă  cette loi de l’humanitĂ©. Autrement dit, poser cette question, c’est poser, par-dessous, la question de l’humanitĂ© du Christ. C’est dans cette piste que je chercherais personnellement. DerniĂšre remarque si la conscience implique rapport Ă  la mort, alors qu’est-ce que la mort ? Autrement dit, c’est dans le contenu du mot mort que la conscience du Christ, en tant que Fils rĂ©vĂ©lĂ© de Dieu, nous interroge. Est-ce que la mort, dans la problĂ©matique humaine et historique, ne peut ĂȘtre, comme l’écrira Freud, que la rĂ©duction Ă  l’état inorganique, c’est-Ă -dire rien, ou un Ă©vĂ©nement qui n’en est pas un ? Or la lecture de la vie du Christ consiste en ce que l’évĂ©nement de cette vie est prĂ©cisĂ©ment la mort dans le don. A partir donc du moment, oĂč l’Eglise primitive interprĂšte la mort comme quelque chose de nouveau, c’est-Ă -dire comme le don de Dieu dans la crĂ©ation, nous ne pouvons pas faire autrement que de parler du Christ comme en parlent les Ă©vangiles. Je ne crois pas qu’il y ait un dĂ©saccord profond, mais il y a un problĂšme de langage Ă  propos de ce mot de conscience. J. GUILLET Du moment que vous parlez de don, vous rejoignez exactement ce que je veux dire. Le Christ meurt et sait ce qu’il fait il donne sa vie. D. VASSE Il donne sa vie, cela veut dire qu’il a vĂ©cu
 et que sa vie est don de la vie. O. DE DINECHIN Je voudrais prolonger la question en la rapprochant de difficultĂ©s entendues Ă  la suite des suicides de bonzes et d’étudiants. Les gens qui font cela donnent apparemment leur vie. Pourtant quelque chose cloche» lĂ -dedans. Ce n’est pas la mĂȘme chose que la mort du Christ. Mais comment exprimer la diffĂ©rence ? D. VASSE C’est facile. Les bonzes ou les Ă©tudiants ne sont pas ressuscitĂ©s au sens oĂč l’on dit que le Christ est ressuscitĂ©. Car c’est cela l’évĂ©nement fondamental qui est un Ă©vĂ©nement de la foi et dont l’Eglise primitive est le tĂ©moin. Il est clair que tout homme vivant donne sa vie en mourant. Reste Ă  savoir qu’il sait qu’il la donne. O. DE DINECHIN J’attendais plutĂŽt le complĂ©ment suivant dans le don qu’il nous fait, le Christ reçoit sa mort. Ce que ne fait pas un bonze qui se suicide. J. CL. ESLIN Il faudrait analyser dans le dĂ©tail la signification d’un suicide d’étudiant. A premiĂšre vue, c’est un certain acte de dĂ©sespoir. La mort d’un bonze par contre se donne comme un acte significatif; c’est une mort volontaire. Tandis que JĂ©sus ne prĂ©sente pas sa mort comme un acte significatif ». De sa part, il semble qu’il y ait plus de passivitĂ© JĂ©sus est un condamnĂ© Ă  mort. C’est au terme d’un procĂšs, qui lui est imposĂ©, qu’on lui prend sa vie. C’est autrui, et mĂȘme autrui comme juge, qui le met Ă  mort. D. V ASSE On ne peut penser la passivitĂ© sans l’activitĂ© qui la couple. Une passivitĂ© pure, qui n’est pas le don d’une activitĂ©, n’existe pas. Le bonze ou l’étudiant qui se suicide, nous donne une vie que nous ne voulons pas prendre; par consĂ©quent le don n’est pas rĂ©alisĂ©. Un don vĂ©cu ainsi n’est plus un don, c’est un encombrement. J. CL. ESLIN Cette mort a une certaine signification politique, qui est reçue dans le contexte politique trĂšs diffĂ©rent du nĂŽtre, du Vietnam, par exemple, ou du Cambodge. D. VASSE C’est la signification qui est reçue, ce n’est pas la mort car nous n’avons pas rĂ©clamĂ© la mort du bonze. C’est lĂ  une des diffĂ©rences fondamentales entre la foi, ou la religion, et l’idĂ©ologie. Ici nous sommes en pleine idĂ©ologie. J. CL. ESLIN Il n’est pas sĂ»r du tout que nous soyons en pleine idĂ©ologie. Le suicide d’un bonze n’a pas une signification du mĂȘme ordre que la mort de JĂ©sus. Mais cela me paraĂźt rĂ©ducteur de dire que ce soit une mort idĂ©ologique. D. VASSE Ce n’est pas la mort qui est idĂ©ologique, c’est la signification qui lui est donnĂ©e. Alors que pour le Christ, la mort n’est paradoxalement signifiante que dans l’évĂ©nement de la rĂ©surrection qui Ă©chappe Ă  toute signification. J’aborde maintenant la question de la parole ce n’est pas par hasard si ce mot de parole a disparu ce matin de mon propre discours. C’est qu’à force de l’employer, j’en ai dĂ©couvert l’ambiguĂŻtĂ© et je l’ai mis au repos. Il est certain que le mot de parole connote tout ensemble le corps, le discours et la voix. Le mot que je prĂ©fĂ©rerais, serait plutĂŽt celui de verbe, parce qu’on ne peut Ă©couter la parole de quelqu’un sans entendre sa voix dans un rapport Ă  son corps. Car le terme de parole, qui est employĂ© dans le langage courant d’une part comme voix et d’autre part comme contenu de la parole Paroles du Christ devient extrĂȘmement ambigu. C’est pourquoi, j’ai fait surgir Ă  la place celui de voix. Il y a un an ou deux, j’aurais mis le mot de Parole avec un grand P. La folie de la croix. Si la folie est caractĂ©risĂ©e par le non-retour de la voix au lieu ou au corps, il est bien Ă©vident que le discours du Christ et la croix sont une folie, puisqu’elles indiquent comme lieu de la voix qui parle en JĂ©sus, le PĂšre. Ce qui veut dire que le corps de JĂ©sus-Christ, la prĂ©sence de JĂ©sus-Christ, c’est le PĂšre. Cela ne peut Ă©videmment ĂȘtre pensĂ© que comme folie, puisque c’est le retour d’une voix, non pas Ă  JĂ©sus-Christ, mais Ă  son PĂšre. C’est constamment manifestĂ© dans saint Jean. Quant au rĂŽle du regard, ce point met en jeu une autre sĂ©rie de concepts. Le voir, tel qu’on peut le penser anthropologiquement et assez immĂ©diatement est celui de nos sens qui met en rapport avec l’extĂ©rioritĂ©. Voir, c’est s’identifier au monde, c’est-Ă -dire Ă  l’objet. Il y a dans la pulsion scopique », comme on dit, une poussĂ©e d’identification Ă  l’objet. C’est le serpent qui fascine cf. la mythologie autour du serpent. Mais il est non moins certain que, dans la rĂ©alitĂ© humaine, il y a un rapport nĂ©cessaire entre le voir et l’entendre, entre l’Ɠil et l’oreille, parce que c’est seulement l’entendre qui, passez-moi le terme, castre » le regard. Car lorsque je regarde une tĂȘte ou un corps, tout n’est pas dans la vision que j’ai de ce corps ; ce dernier me laisse entendre autre chose que ce qu’il signifie au niveau du regard. C’est cela l’écoute elle joue dans la mesure oĂč ma vision est renvoyĂ©e Ă  l’audition de l’ĂȘtre que je suis, un homme; autrement dit, un homme ne regarde qu’en Ă©coutant. L’animal, par exemple, vit au niveau du regard, c’est-Ă -dire qu’il n’y a rien d’autre pour lui que la chose ; celle-ci est immĂ©diatement signifiante. Or aucun objet n’est immĂ©diatement signifiant pour l’homme. L’oreille, ou l’entendre, est ce qui vient introduire une faille absolument radicale dans le regard. Ce qui fonde la certitude, c’est le rapport du voir et de l’entendre, lui aussi manifestĂ© par saint Jean ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux
 » C’est cela qui caractĂ©rise la prĂ©sence. Cette dialectique extrĂȘmement serrĂ©e est indiquĂ©e dans les Ecritures quand il s’agit du face Ă  face. Car le face Ă  face des amoureux, ou le face Ă  face de l’homme avec Dieu, implique Ă  la fois le regard et l’écoute. Ce qui est irritant dans un visage, c’est qu’il se donne Ă  voir en cachant ce qu’il a Ă  dire, et il le manifeste par les trous qu’il prĂ©sente en lui-mĂȘme. Un regard file dans les trous quand je regarde quelqu’un, je cherche Ă  entendre ce que ses yeux, son nez et sa bouche signifient. Je ne peux pas le faire en voyant ce qui est dedans, ce serait de l’ordre du savoir scientifique, mais en cherchant ce que ce regard dit en moi. X. LÉON-DUFOUR Je fais une rĂ©flexion qui va dans le mĂȘme sens la religion chrĂ©tienne est une religion de l’entendre, et le voir est renvoyĂ© Ă  la fin des temps. La vision de Dieu est eschatologique. D. VASSE La pathologie est toujours trĂšs instructive Ă  ce niveau et on apprend beaucoup dans le contact des voyeurs. Dans la mesure oĂč nous le sommes tous un peu, nous pouvons nous rĂ©fĂ©rer Ă  notre expĂ©rience personnelle. L’identification du voyeur au sexe est telle que son Ɠil est un sexe. Il est rĂ©duit Ă  l’objet, au point que le fantasme dernier d’un voyeur est de devenir aveugle, pour ĂȘtre dĂ©livrĂ© de son regard. On retrouve cela Ă  un certain niveau de profondeur chez tous les voyeurs. Ne plus voir enfin, c’est pour eux d’ĂȘtre dĂ©livrĂ© d’une obsession. Car ils ne peuvent pas entendre ce qu’ils voient. La mort et le pĂ©chĂ©. Il est clair que la notion de pĂ©chĂ© ne peut ĂȘtre pensable pour l’humanitĂ© qu’à partir de la mort ; il faut donc absolument inverser les batteries qui sont les nĂŽtres c’est parce que nous mourons sans pouvoir donner de sens anthropologique Ă  notre mort, que nous en dĂ©duisons le pĂ©chĂ©. C’est la mort en tant que phĂ©nomĂšne universel, et lĂ -dessus Paul est formel, qui implique l’universalitĂ© du pĂ©chĂ©; ce n’est jamais l’inverse. D’oĂč le terrible coinçage », quand les adultes mettent sur le dos des enfants, Ă  un Ăąge oĂč ils ne sont pas encore capables de pĂ©cher, leur propre pĂ©chĂ©, et, en particulier, leur sexualitĂ©. De ce fait, pĂ©chant du pĂ©chĂ© des adultes, ils ne peuvent que se tuer, alors qu’il ne s’agit pas encore de pĂ©chĂ©, puisque le pĂ©chĂ© n’est concevable thĂ©ologiquement que dans la dimension de l’amour. Employer le mot pĂ©chĂ© Ă  tort et Ă  travers est une faute, un pĂ©chĂ© pour de bon. La reconnaissance du pĂ©chĂ© est donnĂ©e par surcroĂźt dans une dialectique de l’amour. Car, dans l’amour, le mensonge de la parole de l’homme devient pĂ©chĂ©. Ce n’est qu’aprĂšs la premiĂšre dĂ©couverte que nous pouvons dire c’est parce que nous pĂ©chons que nous mourons. Au point de dĂ©part nous nous interrogeons sur l’universalitĂ© de la mort pourquoi allons-nous mourir ? Le pĂ©chĂ© est finalement une dĂ©duction. Une preuve en est donnĂ©e par l’expĂ©rience que nous faisons aprĂšs coup dans la mesure oĂč nous avons pĂ©chĂ©, quelque chose est mort en nous. C’est la tristesse cf. le discernement des esprits de saint Ignace, ou l’ennui qui manifeste que quelque chose est mort en nous. C’est cela la dĂ©couverte du pĂ©chĂ©. F. GUIBAL N’y a-t-il pas, dans ta confĂ©rence de ce matin, un chemin Ă  suivre Ă  propos du mensonge? La rĂ©alitĂ© humaine Ă©tant cette traversĂ©e du lieu et du savoir, qui dans un premier temps est toujours menacĂ©e par l’échec que peut constituer soit la folie, soit la mort, il semble que le vĂ©ritable savoir, celui qui n’est pas folie, est un savoir de vie dans la mort. Mais ceci pourrait dĂ©finir simplement une certaine sagesse humaine, qui consiste au fond Ă  essayer de vivre honnĂȘtement la condition humaine. Mais il y a un progrĂšs Ă  partir du moment oĂč l’on s’aperçoit que ce savoir de vie dans la mort renvoie toujours quand mĂȘme Ă  la question de la mort. C’est la raison pour laquelle il y a toujours un dĂ©calage entre la folie et la mort. Il y a mensonge, et pas seulement Ă©chec, lorsqu’on accepte bien la condition humaine avec la mort qu’elle implique, mais en essayant de dĂ©nier la question que cette condition demeure pour elle-mĂȘme en Ă©tant savoir de vie dans la mort. Il y aurait donc une diffĂ©rence entre l’échec, celui de la vie dans la folie ou la mort, et le mensonge qui serait la fermeture sur soi d’un savoir de vie dans la mort qui ne voudrait rien savoir d’une parole possible de vie Ă©ternelle. D. VASSE Je reviens sur la question que tu as posĂ©e Ă  propos de la voix et de la brisure. Ce que j’ai dit ce matin est d’une certaine maniĂšre faux, parce que dans la mesure oĂč nous entrons dans une structure mise en pĂ©ril par la folie et la mort, c’est dans la voix originaire que nous mettons la brisure. Mais elle n’est jamais lĂ . Nous pensons le monde ainsi, mais Ă  partir du moment oĂč cette brisure devient ce qu’elle est, c’est-Ă -dire division dans l’écoute, c’est cette division de notre propre Ă©coute qui est mise en cause dans ce que nous appelons la brisure de la voix. C’est l’impossibilitĂ© de tout entendre, c’est-Ă -dire d’entendre le silence. Le pĂ©chĂ©, c’est de ne pas Ă©couter le silence qui est la voix originelle. Il y a donc substitution entre la voix et l’écoute. Et finalement, c’est notre cƓur, notre Ă©coute, notre regard et notre sentir qui sont divisĂ©s. Seulement nous ne pouvons en prendre conscience que secondairement, aprĂšs avoir placĂ© cette brisure dans la voix de l’autre. Ce que je dis est trĂšs simple au niveau des rapports humains. Nous ne voyons pas notre propre division et nos propres fautes ; mais nous pouvons ĂȘtre assurĂ©s que les dĂ©fauts que nous stigmatisons avec le plus de force chez les autres, sont ceux-lĂ  que nous avons. La brisure de la voix de l’autre est une projection de la division de notre Ă©coute. Ceci est encore une fois trĂšs net en pathologie, en particulier dans une espĂšce de refus orgueilleux et inconscient d’accepter ce que Lacan appelle la division du sujet. Certains nĂ©vrosĂ©s mettent constamment en dĂ©faut la parole de l’autre, jamais leur propre Ă©coute. Le refus de reconnaĂźtre la division en soi est toujours exprimĂ© par l’affirmation de la duplicitĂ© chez l’autre. Il y a des gens qui sont entourĂ©s de gens doubles cela veut dire qu’il est bien entendu qu’eux ne le sont pas. C’est cet effet de feed-back, la duplicitĂ© de l’autre reconnue comme division de son Ă©coute, qui rend un homme supportable et humain, et le fait entrer dans une vĂ©ritable dialectique du mensonge qui lie les hommes entre eux. Quand nous parlons, nous mentons c’est le ressort de l’histoire. Si nous ne mentions pas dĂšs l’origine avec Satan, si nous ne prenions pas pour nous la parole de l’autre, il n’y aurait pas d’histoire. D. MAUGENEST En t’écoutant, une phrase me revient Malheureux homme que je suis ! Qui me dĂ©livrera de ce corps de pĂ©chĂ© et de ce corps de mort? ». Tu dis c’est la voix originaire qui est le silence de Dieu. Mais n’y a-t-il pas plus dans cette voix que ce que formellement tu y mets ? Cette dĂ©livrance, ou cette libĂ©ration, n’est-elle pas donnĂ©e par une confession explicite dans le Christ ressuscitĂ© ? D. VASSE Question importante nous n’avons pas d’autre possibilitĂ© de confesser la voix de Dieu dans son silence ou dans la rĂ©surrection du Christ, c’est-Ă -dire dans sa mort, que celle de confesser notre mensonge. Il n’y a qu’un moyen pour l’homme d’accĂ©der Ă  la vĂ©ritĂ©, dĂšs lors qu’il parle, c’est de confesser qu’il ment. Confesser qu’on ment, c’est dĂ©signer dans le mensonge l’oubli de la vĂ©ritĂ©. Confesser un oubli, c’est se souvenir; c’est lĂ -dessus qu’est basĂ©e toute l’histoire du peuple d’IsraĂ«l et du peuple chrĂ©tien Souviens-toi de qui je suis
 Tu ne peux te souvenir de qui je suis, que si tu te souviens de qui tu es
 ». C’est ce qui s’oppose Ă  la perversitĂ©, qui est au contraire, non pas la confession du mensonge et de l’oubli, mais l’oubli de l’oubli. L’oubli de l’oubli est un mensonge au carrĂ©, parce que dire qu’on oublie un oubli, c’est confesser qu’on ne l’oublie pas, mais qu’on fait comme si» on l’oubliait. D. MAUGENEST Mais je ne peux pas confesser de moi-mĂȘme que je mens. D. VASSE Pas plus que je ne peux vivre de moi-mĂȘme et parler de moi-mĂȘme. D. MAUGENEST Je veux dire par-lĂ  que l’initiative me vient de la confession de foi elle-mĂȘme du Christ qui m’apprend mon pĂ©chĂ©. D. VASSE Dans saint Jean, que dit JĂ©sus ? Vous ne m’entendez pas, vous ne me comprenez pas, parce que vous n’entendez pas la vĂ©ritĂ© en vous ». Car nous avons toujours cette possibilitĂ©, qui est profondĂ©ment nĂŽtre, de ne pas entendre en nous ce silence de la vĂ©ritĂ©, parce que nous ne confessons pas notre mensonge. Mais Ă  partir du moment oĂč un homme se reconnaĂźt menteur, fauteur, limitĂ©, etc
 , c’est la vĂ©ritĂ© de l’autre qui lui apparaĂźt. On ne voit pas quelqu’un qui confesse sincĂšrement son mensonge, proclamer sa vĂ©ritĂ© ; c’est au contraire le moyen par lequel il va proclamer la vĂ©ritĂ© de l’autre. ALETTI Il me semble qu’il y a dans le terme de voix une rĂ©sonance johannique. Jean-Baptiste dit Voix phĂŽnĂš dans le dĂ©sert
 », et JĂ©sus Vous n’entendez pas ma voix », etc
 Il y a donc dans ce mot un aspect musical, une rĂ©sonance qui ne se trouve pas dans le terme de Parole. Marieest vraiment morte. [1] Je l’ai trouvĂ©e un matin, endormie dans sa chambre. Elle Ă©tait prĂšs du calice qu’elle tenait contre elle. Je crois qu’elle n’a pas survĂ©cu Ă  l’absence de celui qui Ă©tait prĂ©sent auprĂšs d’elle. Elle a Ă©tĂ© usĂ©e, je crois, par le mystĂšre de l’eucharistie. JĂ©sus y Ă©tait trop silencieux.
ï»żParoles de la chanson Celui qui aime a dĂ©jĂ  franchi la mort par Chansons de messe d'enterrement Refrain Celui qui aime a dĂ©jĂ  franchi la mort. Rien ne pourra le sĂ©parer de l'amour du Dieu vivant. Si notre faim de la Parole Nourri nos corps brisĂ©s, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le cƓur en paix. Si nous avons donnĂ© Ă  boire A celui qui a soif, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le coeur en paix. Si notre soif de la lumiĂšre Nous a fait franchir la peur, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le cƓur en paix. Si nous avons rĂ©chauffĂ© l'Ăąme De celui qui perdait cƓur, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le coeur en paix. Si le dĂ©sir de ton visage Nous a fait crier ton nom, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le cƓur en paix. Si nous avons rendu visite A celui qui Ă©tait seul, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le coeur en paix. Si l'espĂ©rance de ta gloire Nous a fait tenir debout, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le cƓur en paix. Si nous avons ouvert nos portes A celui qu'on rejetait, Devant toi, Seigneur, Nous aurons le coeur en paix.
SoyezassurĂ© de ma reconnaissance et comptez sur moi. AbbĂ© Marcel Villers. Vous trouverez ci-dessous le texte de l’homĂ©lie prononcĂ©e le jour des funĂ©railles de Mme Villers, nĂ©e Rose Counson : quoique rĂ©digĂ©e par l’abbĂ© Villers, l’homĂ©lie a Ă©tĂ© lue par l’abbĂ© Ignace, notre ancien curĂ© de l’UnitĂ© pastorale de Theux, Ă 

2Ăšme dim. de l’Avent C Lc 3,1-6 L’épisode du jeune JĂ©sus au Temple a clos les rĂ©cits de l’enfance Lc 1-2. Et comme pour ces derniers, les Ă©pisodes, ouvrant le ministĂšre de JĂ©sus, sont introduits par la mention de Jean le baptiste. L’an quinze 3,1-2 3,1 L’an quinze du rĂšgne de l’empereur TibĂšre, Ponce Pilate Ă©tant gouverneur de la JudĂ©e, HĂ©rode Ă©tant alors au pouvoir en GalilĂ©e, son frĂšre Philippe dans le pays d’IturĂ©e et de Traconitide, Lysanias en AbilĂšne, 2 les grands prĂȘtres Ă©tant Hanne et CaĂŻphe, la parole de Dieu fut adressĂ©e dans le dĂ©sert Ă  Jean, le fils de Zacharie. Au temps de
 L’évangĂ©liste Luc ouvre une nouvelle page de son Ă©vangile par un sommaire historique. Pour la naissance de Jean le baptiste, il avait dĂ©jĂ  mentionnĂ© HĂ©rode le Grand 37-4 av. et pour celle de JĂ©sus, l’empereur Auguste 27 av. – 14 apr. ainsi que le gouverneur Quirinius 6-9 apr. Cependant, ces indications chronologiques servaient davantage son discours. À l’enfant Jean est associĂ© le prince de JudĂ©e, mais pour JĂ©sus, Luc mentionne des noms liĂ©s Ă  l’empire, confĂ©rant Ă  l’avĂšnement du Christ une dimension plus universelle. Cette fois, Luc paraĂźt plus prĂ©cis en citant les successeurs des prĂ©cĂ©dents. L’an 15 de l’empereur TibĂšre 14-37, successeur d’Auguste, correspond Ă  l’an 28 de notre Ăšre. L’ensemble de ces nouvelles indications permet aussi Ă  Luc de placer les acteurs qui joueront un rĂŽle actif dans la mort du baptiste et lors du procĂšs de JĂ©sus. HĂ©rode Antipas 4 av. – 39 apr. et Philippe, son frĂšre, 4 av. – 34 apr. seront mentionnĂ©s lors l’emprisonnement de Jean 3,19. Et nous retrouverons, lors du procĂšs de JĂ©sus 23,1sq Ponce Pilate prĂ©fet de JudĂ©e 26-37 et les grands-prĂȘtres dont CaĂŻphe Grand-prĂȘtre en 18-37, gendre de l’influent Hanne Grand-prĂȘtre de 6-15 . Seul Lysanias1 29-37 Ă©chappe Ă  la rĂšgle. Luc reprend, en cela, le procĂ©dĂ© du rĂ©dacteur du livre de l’Exode lorsque vint l’avĂšnement de la sortie d’Égypte. Ex 1,8 Un nouveau roi vint au pouvoir en Égypte. Il n’avait pas connu Joseph. Et plus tard 4,29 Au pays de Madiane, le Seigneur dit Ă  MoĂŻse Va, retourne en Égypte, car ils sont morts, tous ceux qui en voulaient Ă  ta vie. » Le temps d’HĂ©rode le grand et de l’empereur Auguste est terminĂ©, ouvrant un nouveau chapitre. Dans ces premiers versets, la gĂ©ographie compte tout autant. L’ensemble de l’ancien et grand royaume d’IsraĂ«l davidique est convoquĂ© depuis la Rome de TibĂšre jusqu’à l’AbilĂšne de Syrie et le GalilĂ©e. Pourtant, au milieu de ce monde, et des grands de ce monde, la Parole de Dieu n’advint ni aux empereurs, ni aux princes hĂ©rodiens, pas mĂȘme aux grands-prĂȘtres, mais Ă  Jean, au dĂ©sert et non en un palais, ni au Temple. GĂ©ographie de l’évangile de Luc La Parole de Dieu vient La parole de Dieu fut adressĂ©e à’ 3,2. Cette parole de Dieu est ainsi prĂ©sentĂ©e comme le premier sujet et actrice dĂ©cisive de l’histoire. Or celle-ci ne s’adresse Ă  aucun ces puissants prĂ©citĂ©s. Comme, hier, Dieu choisit ces moins-que-rien’ pour porter son message. Ces versets introductifs Ă©voquent ceux des livres des prophĂštes qui sont, trĂšs souvent, introduits par un sommaire historique Jr 1,1 La parole du Seigneur lui fut adressĂ©e au temps de Josias, fils d’Amone, roi de Juda, la treiziĂšme annĂ©e de son 1, 1 Parole du Seigneur adressĂ©e Ă  OsĂ©e, fils de BeĂ©ri, au temps d’Ozias, de Yotam, d’Acaz, d’ÉzĂ©kias, rois de Juda, et au temps de JĂ©roboam, fils de Joas, roi d’ mĂȘme pour d’autres livres des prophĂštes Jl 1,1 Mi 1,1 ; So 1,1 ; Ag 1,1 ; Za 1,1. Luc prĂ©sente donc le ministĂšre de Jean Ă  la maniĂšre d’une introduction aux livres prophĂ©tiques. Ces derniers annoncent, gĂ©nĂ©ralement, le jugement de Dieu sur une situation de dĂ©tresse ou de dĂ©liquescence avant l’intervention divine au jour grand et redoutable Ml 3,23. Le retour du prophĂ©tisme, dĂ©jĂ  introduit avec les rĂ©cits d’annonciation, devient maintenant effectif. Il annonce l’avĂšnement du Messie et du Jugement divin. Jean devient ainsi, sous la plume de Luc, dĂ©jĂ , le prophĂšte des temps derniers. 3, 3 Il parcourut toute la rĂ©gion du Jourdain, en proclamant un baptĂȘme de conversion pour le pardon des pĂ©chĂ©s, 4 comme il est Ă©crit dans le livre des oracles d’IsaĂŻe, le prophĂšte Voix de celui qui crie dans le dĂ©sert PrĂ©parez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. 5 Tout ravin sera comblĂ©, toute montagne et toute colline seront abaissĂ©es ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis ; 6 et tout ĂȘtre vivant verra le salut de Dieu. Jean au Jourdain Le podcast possĂšde un dossier sur Jean le baptiste. Cf. Jean, le baptiste de l’histoire aux Ă©vangiles Podcast. La version Ă©crite PDF est offerte aux abonnĂ©s Ă  la newsletter et aux contributeurs. Le ministĂšre de Jean se dĂ©roule dans la rĂ©gion du Jourdain. Le choix n’est pas anodin et cela Ă  plusieurs titres. PremiĂšrement, cette riviĂšre reprĂ©sente la porte d’entrĂ©e des douze tribus, franchie Ă  pieds secs Jos 3,1, vers la terre promise, selon le livre de JosuĂ© Jos 1,2 sv.. Le Jourdain rappelle la promesse faite Ă  MoĂŻse et aux hĂ©breux d’une rĂ©gion oĂč coulent le miel et le lait et libĂ©rĂ©e de toute servitude Ex 3,8. Cependant, le Jourdain reprĂ©sente aussi ce lieu que le prophĂšte Elie franchit Ă  son tour avant d’ĂȘtre enlevĂ© auprĂšs de Dieu 2R 2,8. Or, le prophĂšte Elie est celui dont, selon Malachie, le retour est attendu Ă  la fin des temps. Dans la bouche de Jean rĂ©sonne aussi les mĂȘmes paroles aux accents de pardon Ml 3, 1 Voici que j’envoie mon messager pour qu’il prĂ©pare le chemin devant moi ; [
] 23 Voici que je vais vous envoyer Élie le prophĂšte, avant que vienne le jour du Seigneur, jour grand et redoutable. 24 Il ramĂšnera le cƓur des pĂšres vers leurs fils, et le cƓur des fils vers leurs pĂšres, pour que je ne vienne pas frapper d’anathĂšme le pays ! Enfin, le Jourdain est, au temps du baptiste, une rĂ©gion frontaliĂšre allant de la JudĂ©e Ă  la GalilĂ©e, et longeant la Samarie. Comme si la proclamation de Jean devait aussi rĂ©sonner tant en JudĂ©e qu’en DĂ©capole, PĂ©rĂ©e et autres contrĂ©es. Mais, surtout, ce baptĂȘme de conversion appelant au Pardon, se situe en marge du Temple, lieu cultuel unique des sacrifices de rĂ©paration et de la fĂȘte des Expiations des pĂ©chĂ©s. L’annonce de la naissance du baptiste, ainsi que sa circoncision, nous avait dĂ©jĂ  prĂ©parĂ© Ă  cette rupture d’avec le Temple et, surtout, la classe sacerdotale. Ce baptĂȘme correspond Ă  une plongĂ©e dans l’eau vive du Jourdain prĂ©parant les croyants Ă  accueillir d’un cƓur purifiĂ© ce rĂšgne de Dieu espĂ©rĂ©. Le prophĂšte ÉzĂ©chiel, en son temps, annonçait ce renouvellement de l’Alliance en ces termes Éz 36 , 24 Je vous prendrai du milieu des nations, je vous rassemblerai de tous les pays, je vous conduirai dans votre terre. 25 Je rĂ©pandrai sur vous une eau pure, et vous serez purifiĂ©s ; de toutes vos souillures, de toutes vos idoles, je vous purifierai. 26 Je vous donnerai un cƓur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau. J’îterai de votre chair le cƓur de pierre, je vous donnerai un cƓur de chair. 27 Je mettrai en vous mon esprit, je ferai que vous marchiez selon mes lois, que vous gardiez mes prĂ©ceptes et leur soyez fidĂšles. 28 Vous habiterez le pays que j’ai donnĂ© Ă  vos pĂšres vous, vous serez mon peuple, et moi, je serai votre Dieu. Dans le dĂ©sert, prĂ©parez le chemin du Seigneur Les premiĂšres paroles de Jean reprennent une citation du prophĂšte IsaĂŻe Is 40,3-5. Ces versets sont situĂ©s dans la partie du livre d’IsaĂŻe, appelĂ©e le livre de la consolation, dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©e par le prophĂšte SymĂ©on devant l’enfant JĂ©sus 2,35. En ces versets, IsaĂŻe espĂ©rait, avec le retour des juifs exilĂ©s Ă  Babylone, la venue de la gloire du Seigneur 40,5 en son Temple, au cƓur de JĂ©rusalem 40,2. Cependant, Luc a omis ces versets et Ă  prĂ©fĂ©rer une formule plus gĂ©nĂ©rale, et plus universelle, pour annoncer tout ĂȘtre vivant verra le salut de Dieu. Or ce salut – dĂ©jĂ  admirĂ© par SymĂ©on 2,30, et ce sauveur annoncĂ© par les anges 2,11, se montrera bientĂŽt, et cela, une fois encore, de maniĂšre inattendue. Les traductions nous livrent ces premiers mots Voix de celui qui crie dans le dĂ©sert PrĂ©parez le chemin du Seigneur. » Pour autant, la ponctuation Ă©tant absente des manuscrits grecs, nous pouvons aussi lire Voix de celui qui crie dans le dĂ©sert PrĂ©parez le chemin du Seigneur. » Ainsi est, d’ailleurs, traduit le mĂȘme verset chez IsaĂŻe Is 40,3. Car c’est bien au dĂ©sert, que Dieu manifestera sa fidĂ©litĂ© et sa totale confiance en JĂ©sus, par la venue de l’Esprit Saint 4,2. C’est aussi au dĂ©sert 4,42 ; 5,16 que JĂ©sus se retire pour prier. C’est au dĂ©sert que Luc place Ă©galement la multiplication des pains 9,12 et la recherche d’une brebis perdue 15,4. Ce dĂ©sert-lĂ  n’est pas seulement un lieu gĂ©ographique. Il reprĂ©sente ce chemin de rĂ©vĂ©lation de Dieu et de conversion du peuple, comme autrefois MoĂŻse et les fils d’IsraĂ«l, errant depuis l’Égypte, avant d’entrer en terre promise par le Jourdain.

Lapartition, les enregistrements et les paroles du chant Celui qui aime a dĂ©jĂ  franchi la mort - S89 - Jo Akepsimas du compositeur Jo Akepsimas et de l’auteur Michel Scouarnec.
Il existe des lois physiques qui gouvernent l’univers physique. Il existe de mĂȘme des vĂ©ritĂ©s qui gouvernent nos relations avec Dieu. C’est Dieu lui-mĂȘme qui nous les a rĂ©vĂ©lĂ©es dans Sa Parole La Bible Dieu nous aime et nous a créés pour que nous le connaissions personnellement. Dieu nous aime. Car Dieu a tant aimĂ© le monde qu’Il a donnĂ© son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne pĂ©risse pas, mais qu’il ait la vie Ă©ternelle. » Jean 316 Dieu dĂ©sire que nous Le connaissions. JĂ©sus priant le PĂšre Or la vie Ă©ternelle, c’est qu’ils te connaissent toi le seul vrai Dieu et celui que tu as envoyĂ©, JĂ©sus-Christ. » Jean 173 Il nous offre une vie nouvelle, une vie en abondance. Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle crĂ©ature. » II Corinthiens 517 JĂ©sus dit Moi, je suis venu, afin que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance. » Jean 1010 Pourquoi tant de gens ne connaissent-ils pas cette vie en abondance, cette relation avec Dieu? L’homme ne peut avoir cette relation avec Dieu Ă  cause de sa propre attitude. L’homme a Ă©tĂ© créé pour vivre en relation intime avec son crĂ©ateur. Mais, par un libre choix, il a refusĂ© de dĂ©pendre de Dieu. Cette volontĂ©, caractĂ©risĂ©e par une attitude d’indiffĂ©rence ou de refus Ă  l’égard de Dieu, est une manifestation de ce que la Bible appelle le pĂ©chĂ©. voir Romains 118-21 et EsaĂŻe 535,6 Qui a pĂ©chĂ© ? Tous ont pĂ©chĂ© et sont privĂ©s de la gloire de Dieu. » Romains 323 Quelle est la consĂ©quence du pĂ©chĂ© ? Car le salaire du pĂ©chĂ©, c’est la mort. » Romains 623 Ce sont vos fautes qui mettaient une sĂ©paration entre vous et votre Dieu. » EsaĂŻe 592 Dieu est saint et l’homme pĂ©cheur. Son pĂ©chĂ© a créé un abĂźme entre lui et Dieu. L’homme s’est dĂ©tournĂ© de Dieu et il essaie de trouver la sĂ©curitĂ© et la satisfaction de ses besoins Ă  travers l’argent, des rapports humains, une bonne morale ou des pratiques religieuses. Cependant, toutes ces tentatives sont insuffisantes car elles ne s’attaquent pas au problĂšme fondamental de l’homme son pĂ©chĂ©. JĂ©sus-Christ est la rĂ©ponse de Dieu lui-mĂȘme au pĂ©chĂ© de l’homme. Il est le seul chemin par lequel nous pouvons connaĂźtre Dieu et expĂ©rimenter cette vie nouvelle. AnnoncĂ© plusieurs siĂšcles avant sa venue EsaĂŻe 53, Ă  la fois pleinement homme et pleinement Dieu Philippiens 25-7, JĂ©sus de Nazareth est un ĂȘtre unique dans l’histoire du monde. Comment JĂ©sus a-t-il rĂ©solu le problĂšme du pĂ©chĂ© ? Il est mort Ă  notre place. Christ est mort pour nous alors que nous Ă©tions encore pĂ©cheurs. » Romains 58 Il est ressuscitĂ©; Il est vivant aujourd’hui. Ce JĂ©sus, Dieu l’a ressuscitĂ©, nous en sommes tous tĂ©moins. » Actes 232 C’est pourquoi JĂ©sus peut dire Je suis le chemin, la vĂ©ritĂ© et la vie. Nul ne vient au PĂšre que par moi. » Jean 146 A cause de notre pĂ©chĂ©, nous nous sommes condamnĂ©s Ă  mort. Mais Dieu a envoyĂ© son Fils JĂ©sus-Christ pour mourir sur la croix Ă  notre place. Il a franchi l’abĂźme qui nous sĂ©pare de Dieu. Il a Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  notre place. C’est pourquoi nous pouvons maintenant recevoir le pardon de Dieu et vivre cette vie abondante dans une relation personnelle avec Lui. Car c’est par la grĂące que vous ĂȘtes sauvĂ©s, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est point par les Ɠuvres afin que personne ne se glorifie. » EphĂ©siens 28, 9 Mais il ne suffit pas de connaĂźtre ces trois vĂ©ritĂ©s ni mĂȘme d’y croire intellectuellement. Nous ne pouvons connaĂźtre Dieu de façon personnelle que si nous confions individuellement notre vie Ă  JĂ©sus-Christ. Confier notre vie Ă  JĂ©sus-Christ implique de Comprendre que nous sommes condamnĂ©s Ă  cause de notre rĂ©volte ou de notre indiffĂ©rence Ă  l’égard de Dieu. Croire que JĂ©sus-Christ a payĂ© totalement la dette de nos pĂ©chĂ©s en mourant sur la croix. Le remercier pour son pardon. DĂ©sirer L’aimer et Lui obĂ©ir en nous dĂ©tournant de nos pĂ©chĂ©s pour vivre une relation personnelle avec Lui. Cet engagement fait de nous un enfant de Dieu. Mais Ă  ceux qui l’ont reçu JĂ©sus-Christ, Ă  ceux qui croient en son nom, Il a donnĂ© le pouvoir de devenir enfants de Dieu. » Jean 112 JĂ©sus-Christ dĂ©sire cette relation personnelle. Il dit Voici, je me tiens Ă  la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui et je souperai avec lui, et lui avec moi. » Apocalypse 320 Ces deux cercles illustrent deux façons de vivre Une vie sans JĂ©sus-Christ Ă  gauche. MOI est au centre de la vie. Le Christ est en dehors de la vie. Cette personne n’a pas confiĂ© sa vie Ă  JĂ©sus-Christ. Ses pĂ©chĂ©s ne sont pas pardonnĂ©s. Sa vie est souvent en dĂ©sordre, sans but, car son Moi » limitĂ© la dirige. ÉphĂ©siens 212 Une vie confiĂ©e Ă  JĂ©sus-Christ Ă  droite. Le Christ est au centre de la vie. MOI se soumet Ă  JĂ©sus-Christ. Cette personne a confiĂ© sa vie Ă  JĂ©sus-Christ. Ses pĂ©chĂ©s ont Ă©tĂ© pardonnĂ©s et ellel expĂ©rimente l’amour de Dieu dans sa vie de tous les jours. Romains 51 Qui est au centre de votre vie? Voudriez-vous confier votre vie Ă  JĂ©sus-Christ pour avoir une relation personnelle avec Lui? Voici comment vous pouvez le faire Confier sa vie Ă  JĂ©sus-Christ est un acte de foi qui s’exprime par la priĂšre. Prier, c’est tout simplement parler Ă  Dieu. Il vous connaĂźt. Ce qui importe pour Lui est l’attitude de votre cƓur, votre honnĂȘtetĂ©. Voici une priĂšre que nous vous suggĂ©rons Seigneur JĂ©sus, je te remercie de ton amour et de ce que tu es venu dans le monde pour mourir pour moi. Je reconnais que j’ai dirigĂ© jusqu’à prĂ©sent ma propre vie et qu’ainsi j’ai pĂ©chĂ© contre toi. Je veux maintenant mettre ma confiance en toi, te recevoir dans ma vie. Merci de me pardonner mes pĂ©chĂ©s. Fais de moi la personne que tu dĂ©sires que je sois. Je te remercie d’avoir rĂ©pondu Ă  ma priĂšre et d’ĂȘtre maintenant dans ma vie. Amen. » DĂ©sirez-vous prier Dieu ainsi, en toute sincĂ©ritĂ©? Si oui, priez maintenant et selon sa promesse, JĂ©sus-Christ viendra dans votre vie. Vous pouvez aussi nous Ă©crire en cliquant sur ce lien. Et ensuite? Cliquez ici pour en savoir plus
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celui qui aime a déjà franchi la mort paroles